Séance en hémicycle du 15 décembre 2005 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • CNIL
  • caméra
  • connexion
  • contre le terrorisme
  • lieux
  • terrorisme
  • terroriste
  • vidéosurveillance

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?...

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers (nos 109 et 117).

Nous en sommes parvenus à la discussion des articles.

CHAPITRE IER

Dispositions relatives à la vidéosurveillance

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 34, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

La Commission nationale de l'informatique et des libertés exerce ses pouvoirs de contrôle prévus par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés sur l'ensemble des dispositifs prévus par la présente loi.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cet amendement, qui a déjà été présenté, sans succès, à l'Assemblée nationale, a pour objet de rendre effectif les pouvoirs de contrôle de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

La CNIL s'est clairement prononcée au sujet de ce projet de loi. Elle a notamment dénoncé l'absence d'équilibre général entre la nécessité de maintenir l'ordre public et l'obligation de protéger les droits et libertés.

Des dispositions supplémentaires tendant à aller dans ce sens ont, certes, été adoptées à l'Assemblée nationale. Quoique bienvenues, elles sont largement insuffisantes, et elles le sont d'autant plus - et c'est là le fond de la problématique soulevée non seulement par ce projet de loi en particulier, mais également par l'orientation imprimée à notre droit pénal en général - que les prérogatives de la CNIL ne sont pas respectées dans de nombreux domaines.

Je le répète, nous avons l'obligation de lutter fermement contre le terrorisme. Mais, dans un domaine aussi sensible, notamment pour créer un sentiment de consensus national, le Gouvernement aurait dû commencer par placer la CNIL au coeur de ce nouveau dispositif. Or c'est loin d'être le cas.

La CNIL constate que ce dispositif instaure un cadre de police administrative de lutte contre le terrorisme échappant au contrôle a priori du juge.

Le renforcement du rôle de la police administrative, qui bénéficiera désormais d'un large accès à plusieurs types de fichiers publics et privés, à des informations provenant de la vidéosurveillance ou des services de renseignement, marque un basculement radical dans notre dispositif antiterroriste, dont les conséquences présentent un grand potentiel de dangerosité en termes d'atteinte aux droits et aux libertés.

Ces dangers potentiels ne peuvent être restreints que par la mise en oeuvre préalable de garanties fortes, claires et incluses dans le dispositif de la loi, qui doit prévoir une limitation dans le temps, fixée à trois ans, ainsi que l'information constante et régulière du Parlement suivie de la remise d'une évaluation précise. Enfin et surtout, la CNIL doit exercer sans restriction les pouvoirs de contrôle prévus par la loi sur l'ensemble des dispositifs prévus.

À la lecture des articles du projet de loi, nous constatons que la CNIL est considérée comme totalement subalterne dans un certain nombre de circonstances, notamment lorsqu'est prétextée l'urgence.

Mes chers collègues, c'est en me fondant sur ces préalables et afin de rendre à la CNIL la place qui lui est due que je vous demande d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Cet amendement tend à insérer un article additionnel rappelant que la CNIL exerce ses pouvoirs de contrôle sur les dispositifs du projet de loi dans les conditions prévues par la loi du 6 janvier 1978.

La CNIL a émis un avis favorable dans son ensemble à ce projet de loi et les amendements qui sont inspirés de ses recommandations lui donnent toute garantie.

L'amendement n° 34 n'est pas utile puisque les traitements de données à caractère personnel déjà autorisés ou qui vont l'être par le présent texte relèvent de la loi de 1978. La CNIL exercera donc son contrôle dans les conditions prévues par cette loi.

Si M. le ministre confirme cette analyse, l'amendement devrait pouvoir être retiré ; s'il ne l'était pas, j'émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire

Madame Boumediene-Thiery, je comprends le sens de votre amendement, mais je partage l'avis de M. le rapporteur.

Les dispositions du projet de loi entrant dans le champ d'application de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés sont automatiquement soumises au contrôle de la CNIL, conformément à l'article 44 de cette loi, que nous respectons totalement. C'est le cas des articles 6, 7 et 8 du projet de loi auxquels vous avez déjà fait référence.

Il ne me semble donc pas nécessaire de compléter le projet de loi sur ce point. Pour autant, M. le rapporteur vient de le rappeler, plusieurs amendements ultérieurs concerneront la CNIL. Le Gouvernement se montrera très ouvert aux amendements, présentés par la commission ou par MM. Türk, Portelli et Nogrix, précisant le rôle de la CNIL ou allant dans le sens des recommandations de cette dernière.

Nous allons donc accepter un certain nombre d'avancées et il me semble que, pour ne pas alourdir le texte en ajoutant un article additionnel avant l'article 1er, il serait peut-être bon, madame, que vous retiriez cet amendement sur lequel nous pourrons revenir dans la discussion concernant la CNIL.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Je le maintiens, monsieur le président, car je considère que des garanties supplémentaires ne sont pas inutiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement souligne la grande importance qui s'attache au respect des libertés et l'attention qu'y porte constamment la CNIL.

J'entends bien les remarques, sur le plan juridique, de M. le rapporteur et de M. le ministre, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

M. Jean-Pierre Sueur. ...mais, à la faveur de cette explication de vote, je veux revenir sur la déclaration que M. Hyest a faite hier soir en fin de séance.

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous avez dit, monsieur le président de la commission, que ceux qui s'opposeraient à ce texte en raison de certaines de ses dispositions - et certaines sont, pour nous, inacceptables - démontreraient qu'ils ne veulent pas véritablement oeuvrer contre le terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Il y a dans ce propos un sophisme inacceptable et nous ne pouvons le laisser sans réponse.

Chacun nous a entendus insister sur notre totale solidarité et sur notre pleine détermination à lutter contre le terrorisme, solidarité et détermination que personne ne peut mettre en doute ! Mais il faut que vous démontriez - et, pour l'heure, je n'ai pas entendu le début du commencement d'une démonstration - qu'en dessaisissant les juges...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

...du contrôle de la liberté d'aller et de venir ou encore de la surveillance de certaines communications vous servez la cause de la lutte contre le terrorisme.

Nous considérons, et nous l'avons démontré amplement, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

... que c'est une erreur fondamentale de restreindre inutilement les libertés et de porter atteinte à l'État de droit. C'est notre position.

Monsieur le président de la commission, on ne peut pas inférer de la position qui est la nôtre et dire que nous ne serions pas déterminés à lutter contre le terrorisme. Partir sur un tel chemin, distinguer ceux qui veulent lutter contre le terrorisme et ceux qui ne le veulent pas, est absurde !

La question dont il faut pouvoir discuter est celle des moyens et du rapport entre ces moyens et d'éventuelles réductions des libertés et de l'État de droit !

Nous n'avons pas non plus apprécié que M. le président de la commission des lois nous accuse, dans le début de son intervention, de faire de la politique politicienne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président de la commission, vous avez entendu comme moi-même M. le ministre expliquer, à propos d'un décret qui n'était pas paru, que M. Sarkozy s'était ému de constater en revenant au ministère de l'intérieur que M. Dominique de Villepin, aujourd'hui Premier ministre, avait pris quelque retard, commis quelques négligences. On est bien là en pleine politique politicienne, car en quoi était-il utile au représentant du ministre de l'intérieur de mettre en cause l'attitude qui fut celle de l'actuel Premier ministre alors qu'il était ministre de l'intérieur du gouvernement précédent ?

Nous, nous ne faisons pas de politique politicienne dans ce débat.Simplement, nous ne voulons pas d'amalgame s'agissant de la lutte, à laquelle nous sommes profondément attachés, contre le terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, compte tenu du nombre d'amendements que nous avons à examiner, je vous invite à la concision.

Je mets aux voix l'amendement n° 34.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 83, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Il est constitué une délégation parlementaire d'évaluation des actions conduites par les services de renseignements et d'informations dépendants du ministère de l'intérieur, du ministère de la défense et du ministère des finances.

La délégation est constituée de sept députés et sept sénateurs désignés de façon à assurer, au sein de chaque assemblée, une représentation proportionnelle des groupes politiques. Les députés sont désignés au début de chaque législature pour la durée de celle-ci. Les sénateurs sont désignés après chaque renouvellement du Sénat.

Après chacun de ses renouvellements, la délégation élit son président et son premier vice-président qui ne peuvent appartenir à la même assemblée.

Si le président appartient à la majorité, le vice-président sera issu de l'opposition.

Si le président appartient à l'opposition, le vice-président sera issu de la majorité.

Les membres de la délégation prêtent serment dont le contenu sera déterminé par un décret en Conseil d'État. Ce serment comporte la reconnaissance du secret des débats et de la confidentialité des documents ou des exposés présentés à la délégation.

Les membres de la délégation sont soumis, après la fin de leurs mandats, aux conditions définies par le dit serment.

La violation de leur serment par les membres de la délégation est punie des peines prévues à l'article 413-10 du code pénal.

La délégation peut entendre tous les responsables des services, quel que soit leur grade, afin de recueillir les éléments nécessaires à sa mission d'évaluation.

La délégation établit son règlement intérieur qui est soumis à l'approbation du bureau des assemblées.

Ses dépenses sont financées et exécutés comme dépenses des assemblées parlementaires.

La délégation peut établir des rapports en tenant compte du secret et de la confidentialité nécessaires. Ses rapports, s'ils sont publiés, doivent recevoir l'aval du président de l'Assemblée nationale et du président du Sénat et l'autorisation des ministres de l'intérieur, de la défense et de l'économie et des finances.

L'amendement n° 82, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Il est institué une commission destinée à élaborer un projet de texte relatif à la création d'un dispositif parlementaire d'évaluation des actions conduites par les services de renseignements et d'informations dépendants du ministère de l'intérieur, du ministère de la défense et du ministère des finances.

La commission est constituée de députés et de sénateurs désignés de façon à assurer, au sein de chaque assemblée, une représentation proportionnelle des groupes politiques.

La commission élit son président et un rapporteur. Si le président appartient à la majorité, le rapporteur sera issu de l'opposition. Si le président appartient à l'opposition, le rapporteur sera issu de la majorité.

La commission est assistée d'un conseil composé de directeurs des services de renseignements et d'informations dépendants du ministère de l'intérieur, du ministère de la défense et du ministère des finances.

Ses dépenses sont financées et exécutés comme dépenses des assemblées parlementaires.

La commission devra rendre les conclusions de son travail deux mois après la promulgation de cette loi.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Ces deux amendements visent à faire entrer le Parlement dans le processus d'évaluation des actions conduites par les services de renseignement.

L'amendement n° 82 prévoit l'institution d'une commission, composée de sénateurs et de députés, qui aurait pour objet d'élaborer un projet de texte relatif à la création d'un dispositif parlementaire d'évaluation.

L'amendement n° 83 va plus loin puisqu'il prévoit l'institution d'une délégation parlementaire d'évaluation des actions conduites par les services de renseignement et d'informations dépendant du ministère de l'intérieur, du ministère de la défense et du ministère des finances.

L'histoire des relations entre les services de renseignement et le pouvoir législatif en France, faites de méfiance des uns à l'égard de l'autre, ne date pas de la Ve République. Sans remonter à l'affaire Dreyfus, il y a toujours eu de la part de l'armée, du ministère des affaires étrangères et du ministère de l'intérieur une grande méfiance à l'égard de tout contrôle sur le renseignement.

Or, actuellement, certains l'ont évoqué à l'envi et à bon droit, du fait de l'accroissement du terrorisme et de ses réseaux intérieurs et extérieurs, la nécessité d'infiltrations et de renseignements de plus en plus étoffés et performants se fait sentir. En conséquence, encore plus que par le passé, le Parlement doit pouvoir évaluer et contrôler effectivement les activités des services de renseignement.

Je me garderai bien de me lancer dans la polémique. Toutefois, lorsque l'on se remémore l'histoire récente, il n'est pas sérieux de dire que rien n'a été fait en la matière, notamment sous le gouvernement de M. Jospin, M. le ministre de l'intérieur l'a rappelé hier.

Certes, nous ne sommes pas parvenus à ce que tendait à mettre en place la proposition de loi de M. Paul Quilès, confiant au Parlement le contrôle des services de renseignement. Dans le compte rendu des débats de la commission de la défense de l'époque, on lit que « M. René Galy-Dejean a indiqué que les commissaires du groupe RPR, opposés à l'esprit de la proposition de loi, voteraient contre. Il a considéré que la culture du renseignement en France n'avait rien de commun avec celle que connaissent d'autres pays et que les exemples étrangers n'étaient, par conséquent, pas transposables. »

Les États-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Italie, les Pays-Bas, la Belgique, l'Espagne et bien d'autres Etats ont mis en place des systèmes aux modalités différentes ; mais tous exercent un contrôle effectif sur les activités des services de renseignement.

Il ne s'agit pas d'en obtenir le détail, nous ne demandons ni la levée du secret des enquêtes menées ni la déclaration sur la place publique du nom des personnes infiltrées dans tel ou tel réseau ! Il s'agit d'examiner s'il y a bien adéquation entre les objectifs et la réalité, et d'évaluer le travail accompli.

Les choses ont évolué puisqu'à l'Assemblée nationale ont été examinés trois amendements émanant l'un du rapporteur M. Alain Marsaud, qui n'est pas laxiste dans ce domaine et que je connais bien puisqu'il est de mon département, l'autre du groupe socialiste et le troisième du groupe UDF. Ces trois textes tendaient, selon des modalités différentes, à la création d'une instance chargée de l'évaluation en la matière.

Le ministre a donné son accord de principe et a demandé le retrait de ces textes afin que soit mis en place un groupe de travail chargé de procéder à une première évaluation et de fournir une feuille de route au plus tard le 15 février.

Pourquoi ces amendements ont-ils été déposés ? Il ne s'agit pas d'une défiance à l'égard du ministre ! Toutefois, lorsque ce dernier nous dit qu'il prend les choses en main, nous préférerions que le Parlement le fasse. Lorsqu'il nous propose, par exemple, la présence dans cette commission d'un représentant par groupe, nous lui répondons qu'il vaudrait mieux une représentation à la proportionnelle ! Lorsque nous souhaitons un président d'une couleur politique et un rapporteur d'une autre, sur le modèle de ce qui se passe à l'Assemblée nationale et qui n'existe pas dans notre règlement, nous pensons faire chose utile !

Mes chers collègues, tel est le sens de ces amendements. Encore une fois, il ne s'agit pas de défiance à l'égard du ministre. À ce titre, nous saluons l'évolution du groupe du RPR devenu l'UMP, qui, de ce point de vue, semble avoir été bénéfique. Nous pensons néanmoins qu'il est bon d'aller plus loin dès maintenant et de formaliser une telle proposition dès aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L'amendement n° 82 tend à créer une commission chargée d'élaborer une proposition de loi relative à la création d'un organe parlementaire compétent pour contrôler les services de renseignement. En somme, cet amendement a pour objet de formaliser l'engagement pris par le Gouvernement devant l'Assemblée nationale de mettre en place un groupe de travail, qui, comme vous l'avez dit, monsieur Peyronnet, doit rendre ses conclusions avant le 15 février 2006.

Je ne suis pas favorable à cet amendement, car il est étrange que la loi crée une commission provisoire.

Ainsi, sans préjuger le fond de l'amendement n° 83, il convient d'attendre les conclusions de ce groupe de travail, qui sera composé des groupes parlementaires et des chefs de service concernés.

