Intervention de Jean-Jacques Hyest

Réunion du 16 janvier 2007 à 16h10
Article 77 de la constitution — Adoption d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Jean-Jacques HyestJean-Jacques Hyest, rapporteur :

Le Parlement fut convoqué en Congrès, avant que cette réunion ne soit ajournée, pour des raisons extérieures au texte sur la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. Vous avez déjà rappelé, monsieur le ministre, les raisons pour lesquelles les parlementaires ne furent pas réunis en Congrès, et je ne reviendrai donc pas sur ce point.

Depuis, la Polynésie française a reçu un statut d'autonomie rendant sans objet le projet de loi de révision de 1999.

C'est pourquoi nous sommes à nouveau saisis d'un texte relatif au corps électoral appelé à élire les assemblées des provinces et le congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Des années se sont écoulées depuis 1999, et l'on peut regretter que la divergence d'interprétation entre le législateur et le juge constitutionnel n'ait pas pu être réglée plus tôt. Mais ce temps écoulé nous a permis de nous assurer que la définition d'un corps électoral restreint pour les élections provinciales était compatible avec les engagements internationaux de la France, en particulier avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. C'est ce qu'a établi la Cour de Strasbourg dans son arrêt Py contre France, au mois de janvier 2005.

Surtout, au-delà de l'ambiguïté des textes évoquée par certains, il est temps d'inscrire dans notre Constitution une disposition interprétative respectant l'esprit de l'accord de Nouméa. Il est temps de le faire aujourd'hui, parce que la différence d'interprétation n'a pas encore eu d'impact sur le corps électoral. Elle n'en aurait eu qu'à partir du scrutin de 2009, lorsque les personnes arrivées après 1998 auraient atteint la durée de résidence de dix ans.

Rappelons d'ailleurs que l'enjeu présent est le corps électoral pour les élections des assemblées des provinces et du congrès, qui interviendront en 2009 et en 2014.

Le dispositif dont nous discutons est, en effet, de nature transitoire. Il prendra fin à l'issue du processus défini par l'accord de Nouméa, c'est-à-dire entre 2014 et 2019.

À ce moment-là, soit les populations intéressées voteront l'accession à la pleine souveraineté, soit une nouvelle organisation devra être mise en place, avec une redéfinition de la citoyenneté calédonienne.

C'est l'esprit, et même la logique, de l'accord de Nouméa, qu'il s'agit de rétablir.

Pourquoi, en effet, l'accord et la loi organique préciseraient-ils que les électeurs de la consultation de 1998 peuvent participer aux élections provinciales, s'il s'agissait seulement de satisfaire une condition de résidence de dix ans, quelle que soit la date d'arrivée dans l'archipel ? Le texte est incompréhensible s'il ne vise pas un corps électoral gelé.

La cristallisation du corps électoral n'aura d'ailleurs qu'une incidence limitée sur les effectifs de la liste électorale spéciale. La réduction du nombre d'électeurs admis à participer aux élections provinciales du fait du gel du corps électoral concernera 712 électeurs pour le scrutin de 2009 et 4 722 pour celui de 2014.

Le projet de loi constitutionnelle qui nous est présenté reprend le texte de la loi organique, en l'améliorant et en tenant compte des observations formulées à l'époque par le Sénat, notamment par notre excellent collègue Lucien Lanier. §L'Assemblée nationale a apporté au texte quelques précisions rédactionnelles tout à fait opportunes.

Mes chers collègues, ceux d'entre vous qui ne sont pas au fait de tout l'historique des accords de Matignon et de Nouméa pensent-ils franchement que le Président de la République, par deux fois, les assemblées, par deux fois, deux premiers ministres se soient trompés à ce point sur l'interprétation d'un texte qui constitue un engagement de l'État ? Pour ma part, tel n'est pas mon sentiment. Le Sénat ne l'a pas cru non plus, que ce soit en 1999 ou avant. C'est pourquoi je vous invite à adopter le projet de loi constitutionnelle, sans modification.

Je voudrais terminer cette intervention en formant le voeu qu'une fois ce texte adopté les parties en présence retrouvent, avec l'appui de l'État, la voie d'un dialogue apaisé et constructif. Monsieur le ministre, je vous remercie de la part que vous prenez à l'établissement et à la poursuite de ce dialogue, dont l'enjeu essentiel est le destin de la Nouvelle-Calédonie et son ancrage dans la République.

Au sein de l'ensemble mélanésien, dans le Pacifique Sud, la Nouvelle-Calédonie constitue aujourd'hui un pôle de stabilité, alors que d'autres îles sont encore marquées par des troubles politiques.

Renforcée par le dialogue et la stabilité, la Nouvelle-Calédonie pourra affronter les défis de l'avenir. Terre de diversité et d'échanges, elle mérite les efforts que nous pourrons consentir, afin d'assurer cet avenir.

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