Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 26 juillet 2007 à 9h45
Lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

Vous faisiez d'ailleurs état de cette sévérité dans un rapport en disant : « Lorsqu'il relève la récidive, le juge prononce en général une peine plus sévère. Selon une étude du ministère de la justice, l'emprisonnement ferme est prononcé pour 57 % des délinquants en réitération, alors qu'il ne s'applique qu'à 11 % des primo délinquants. »

Les peines minimales créées par ce projet de loi apparaissent donc inutiles et constituent une mesure de défiance à l'encontre des magistrats.

Ce qui pose réellement problème, dans le traitement de la récidive, est plus la non-exécution des décisions de justice que le quantum des peines prononcées.

Je citerai une fois de plus le rapport de la mission d'information de 2004 : « Chacun s'accorde à considérer que, pour lutter plus efficacement contre la récidive, il est préférable de prononcer des sanctions immédiatement appliquées dès la première infraction afin de produire un choc psychologique, voire économique chez le prévenu, plutôt que de recourir ultérieurement à des peines alourdies exécutées tardivement, voire aléatoirement. »

Au lieu d'augmenter les moyens pour permettre, d'une part, que les peines soient exécutées et, d'autre part, qu'une fois exécutées elles soient aménagées, le Gouvernement préfère agir sur ce qui est visible, médiatique : l'alourdissement des sanctions. Le problème est qu'en l'espèce cet alourdissement des peines se fera au détriment de nos principes fondamentaux.

Contrairement à ce qui a été dit sur les travées de la majorité, le présent projet de loi, qui ne prévoit pas le retour des circonstances atténuantes, ne permet pas réellement au juge d'individualiser la peine.

En cas de première récidive, la juridiction pourra prononcer une peine inférieure aux peines planchers en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci.

En cas de seconde récidive, la juridiction ne pourra prononcer une peine inférieure aux peines planchers que si l'accusé présente des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion.

Je ne reviendrai pas sur le débat que nous avons eu concernant ces garanties exceptionnelles. Si, dans le texte, le juge peut déroger aux peines planchers, dans les faits, il lui sera bien difficile d'apprécier les garanties exceptionnelles d'insertion et de réinsertion d'une personne qu'il est en train de juger pour un crime ou un délit.

Par conséquent, l'atteinte au principe de l'individualisation de la peine est réelle et préoccupante. La prochaine étape sera-t-elle l'instauration de peines automatiques ? Nous nous dirigeons dans cette voie d'un pas rapide !

On nous propose d'ores et déjà une justice quasi automatique, qui ne devra plus se soucier de la réelle gravité des faits commis et de la personnalité de l'auteur de l'infraction.

On impose aux magistrats un renversement de la philosophie pénale.

Historiquement, il a été demandé aux juges, garants des libertés fondamentales, de motiver les décisions attentatoires aux libertés et plus particulièrement d'expliciter les raisons pour lesquelles des individus doivent faire l'objet d'une incarcération ou de toute autre mesure contraignante.

Ici, on leur demande l'inverse : il leur faudra motiver la liberté, le magistrat devant, en effet, justifier le maintien en liberté ou tout du moins la non-application d'une peine plancher, ce qui apparaît contraire à notre Constitution.

La justice des mineurs n'échappe évidemment pas à cette déferlante répressive. Nous connaissons tous l'obsession du Président de la République au sujet des mineurs délinquants.

Justice des mineurs laxiste - elle aussi -, mineurs de plus en plus violents, de plus en plus jeunes, de surcroît multirécidivistes.

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