Quant à l'idée d'appliquer la règle de la proportionnelle à la représentation des groupes politiques, il s'agit d'une idée intéressante, mais qui peut mener à des résultats assez surprenants !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Peyronnet, je comprends parfaitement le sens de votre démarche, mais je vous demanderai très solennellement de retirer ces amendements, au regard des engagements pris par le ministre d'État devant l'Assemblée nationale et hier devant la Haute Assemblée.

Voter un amendement à la sauvette sur un sujet aussi sensible pourrait avoir un certain nombre de conséquences. Nous avons, tous ensemble, dans ce domaine, le même souci de transparence. Néanmoins, nous savons aussi qu'il faut trouver le juste équilibre entre transparence et discrétion ; or, pour ce faire, le travail doit être préparé en commun.

Nous sommes favorables à l'idée que la représentation nationale exerce un droit de regard sur les services de renseignement. C'est acquis et je renouvelle cet engagement. Il s'agit d'une exigence démocratique que nous partageons tous.

Dans une démocratie moderne, le Parlement assume une responsabilité de contrôle sur les activités de renseignement que le Gouvernement met en oeuvre. C'est incontestable. Toutes les démocraties avancées d'ailleurs, à de rares exceptions près, appliquent ce principe. En ce qui nous concerne, la discrétion, ce n'est pas le secret.

Le Gouvernement a déjà examiné, avec grand intérêt, les amendements présentés à l'Assemblée nationale par le rapporteur Alain Marsaud, Pierre Lellouche, ainsi qu'au nom du groupe socialiste, par MM. Jacques Floch et Julien Dray ; c'est dans le même esprit que nous examinons aujourd'hui les amendements n° 82 et 83.

En conclusion, je réitère notre engagement. Une fois la présente loi votée, nous mettrons en place un groupe de travail associant des parlementaires et des fonctionnaires des services de renseignement, et qui sera chargé de proposer un texte avant le 15 février. Il ne s'agit pas d'un engagement à court, moyen ou long terme, car la date est fixée. Le texte proposé fera alors l'objet dans les mois à venir d'un projet de loi ou d'une proposition de loi qui, inscrite à l'ordre du jour du Parlement, sera débattue.

Telles sont les différentes étapes : la mise en place du groupe de travail, un débat avant le 15 février pour aboutir à un texte et l'examen d'un projet ou d'une proposition de loi.

Fort de cet engagement, monsieur Peyronnet, je vous demande très solennellement de bien vouloir retirer vos amendements, comme avaient accepté de le faire vos collègues socialistes de l'Assemblée nationale.

Notre engagement est très fort et très ferme, l'échéancier est précis et arrêté par le ministre d'État. Nous allons ensemble dans cette direction. Je souhaite que nous n'allions pas plus loin aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Peyronnet, les amendements n° 82 et 83 sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Nous sommes d'accord sur les principes que pose de manière satisfaisante M. le ministre. Nos collègues socialistes de l'Assemblée nationale ont retiré leurs amendements ; nous, nous les maintenons !

Nous avons travaillé à la sauvette, comme vous dites, parce que, compte tenu de la promesse du ministre, il a été décidé en commission d'accepter sa proposition. Pourtant, nous aurions pu travailler encore longtemps sur ces textes, qui ne mettent pas en cause la sécurité nationale.

Ces amendements tendent à déterminer la composition d'une commission ou d'une délégation ! Ce n'est pas à un règlement intérieur d'insister sur la confidentialité, sur le serment. Nous avons pris un certain nombre de précautions. Qu'elles soient insuffisantes et que le travail n'ait pas été assez réfléchi, c'est votre droit de le penser. De notre côté, à ce stade, on peut déjà mettre en place, nous semble-t-il, une telle instance.

Les choses avancent certes, mais très lentement. À la fin de l'année 2001, il a été décidé qu'une commission de contrôle - purement financier - devait être mise en place. Elle joue un rôle utile. Deux députés, deux sénateurs et des magistrats y siègent. Mais elle a seulement le pouvoir de vérifier qu'il y a bien adéquation entre les objectifs financiers et les dépenses effectives, qu'il n'y a pas de dérive de ce point de vue. Elle n'exerce aucun contrôle sur le travail réel et les objectifs des services de renseignement.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous maintenons les amendements n° 82 et 83 et nous demandons un scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Nous allons voter contre ces deux amendements pour plusieurs raisons.

L'amendement n° 82 tend à créer une commission chargée de préparer un projet, ce que propose le Gouvernement. Cet amendement, s'il est adopté, aura normalement une durée de vie d'un mois et demi ou de deux. Compte tenu de l'engagement du Gouvernement, un tel amendement ne me paraît pas utile.

Quant à l'amendement n° 83, la délégation parlementaire n'est certainement pas, me semble-t-il, le bon outil lorsqu'on voit l'important problème qu'a constitué la commission des interceptions de sécurité par le passé.

À une autre époque, déjà parlementaires, nous avons rencontré d'importantes difficultés pour que les interceptions de sécurité fassent l'objet d'une plus grande transparence vis-à-vis du Parlement. C'est quand même important en matière de liberté publique.

Nous allons voter contre l'amendement n° 83 parce qu'il ne nous paraît pas prévoir le bon outil. Quant à l'amendement n° 82, sur le principe, nous sommes d'accord, mais prenons en compte l'engagement qui a été pris.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je mets aux voix l'amendement n° 83.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 60 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 82.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa du II est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« La même faculté est ouverte aux autorités publiques aux fins de prévention d'actes de terrorisme ainsi que, pour la protection des abords immédiats de leurs bâtiments et installations, aux autres personnes morales, dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme.

« Il peut être également procédé à ces opérations dans des lieux et établissements ouverts au public aux fins d'y assurer la sécurité des personnes et des biens lorsque ces lieux et établissements sont particulièrement exposés à des risques d'agression ou de vol ou sont susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme. » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) Après le deuxième alinéa sont insérés quatrealinéas ainsi rédigés :

« Le cas échéant, l'autorisation peut également prescrire que les agents individuellement habilitésdes services de la police ou de la gendarmerie nationales sont destinataires des images et enregistrements. Elle précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements. La décision de permettre aux agents individuellement habilitésdes services de la police ou de la gendarmerie nationales d'être destinataires des images et enregistrements peut également être prise à tout moment, après avis de la commission départementale, par arrêté préfectoral. Ce dernier précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements. Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, cette décision peut être prise sans avis préalable de la commission départementale. Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision, qui fait l'objet d'un examen lors de la plus prochaine réunion de la commission.

« Les systèmes de vidéosurveillance installés doivent être conformes à des normes techniques définies par arrêté ministériel, à compter de l'expiration d'un délai de deux ans après la publication de l'acte définissant ces normes.

« Les systèmes de vidéosurveillance sont autorisés pour une durée de cinq ans renouvelable. L'autorisation peut être renouvelée pour la même durée. Dans le cas contraire, le système est retiré.

« La commission départementale instituée au premier alinéa peut à tout moment exercer un contrôle sur les conditions de fonctionnement des dispositifs autorisés en application des mêmes dispositions. Elle émet le cas échéant des recommandations et propose la suspension des dispositifs lorsqu'elle constate qu'il en est fait un usage anormal ou non conforme à leur autorisation. » ;

b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Les autorisations mentionnées au présent III et délivrées antérieurement à la date de publication de la loi n° du relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers sont réputées délivrées pour une durée de cinq ans à compter de cette date. » ;

3° Après le III, il est inséré un III bis ainsi rédigé :

« III bis. - Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent délivrer aux personnes mentionnées au II, sans avis préalable de la commission départementale, une autorisation provisoire d'installation d'un système de vidéosurveillance, exploité dans les conditions prévues par le présent article, pour une durée maximale de quatre mois. Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision. Il peut alors réunir sans délai cette dernière afin qu'elle donne un avis sur la mise en oeuvre de la procédure d'autorisation provisoire.

« Le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police, recueillent l'avis de la commission départementale sur la mise en oeuvre du système de vidéosurveillance conformément à la procédure prévue au III et se prononcent sur son maintien. La commission doit rendre son avis avant l'expiration du délai de validité de l'autorisation provisoire. Si l'autorisation n'est pas accordée à l'expiration de ce délai, le système est retiré. À défaut, le responsable du système s'expose aux sanctions prévues au VI. » ;

4° Le VII est ainsi rédigé :

« VII. - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article et notamment les conditions dans lesquelles le public est informé de l'existence d'un dispositif de vidéosurveillance ainsi que de l'identité de l'autorité ou de la personne responsable. Ce décret fixe également les conditions dans lesquelles les agents sont habilités à accéder aux enregistrements et les conditions dans lesquelles la commission départementale exerce son contrôle. »

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Je ne reviendrai pas sur l'argumentaire que j'ai développé hier soir quant à nos doutes sur l'efficacité de la vidéosurveillance.

J'insiste toutefois pour comprendre la raison de cette passion soudaine du Gouvernement pour la vidéosurveillance, d'autant que la loi autorisait déjà son installation pour assurer la sécurité des personnes.

Le projet de loi présenté aujourd'hui prévoit que les lieux susceptibles d'être des cibles d'actes terroristes peuvent être surveillés. En quoi la référence à la sécurité des personnes ne suffisait-elle pas ? Cette remarque souligne une volonté d'affichage.

Par ailleurs, M. le rapporteur m'étonne en indiquant que la vidéosurveillance pourra « être très utile en cas d'attentat à la voiture piégée », mais est-ce avant ou après l'attentat ? Je crains que, là encore, il ne s'agisse d'une information dont l'efficacité sera a posteriori douteuse.

Le rapport, en évoquant la jurisprudence du Conseil constitutionnel élaboré en 1995, souligne que le projet de loi ne remet pas en cause l'équilibre trouvé.

De deux choses l'une, ou M. le ministre nous indique que l'évolution sera marginale, loin des multiples carences du Big Brother britannique, ou bien M. le rapporteur ne peut pas dire qu'il n'y aura pas d'évolution quant au respect de la Constitution, puisque l'installation de caméras sera massive et généralisée.

Vous devez nous préciser ce que seront les conséquences exactes de la loi en matière d'installations nouvelles pour permettre au Conseil constitutionnel, si une saisine par 60 sénateurs ou 60 députés a lieu, de prendre position.

Monsieur le ministre, cet article symbolise à nos yeux une démarche dont l'objectif tend à renforcer un dispositif générateur d'une société policée, régentée dans le moindre détail, alors que, sur le plan des grands équilibres, des foyers mêmes du radicalisme islamique, par exemple, rien n'est fait pour engager le monde vers la paix, la sérénité.

Lutter contre le terrorisme ne peut se résumer aux nombreuses mesures policières et judiciaires qui existent déjà.

Je vous demanderai également de cesser de taxer de laxistes ou d'irresponsables ceux qui, comme nous, vous rappellent la réalité du monde d'aujourd'hui, sa dureté qui constitue le terreau de la violence.

Ce sont bien des réponses politiques ou économiques qui permettent de fermer définitivement ces pages sombres de l'histoire.

Nous voterons contre cet article 1er, à l'effet d'affichage dérisoire et à l'inefficacité annoncée et prouvée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de seize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 64, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

L'article 1er complète l'article 10-II de la loi de 1995 et ajoute aux motifs légaux pouvant justifier l'installation de caméras la prévention des actes terroristes.

Ce qui apparaît comme étant la nouveauté de cet article me gêne beaucoup. Ainsi, des personnes morales autres que les autorités publiques compétentes pourront installer aux abords de leurs bâtiments des caméras qui seront susceptibles de filmer ce qui se passe sur la voie publique.

Cette mesure, déjà attentatoire aux libertés, pourra être, de surcroît, contournée par la nouvelle procédure d'urgence, qui permet à l'autorité préfectorale de se passer de l'avis, déjà purement formel, de la commission départementale afin d'autoriser l'installation de dispositifs de vidéosurveillance.

Comme nous pouvons le constater, les atteintes à la liberté d'aller et venir sont multiples : possibilité de filmer ce qui se passe sur la voie publique, sans que des précisions soient clairement apportées ; possibilité pour certains agents des services de la police ou de la gendarmerie d'accéder directement et de manière permanente à ces images pour les besoins de leurs missions de police administrative et, donc, sans contrôle du juge judiciaire ; instauration d'une procédure d'urgence dérogatoire, justifiée par « l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme », et qui diminue d'autant les maigres garanties encadrant la collecte et la consultation des données filmées. Par ailleurs, cette notion d'urgence et d'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme est particulièrement vague.

Les atteintes aux libertés de ce nouveau dispositif de vidéosurveillance justifieraient-elles, à elles seules, la suppression de l'article 1er ?

Néanmoins je tiens à mettre en avant nos doutes sur l'efficacité de la vidéosurveillance en matière de terrorisme.

Dans son rapport, à la page 29, M. le rapporteur considère que « la vidéosurveillance peut dans certains cas prévenir des actions terroristes ». Il relativise cette affirmation en admettant que « cet aspect ne doit toutefois pas être exagéré, le mode opératoire des attentats suicides rendant particulièrement difficiles la détection et l'interruption de l'opération terroriste ».

La vidéosurveillance dans le cadre de ce projet de loi n'est qu'une mesure d'affichage destinée à rassurer l'opinion publique, mais qui ne permettra pas, par exemple, de démanteler plus efficacement les réseaux terroristes.

C'est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression de l'article 1er et nous demandons un scrutin public.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 35, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Supprimer le 1° de cet article.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet article, notamment son premier alinéa, pèche par son absence d'efficacité et par le danger qu'il représente pour nos droits et libertés.

Il convient de rétablir une certaine vérité. La multiplication des caméras n'aidera en rien à la prévention des actes terroristes, notamment parce que l'efficacité de tels systèmes est toute relative.

C'est un fait établi. New York, Madrid et Londres en sont de tragiques exemples. Les caméras qui y étaient présentes, encore plus nombreuses pour Londres, n'ont pu empêcher les attentats.

La crainte de voir enregistrés leurs actes n'est pas assez dissuasive pour les terroristes, notamment pour ceux qui préparent des actions suicides.

Au mieux, la vidéosurveillance présente un intérêt si des mesures de police interviennent après la commission d'actes terroristes. À ce stade, les images peuvent permettre d'identifier a posteriori les auteurs des actes incriminés.

Dès lors, étendre le champ de la vidéosurveillance, sans contrôle judiciaire préalable, présente un danger quant à la mise en oeuvre de tels dispositifs, d'autant plus que des personnes morales de droit privé pourront enregistrer des images de ce qui s'est passé sur la voie publique ou dans des lieux et établissements ouverts au public.

Toutefois, la vidéosurveillance constitue en soi une atteinte à nos droits et libertés. Elle contrevient à la liberté d'aller et venir, au respect de la vie privée. En un mot, elle s'oppose au principe de sûreté, cette atteinte n'étant rendue acceptable que par le strict respect du principe de proportionnalité.

En mettant en oeuvre un dispositif où la CNIL et les juges sont mis hors jeu au profit du Gouvernement et de la police administrative, où l'efficacité proclamée n'est pas l'efficacité atteinte et où de simples particuliers pourront pratiquer la vidéosurveillance de tous les citoyens dans des lieux publics, vous marquez là le caractère largement disproportionné de ce projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 84, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour insérer quatre alinéas après le deuxième alinéa de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995:

« Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, l'autorisation peut également prescrire, sous contrôle de l'autorité judiciaire, que les agents individuellement habilités des services de la police ou de la gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions sont destinataires des images et enregistrements. Elle précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements au cas par cas pour chacun des systèmes de vidéosurveillance concerné par la présente disposition. Cette décision peut être prise sans avis préalable de la commission départementale. Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision, qui fait l'objet d'un examen lors de la plus prochaine réunion de la commission.

