Passée la mention d’autres voies et moyens de dissimuler le visage dans l’espace public, la cagoule, par exemple, ce texte vise en tout premier lieu l’interdiction du voile intégral islamique, tout comme le texte sur les signes religieux à l’école concernait à titre principal le port du voile par les jeunes filles musulmanes.
Je vais donc pouvoir user d’une partie du temps de parole qui me reste pour m’exprimer à titre personnel et en ma qualité de vice-présidente du groupe d’amitié France-Pays du Golfe sur l’aspect culturel de la question ; les orateurs qui vont me succéder évoqueront sans doute d’autres aspects.
Vous savez bien, madame le ministre d’État, que l’héritage familial a placé la barre bien haut s’agissant des relations avec les pays du Golfe et les pays musulmans dans leur ensemble. J’y ai ajouté ma passion personnelle pour l’Iran.
On ne peut pas donc dire que la culture et la civilisation arabo-islamiques me soient étrangères.
Je profite donc de ma présence à cette tribune pour mettre un terme à des propos de comptoir rapportés d’ignorants en ignorants et alimentant un « je ne sais quoi » qui ressemble, à s’y méprendre, à de l’islamophobie.
Qui n’a pas entendu : « Oui, mais quand on est chez eux, il faut se voiler ! » Qui entend-on par « on » et de quel pays parle-t-on ?
De toute façon, c’est faux ! Aucune femme étrangère ne doit se voiler dans les pays arabes, sauf sur les lieux de culte ! Je ne parle pas ici de l’Iran, qui n’est pas un pays arabe ; notre collègue Josette Durrieu sait d’ailleurs très bien comment cela se passe dans ce pays.
En Arabie Saoudite, les femmes étrangères doivent se couvrir le corps, mais elles ne portent presque plus le voile, qui était obligatoire il y a encore quelques années. Il est d’ailleurs très fréquent de voir, dans la rue, des femmes étrangères qui ne sont pas voilées.
Grâce à une grande tolérance des pratiques religieuses étrangères, les Émirats Arabes Unis, le Qatar, Bahreïn et le Koweït accueillent sur leur territoire des lieux de culte chrétiens.
Et les femmes citoyennes de ces pays, me direz-vous ?
Les femmes émiraties, par exemple, ne portent plus systématiquement l’abaya, cette longue robe noire traditionnelle. Il suffit d’ailleurs de visiter l’université Zayed d’Abou Dhabi pour constater que les jeunes filles très éduquées sont libres de porter ou non cette robe noire dans l’espace public, et très peu nombreuses sont celles qui portent le voile intégral.
Quant aux femmes saoudiennes, je vous renvoie, mes chers collègues, aux actes du colloque que nous avons tenu ici même sur le rôle la femme dans la société saoudienne et qui aurait fait cesser ce genre de propos totalement erronés !
Dans la région, le niqab est de plus en plus mal vu sur les lieux de travail.
Aux Émirats Arabes Unis, par exemple, pour des raisons de sécurité, on demande aux femmes qui travaillent dans certaines administrations de ne pas se couvrir le visage. C’est notamment le cas du Centre de recherche stratégique d’Abou Dhabi, que vous avez visité, madame le ministre d’État, lorsque vous occupiez d’autres fonctions : le port du voile intégral y est purement et simplement interdit.
Au Yémen, des femmes m’ont confié que le fait de porter le niqab était un handicap sérieux pour obtenir un emploi dans une entreprise, alors que la pression de la société yéménite pousse pourtant les femmes à se voiler le visage.
Au Koweït, les femmes qui portent le niqab n’ont tout simplement pas le droit de conduire.
Dans tous les pays de la péninsule arabique, le port du voile a une signification plutôt culturelle. La tradition, les coutumes, sont responsables de ce phénomène, qui devient de plus en plus minoritaire dans cette région, centre historique du monde musulman.
Dans toute la péninsule, les femmes portent beaucoup plus le niqab dans les villes qu’à la campagne.
Phénomène intéressant, sur l’île yéménite de Socotra, au large de la Somalie, les femmes n’étaient jamais voilées, mais l’arrivée des travailleurs venus de la région de Sanaa ou du golfe d’Aden les ont contraintes à porter le niqab, alors que celui-ci ne faisait absolument pas partie de leurs traditions.
Enfin, en Iran, vaste sujet, un petit foulard suffit, doublé d’une tenue qui ne laisse pas apparaître la forme des hanches. À nos âges – enfin, au mien ! –, qui s’en plaindrait ?