Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 15 décembre 2005 à 9h30
Lutte contre le terrorisme — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement, qui a déjà été présenté, sans succès, à l'Assemblée nationale, a pour objet de rendre effectif les pouvoirs de contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

La CNIL s'est clairement prononcée au sujet de ce projet de loi. Elle a notamment dénoncé l'absence d'équilibre général entre la nécessité de maintenir l'ordre public et l'obligation de protéger les droits et libertés.

Des dispositions supplémentaires tendant à aller dans ce sens ont, certes, été adoptées à l'Assemblée nationale. Quoique bienvenues, elles sont largement insuffisantes, et elles le sont d'autant plus - et c'est là le fond de la problématique soulevée non seulement par ce projet de loi en particulier, mais également par l'orientation imprimée à notre droit pénal en général - que les prérogatives de la CNIL ne sont pas respectées dans de nombreux domaines.

Je le répète, nous avons l'obligation de lutter fermement contre le terrorisme. Mais, dans un domaine aussi sensible, notamment pour créer un sentiment de consensus national, le Gouvernement aurait dû commencer par placer la CNIL au coeur de ce nouveau dispositif. Or c'est loin d'être le cas.

La CNIL constate que ce dispositif instaure un cadre de police administrative de lutte contre le terrorisme échappant au contrôle a priori du juge.

Le renforcement du rôle de la police administrative, qui bénéficiera désormais d'un large accès à plusieurs types de fichiers publics et privés, à des informations provenant de la vidéosurveillance ou des services de renseignement, marque un basculement radical dans notre dispositif antiterroriste, dont les conséquences présentent un grand potentiel de dangerosité en termes d'atteinte aux droits et aux libertés.

Ces dangers potentiels ne peuvent être restreints que par la mise en oeuvre préalable de garanties fortes, claires et incluses dans le dispositif de la loi, qui doit prévoir une limitation dans le temps, fixée à trois ans, ainsi que l'information constante et régulière du Parlement suivie de la remise d'une évaluation précise. Enfin et surtout, la CNIL doit exercer sans restriction les pouvoirs de contrôle prévus par la loi sur l'ensemble des dispositifs prévus.

À la lecture des articles du projet de loi, nous constatons que la CNIL est considérée comme totalement subalterne dans un certain nombre de circonstances, notamment lorsqu'est prétextée l'urgence.

Mes chers collègues, c'est en me fondant sur ces préalables et afin de rendre à la CNIL la place qui lui est due que je vous demande d'adopter cet amendement.

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