La parole est à M. Louis Mermaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Même si nous comprenons parfaitement l'argumentation de Mmes Assassi et Boumediene-Thiery, nous avons une position différente. Si nous souhaitons placer sous le contrôle de la CNIL et de l'autorité judiciaire les systèmes de vidéosurveillance, nous ne voulons pas scier la branche, mais simplement l'élaguer pour que soient respectés le principe fondamental de finalité et, par voie de conséquence, celui de proportionnalité.

Nous ne faisons pas de fixation sur la vidéosurveillance ; elle existe partout. Pour nous, le problème, c'est qu'elle soit encadrée et que les éléments recueillis ne soient pas transmis à n'importe qui et n'importe comment. A partir de là, la vidéosurveillance a son utilité. Encore faut-il qu'elle ne soit pas détournée de son objet et que toutes les garanties existent.

Nous souhaitons qu'une fois mis en place le contrôle fonctionne avec la plus grande rapidité sans nuire en rien à la recherche des renseignements qui peuvent être utiles à notre sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 2, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, supprimer les mots :

Le cas échéant,

et le mot :

également

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 1, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans les première et troisième phrases du premier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, après les mots :

agents individuellement

insérer les mots :

désignés et dûment

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Il s'agit d'un amendement de précision et d'harmonisation, qui tient compte de la recommandation de la CNIL de bien préciser les modalités selon lesquelles les agents ayant accès aux images sont désignés.

Je me permettrai, d'ailleurs, de présenter, au nom de la commission, des amendements similaires aux articles 5, 6 et 8.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 51 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, Türk et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier, Cambon, Goujon et Lecerf, est ainsi libellé :

Compléter la deuxième phrase du texte proposé par le a) du 2 de cet article pour modifier le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 par les mots :

ainsi que la durée de conservation des images, dans la limite d'un mois à compter de cette transmission ou de cet accès, sans préjudice des nécessités de leur conservation pour les besoins d'une procédure pénale

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Il est nécessaire que l'autorisation préfectorale, en matière d'installation de dispositifs de vidéosurveillance, précise non seulement les modalités de transmission des images aux services de police et de gendarmerie compétents, mais également leur durée de conservation par ces services.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 85, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I- Après le premier alinéa du texte proposé par le a) du 2°de cet article pour insérer quatre alinéas après le deuxième alinéa de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Toute constitution de nouveaux fichiers à partir de ces images et enregistrements ou tout rapprochement avec d'autres traitements sont soumis aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel.

II- En conséquence, dans le deuxième alinéa a) du 2° de cet article, remplacer le mot :

quatre

par le mot

cinq

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 4, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer les deux dernières phrases du troisième alinéa du texte proposé par le a) du 2 de cet article pour le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Il s'agit d'un amendement rédactionnel visant à supprimer une mention inutile et redondante.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 65 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour insérer quatre alinéas après le deuxième alinéa de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, remplacer les mots :

peut à tout moment

par le mot :

doit

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 3, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour le III de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, après les mots :

peut à tout moment exercer

insérer les mots :

, sauf en matière de défense nationale,

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Il s'agit d'un amendement de cohérence.

Le droit en vigueur prévoit que l'avis préalable de la commission départementale n'est pas requis en matière de défense nationale pour installer un système de vidéosurveillance.

De la même manière, la commission ne peut pas être saisie par toute personne intéressée d'une difficulté tenant au fonctionnement d'un système de vidéosurveillance, lorsque ce dernier concerne la défense nationale.

Par souci de cohérence, il semble donc nécessaire de préciser que la commission départementale ne peut exercer son pouvoir de contrôle lorsque la défense nationale est en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 36, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Après la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le a) du 2° de cet article pour insérer quatre alinéas après le deuxième alinéa de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, insérer une phrase ainsi rédigée :

Elle en effectue une évaluation chaque année.

L'amendement n° 37, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Supprimer le 3 de cet article.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Il convient de rendre effectif le contrôle de la commission départementale. À cet effet, il ne peut être limité à d'éventuelles réclamations présentées par les administrés.

C'est la raison pour laquelle il convient d'instituer un contrôle obligatoire tous les ans, et cela est d'autant plus vrai que les commissions départementales n'ont pas une réelle possibilité de contrôle. Il s'agit souvent d'un simple effet d'affichage.

Or comment ces commissions pourront-elles effectuer un contrôle effectif de l'installation technique des systèmes de vidéosurveillance ? Comment pourront-elles vérifier l'identité de celles et ceux qui se trouveront derrière les caméras, du sort qui sera fait aux images prises ainsi qu'à la destination qui leur sera réservée ?

Par ailleurs, la multiplication et l'extension des systèmes de vidéosurveillance impliquent des conséquences humaines, techniques et budgétaires très lourdes.

Si l'on veut accroître au maximum l'efficacité des systèmes de vidéosurveillance afin de prévenir des actes terroristes, il faudrait qu'il y ait au moins une personne derrière chaque objectif de caméra.

Or, en l'absence d'un personnel suffisant, les images sont d'abord enregistrées, pour pouvoir être consultées ultérieurement des jours, des semaines, voire des mois plus tard. Il n'y a pas d'intervention immédiate de secours.

La fonction de la vidéosurveillance est alors essentiellement psychologique. Mais, comme je l'ai dit, l'effet dissuasif en matière de lutte contre le terrorisme est plus que relatif.

En outre, au facteur humain que suppose une telle intensification, s'ajoute la problématique technique.

Toutes les caméras, tous les systèmes de vidéosurveillance ne se valent pas. En effet, selon les conditions météorologiques, l'obscurité ambiante ou les caractéristiques du lieu dans lesquels les caméras sont installées, on ne peut pas être assuré que les images enregistrées seront d'une qualité d'exploitation convenable.

Seuls des systèmes techniques très complexes peuvent être garants d'une telle qualité. Or, qu'il s'agisse du personnel humain placé derrière les caméras ou des systèmes techniques complexes réellement performants, tout cela a un coût financier très lourd, qui s'élève, au minimum, à des dizaines de millions d'euros.

Ainsi, pour que 1 % d'une ville comme Lyon soit couvert, il conviendrait de dépenser environ 5 millions d'euros, ce qui représente un coût exorbitant, alors que rien, absolument rien, ne permettra de démontrer l'efficacité du dispositif.

Où trouvera-t-on l'argent ? Combien cela coûtera-t-il réellement ? Le Gouvernement ne nous en dit absolument rien.

On tente de nous faire basculer dans l'ère de Big Brother, alors que de tels choix techniques, à l'efficacité toute relative, risquent de grever le budget du renseignement humain, qui, malgré ses failles et ses zones d'ombre, caractérise le dispositif français, efficace en matière de lutte antiterroriste ?

Je voudrais mettre l'accent sur une autre difficulté. Si la vidéosurveillance n'a pour objet unique que l'élucidation des délits, l'intervention rapide en vue de porter assistance à des personnes en danger n'impliquerait-elle pas une augmentation importante des effectifs des services de police, notamment de la police de proximité ?

Or, à cet égard, comme j'ai eu l'occasion de le dire précédemment, le dispositif préexistant, issu de la loi du 21 janvier 1995, permet déjà la vidéosurveillance. Malheureusement, à ce jour, nous ne disposons d'aucune évaluation, ni d'aucun bilan a fortiori de ce système. Il serait pourtant intéressant, nous semble-t-il, cinq ans après le vote de la loi, de savoir où nous en sommes exactement.

Alors que les garanties indispensables sont absentes ou insuffisantes dans le projet de loi qui nous est soumis, à ce système déjà exorbitant vient s'ajouter une procédure dérogatoire encore plus exorbitante.

C'est ainsi qu'est instituée une procédure d'urgence permettant une autorisation provisoire de quatre mois pour l'installation d'un système de vidéosurveillance, sans avis préalable de la commission départementale.

Seul le préfet pourra octroyer cette autorisation, l'avis de la commission n'intervenant que pour régulariser une installation préalablement mise en place.

Après l'atteinte supposée aux droits et libertés de chacun, s'ajoutera alors une autre atteinte manifeste.

Ce caractère manifestement attentatoire est renforcé par la règle selon laquelle la commission n'intervient que quatre mois après la décision unilatérale et discrétionnaire du préfet. En d'autres termes, une fois de plus, les juges sont écartés !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 5, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer les deux dernières phrases du second alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour insérer un III bis à l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995.

L'amendement n° 6, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le 3° de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :

bis Au VI, après les mots : « Le fait » sont insérés les mots : « d'installer un système de vidéosurveillance ou de le maintenir sans autorisation, » ;

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L'amendement n° 5 est un amendement rédactionnel tendant à supprimer une mention inutile et redondante.

S'agissant de l'amendement n° 6, le paragraphe VI de l'article 10 de la loi de 1995 définit les sanctions pénales applicables en cas de non-respect de la législation en matière de vidéosurveillance.

Toutefois, étonnamment, dans l'hypothèse où un exploitant maintiendrait un système de vidéosurveillance ne bénéficiant plus d'une autorisation, mais ne disposant pas de dispositif d'enregistrement, il ne pourrait pas être sanctionné sur le fondement du paragraphe VI, lequel ne réprime que le fait de procéder à des enregistrements sans autorisation.

Cet amendement a pour objet de remédier à cette situation en obligeant les exploitants à retirer les systèmes non autorisés ou qui ne le sont plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 86, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Au début de la première phrase du texte proposé par le 4° de cet article pour le VII de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier1995, après les mots :

Un décret en Conseil d'État

insérer les mots :

, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés,

La parole est à M. Louis Mermaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

Cet amendement répond au même souci de faire intervenir la CNIL, ce qui constitue, pour nous, une garantie minimale.

En effet, la CNIL doit pouvoir jouer son rôle, tout son rôle. Encore faut-il lui en donner les moyens.

En participant à la rédaction des décrets d'application, elle pourrait exercer sa mission d'intérêt général consistant à veiller à ce que l'informatique soit au service du citoyen et ne porte atteinte ni à l'identité humaine, ni aux droits de l'homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles et publiques, autant de droits garantis par la Constitution.

Le Gouvernement peut-il nous dire, dès aujourd'hui, quand seront publiés les décrets d'application, qui conditionnent l'application de la loi ?

Figurent, d'ailleurs, dans ce texte, des articles déjà adoptés lors du vote de la loi pour la sécurité intérieure, et qui feront l'objet d'un nouvel examen devant le Parlement, faute d'avoir trouvé, jusqu'à présent, leur raison d'être du fait d'une carence réglementaire.

Dans son rapport écrit, M. Courtois demande que le Gouvernement publie une circulaire d'application à destination des maires. Pourquoi pas ? Il semblerait que de nombreuses municipalités attendent cette loi pour installer des systèmes de vidéosurveillance.

De la même manière, notre rapporteur suggère que l'arrêté devant fixer les normes techniques soit pris le plus rapidement possible afin que des travaux qui ne sont pas aux normes ne soient pas engagés, car cela entraînerait des dépenses supplémentaires.

Monsieur le président, du fait d'un incident technique, je n'ai pu tout à l'heure présenter l'amendement n° 85. Je dirai simplement qu'il visait également à tenir compte des recommandations de la CNIL, ce qui allait exactement dans le même sens que l'amendement que je viens de présenter.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 7, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Dans la seconde phrase du texte proposé par le 4°de cet article pour le VII de l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, après les mots :

les conditions dans lesquelles les agents

insérer les mots :

visés au III

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

En ce qui concerne l'amendement n° 64, qui tend à supprimer l'article 1er, il est évident que la commission ne peut qu'y être défavorable. Elle a, pour sa part, déposé plusieurs amendements sur cet article.

Sur un plan personnel, je voudrais souligner que la vidéosurveillance me paraît particulièrement importante, à titre préventif, en ce qu'elle permet d'identifier, au moyen de photos, de films, des individus susceptibles de repérer des lieux au préalable, mais aussi, même si ce n'est qu', malheureusement, d'identifier les commanditaires.

Un tel dispositif nous paraît donc important pour éviter que ces individus ne recommencent et pour qu'ils puissent être punis par la justice de notre pays.

En conséquence, la commission est très défavorable à l'amendement n° 64.

S'agissant de l'amendement n° 35, il tend, notamment, à supprimer la possibilité pour des personnes morales privées de filmer la voie publique aux abords de leurs bâtiments ou installations aux fins de prévenir des actes de terrorisme.

Cet amendement est contraire à la position de la commission des lois. Je rappelle que de tels systèmes de vidéosurveillance ne pourraient être installés que dans les lieux susceptibles d'être exposés à des actes de terrorisme, en particulier les lieux très fréquentés. En outre, la technologie permettant d'ores et déjà d'empêcher de filmer l'intérieur des habitations privées, le détournement de tels systèmes serait de fait très difficile.

Par ailleurs, les commissions départementales auront désormais un pouvoir de contrôle propre. Ne préjugeons donc pas leur insuffisance.

Aussi la commission a donné un avis défavorable à cet amendement.

En ce qui concerne l'amendement n° 84, il vise à restreindre la possibilité pour les services de police et de gendarmerie d'accéder aux images et enregistrements des systèmes de vidéosurveillance aux seul cas où l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'acte terroriste le requièrent.

Le projet de loi ne limite pas cet accès à cette seule finalité. Le préfet pourrait ainsi autoriser, pour un système de vidéosurveillance déterminé, l'accès aux images aux services de police et de gendarmerie. La vidéosurveillance est envisagée comme un outil général de police administrative. Cet accès n'est pas exempt de garantie, puisque seuls des agents individuellement désignés et dûment habilités en auraient le droit.

D'ailleurs, l'amendement n° 51 rectifié ter, présenté par M. Portelli, précise que la conservation de ces images ne peut excéder un mois.

Pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à une restriction du droit d'accès qui s'inscrit dans un cadre de police administrative et non de police judiciaire, contrairement à ce qui est prévu dans le présent amendement, sur lequel la commission a, par conséquent, émis un avis défavorable.

En ce qui concerne l'amendement n° 51 rectifié , il précise que les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie qui ont accès aux images de vidéosurveillance ne peuvent, en tout état de cause, conserver ces images plus d'un mois.

Il s'agit d'aligner le plus possible le régime d'accès à ces images par les services de police et de gendarmerie sur le régime de droit commun en matière de vidéosurveillance.

C'est la raison pour laquelle la commission est favorable à cet amendement.

S'agissant de l'amendement n° 65 rectifié, très proche de l'amendement n°36, il tend à rendre obligatoire tous les ans le contrôle de chaque système de vidéosurveillance par la commission départementale.

Le projet de loi prévoit seulement qu'elle peut exercer à tout moment un contrôle sans en préciser la périodicité.

Or je crains qu'un tel amendement n'engorge complètement l'activité des commissions départementales ; un examen annuel ne me paraît pas indispensable. La commission doit cibler son contrôle sur les systèmes les plus sensibles ou ayant fait l'objet d'un signalement par un tiers.

En outre, il est prévu dans le projet de loi que l'autorisation préfectorale sera délivrée pour une durée de cinq ans, contre une durée indéterminée aujourd'hui. Ce renouvellement périodique sera l'occasion d'un réexamen du système installé.

Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements.

Pour ce qui est de l'amendement n° 37, il vise à supprimer la procédure d'urgence au motif que celle-ci permettrait de contourner l'ensemble des garanties prévues par la loi.

Or, selon nous, la portée de cette procédure d'urgence ne doit pas être exagérée, puisque celle-ci n'est applicable qu'en cas de risque d'actes de terrorisme.

Par ailleurs, l'avis préalable de la commission départementale n'est pas requis uniquement pour l'autorisation provisoire d'une durée maximale de quatre mois. Cette commission peut également donner son avis quand elle le souhaite, même si l'avis préalable reste requis pour la délivrance de l'autorisation préfectorale définitive. L'urgence n'efface donc pas les garanties mises en place.

C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Enfin, s'agissant de l'amendement n° 86, il tend à prévoir que le décret d'application de l'article 10 de la loi de 1995 est pris après avis de la CNIL. Or il convient de rappeler que la CNIL n'est pas compétente en matière de vidéosurveillance, sauf s'il y a constitution de fichier, ce qui n'est pas le cas.

La commission est donc également défavorable à cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Mesdames Assassi et Boumediene-Thiery, avec les amendements n° 64 et 35, vous proposez quasiment de supprimer l'article 1er du projet de loi, qui permet de développer l'installation de réseaux de télésurveillance pour faire face à la menace terroriste dans notre pays.

Comme je l'ai dit hier soir, je suis très ému que vous considériez la mise en place de caméras de télésurveillance, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et de la prévention des attentats, comme un élément de privation de liberté, quand, au contraire, elle contribue à garantir nos droits, dont le premier est tout de même d'assurer la sécurité de nos concitoyens.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Madame Assassi, vous avez affirmé que la télésurveillance était inutile car elle ne pouvait éviter les d'attentats suicides ! Nous estimons, au contraire, que les caméras permettent, d'une part, de détecter des comportements qui pourraient être les prémices d'attentats criminels et terroristes et, d'autre part, de démanteler les réseaux et d'arrêter les commanditaires.

Permettez-moi de vous rappeler que les commanditaires des attentats de Londres ont été interpellés et mis hors d'état de nuire grâce aux caméras de télésurveillance, ce qui, du même coup, a sûrement permis d'éviter d'autres attaques. Or, madame Assassi, vous semblez estimer que, après tout, l'interpellation des commanditaires, grâce au système de caméras de télésurveillance, n'apporte rien de plus et qu'il valait mieux laisser les commanditaires en liberté ! Telle est la logique de votre raisonnement.

Au contraire, nous considérons, nous, qu'il est plus criminel encore d'être l'organisateur ou le commanditaire d'un attentat que le kamikaze lui-même. Il est donc de notre devoir de nous donner tous les moyens de développer ces systèmes, comme l'a fait le Royaume-Uni.

Vous évoquez une « installation de caméras massive et généralisée ». Il faut relativiser ! Voici simplement les chiffres, mesdames, messieurs les sénateurs : nous disposons, aujourd'hui, en France, d'environ 300 000 caméras de vidéosurveillance, réparties entre 250 communes. Le Royaume-Uni en compte 4 millions, et il s'est donné comme objectif de passer à 25 millions ! La différence est considérable, d'autant qu'avec cet article 1er, nous nous fixons, nous, un objectif qualitatif, et non quantitatif.

Il est donc évident que ces amendements de suppression de l'article 1er ne se justifient pas. De surcroît, madame Alima Boumediene-Thiery, vous faites référence aux mosquées et aux synagogues, ...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

...alors que nous savons qu'elles comptent parmi les lieux les plus menacés de notre territoire et que les deux communautés concernées insistent fortement auprès du Gouvernement pour que des dispositions soient prises pour assurer la protection de chacun de leurs membres.

Nous avons le devoir impératif de leur apporter une réponse positive et concrète. Sincèrement, madame Boumediene-Thiery, je m'étonne que vous fassiez référence à ces lieux de culte comme à une menace pour les libertés individuelles dès lors que nous y installerions des caméras de surveillance pour y assurer la protection et la sécurité des membres de la communauté.

Le Gouvernement est donc totalement défavorable aux amendements n°s 64 et 35.

S'agissant de l'amendement n° 84, je ferai quatre remarques.

Premièrement, définir a priori dans la loi les cas où les images pourront être visionnées et analysées par les services de police et de gendarmerie affecterait grandement l'efficacité de la lutte contre le terrorisme, lequel revêt un caractère multiforme et imprévisible, comme vous le savez.

Deuxièmement, il est nécessaire de ne pas figer dans la loi la désignation des services dont la mission serait spécialement, en cas d'attaque terroriste, d'avoir accès aux images et de les exploiter, à un moment où la mobilisation de toutes nos forces serait nécessaire.

Troisièmement, en tant que décisions de police administrative, prises en vue d'assurer la sécurité publique, ces décisions peuvent faire l'objet d'un contrôle du juge administratif, et de lui seul.

Quatrièmement, il n'est pas nécessaire de mentionner que la transmission des images et l'accès aux enregistrements se feront au cas par cas. Il est prévu, en effet, que ces décisions figureront dans l'autorisation même ou, par la suite, seront prises relativement à un système de vidéosurveillance donné. Elles seront donc nécessairement examinées au cas par cas, en fonction de l'appréciation du contexte spécifique au système concerné.

Monsieur Courtois, le Gouvernement est bien évidemment favorable à vos amendements n° 2 et 1. S'agissant de ce dernier, je tiens à préciser que les agents seront mentionnés ès qualités et que leur désignation nominative et leur habilitation relèveront des chefs de service de la police et de la gendarmerie.

Concernant l'amendement n° 51 rectifié ter, qui a pour objet de pallier une insuffisance du texte proposé, l'avis du Gouvernement est favorable.

L'amendement n° 3 de M. Jean-Patrick Courtois tend à introduire une précision justifiée. J'y suis donc favorable, comme à l'amendement n° 4.

S'agissant de l'amendement n° 36 de Mme Alima Boumediene-Thiery, l'avis du Gouvernement est défavorable, car le projet de loi répond déjà entièrement aux préoccupations qui se trouvent à l'origine de cet amendement, qui nous paraît donc inutile.

Le Gouvernement est également défavorable, bien sûr, à l'amendement n° 37. Je l'expliquerai par un exemple. Un magasin qui ne serait pas équipé de vidéosurveillance peut-il demander au préfet l'autorisation de s'équiper très rapidement ?

Imaginons que, demain, se produise une flambée de violence terroriste dans notre pays et que certains magasins, afin d'assurer la sécurité de leurs clients, souhaitent prendre des mesures rapides pour s'équiper techniquement en systèmes de vidéosurveillance. Aux termes de la législation actuelle, ce serait impossible, il faut le savoir ! Mais demain, grâce à ces dispositions, ce sera possible en cas d'urgence et d'exposition particulière à un risque d'acte terroriste : le préfet pourra autoriser l'installation de caméras, pour une période limitée à quatre mois, au cours de laquelle, d'ailleurs, la commission départementale des systèmes de vidéosurveillance devra donner son avis.

Je ne vois pas en quoi cette procédure de bon sens serait attentatoire aux libertés.

Monsieur Jean-Patrick Courtois, je vous remercie de contribuer, par les amendements n° 5, 6 et 7 à l'amélioration du texte. Le Gouvernement y est évidemment favorable.

Enfin, s'agissant de l'amendement n° 86, je répondrai à M. Mermaz que le décret fixant les modalités d'application de l'article 10 de la loi du 21 janvier 1995 ne relève pas de la compétence de la CNIL et ne doit donc pas être soumis à son avis, car il porte sur des systèmes de vidéosurveillance qui se situent hors du champ d'application de la loi du 6 janvier 1978.

Les deux réglementations s'excluent l'une l'autre. Les fichiers normatifs qui sont structurés selon des critères permettant d'identifier les personnes physiques et qui utilisent des images enregistrées par un système de vidéosurveillance sont soumis, aux termes du I de l'article 10 de la loi du 21 janvier 1995, aux conditions prévues par la loi du 6 janvier 1978, donc au contrôle de la CNIL, et non à la réglementation relative à la vidéosurveillance.

Par ailleurs, monsieur Mermaz, vous vous êtes inquiété des décrets d'application de la loi. Je veux vous rassurer : le ministre d'État a demandé à ses services de travailler d'ores et déjà à leur rédaction, afin que la loi, une fois votée, puisse être appliquée dans les meilleurs délais.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Mme Alima Boumediene-Thiery. Je souhaite interpeller M. le ministre car, à aucun moment dans mon intervention, je n'ai parlé de synagogue ni de mosquée !

M. le ministre s'entretient avec un sénateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le ministre, vous pourriez écouter ce que je vous dis ! Votre attitude témoigne d'un manque de respect.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le président. Monsieur le ministre, Mme Alima Boumediene-Thiery vous interpelle !

M. Christian Estrosi se tourne vers Mme Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Monsieur le ministre, je n'ai parlé à aucun moment de synagogue ni de mosquée. Je vous mets, d'ailleurs, au défi de réécouter l'enregistrement de la séance ou de consulter le compte rendu intégral des débats : vous verrez que, dans mes propos, il n'est jamais question de mosquées ou de synagogues, mais de lieux de culte.

Je tenais à le souligner, parce que, d'une part, en ce qui me concerne, je ne fais pas d'amalgame entre terrorisme et religion.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Mme Alima Boumediene-Thiery. D'autre part, vos propos révèlent vos fantasmes. Est-ce parce que je m'appelle Boumediene que vous pensez aux mosquées et aux synagogues ?

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Mme Alima Boumediene-Thiery. Enfin, si vous nous écoutiez davantage, au lieu de lire vos notes, vous nous répondriez mieux !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, gardons un peu de sérénité à ce débat, je vous en prie !

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Madame Boumediene-Thiery, tout d'abord, je ne vous ai jamais manqué de courtoisie, et je regrette que vous n'en fassiez pas autant à mon égard, comme le montre, notamment, votre utilisation, à l'endroit du modeste représentant de l'État que je suis, du terme de fantasme.

Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout le monde a des fantasmes !

Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ces propos ne me semblent pas dignes de vous ni de la Haute Assemblée.

C'est le texte même de votre amendement qui fait référence aux synagogues et aux mosquées, puisqu'il interdirait aux personnes qui régissent, administrent et animent les lieux de culte d'installer des caméras ! Madame Boumediene-Thiery, j'en suis désolé, mais vous y faites implicitement référence en évoquant les lieux de culte.

Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Et les églises ? Il y a beaucoup plus d'églises en France que de synagogues et de mosquées ! Notre-Dame de Paris est un lieu important à surveiller !

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Si madame Borvo Cohen-Seat veut s'exprimer, qu'elle demande la parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, un peu de sérénité !

Je mets aux voix l'amendement n° 64.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

Il est procédé au comptage des votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 61 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Je mets aux voix l'amendement n° 35.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 1 er est adopté.

Un arrêté ministériel détermine les services dont les missions consistent à lutter contre le terrorisme au sens de la présente loi. Pour l'application des articles relatifs à la vidéosurveillance, des arrêtés préfectoraux fixent la liste de ces services au plan départemental.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 8, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Cet amendement tend à supprimer l'article 1er bis, car le choix de situer de telles dispositions à cet endroit du texte n'est pas satisfaisant. Puisque celles-ci prévoient notamment qu'un arrêté ministériel détermine les services spécialisés dans la lutte contre le terrorisme « au sens de la présente loi », elles auraient plutôt leur place dans les dispositions finales que dans le chapitre relatif à la vidéosurveillance.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous présenterai tout à l'heure un amendement tendant à reprendre ces dispositions et à préciser que les services concernés sont uniquement les services de police et de gendarmerie.

En revanche, je vous proposerai d'abandonner la seconde phrase de l'article 1er bis, selon laquelle des arrêtés préfectoraux fixent, en matière de vidéosurveillance, la liste de ces services au niveau départemental. Cette précision paraît inutile et relève d'une mauvaise compréhension de l'article 1er. En effet, ce dernier limite l'accès aux images de vidéosurveillance, non pas aux seuls services spécialisés dans la lutte contre le terrorisme, mais aux seuls agents des services de police et de gendarmerie individuellement désignés et dûment habilités.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Monsieur le rapporteur, sans être hostile à la position de la commission, je rappellerai simplement que cet article est issu d'un amendement du groupe socialiste adopté par l'Assemblée nationale. Le vote d'un sous-amendement a d'ailleurs permis d'améliorer la rédaction de l'article, puisque le décret en Conseil d'État initialement prévu a été remplacé par un arrêté ministériel, lequel déterminera « les services dont les missions consistent à lutter contre le terrorisme au sens de la présente loi ». Cette disposition est véritablement nécessaire.

Cela dit, lorsque nous examinerons l'amendement de la commission tendant à rétablir l'article, il serait bon d'avoir un débat sur l'intérêt de la seconde phrase, puisque vous nous avez annoncé votre intention de supprimer l'intervention des services préfectoraux.

L'amendement est adopté.

Après l'article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 précitée, il est inséré un article 10-1 ainsi rédigé :

« Art.10-1. - I. - Aux fins de prévention d'actes de terrorisme, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent prescrire la mise en oeuvre, dans un délai qu'ils fixent, de systèmes de vidéosurveillance, aux personnes suivantes :

« - les exploitants des lieux et établissements ouverts au public aux fins d'y assurer la sécurité des personnes et des biens lorsque ces lieux et ces établissements sont particulièrement exposés à des actes de terrorisme ;

« - les exploitants des établissements, installations ou ouvrages mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense ;

« - les gestionnaires d'infrastructures, les autorités et personnes exploitant des transports collectifs, relevant de l'activité de transport intérieur régie par la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs ;

« - les exploitants d'aéroports qui n'étant pas visés aux deux alinéas précédents, sont ouverts au trafic international.

« II. - Préalablement à leur décision et sauf en matière de défense nationale, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police saisissent pour avis la commission départementale instituée à l'article 10, quand cette décision porte sur une installation de vidéosurveillance filmant la voie publique ou des lieux et établissements ouverts au public. La commission départementale exerce un pouvoir de contrôle dans les conditions prévues au dernier alinéa du 1° du III de l'article 10.

« Les systèmes de vidéosurveillance installés en application du présent article sont soumis aux dispositions des quatrième et cinquième alinéas du II et des deuxième, troisième, quatrième et sixième alinéas du III de l'article 10.

« III. - Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent prescrire, sans avis préalable de la commission départementale, la mise en oeuvre d'un système de vidéosurveillance, exploité dans les conditions prévues par le II du présent article. Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision. Il peut alors réunir sans délai cette dernière afin qu'elle donne un avis sur la mise en oeuvre de la procédure de décision provisoire.

« Avant l'expiration d'un délai maximal de quatre mois, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police, recueillent l'avis de la commission départementale sur la mise en oeuvre du système de vidéosurveillance conformément à la procédure prévue au III de l'article 10 et se prononcent sur son maintien.

« IV. - Si les personnes mentionnées au I refusent de mettre en oeuvre le système de vidéosurveillance prescrit, le représentant de l'État dans le département et, à Paris, le préfet de police, les mettent en demeure de procéder à cette installation dans le délai qu'ils fixent en tenant compte des contraintes particulières liées à l'exploitation des établissements, installations et ouvrages et, le cas échéant, de l'urgence.

