Intervention de Daniel Soulage

Réunion du 7 avril 2005 à 9h45
Eau et milieux aquatiques — Articles additionnels après l'article 13

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage :

L'article L. 211-1 du code de l'environnement définit les principes d'une gestion équilibrée de l'eau. Il me semble indispensable, dans le cadre du projet de loi que nous examinons, que nous inscrivions dans l'article précité que la création de ressources en eau participe à une gestion équilibrée de la ressource.

Stocker l'eau, quand elle est abondante, en prévision des périodes plus sèches, est un sage principe de prévention et de précaution, qui avait d'ailleurs été mis en lumière par la sécheresse de l'été 2003 et souligné par un rapport du Sénat.

La création de ressources nouvelles se révèle parfois indispensable pour répondre aux attentes de la population, aux activités économiques et pour soutenir le débit des rivières en période d'étiage.

Je vais prendre l'exemple de mon département, où nous n'avons pas hésité à développer une politique ambitieuse en matière d'irrigation.

Le Lot-et-Garonne irrigue annuellement entre 80 000 et 90 000 hectares. Cette politique concerne 4 800 irrigants et permet de maintenir en place la population agricole dans un département où les agriculteurs représentent 14 % de l'ensemble des actifs. Notre besoin en eau pour ces surfaces se monte à 120 millions de mètres cubes. La moitié de ce besoin est comblée par l'eau provenant de petits lacs individuels ou collectifs, et un cinquième provient de stockages dans la Garonne ou le Lot. Il ne nous manque donc qu'un petit tiers du volume pour répondre aux besoins, mais c'est là encore beaucoup trop !

Parallèlement, nous n'avons pas oublié d'agir en faveur des économies d'eau. Pour ce faire, le conseil général finance depuis quarante ans l'association climatologique de la moyenne Garonne et du Sud-Ouest, l'ACMG, dirigée de manière très dynamique par M. Berthoumieu, à qui je rends hommage car il assure un suivi qualitatif et quantitatif en matière d'économie d'eau, de prospective et d'études climatiques.

Pour autant, une politique d'économie d'eau ne peut plus suffire à combler les besoins, et ce pour deux raisons.

La première raison, c'est le réchauffement climatique. Depuis vingt ans, les végétaux qui poussent dans nos champs, nos forêts et nos jardins ont besoin, en été, de 35 % d'eau de plus en moyenne que ce que nos parents devaient leur fournir dans les années soixante-dix.

La deuxième raison est d'ordre politique. Il est devenu en effet presque impossible de constituer de nouvelles réserves d'eau, alors que c'est la seule solution pour traverser sans crainte ces périodes de sécheresses récurrentes.

Sur ce dernier point, il me semble que nous devons agir dès maintenant si nous voulons retrouver dans dix ans des conditions optimales de qualité écologique dans nos rivières.

C'est pourquoi je vous demande d'inscrire dans la loi la création de ressources nouvelles.

Par ailleurs, je souhaite que nous mettions en oeuvre tous les moyens nécessaires pour optimiser la ressource en eau. Des études récentes ont été réalisées dans ce sens dans le Lot-et-Garonne, et je souhaite vous faire part des solutions que nous y avons envisagées.

La première solution consisterait à stocker de l'eau dans des lacs de deuxième génération, avec un décanteur en amont pour réduire le risque d'envasement du lac et dénitrifier les eaux, rendant ainsi ces dernières aptes à la consommation. Si l'on complète ces lacs avec un système de prélèvement à hauteur variable, on libère en aval de l'eau de qualité favorable à la vie aquatique, ce que reconnaissent maintenant nos amis pêcheurs. Pourquoi ne pas imposer, ou tout au moins favoriser de tels systèmes plutôt que de refuser ou de retarder la construction de nouveaux lacs de réalimentation ?

La deuxième solution consiste également à stocker de l'eau, mais dans les nappes alluviales et superficielles en période hivernale. Là encore, nous avons prouvé il y a quelques années avec l'ACMG, le Bureau de recherches géologiques et minières et l'agence de l'eau locale qu'un vaste volume de stockage était disponible sous nos pieds, à condition d'en optimiser la gestion pour le bien de tous. Les Méditerranéens mettent en oeuvre de telles pratiques depuis des milliers d'années. Or, puisque les évolutions climatiques apportent un climat méditerranéen en Aquitaine, il est logique d'y appliquer de telles solutions.

La troisième solution est de faire avancer la recherche sur l'augmentation des précipitations. Les chercheurs de l'Organisation météorologique mondiale entreprennent de nouveaux efforts dans cette direction, alors que les scientifiques français se sont désintéressés de cette problématique depuis plus de vingt ans. Ces chercheurs nous disent que la pollution réduit l'efficacité des pluies ; d'autres affirment qu'avec des sels hygroscopiques il devient possible d'accroître très sensiblement le rendement des précipitations lorsqu'elles se produisent déjà naturellement. Si l'on se joignait aux pays les plus concernés par le problème de la sécheresse, je suis certain que l'on ferait avancer, pour le bien de tous, ce domaine de la connaissance.

Enfin, une fois que l'eau est disponible, je confirme qu'il faut la gérer au mieux de manière à ne pas la gaspiller. Pour cela il faut davantage aider le pilotage de l'irrigation et développer les techniques de précision qui sont tout juste en train de naître. La qualité des productions, la maîtrise des phénomènes de pollution diffuse et la gestion des pénuries en seraient optimisées.

Pour toutes ces raisons, je vous demande d'adopter cet amendement.

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