Intervention de Daniel Soulage

Réunion du 20 décembre 2006 à 15h00
Eau et milieux aquatiques — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Daniel SoulageDaniel Soulage :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte était attendu : la dernière réforme substantielle de la politique de l'eau, depuis la loi fondatrice du 16 décembre 1964, remonte à la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 et le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale au mois de janvier 2002 ne fut jamais inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée. Il a fait l'objet d'une longue concertation en 2003 et en 2004, dans le cadre d'un débat national sur l'eau organisé par le ministère de l'écologie et du développement durable.

Plusieurs objectifs sous-tendent ce texte : lutter contre les pollutions diffuses, reconquérir la qualité écologique des eaux, simplifier et renforcer la police de l'eau, donner des outils nouveaux aux communes et à leurs groupements pour gérer les services publics de distribution d'eau et d'assainissement dans la transparence, renforcer la gestion locale et concertée des ressources en eau, rénover les comités de bassin et les agences de l'eau, réformer l'organisation de la pêche.

Un travail très important et très utile a été réalisé par la commission, notamment par M. le rapporteur, par Mme le ministre, ainsi que par notre assemblée. Toutefois, au terme de l'examen de ce texte, les membres du groupe UC-UDF ne peuvent tirer qu'un bilan en demi-teinte.

Certes, nous nous réjouissons des avancées qui ont été réalisées lors de la navette parlementaire. Je remercie tout particulièrement M. le rapporteur et Mme le ministre d'avoir retenu un amendement qui me tenait à coeur en matière de ressources en l'eau. Cette disposition sera particulièrement utile aux agriculteurs, en particulier du Sud-Ouest, qui sont confrontés à de très forts besoins estivaux en eau, comme on a pu le constater en 2003, en 2005 et en 2006, alors que, par ailleurs, les pluies hivernales et printanières nécessaires pour réalimenter les réserves naturelles des sols et des sous-sols sont plus faibles.

Aussi, pour répondre aux besoins, tant de la population que des activités économiques pour lesquelles il est indispensable de mieux utiliser les eaux de surface plutôt que les réserves profondes, et afin de soutenir le débit des rivières en période d'étiage de manière à maintenir la vie aquatique et piscicole, il est urgent et indispensable de créer des ressources nouvelles pour amortir les effets du réchauffement.

Stocker l'eau quand elle est abondante, en prévision des périodes plus sèches, est une mesure de bon sens répondant au principe de précaution, et je me félicite qu'elle soit désormais inscrite dans la loi.

Mais nous déplorons deux lacunes de ce projet de loi.

Tout d'abord, il me semblait important de réaffirmer le principe de transparence des GAEC.

Ce principe est déjà ancien, puisque c'est la loi du 8 août 1962 qui a institué une égalité de traitement entre l'associé de GAEC et l'exploitant individuel pour tout ce qui concerne son statut fiscal, social et économique, ainsi que celui de sa famille. Il s'applique de longue date à l'ensemble des réglementations dont relèvent les exploitants agricoles et il a par ailleurs fait l'objet d'une reconnaissance européenne officielle dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune de 2003. Mais il reste mal appliqué.

Il vient d'être réaffirmé et étendu par la loi d'orientation agricole du 5 janvier 2006 à l'ensemble du statut professionnel des associés de GAEC, ce type de groupement permettant d'atteindre les objectifs fixés dans la loi, notamment la constitution d'entreprises pérennes au sein desquelles les associés peuvent se libérer des astreintes de l'élevage.

Le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques aurait dû tenir compte de cette extension. En effet, la transparence des GAEC est mise en oeuvre dans le domaine de la fiscalité, notamment. Elle permet un traitement équitable des membres de GAEC, les plaçant à parité des autres chefs d'exploitation agricole pour tout ce qui touche à leur statut professionnel, et dans le respect du principe d'égalité des citoyens devant l'impôt.

Ce principe trouve application pour les impositions de toutes natures, y compris les redevances pour pollution de l'eau. Mais il aurait été nécessaire de le réaffirmer car, pour l'instant, il reste largement lettre morte. Chaque exploitant associé d'un GAEC devrait pouvoir bénéficier de la franchise de la redevance élevage, comme les exploitants individuels.

Le dernier point que je souhaite évoquer a trait à la suppression du Fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement.

La création de ce fonds a été adoptée par deux fois à l'unanimité par la Haute Assemblée. En première lecture, les trois rapporteurs ainsi que les groupes socialistes et UC-UDF avaient déposé des amendements visant à la création d'un tel fonds. Il en a été de même en deuxième lecture. Dans ces conditions, je regrette que la très grande majorité des membres de la CMP aient finalement décidé de supprimer ce fonds.

Monsieur le rapporteur, vous avez souligné, lors de l'examen en deuxième lecture de ce projet de loi, l'importance de ce dispositif : « Ce dispositif permettrait de reconnaître l'importance de l'action conduite de longue date par les départements en matière de soutien aux communes rurales et à leurs groupements pour l'adduction d'eau et l'assainissement. Rappelons que les départements consacrent aujourd'hui 700 millions d'euros tous les ans en faveur des communes.

« Il tend également à leur donner les moyens d'exercer plus efficacement encore leur mission d'aide à l'équipement des communes rurales pour lequel les besoins financiers vont progresser considérablement afin de respecter les obligations communautaires.

« Enfin, cet amendement vise à compléter la péréquation des financements à l'échelle départementale entre communes urbaines et communes rurales, établie par les agences de l'eau, désormais gestionnaires du feu FNDAE. »

L'Assemblée nationale a supprimé ce dispositif, considérant qu'il faisait double emploi avec les actions menées par les agences de l'eau et qu'il risquait de « brouiller » la répartition des compétences en matière d'eau et d'entraîner, du fait de l'instauration de la nouvelle taxe, une forte augmentation du prix de l'eau. La CMP n'a pas cru devoir retenir la création de ce fonds, préférant abonder les crédits des agences de 12 milliards à 14 milliards d'euros pour la période 2007-2012 afin que celles-ci conservent la maîtrise des péréquations.

J'ai donc de vives inquiétudes. Je ne voudrais pas que la suppression du fonds départemental revienne à nier la compétence du département en matière de soutien aux communes rurales et à leurs groupements pour l'adduction d'eau et l'assainissement.

Comment feront les communes rurales pour lesquelles les besoins financiers vont progresser considérablement pour respecter les obligations communautaires si les départements ne les aident plus ?

Que vont devenir les fonds départementaux déjà mis en place par les conseils généraux, particulièrement à l'écoute du milieu rural ?

En conclusion, je tiens tout de même à apporter mon soutien à ce texte nécessaire à notre politique de l'eau. Néanmoins, compte tenu de la suppression du fonds départemental, certains des collègues de mon groupe manifesteront leur désaccord.

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