« V. - Est puni d'une amende de 150 000 € le fait pour les personnes mentionnées au I de ne pas avoir pris les mesures d'installation du système de vidéosurveillance prescrit à l'expiration du délai défini par la mise en demeure mentionnée au IV.

« VI. - Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article et notamment les conditions dans lesquelles le public est informé de l'existence d'un dispositif de vidéosurveillance ainsi que de l'identité de l'autorité ou de la personne responsable. Ce décret fixe également les conditions dans lesquelles les agents sont habilités à accéder aux enregistrements et les conditions dans lesquelles la commission départementale exerce son contrôle. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 66, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 2 se situe dans la même logique que l'article 1er puisqu'il tend également à étendre l'utilisation de la vidéosurveillance dans le but de lutter contre le terrorisme.

Ainsi, le préfet peut prescrire la mise en oeuvre de dispositifs de vidéosurveillance de certains sites particulièrement sensibles et visés par le code de la défense et celui de l'environnement, tels que les centrales nucléaires, les barrages, mais aussi les usines chimiques.

Toutefois, pour ces installations sensibles, une procédure dérogatoire d'urgence est prévue et permet au préfet de passer outre l'avis de la commission départementale. Ces sites sont pourtant soumis à une réglementation très stricte en matière de sécurité puisqu'ils doivent disposer, si ce n'est déjà le cas, d'un plan efficace en matière de surveillance, d'alarme et de protection matérielle.

Puisque les sites visés sont déjà dotés des moyens proposés, le seul risque contre lequel il faudrait encore se prémunir est celui d'une attaque aérienne. Par conséquent, nous ne comprenons pas du tout l'utilisation des caméras pour la protection de ces lieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 52 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, Türk et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier, Cambon, Goujon et Lecerf, est ainsi libellé :

Supprimer le deuxième alinéa du I du texte proposé par cet article pour insérer un article 10-1 dans la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Le pouvoir préfectoral d'imposer l'utilisation des caméras nous semble devoir être limité aux seuls sites d'intérêt public sur lesquels pèse une menace terroriste susceptible d'entraîner une désorganisation massive du fonctionnement du pays.

Pour les autres lieux et établissements ouverts au public, il nous paraît préférable que les préfets privilégient la voie de la concertation, pour sensibiliser les responsables de ces lieux et de ces établissements et pour les inciter à mettre en place des systèmes de vidéosurveillance.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Les amendements n° 59, 60 et 61 sont présentés par MM. Badré, Pozzo di Borgo et les membres du groupe Union centriste-UDF.

L'amendement n° 59 est ainsi libellé :

Dans le troisième alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 10-1 de la loi n°95-73 du 21 janvier 1995, après les mots :

exploitants

insérer les mots :

ou pour ce qui concerne les transports collectifs relevant de l'activité de transport intérieur régie par la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, les autorités organisatrices,

L'amendement n° 60 est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le début de l'avant-dernier alinéa du I du texte proposé par cet article pour l'article 10-1 de la loi n°95-73 du 21 janvier 1995 :

- les autorités organisatrices de transports, relevant...

L'amendement n° 61 est ainsi libellé :

Compléter le I du texte proposé par cet article pour l'article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, par un alinéa ainsi rédigé:

« Les surcoûts identifiables et spécifiques éventuellement exposés par les exploitants et les gestionnaires mentionnés aux précédents alinéas pour la mise en oeuvre de systèmes de vidéosurveillance font l'objet d'une compensation financière.

La parole est à M. Jean-Claude Merceron, pour présenter ces trois amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Merceron

Ces amendements visent à modifier et à clarifier les compétences entre les différents organismes concourant à l'organisation et au fonctionnement des transports collectifs.

Ainsi, il convient de cerner au mieux les responsabilités de chacun des acteurs de la sécurité dans les transports. C'est pourquoi il est proposé que les autorités organisatrices des services de transports de personnes soient les destinataires de la prescription du préfet, ou du préfet de police de Paris, de mettre en oeuvre des systèmes de vidéosurveillance.

Par ailleurs, l'obligation de mettre en place des systèmes de vidéosurveillance dans les réseaux de transports collectifs pose la question de leur financement. Le projet de loi étant silencieux sur cet aspect, il est proposé, à l'instar de ce qui est prévu à l'article 5 pour les opérateurs de télécommunication, que le surcoût supporté par les exploitants et les gestionnaires pour la mise en oeuvre de tels systèmes fasse l'objet d'une compensation financière.

L'État est le garant de la sécurité intérieure et, notamment, de la protection des citoyens face à la menace terroriste. Il doit donc assumer pleinement toute sa responsabilité, en prenant notamment en charge financièrement les conséquences des ordres qu'il donne par l'intermédiaire de ses représentants.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 9, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer la dernière phrase du premier alinéa du II du texte proposé par cet article pour insérer un article 10-1 dans la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Il s'agit de supprimer une mention redondante avec les dispositions de l'alinéa suivant. En effet, la possibilité pour la commission départementale d'exercer son contrôle à tout moment est déjà satisfaite.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 53 rectifié quater, présenté par MM. Portelli, Türk et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier, Cambon, Goujon et Lecerf, est ainsi libellé :

I. Rédiger comme suit le second alinéa du II du texte proposé par cet article pour insérer un article 10-1 dans la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 :

« Les systèmes de vidéosurveillance installés en application du présent article sont soumis aux dispositions des quatrième et cinquième alinéas du II, des deuxième, troisième, quatrième et sixième alinéas du III, du IV, du V, du VI et du VII de l'article 10.

II. En conséquence, supprimer le VI du même texte.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

La rédaction actuelle de l'article 2 soumet les systèmes de vidéosurveillance à certaines garanties, mais celles-ci nous paraissent insuffisantes.

Compte tenu de l'extension considérable des dispositifs de surveillance des lieux publics induite par les dispositions de cet article, il nous semble en effet essentiel d'apporter aux citoyens des garanties en termes de transparence, qu'il s'agisse du droit d'accès aux enregistrements ou du rappel de la faculté de saisir la commission départementale ou la juridiction concernée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 10, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Au début de la deuxième phrase du premier alinéa du III du texte proposé par cet article pour insérer un article 10-1 dans la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, ajouter les mots :

Quand cette décision porte sur une installation de vidéosurveillance filmant la voie publique ou des lieux ou établissements ouverts au public,

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Il s'agit d'un amendement de précision. Il convient que la commission départementale ne soit compétente que dans les cas où la vidéosurveillance filme la voie publique ou des lieux ouverts au public.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 87, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Au début de la première phrase du VI du texte proposé par cet article pour l'article 10-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, après les mots :

Un décret en Conseil d'État

insérer les mots :

, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés,

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Cet amendement ne devrait pas, à mon sens, poser de problèmes. Nous proposons en effet que le décret en Conseil d'État qui est prévu soit pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Qui verra, ici, un obstacle à ce que l'avis de cette commission soit sollicité avant de publier un tel décret ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La commission est évidemment défavorable à l'amendement n° 66 de suppression de l'article, car nous devons nous prémunir contre les risques pesant, notamment, sur les centrales nucléaires.

L'amendement n° 52 rectifié ter vise à supprimer la possibilité offerte au préfet de prescrire l'installation d'un système de vidéosurveillance aux exploitants de lieux et établissements ouverts au public. Cette faculté, qui a été introduite à l'Assemblée nationale à la suite de l'adoption d'un amendement du groupe socialiste, a eu pour conséquence d'élargir considérablement le champ d'application de l'article 2, alors que la rédaction initiale du texte restreignait le recours à cette procédure de prescription aux seuls sites d'intérêt public sur lesquels pèse une menace terroriste particulière.

La commission émet naturellement un avis favorable sur l'amendement n° 52 rectifié ter, qui tend donc à revenir à cette rédaction initiale. Autrement, nous risquerions de rompre l'équilibre obtenu dans la loi de 1995 en matière de vidéosurveillance.

Les amendements n° 59, 60 et 61 du groupe de l'Union centriste-UDF tendent à modifier la définition des personnes chargées des transports collectifs qui pourraient se voir prescrire par le préfet l'installation de systèmes de vidéosurveillance.

Le projet de loi fait peser cette obligation sur les exploitants et sur les gestionnaires des transports collectifs. Les amendements n° 59 et 60 tendent à la faire reposer sur les autorités organisatrices des transports. Or il me semble que ces autorités, telles que les régions ou les communes, ne sont pas les plus aptes à réagir à la décision du préfet, si elles n'exploitent pas directement les transports collectifs. La rédaction proposée nous semble donc moins claire.

En outre, le fait de prévoir, par l'amendement n° 61, la prise en charge par l'État des surcoûts constatés présente deux risques d'écueil.

D'une part, si une compensation financière de l'État est décidée, les exploitants de transports collectifs ou d'installations vitales risquent de faire délibérément porter le coût de ces systèmes sur l'État et de refuser d'installer des systèmes de vidéosurveillance dans l'attente que le préfet les prescrive. Il importe donc que la disposition prévue, qui doit permettre d'éviter quelques cas de carence manifeste, ne soit pas détournée.

D'autre part, la charge de ces investissements doit incomber aux exploitants des systèmes de vidéosurveillance, qui sont tenus d'assurer la sécurité des personnes qu'ils reçoivent et, plus généralement, celle de leurs clients. La législation et la réglementation prévoient déjà de trop nombreuses prescriptions de sécurité qui ne font l'objet d'aucune compensation. C'est ainsi le cas en matière de sécurité incendie et d'obligation de surveillance dans de nombreux domaines tels que certains garages ou parcs de stationnement. L'adoption de cette mesure entraînerait donc un transfert de charges.

Compte tenu de ces explications et de la position du Gouvernement sur ce sujet, la commission vous demande donc, monsieur Merceron, de bien vouloir retirer ces trois amendements. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

L'amendement n° 53 rectifié quater tend à aligner le plus possible le régime applicable aux systèmes de vidéosurveillance installés en vertu du présent article sur celui de droit commun. En effet, la nouvelle procédure instaurée ne diffère de la procédure normale que pour ce qui concerne la personne qui demande l'installation de systèmes de vidéosurveillance.

L'amendement n° 53 rectifié quater précise, par renvoi à l'article 10 de la loi du 21 janvier 1995, que la durée de conservation des enregistrements ne peut être supérieure à un mois. Par ailleurs, toute personne intéressée a un droit d'accès aux images dans les conditions prévues par l'article 10 précité.

En outre, cet amendement a été rectifié, à la demande de la commission, afin d'aligner encore plus complètement les deux procédures susvisées. Par conséquent, la commission émet un avis favorable.

L'amendement n° 87 prévoit que le décret en Conseil d'État précisant les modalités d'application de l'article 2 est pris après avis de la CNIL. Or cette dernière n'est pas compétente en matière de vidéosurveillance. La loi de 1995 a d'ailleurs tranché en ce sens. Bien entendu, si la vidéosurveillance donnait lieu à la constitution de fichiers, cette action relèverait de la CNIL. Mais c'est un autre sujet puisque, en l'occurrence, tel n'est pas le cas. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

L'amendement n° 66 tend à supprimer l'article 2 du projet de loi, ce qui reviendrait à priver les autorités publiques d'un moyen d'action essentiel dans la lutte contre le terrorisme qui menace notre pays. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

Monsieur Lecerf, par l'amendement n° 52 rectifié ter, vous proposez de supprimer la possibilité pour les préfets d'imposer l'installation de systèmes de vidéosurveillance dans les lieux et établissements ouverts au public. Je partage votre préoccupation de reconnaître le droit aux préfets d'imposer un système de vidéosurveillance uniquement dans les lieux où la nécessité de se prémunir contre des actes de terrorisme est la plus accrue.

En la matière, une contradiction apparaît de façon flagrante entre les membres du groupe socialiste de l'Assemblée nationale et ceux du Sénat. Alors que M. Dray, à l'Assemblée nationale, a fait adopter un amendement maximaliste, considérant qu'il fallait développer le plus possible les lieux d'implantation de caméras de télésurveillance, à la Haute Assemblée, les membres du groupe socialiste estiment au contraire que cette mesure est totalement inutile...

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

... et qu'il ne faudrait surtout pas permettre à l'autorité administrative de multiplier le nombre d'implantations.

Bien évidemment, monsieur Lecerf, je partage totalement votre point de vue tendant à corriger la vision maximaliste des membres du groupe socialiste de l'Assemblée nationale. Il nous appartient de réglementer les lieux d'implantation. Contrairement aux établissements d'importance vitale ou aux infrastructures de moyens de transports, les lieux ouverts au public peuvent difficilement être considérés comme une catégorie homogène de sites exposés à une menace terroriste. Le Gouvernement est donc totalement favorable à cet amendement, qui revient à la rédaction initiale du projet de loi.

En ce qui concerne les amendements n° 59, 60 et 61, je rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que l'article 2 du projet de loi aborde la question des transports collectifs et de leur équipement en matériel de vidéosurveillance. Si les exploitants n'ont pas souhaité demander l'autorisation d'équiper les lieux concernés de systèmes de vidéosurveillance, selon le régime normal de l'article 1er, alors que le préfet estime un tel équipement nécessaire pour lutter contre le terrorisme, aux termes de l'article 2, ce dernier peut imposer à ces exploitants l'installation de caméras.

En l'occurrence est bien visé le gestionnaire. C'est sur lui - RATP ou entreprise équivalente - que pèsera la charge. Les autorités organisatrices ne sont pas directement mises en cause.

De même qu'un établissement recevant du public doit respecter des normes de sécurité, que tout élu local connaît bien, de même qu'une usine classée « Seveso » doit elle aussi respecter des normes, il est tout à fait envisageable qu'un exploitant de transports collectifs soit contraint d'équiper en caméras un hall de gare, un couloir de métro ou une rame de tramway, si la lutte antiterrorisme l'exige. C'est souhaitable tant pour les usagers que pour l'intérêt général.

Aucun principe ne s'oppose à ce que, sans compensation financière, une telle mesure soit imposée aux opérateurs. C'est d'ailleurs ce raisonnement qui a dicté l'avis rendu par le Conseil d'État sur ce point.

Fort de cette explication et de l'avis émis par la commission des lois, je vous demande, monsieur Merceron, de bien vouloir accepter de retirer les amendements n° 59, 60 et 61.

Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 9 de la commission, ainsi que sur l'amendement n° 53 rectifié quater, car la proposition formulée est tout à fait justifiée, et sur l'amendement n° 10, texte de cohérence.

Pour ce qui concerne l'amendement n° 87, comme je l'ai indiqué, la CNIL n'a pas à intervenir systématiquement en matière de vidéosurveillance. En l'espèce, aucune constitution de fichier informatique n'est prévue, c'est-à-dire un traitement automatisé de données, au sens de la loi du 6 janvier 1978. Je veux rappeler en cet instant que, depuis 2004, la CNIL est destinataire d'un rapport du Gouvernement relatif à l'ensemble de la vidéosurveillance en France. C'est dans ce cadre qu'elle aura à connaître des développements de la vidéosurveillance. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 87.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote sur l'amendement n° 52 rectifié ter.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Monsieur le ministre, je veux réagir contre vos méthodes, notamment contre vos propos à l'égard de Mme Boumediene-Thiery. Et maintenant, voilà que vous vous faites l'exégète de la pensée des élus socialistes tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat en cherchant à opposer les deux groupes, ce que vous n'arriverez pas à faire, je tiens à vous le dire tout de suite, monsieur le ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Gautier

Vous employez toujours la même méthode. Vous nous prêtez des propos qui ne sont pas les nôtres.

