Intervention de Jean-Jacques Mirassou

Réunion du 7 juin 2011 à 14h30
Conseillers territoriaux — Question préalable

Photo de Jean-Jacques MirassouJean-Jacques Mirassou :

… car ils sont sans doute terriblement sollicités – cela a été vrai à d’autres époques –, et que les sénateurs de l’opposition n’ont pas reçu, sur ce sujet, le même niveau d’information que ceux de la majorité.

Le Sénat s’honorerait en refusant de participer à ce qu’il faut bien considérer comme une mascarade !

Par ailleurs, l’élection du conseiller territorial passe par l’instauration d’un mode de scrutin injuste pour les femmes, cela a été dit. Le conseiller territorial uniquement décliné au masculin n’est sûrement pas le fait du hasard. C’est en effet à un recul de la parité que concourent ce tableau et ce projet de loi.

Dans leur communiqué commun du 23 octobre 2009, les présidentes des délégations aux droits des femmes du Sénat et de l’Assemblée nationale faisaient remarquer que, « dans le cadre des scrutins uninominaux, non soumis à des mesures paritaires contraignantes, les femmes sont toujours sacrifiées par les formations politiques ». Ce communiqué garde, au moment où je parle, toute sa pertinence.

L’ensemble de ces arguments, monsieur le ministre, mes chers collègues, ont largement été évoqués par les sénateurs socialistes, avant le vote de ce texte qui allait aboutir à la loi du 16 décembre 2010. Si j’ai tenu à les rappeler, c’est parce qu’ils sont encore plus d’actualité aujourd’hui.

D’abord, parce que les récentes élections cantonales, quoi que vous en disiez, ont été remportées par la gauche et ont apporté la démonstration de l’attachement très fort de la population à ses départements, à ses cantons et à ses conseillers généraux.

Ensuite, parce que les élus locaux sont maintenant parfaitement au courant des tenants et aboutissants de cette réforme, et donc des risques qu’elle fait courir à notre paysage institutionnel en créant de nouvelles strates là où elle prétend simplifier, tout en réduisant à néant cette notion de proximité à laquelle nous sommes tous tellement attachés.

Mais ce n’est pas tout. Cette réforme rebat aussi lourdement les cartes des blocs de compétences en retirant aux conseils généraux et régionaux les responsabilités qui, pour certaines, venaient de leur être confiées au prix de coûteuses adaptations. La réforme, de surcroît, planifie également à l’horizon 2015 la disparition de la clause de compétence générale, ce qui constitue une atteinte supplémentaire à la libre administration des collectivités territoriales.

Et ce n’est malheureusement pas fini car, dans tous les territoires, on se « frotte » maintenant à la refonte de l’intercommunalité qui, pilotée au pas de charge par les préfets, engendre un nouveau tollé, pleinement justifié dans de nombreux départements.

Cette refonte, quand elle est contestée, l’est parce qu’elle bat en brèche la responsabilité naturelle des élus locaux, et parce qu’elle doit être réalisée à marche forcée d’ici au 31 décembre 2011, sans donner la possibilité d’étudier les impacts majeurs des propositions préfectorales sur l’avenir des territoires concernés.

Dans ces conditions, ce volet de la réforme des collectivités territoriales privilégie la simple arithmétique d’une commande gouvernementale visant à faire disparaître autoritairement des structures locales tout en en créant d’autres.

Certes, tout le monde en conviendra, un nouveau pas doit être franchi dans l’intercommunalité pour garantir des projets de territoires plus cohérents et plus ambitieux ; mais tout cela doit se faire dans la plus grande concertation avec les élus locaux, sur la base du volontariat, et non à marche forcée et sûrement pas, en tout cas, en remplissant des cadres colorés issus de la seule imagination des préfectures et de la place Beauvau, dont le but inavoué est de nier la réalité cantonale et départementale.

Alors, et ce sera ma conclusion, monsieur le ministre, mes chers collègues, pourquoi cette obstination à vouloir imposer une réforme contestée hier, aujourd’hui, et sans doute encore plus demain ?

Le Sénat, en votant contre ce tableau de répartition des conseillers territoriaux dans les départements et les régions, disqualifiera de fait le nouvel élu et, par la même occasion, cette réforme dangereuse et inutile. Tel est bien le sens de cette motion tendant à opposer la question préalable.

Il est encore temps, chers collègues, de faire preuve de courage et de lucidité !

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