Vous avez dit tout à l'heure que nous nous opposions à l'extension du champ des caméras où que ce soit. M. Mermaz n'a pas du tout défendu cette position. Si nous acceptons tout à fait l'utilisation de caméras, nous demandons toutefois que l'extension du champ des caméras et la définition des sites de leur implantation, qu'ils soient publics ou privés, soient encadrées par la réglementation et l'action judiciaire.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ce n'est pas moi qui ai dit, c'est M. Peyronnet tout à l'heure : « Eux, c'est eux, nous, c'est nous ». C'est donc vous-même qui reconnaissez de fait l'opposition qui existe entre vos deux groupes parlementaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur Gautier, la police administrative, soumise aux juridictions administratives et au Conseil d'État, a toujours su défendre les libertés publiques.

Vous soutenez qu'il faut tout ramener au judiciaire, mais cela ne se justifie pas dans le cas présent. Sont visées des autorisations administratives. Si l'administration commet des abus, les juridictions administratives et le Conseil d'État seront amenés à se prononcer.

Vous affirmez depuis le début de ce débat qu'il y aura des abus. Mais si un projet de loi nous est soumis aujourd'hui, c'est justement pour encadrer les systèmes de vidéosurveillance. Bien entendu, s'il y a des abus...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

... il y a effectivement des recours, notamment le recours pour excès de pouvoir. Je ne comprends pas votre point de vue, mon cher collègue.

En la matière, la police administrative, de qui relève la prévention, est en cause. De ce fait, la juridiction administrative est compétente. Sur ce point, le projet de loi est parfait. Je ne comprends pas ce débat, qui me paraît artificiel. Il faut parfois rappeler des choses simples, qui constituent la structure de notre droit français.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Les amendements n°s 59, 60 et 61 sont retirés.

Je mets aux voix l'amendement n° 9.

L'amendement est adopté.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En conséquence, l'amendement n° 87 n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'amendement n° 10.

L'amendement est adopté.

L'article 2 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

CHAPITRE II

Contrôle des déplacements et communicationdes données techniques relatives aux échanges téléphoniques et électroniques des personnes susceptibles de participer à une action terroriste

I. - Après la première phrase du huitième alinéa de l'article 78-2 du code de procédure pénale sont insérées trois phrases ainsi rédigées :

« Lorsque ce contrôle a lieu à bord d'un train effectuant une liaison internationale, il peut être opéré sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière. Toutefois, sur celles des lignes ferroviaires effectuant une liaison internationale et présentant des caractéristiques particulières de desserte, le contrôle peut également être opéré entre cet arrêt et un arrêt situé dans la limite des cinquante kilomètres suivants. Ces lignes et ces arrêts sont désignés par arrêté ministériel. »

II. - Dans la deuxième phrase du huitième alinéa du même article, les mots : « mentionnée ci-dessus » sont remplacés par les mots : « mentionnée à la première phrase du présent alinéa ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Une fois de plus, les dispositions de cet article révèlent la volonté de ce gouvernement d'amalgamer criminalité, grande criminalité, terrorisme et immigration clandestine. Faire croire que derrière chaque immigré se cache un terroriste potentiel ne fait qu'augmenter les peurs. Cette méthode sert à légitimer la politique répressive actuellement conduite.

Ce qui compte, ce n'est pas tant de renforcer la lutte contre le terrorisme que de faciliter, de multiplier les contrôles d'identité à l'encontre de tous les citoyens. Parmi eux, pense ce gouvernement, certes, il y a peu de chance que se trouve un terroriste, mais il y a de fortes chances qu'il y ait un immigré clandestin, alors même que la pratique démontre quotidiennement la très faible effectivité des garanties que constituent les critères d'ouverture de cette procédure définie au premier alinéa de l'article 78-2 du code de procédure pénale.

Justifier une telle mesure par la lutte contre le terrorisme procède d'une pure hypocrisie. Évidemment, les contrôles d'identité n'ont jamais eu aucun rôle notable en ce domaine. Chaque jour, dans le métro, dans les gares de banlieue se multiplient les contrôles, qui contribuent plus à l'humiliation quotidienne des jeunes qu'à la véritable lutte contre le terrorisme. Il serait d'ailleurs intéressant de savoir combien de terroristes sont arrêtés chaque matin à l'issue de ces contrôles !

Une telle mesure est tout à fait inacceptable car elle relève, en fait, de la mise sous surveillance permanente des citoyens. C'est la raison pour laquelle nous nous inscrivons en faux contre cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 67 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

L'amendement n° 88 rectifié est présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon, pour présenter l'amendement n° 67.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 3 du projet de loi étend le champ d'application des contrôles d'identité opérés à bord des trains transnationaux. Nous nous situons dans le cadre général des contrôles d'identité et non dans celui de la lutte contre le terrorisme, c'est évident Les policiers pourront donc vérifier à bord des trains susvisés l'identité de toute personne à l'égard de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a tenté de commettre ou commis une infraction sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt situé au-delà des vingt kilomètres de la frontière.

Pour les lignes ferroviaires « présentant des caractéristiques particulières de dessertes », ces contrôles pourront également être opérés « dans la limite des cinquante kilomètres suivants », c'est-à-dire au cours des cinquante kilomètres suivant « le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière. »

Cette nouvelle contrainte pèsera donc en permanence sur tous les concitoyens, que la lutte contre le terrorisme soit ou non le prétexte à ces contrôles. Nous sommes bien confrontés à un article d'application générale qui permet tout simplement de faciliter et de multiplier les contrôles d'identité.

De plus, le Gouvernement veut nous faire croire que cette disposition sera temporaire, puisque l'article 15 du projet de loi la rend applicable jusqu'au 31 décembre 2008.

Malheureusement, nous doutons de la sincérité de cet engagement. Selon une fâcheuse habitude, les dispositions temporaires sont, en effet, pérennisées avant même l'expiration de leur terme. Tel fut le cas des dispositions à caractère prétendument exceptionnel de la loi relative à la sécurité quotidienne, qui ne devaient être applicables que jusqu'au 31 décembre 2003 mais dont M. Sarkozy, à peine arrivé au Gouvernement, proposa la prolongation jusqu'au 31 décembre 2005 dans la loi pour la sécurité intérieure, et qui furent finalement pérennisées par la loi Perben II du 9 mars 2004.

Nous refusons l'adoption de toute législation d'exception.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour présenter l'amendement n° 88 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Nous proposons la suppression de l'article 3. Je ne reviens pas sur l'objet de ce dernier, qui a été décrit largement.

Pour nous, comme pour beaucoup de magistrats, justifier une telle mesure par la lutte contre le terrorisme procède d'une pure hypocrisie : il s'agit plus, en effet, d'un essai de renforcement des mesures contre l'immigration irrégulière que de la lutte contre le terrorisme.

Certes, nous ne sommes pas favorables à l'immigration irrégulière. Nous participons, d'ailleurs, à une commission d'enquête parlementaire sur l'immigration clandestine. Je rappelle qu'un texte sera déposé prochainement sur ce sujet, qui n'est pas celui dont nous débattons aujourd'hui. Je tiens simplement à préciser que nous sommes hostiles à l'amalgame constant qui est fait dans le présent texte, notamment, sur cette question.

La modification envisagée par le biais de l'article 3 apparaît en l'état comme un moyen de contourner les autres procédures plus encadrées de contrôle d'identité.

Cette mesure n'est pas une disposition autonome visant précisément à la lutte contre les membres de cellules terroristes. Au contraire, elle s'insère dans un texte existant, l'article 78-2 du code de procédure pénale, dont l'objet est la lutte contre les réseaux d'immigration irrégulière et de criminalité organisée. Parmi ces immigrants peuvent, bien entendu, se trouver des terroristes, mais ce n'est que par ricochet, d'une certaine façon, que l'on peut en rencontrer.

Je rappelle également que la dernière modification de l'article 78-2 du code de procédure pénale date de la loi du 26 novembre 2003, relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.

Elle prévoit que, lorsqu'il existe une section autoroutière démarrant dans la zone des vingt kilomètres, les contrôles d'identité peuvent avoir lieu jusqu'au premier péage autoroutier, même si celui-ci se situe au-delà des vingt kilomètres, sur la voie ou les aires de stationnement, ainsi que sur le lieu de ce premier péage et les aires de stationnement attenantes. Son objet est bien la lutte contre l'entrée et le séjour irréguliers en France dans des sections du territoire national ouvertes au trafic international et ayant les caractéristiques des zones frontalières.

On perçoit bien qu'une telle disposition n'est destinée qu'à faciliter les contrôles pour lutter, d'abord et avant tout, contre l'immigration irrégulière.

Monsieur le rapporteur, je note que vous êtes très prudent sur le respect de cet équilibre entre sécurité publique et respect des libertés individuelles, dont vous assurez, à la page 53 de votre rapport, qu'il est respecté en employant le conditionnel : « Eu égard aux spécificités du transport ferroviaire, ces dispositions semblent respecter l'équilibre entre les nécessités de l'ordre public et la sauvegarde de la liberté individuelle. Elles ne méconnaîtraient pas la compétence du législateur, conformément aux exigences du juge constitutionnel. »

Je souligne surtout que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 5 août 1993, s'est exprimé sur une mesure d'extension analogue. Il a déclaré qu'une telle disposition devait être accompagnée de justifications appropriées tirées d'impératifs constants et particuliers de la sécurité publique.

Il ne me semble pas que ces dispositions, ces prescriptions, ces préconisations soient parfaitement respectées dans le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

La commission n'est pas favorable à la suppression de cet article.

Sur le plan pratique, quelle est la situation actuelle ? Les contrôles, dans les trains internationaux, peuvent être opérés dans la bande des vingt kilomètres. Sauf à admettre que des passagers sautent en cours de route, ce qui permettrait de régler une partie du problème, compte tenu de la vitesse des trains, on peut considérer que ce sont les mêmes personnes qui sont contrôlées dans la bande des vingt kilomètres jusqu'à la prochaine gare. Il paraît donc parfaitement logique de préciser que ces contrôles peuvent avoir lieu à partir d'une certaine gare jusqu'à une autre gare, y compris dans les gares elles-mêmes, ce qui préserve le confort des passagers.

Une formule analogue a été retenue pour les autoroutes : il semble en effet également parfaitement logique de prévoir des dispositions fondées sur le même principe pour ces deux types de transport.

Pour ces deux raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements visant à la suppression de cet article.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ces deux amendements tendent à supprimer l'article 3. Je regrette qu'une fois de plus l'amalgame soit fait entre immigration et terrorisme.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Il est bizarre, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous sembliez découvrir que les terroristes se déplacent. Voyez-vous, les terroristes se déplacent. C'est ainsi !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je vous laisse l'entière responsabilité de vos propos !

En tout cas, je le précise, à l'intention de ceux qui, ici, semblent l'ignorer : les terroristes se déplacent. C'est un constat.

Je rappelle que les contrôles d'identité dont il s'agit ici, monsieur Badinter, ont été instaurés en 1993, en compensation de la suppression des contrôles aux frontières dans l'espace Schengen.

Le Conseil constitutionnel lui-même - vous le connaissez peut-être ? - a reconnu la légitimité de cette décision le 5 août 1993. Il me semble me souvenir que vous y étiez...

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Cette décision a déclenché chez M. Pasqua une fureur à nulle autre pareille !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

...et que vous avez proposé, dans votre sagesse, que toute extension à cette disposition ne puisse s'appuyer que sur une justification réelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Badinter

Je ne proposais rien. Je présidais le Conseil constitutionnel, qui est un organisme collégial : une décision rendue n'est pas l'oeuvre d'un seul homme.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Permettez-moi de vous dire que le terrorisme est une justification tout à fait légitime, selon la décision du Conseil constitutionnel du 5 août 1993 susmentionnée. D'ailleurs, ce texte avait totalement convaincu le Conseil d'État, qui l'avait validé dans son entier.

Le droit actuel permet de réaliser ces contrôles, d'une part, dans la bande frontière de vingt kilomètres, d'autre part, dans les gares dans lesquelles s'arrêtent les trains internationaux.

Le présent article 3 ne vise qu'à adapter les modalités d'exercice de ces contrôles à la réalité de la circulation ferroviaire.

Faut-il tirer la sonnette d'alarme une fois atteinte la limite des vingt kilomètres pour que le train s'arrête et pour pouvoir procéder à ces contrôles ? Il n'est pas toujours possible de les réaliser dans la bande des vingt kilomètres, surtout si le train est rapide. Du fait de l'extension des lignes à grande vitesse, les vingt kilomètres sont parcourus de plus en plus vite.

Même en gare, il est difficile de pratiquer ces contrôles : ils gênent les usagers, les retardent, et mobilisent des dizaines de fonctionnaires qui pourraient être employés à d'autres missions de lutte antiterroriste.

Il est plus simple de réaliser des contrôles à bord des trains internationaux. L'équilibre juridique est maintenu en raison des limites très strictes fixées par le projet de loi : les contrôles ne peuvent intervenir que jusqu'à la première gare commerciale située après la bande de vingt kilomètres et, pour les lignes à risque, dans une limite de cinquante kilomètres après celle-ci.

À titre d'exemple, je rappellerai simplement que l'un des terroristes de Londres a traversé notre pays en train pour fuir l'Angleterre et se rendre en Italie.

Le Gouvernement est bien évidemment défavorable à ces deux amendements.

Les amendements ne sont pas adoptés.

L'article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 62 rectifié bis, présenté par MM. Goujon, Lecerf et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I - Après l'article 25 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. ... - Les personnels de la police nationale revêtus de leurs uniformes ou des insignes extérieurs et apparents de leur qualité, sont autorisés à faire usage de matériels appropriés pour immobiliser les moyens de transport dans les cas suivants :

« - lorsque les conducteurs ne s'arrêtent pas à leurs sommations ;

« - lorsque le comportement du conducteur ou de ses passagers est de nature à mettre délibérément en danger la vie d'autrui ou d'eux-mêmes ;

« - en cas de crime ou délit flagrant, lorsque l'immobilisation du véhicule apparaît nécessaire en raison du comportement du conducteur ou des conditions de fuite.

« Ces matériels doivent être conformes à des normes techniques définies par arrêté ministériel. »

II - L'ordonnance n° 58-1309 du 23 décembre 1958 est abrogée.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

C'est bien volontiers que je prends le relais de mon collègue Philippe Goujon, à qui je reconnais la paternité pleine et entière de cet amendement, que j'approuve pleinement.

L'article 2 de l'ordonnance du 23 décembre 1958 relative à l'usage des armes et à l'établissement de barrages de circulation par le personnel de la police dispose que les membres du personnel de la police en uniforme sont autorisés à faire usage de tous engins et moyens appropriés tels que herses, hérissons, câbles, pour immobiliser les moyens de transports quand les conducteurs ne s'arrêtent pas à leurs sommations.

Les herses et les hérissons, dont l'évocation nous rappelle les films en noir et blanc, sont des moyens lourds qui sont de moins en moins utilisés, car ils nécessitent une mise en place préalable. Ils sont remplacés par des matériels plus aisés d'utilisation et moins dangereux pour les personnels qui les utilisent comme pour les conducteurs des véhicules immobilisés et leurs passagers.

Le matériel de nouvelle génération peut être utilisé de manière beaucoup plus souple et, au besoin, projeté par les agents de la force publique au-devant d'un véhicule en marche, sans provoquer, au détriment du conducteur ou du véhicule, de dommages liés à son utilisation.

Lors d'opérations de police impliquant des contrôles de véhicules, les comportements dangereux et agressifs vis-à-vis des fonctionnaires chargés de ces opérations sont de plus en plus fréquents.

À titre d'exemple, je rappelle que les membres d'ETA se sont signalés à plusieurs reprises par un comportement extrêmement dangereux à l'occasion de contrôles routiers. Il n'est plus rare de constater que les conducteurs n'hésitent pas à foncer sur les forces de sécurité intérieure lors de la mise en place de dispositifs d'interpellations.

Le texte qui est proposé a pour objet d'ouvrir le champ d'application de l'utilisation de matériels appropriés pour immobiliser les véhicules afin de couvrir deux cas de figure supplémentaires : la prévention de la mise en danger délibérée d'autrui et l'interpellation d'auteurs de crimes ou délits flagrants.

Cette disposition doit être insérée dans la loi du 21 janvier 1995 pour permettre de rassembler les textes relatifs aux dispositifs de sécurité intérieure dans un texte unique.

Il est également prévu dans cet amendement que les matériels utilisés devront être soumis à un agrément préalable, ce qui apporte des garanties sur les types de matériels utilisés, testés en fonction de leur innocuité.

Enfin, cet amendement est aussi porteur de simplification, puisqu'il a pour objet d'abroger l'ordonnance de 1958, dont il ne restait plus qu'une disposition en vigueur, désormais intégrée dans la loi du 21 janvier 1995 susvisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Cet amendement vise à actualiser les règles selon lesquelles les forces de police peuvent immobiliser des véhicules.

Ces règles relèvent aujourd'hui - je vous le rappelle, mes chers collègues - de l'ordonnance du 23 décembre 1958, aux termes de laquelle les véhicules peuvent être immobilisés lorsque les conducteurs ne s'arrêtent pas aux sommations.

Par cet amendement sont ajoutées deux circonstances dans lesquelles il pourrait être fait usage de moyens techniques d'immobilisation des véhicules, « lorsque le comportement du conducteur ou de ses passagers est de nature à mettre délibérément en danger la vie d'autrui » et « en cas de crime ou délit flagrant ».

Cette modification tient compte de l'évolution de la criminalité : bien souvent, les agents de la police nationale n'ont pas le temps de faire les sommations. Cette précision me paraît donc particulièrement importante.

Il est apporté, en outre, dans cet amendement, la précision suivante : « Ces matériels doivent être conformes à des normes techniques définies par arrêté ministériel. »

En effet, les méthodes d'immobilisation ont beaucoup évolué et ne se limitent plus aux herses et aux barrières, qui s'avèrent dangereuses pour les policiers eux-mêmes et pour les conducteurs.

Il est en outre prévu que les policiers revêtus d'insignes extérieurs et apparents pourront faire l'usage de ce procédé, alors que, aux termes de l'ordonnance de 1958, seuls les policiers en uniforme ont ce pouvoir.

La commission des lois est donc très favorable à cet amendement, présenté par MM. Goujon et Lecerf.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Cet amendement est le bienvenu. Je remercie M. Lecerf de l'avoir présenté et M. Goujon de l'avoir proposé.

Tout comme M. le rapporteur, nous estimons que cet amendement tend à moderniser des dispositions anciennes, en intégrant le délit de mise en danger et en rendant possible l'utilisation de ces moyens nouveaux dans le cas des crimes et délits flagrants.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

On va voir comment ça marche ! Il faudra expérimenter !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

On m'a reproché tout à l'heure d'avoir rédigé à la sauvette, sans savoir où j'allais, deux amendements tendant à insérer, avant l'article 1er, des articles additionnels.

Or, s'agissant de cet amendement, on nous a simplement dit, en commission, qu'il existait des « bidules » que l'on pouvait lancer sous les roues des voitures afin de les immobiliser tranquillement. Nous aurions aimé en savoir un peu plus !

En effet, ce dont nous discutons n'est tout de même pas anodin : il s'agit de l'utilisation d'engins nouveaux et, du moins l'espérons-nous, efficaces, dont on nous dit qu'ils sont adaptés à la lutte contre le terrorisme. Or, en l'occurrence, celle-ci ne semble concernée qu'à la marge, et même plus qu'à la marge !

Il se peut que, par accident ou par erreur, un terroriste soit arrêté à cette occasion. Mais, dans la plupart des cas, les automobiles qui ne s'arrêtent pas ne sont pas conduites par des terroristes !

Il s'agit donc manifestement d'un texte de commande - nous avons été au pouvoir et nous savons comment les choses se passent ! - qui rend possible l'utilisation d'armes nouvelles, dont on nous dit qu'elles ne sont pas dangereuses.

Certes, nous voulons bien vous croire sur parole, mais nous sommes tout de même un peu inquiets !

J'ajoute que cet amendement accentue le caractère « fourre-tout » d'un texte qui n'en avait vraiment pas besoin.

Nous voterons donc contre cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il est vrai qu'il s'agit d'une disposition générale, mais elle n'est pas la seule dans ce projet de loi. Il en est une autre qui concerne le statut des policiers. Mais que celui qui n'a jamais péché jette la première pierre !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Monsieur le ministre, la commission des lois souhaite simplement connaître, car cela l'intéresse, le fonctionnement des nouveaux dispositifs.

Je vous proposerai donc, mes chers collègues, lorsque le ministère de l'intérieur sera prêt, et comme cela a été fait, à ma demande, à l'occasion de l'examen d'autres textes, de constater de visu le fonctionnement de ces dispositifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Mermaz

M. Louis Mermaz. On va au Bazar de l'Hôtel de Ville avant de faire un achat !

Rires sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui, quand on achète sur catalogue !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Nous savons que les herses sont des dispositifs très dangereux et mal utilisés. J'ai d'ailleurs pu constater moi-même que certains grands criminels disposaient de véhicules équipés de pneus increvables et que les herses ne suffisaient donc pas à les arrêter.

Il s'agit, en outre, d'adapter les dispositifs existants afin de les rendre moins dangereux pour les forces de police et de gendarmerie, car il n'y a pas de raison qu'une arrestation mette en danger ces personnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

Il s'agit là, typiquement, d'une mesure d'ordre général dont personne, y compris dans la majorité, ne savait ce qu'elle recouvrait lorsqu'elle a été présentée à la commission des lois. C'est tout de même extraordinaire ! Je rappelle que nous sommes les législateurs !

Nous avons donc cru sur parole M. Goujon, qui connaît bien tout ce qui concerne la police, puisqu'il en est très proche.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Borvo Cohen-Seat

À ce titre, il a dû, sans doute, assister à une démonstration de cet appareillage.

Mais, mes chers collègues, lorsque l'on nous a demandé de nous prononcer sur le bracelet électronique, on nous en a montré un exemplaire en nous indiquant qu'il s'agissait d'une sorte de GPS, pas encore totalement homologué, mais qui le serait bientôt. En tout cas, on nous l'a montré !

Quant à la commission des lois, il lui arrive de procéder à des auditions et de mener ses propres enquêtes.

En l'occurrence, rien de tel ne s'est passé ! Nous savons simplement que M. Goujon connaît le dispositif qu'il nous est proposé de généraliser.

Vous savez, mes chers collègues, des arrestations musclées, il y en a peut-être peu dans la France profonde, mais à Paris, on en voit !

Alors, de grâce, avant que nous, législateurs, ne votions une mesure d'ordre général tendant à permettre l'arrestation de conducteurs d'automobiles et de deux-roues, avec les dangers que cela comporte, voyons d'abord si ce dispositif est au point et comment il fonctionne ! Nous aurons ensuite tout le temps de le mettre en oeuvre, sans doute à bon escient.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Philippe Goujon, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Bien sûr, Mme Borvo Cohen-Seat caricature un peu la situation.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Car c'est bien de cela qu'il s'agit et non d'une quelconque querelle idéologique.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

De quoi s'agit-il en effet ?

Tout d'abord, la police et la gendarmerie disposent actuellement, pour immobiliser les véhicules, de moyens totalement obsolètes. En effet, les herses, qui sont désormais très peu utilisées, sont dangereuses tant pour les occupants et les conducteurs des véhicules que pour les forces de police, qui doivent faire des sommations.

Or nous savons, depuis plusieurs années, qu'il existe de nouveaux matériels, mais qu'il est nécessaire de modifier l'ordonnance de 1958 pour les utiliser. Ces matériels d'un type nouveau - pointes de plastique, barres de plastique projetables, herses en plastique, etc - sont fabriqués avec des matières nouvelles, afin justement de rendre ces procédures d'immobilisation de véhicules beaucoup moins dangereuses. Il s'agit donc d'un progrès, du point de vue de la sécurité tant des gendarmes et des policiers que des occupants des véhicules, je le répète.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

C'est ce progrès qui nous motive.

De plus, ces dispositifs sont plus efficaces. Je ne vois donc vraiment pas où est le problème ! Par ailleurs, ces matériels ont été testés pendant un an par les services spécialisés.

Par ailleurs, il existe un rapport direct entre l'utilisation de ces nouveaux moyens et la lutte contre le terrorisme, qui fait l'objet de notre débat. En effet, nous le savons, ce sont principalement les terroristes d'ETA qui forcent habituellement, et de façon très dangereuse, les barrages de police.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Goujon

Même si les membres d'ETA ne sont pas les seuls concernés, le rapport direct avec le terrorisme est donc établi : nous sommes au coeur du débat !

Dans l'intérêt de tous, et notamment des personnes interpellées, les personnels de police et de gendarmerie doivent pouvoir bénéficier des mesures les plus appropriées, ainsi que des matériels les plus performants et les plus modernes, dans la mesure où ceux-ci sont moins dangereux.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Ce débat montre combien notre réticence, s'agissant de l'ensemble du dispositif qui nous est proposé, est justifiée.

J'ai remarqué que M. le président de la commission des lois prenait cela avec une certaine légèreté !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous avez dit, monsieur Hyest, que celui qui n'avait jamais péché pouvait jeter la première pierre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous tentiez ainsi de justifier, si j'ai bien compris votre raisonnement - car je m'efforce toujours de comprendre -, le fait d'agglutiner à ce texte toute une série de dispositions.

Nous sommes en désaccord total sur cette méthode, mes chers collègues !

Si vous jugez utile, monsieur le ministre, de prendre des mesures législatives concernant l'équipement ainsi que les différents matériels et dispositifs nécessaires à la police et à la gendarmerie dans l'exercice quotidien de leurs missions, faites un autre projet de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Mais, ici, il s'agit d'un autre sujet !

En effet, de deux choses l'une : ou bien on parle de terrorisme, situation exceptionnelle qui requiert - nous en sommes d'accord, nous l'avons dit et nous le répétons -, sous certaines conditions, des mesures exceptionnelles, ou bien on envisage l'ensemble des problèmes de la police à travers le prisme du terrorisme, ce que vous êtes en train de faire.

Nous sommes en total désaccord avec cette méthode, comme nous le serons encore tout à l'heure, lorsque la question de l'immigration sera examinée à travers le prisme du terrorisme, ce qui est une faute totale !

Si on décide de faire une loi relative à la lutte contre le terrorisme, alors il ne faut y inclure aucun cavalier. Sinon, on prête le flanc à la critique !

En effet, à travers le prisme du terrorisme, vous envisagez toutes sortes de problèmes et, à partir de là, vous bâtissez toute une conception que nous ne saurions partager.

Monsieur le président de la commission des lois, vous nous avez dit et répété ce matin que, si un problème se posait, la justice ne serait pas dépossédée de ses missions, car tout un chacun pourrait toujours saisir le tribunal administratif

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

... voire, encore après, le Conseil d'État ! Nous savons tout cela. Mais là n'est pas la question ! Ce qui est en cause, c'est ce qui vient avant, et non après, la décision de mise en oeuvre du dispositif ! Ce qui précède relève de l'autorité judiciaire et il importe de n'y toucher qu'avec des doigts tremblants.

En revanche, après la décision, nous sommes totalement d'accord avec vous, monsieur le président de la commission des lois, on peut saisir le tribunal administratif. Mais là n'est vraiment pas la question !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je vais essayer d'éclairer davantage la Haute Assemblée - quoique M. Goujon y ait déjà largement contribué -, puisque celle-ci semble se passionner pour la modernisation du matériel mis à disposition des forces de sécurité intérieure en matière de lutte contre le terrorisme. En effet, monsieur Sueur, c'est de cela qu'il s'agit, et de rien d'autre !

Je suis toujours étonné par votre propension à vous ranger du côté de ceux qui remettent en cause l'intégrité de notre territoire, de son droit, de ses règles ...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

C'est inadmissible ! Nous demandons une suspension de séance !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur le ministre, acceptez-vous cette demande de suspension de séance ?

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Nous verrons ce qui est le plus grave !

Je souhaite que M. Sueur attende, pour réagir, que j'aie achevé mon explication.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, je demande à réagir tout de suite !

Monsieur le ministre, j'ai le droit de vous interrompre si je le souhaite !

Protestations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Vous avez dit quelque chose de très grave, monsieur le ministre !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Vous m'interrompez au milieu de ma phrase !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Sans doute redoutez-vous, monsieur Sueur, la fin de ma phrase !

Je répète, monsieur Sueur, que je m'étonne de votre propension à vous ranger du côté des fauteurs de troubles plutôt que du côté des forces de l'ordre, qui assurent la sécurité des personnes et des biens !

Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je suis allé au terme de ma phrase. Maintenant, vous pouvez m'interrompre, monsieur Sueur !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Comme certains d'entre vous l'ont rappelé, nous savons qu'à de nombreuses reprises, des terroristes d'ETA ont foncé sur les forces de l'ordre, mettant la vie de ces personnels en danger.

Mon rôle est d'abord de défendre les hommes et les femmes qui ont pris l'engagement devant les Françaises et les Français de protéger nos concitoyens, et nous souhaitons mettre à leur disposition les moyens matériels nécessaires à leur propre protection, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Voilà, monsieur Sueur, de quoi il s'agit, et de rien d'autre !

Vous avez souhaité des explications sur le matériel dont il s'agit. Comme certains l'ont dit, les herses et les hérissons sont des moyens lourds, qui sont de moins en moins utilisés, car ils nécessitent une mise en place préalable. Les forces de l'ordre, qui ont besoin d'être le plus réactives possible chaque fois que nécessaire, n'ont pas le temps d'installer ces matériels.

C'est dans ce cadre que nous proposons la modification de l'ordonnance du 23 décembre 1958. Le matériel que l'on utilisait en 1958 n'est plus celui que nous mettons à la disposition de nos forces de l'ordre aujourd'hui.

D'ailleurs, en l'occurrence, il n'est fait que proposer à la police nationale d'adopter les moyens qui sont à disposition de la gendarmerie nationale aux termes du code de la défense.

De quels matériels s'agit-il ? Je vais vous donner quelques précisions puisque M. le président de la commission des lois lui-même a souhaité savoir comment fonctionnait ce matériel. Je tiens à la disposition de ceux qui le souhaitent, la documentation correspondante. Il s'agit d'éléments légers emballés dans des housses en plastique faciles à déplacer, qui peuvent être déployés en quelques secondes sur la voirie là où il fallait plusieurs heures pour installer les herses et hérissons.

Nous disposons aujourd'hui de dispositifs qui permettent aux forces de l'ordre d'être plus réactives pour interpeller des terroristes présumés tout en se protégeant elles-mêmes. Pourquoi nous priver de cette opportunité ?

Voilà de quoi il s'agit, monsieur Sueur, et je ne comprends pas pourquoi vous ne voudriez pas que, dans ce projet de loi de lutte contre le terrorisme, nous permettions à nos forces de l'ordre de disposer de ce matériel ; une telle attitude ne pourrait que favoriser indirectement l'action des terroristes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. le président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Hyest

Mes chers collègues, j'ai dit qu'il s'agissait d'une disposition d'ordre général qui s'appliquait aussi au terrorisme et M. le ministre a eu raison de rappeler à ce propos que, dans le cadre des attentats exécutés par l'ETA, des gendarmes ont été écrasés par des véhicules. Tout le monde est d'accord pour moderniser le dispositif.

Au demeurant, monsieur Sueur, vous avez raison de dire que nos méthodes de travail ne sont pas bonnes. Toutefois, vous savez bien que, lorsque nous souhaitons apporter une modification ponctuelle à la législation, compte tenu de la lourdeur de la discussion en séance publique, c'est très difficile. Dès lors, on profite de la discussion de grandes lois pour y « accrocher » de petites modifications qui s'imposent. Si nous changions complètement de méthode de travail, peut-être pourrions-nous à la fois nous livrer à une meilleure appréciation de la législation, à une évaluation régulière d'un certain nombre lois pour déterminer si elles sont toujours pertinentes et, ensuite, faire les modifications nécessaires qui toutefois ne justifieraient pas un grand débat comme nous savons en organiser et qui font perdre beaucoup de temps.

Par ailleurs, un jour ou l'autre nous serons obligés de repréciser ce qui est du domaine de la loi et ce qui est du domaine du règlement. La Constitution le fait, mais, malgré cela, nous nous « vautrons » dans le réglementaire. J'ai essayé à plusieurs reprises de lutter contre cette propension qui n'est pas tellement le fait de la commission des lois d'ailleurs. En tout cas, je pourrais évoquer un texte qui comportait 150 articles dans lequel j'ai eu du mal à en trouver trois relevant du domaine législatif.

Si nous voulons rationaliser notre travail de cette façon, nous pourrons le faire à l'occasion d'une réorganisation du travail du Sénat. Monsieur Sueur, je suis peut-être léger, mais pas trop quand même !

Sourires

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, la mise au point que je vais faire ne porte pas sur les propos de M. le président de la commission des lois car, si nous avons des désaccords parfois, nous nous exprimons toujours en termes mesurés. Ma mise au point porte sur les propos extrêmement graves qui ont été tenus par M. le ministre.

De quoi s'agit-il ?

Des mesures relatives au matériel utilisé par la police et la gendarmerie sont proposées dans un amendement. Ces mesures n'avaient pas été prévues dans le projet de loi initial, c'est le signe qu'elles n'étaient pas perçues par le Gouvernement comme nécessaires dans la lutte contre le terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Le devoir d'amendement existe également, mon cher collègue.

Nous avons dit, d'une part, que nous souhaitions avoir des précisions sur les matériels, ce qui n'est quand même pas une demande exorbitante.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Vous les avez eues !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous avons dit, d'autre part, qu'il était, à notre sens, de mauvaise méthode de traiter en même temps du terrorisme, qui relève de dispositions à caractère exceptionnel, et de mesures générales concernant l'action de la police et de la gendarmerie, qui devraient relever d'un texte de loi spécifique.

Telle est notre position. Chacun peut exprimer son avis. Sur cet amendement le nôtre est différent de celui du Gouvernement, c'est notre droit.

Mes chers collègues, j'estime qu'aucun d'entre nous, quel que soit le groupe auquel il appartienne, ne devrait accepter d'être traité comme je l'ai été par le Gouvernement.

Monsieur le ministre, vous m'avez dit, et le procès-verbal en fera foi : « Vous avez une propension à vous ranger du côté de ceux qui mettent en cause l'intégrité du territoire ». Puis, vous avez rectifié : « Vous avez une propension à vous ranger du côté des fauteurs de trouble. »

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Chacun peut défendre ses positions avec conviction, et je ne dirai jamais à l'un de mes collègues, parce qu'il n'est pas d'accord avec moi, qu'il est du côté de ceux qui portent atteinte à l'intégrité du territoire.

Si je vous comprends bien, monsieur le ministre, nous serions complices !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous défendrions ceux qui portent atteinte à l'intégrité du territoire, nous défendrions les fauteurs de trouble, parce que nous ne sommes pas d'accord avec un amendement.

Monsieur le ministre, c'est très grave.

Dans ces conditions, monsieur le président, j'ai l'honneur de vous demander, au nom du groupe socialiste, une suspension de séance de manière que le Gouvernement ait le temps de réfléchir aux excuses qu'il voudra bien nous présenter.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, je souhaite que la sérénité prévale au cours de nos débats. Chacun doit pouvoir s'exprimer comme il l'entend.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

M. le ministre a apporté un certain nombre de précisions, M. le président de la commission des lois également.

Monsieur Sueur, vous demandez une suspension de séance. Je suis libre d'en apprécier l'opportunité, mais je pense qu'elle couperait le débat.

Si vous insistez, je vais mettre aux voix cette demande de suspension.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le président, je veux bien renoncer à ma demande de suspension de séance, mais je pense que nous serons tous d'accord pour affirmer que, quelle que soit la position qu'il prend sur un amendement, un sénateur de la République ne peut pas se voir reprocher d'avoir une propension à se ranger du côté de ceux qui portent atteinte à l'intégrité du territoire ou du côté des fauteurs de trouble. Je demande donc à M. le ministre de bien vouloir revenir sur ses propos.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Monsieur Sueur, je vous donne acte de votre déclaration.

La parole est à M. le ministre délégué.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Sueur, je vous sens blessé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je ne suis pas blessé, ce n'est pas une question personnelle !

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Sueur, je veux vous dire avec le grand respect que je vous porte que je suis désolé si mes propos vous ont blessé.

M. Goujon a proposé un amendement visant à protéger nos forces de l'ordre qui ont perdu des vies humaines à de multiples reprises à cause de terroristes qui ont foncé sur elles, M. le président de la commission des lois l'a rappelé. Depuis 1958, les technologies ont évolué et nous disposons aujourd'hui de moyens leur permettant de pouvoir combattre le terrorisme tout en protégeant leur intégrité physique.

En tant que ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, vous comprendrez que je sois très attaché à la protection de ces hommes et de ces femmes qui sont au service de la sécurité des personnes et des biens dans notre pays.

Lorsque vous intervenez dans ce débat pour dire qu'il n'est pas utile de donner à nos forces de l'ordre les moyens nécessaires pour protéger leur vie, vous comprendrez que le ministre que je suis ait du mal à suivre les propos du sénateur que vous êtes. C'est dans cet esprit que je me suis exprimé, en me rangeant totalement aux côtés des hommes et des femmes qui attendent de la part du Gouvernement, mais aussi des élus de la nation, des moyens pour se défendre et pour se protéger.

Si je vous ai blessé, je veux bien l'admettre, monsieur Sueur, mais je voudrais que vous admettiez également que les mesures proposées par M. Goujon nous permettent de nous ranger ensemble du côté des forces de l'ordre.

Applaudissements sur les travées de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, je vous invite à respecter les positions des uns et des autres. Cela serait à l'honneur de notre Haute Assemblée ; il faut dépassionner ce débat, qui est extrêmement riche et intéressant, mais qui doit rester mesuré.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le ministre, il ne s'agit absolument pas de blessure personnelle : il s'agit d'une question de principe.

Le terrorisme est une horreur, nous l'avons tous dit. Les policiers et les gendarmes font un métier difficile et nous sommes, tous groupes politiques confondus, parfaitement solidaires de leur action. Mais il n'est pas possible que, dès lors que nous émettons une appréciation sur l'une ou l'autre des mesures de ce texte, l'on nous taxe d'être hostiles aux moyens qui doivent être donnés à la police pour qu'elle exerce son travail et d'être opposés à la lutte contre le terrorisme. À ce moment-là, aucune discussion ne serait plus possible.

Nous devrions tout accepter en bloc, y compris les dispositions qui figureront dans la vingt-troisième, la vingt-quatrième ou la vingt-cinquième loi contre le terrorisme, sinon nous serions considérés comme complices. C'est de l'intimidation !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous estimons que nous pouvons avoir des points de vue différents sur l'équilibre entre les mesures exceptionnelles qui sont nécessaires, je le répète, et la protection des libertés. Nous pouvons avoir également des points de vue différents sur les dispositions qui doivent être prises dans un texte sur le terrorisme. L'on pourrait y faire figurer une multitude de choses, mais nous réaffirmons que ce n'est pas de bonne méthode, car la situation exceptionnelle due au terrorisme doit être traitée comme telle.

Nous aimons tous notre pays, nous aimons tous ceux qui le servent, dans la police et dans la gendarmerie en particulier.

Nous sommes attachés à l'intégrité du territoire et nous n'avons nullement l'intention de soutenir les fauteurs de troubles. Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir bien voulu en prendre acte.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.

I. - Le I de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les personnes qui, au titre d'une activité professionnelle principale ou accessoire, offrent au public une connexion permettant une communication en ligne par l'intermédiaire d'un accès au réseau, y compris à titre gratuit, sont soumises au respect des dispositions applicables aux opérateurs de communications électroniques en vertu du présent article. »

II. - Dans la première phrase du II du même article, les mots : « il peut être différé » sont remplacés par les mots : « il doit être différé ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, hier matin, un quotidien, s'appuyant sur un rapport du Sénat relatif à la nouvelle génération de documents d'identité et à la fraude documentaire, révélait que 500 000 cartes d'identité et 100 000 passeports étaient volés chaque année. Cela pose à nouveau le problème de la sécurisation des documents d'identité, dont les passeports, et des possibilités de lutte contre leur falsification.

Nous savons tous que l'utilisation de documents d'identité falsifiés fait partie de la panoplie qu'utilisent les malfaiteurs et les terroristes pour accomplir leurs méfaits.

Or, le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers prétend remédier à ces dérives.

Le site de l'Imprimerie nationale de Douai - une autre unité est implantée à Choisy-le-Roi, dans le Val-de-Marne - doit pouvoir être doté de la capacité d'imprimer les passeports personnalisés. Dans le cas contraire, nous nous heurterions à de très grandes difficultés, non seulement pour la sécurité de l'État, parce qu'il faudrait transporter les passeports d'une imprimerie à l'autre, mais aussi pour la sécurité des citoyens. Il en résulterait également des difficultés financières pour le centre de Douai et des menaces sur l'emploi des personnels.

Monsieur le ministre, une telle évolution serait inconciliable avec le rôle qui est imparti à l'Imprimerie nationale. Si elle ne pouvait pas exécuter ce travail de sécurisation, à quoi servirait-elle ?

Des coups terribles ont déjà été portés à l'Imprimerie nationale. Elle ne conserve plus que trois divisions sur onze et 520 salariés sur 1 350. Il serait inconcevable que son développement soit bloqué du fait de la non-réalisation des travaux qui lui permettrait d'assurer la personnalisation des documents d'identité.

En 2004, Bercy a décidé de recentrer l'activité de l'Imprimerie nationale sur les activités régaliennes et l'État vient tout juste de procéder à la recapitalisation de l'entreprise. La compétence de l'Imprimerie nationale est donc reconnue et elle a les moyens de réaliser très vite des travaux.

J'ai attiré l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences de cette situation tant sur la sécurité de l'État et des citoyens que sur l'emploi. Une solution rapide doit être trouvée afin d'assurer à l'Imprimerie nationale la centralisation de la production des documents d'identité nationale électronique sécurisée, dit INES.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je me permets d'intervenir parce que j'ai présidé la mission sénatoriale sur la fraude documentaire et sur la nouvelle génération de documents d'identité et je souhaiterais corriger les chiffres qui ont été énoncés. Chaque année, 500 000 cartes d'identité sont perdues, et non pas volées, même si l'on peut penser qu'elles ne sont pas perdues pour tout le monde. En outre, 85 000 passeports ont été volés en cinq ans, auxquels il faut ajouter les 90 000 passeports vierges qui ont été dérobés sur la même période. Et il ne s'agit là que de la partie émergée de l'iceberg, car la fraude documentaire est considérable.

L'unité de l'Imprimerie nationale de Douai connaît en effet des difficultés. Certaines sont liées à la mise en concurrence et à l'application de la réglementation européenne. Il serait en effet souhaitable que l'Imprimerie nationale soit chargée de la réalisation des cartes d'identité et de leur personnalisation dans le cadre du programme INES. Je sais que le ministère y travaille, dans le respect du cadre légal et de la réglementation européenne.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Je souhaite apporter quelques éléments de réponse à Mme Hélène Luc et à M. Jean-René Lecerf, qui sont très préoccupés par l'avenir de l'Imprimerie nationale et du site de Douai.

Les questions que vous évoquez, madame, monsieur le sénateur, n'ont pas de lien direct avec notre débat. Le projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme ne modifie en rien la situation de l'Imprimerie nationale. Je tiens néanmoins à vous apporter quelques éléments d'information sur cette question dont je perçois bien l'importance.

Nous devons mettre à la disposition des Français un nouveau passeport incluant un composant électronique. Il s'agit de répondre à une exigence de sécurité, car les nouveaux passeports seront beaucoup plus difficiles à falsifier. Il s'agit aussi de répondre à une exigence internationale. Nous sommes invités à cette évolution par le règlement européen du 13 décembre 2004 et par les engagements que nous avons pris envers les États-Unis.

Il nous reste aujourd'hui à définir les modalités de production de ce passeport. Un débat juridique a eu lieu devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris, qui a à connaître d'un contentieux portant sur les modalités de passation du marché public relatif à la personnalisation des passeports.

Dans notre esprit, il n'est nullement question de mettre en cause les tâches actuellement assurées par l'Imprimerie nationale, qui est une belle entreprise. Elle conserve la production des livrets vierges des passeports, dont le nombre ne saurait décroître, bien au contraire. Lorsqu'elle met en oeuvre la mission de réalisation des titres et documents qui lui est confiée aux termes de l'article 2 de la loi du 31 décembre 1993, l'Imprimerie nationale assure l'impression fiduciaire et l'assemblage des documents en ayant recours à des matériaux et des techniques d'impression spécialement conçus pour empêcher la falsification et la contrefaçon.

J'ajoute que la loi du 31 décembre 1993 doit être lue à la lumière de nos engagements européens, tels qu'ils ont été rappelés par la Commission européenne dans une décision du 20 juillet 2005 autorisant, sous certaines conditions, le versement par l'État d'une aide à la restructuration de l'Imprimerie nationale. Cette aide est conséquente : il s'agit d'une augmentation de capital de 197 millions d'euros. C'est la marque de la détermination du Gouvernement et du ministre d'État, ministre de l'intérieur à sauvegarder l'avenir de l'Imprimerie nationale dans l'intérêt général et dans celui de ses salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Luc

Il faudra prendre des dispositions pour les cartes d'identité.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 68, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 4 a pour objet d'assimiler à des opérateurs de communication électronique les personnes dont l'activité professionnelle principale ou accessoire est d'offrir au public une connexion à l'Internet par l'intermédiaire d'un accès au réseau.

Compte tenu de l'imprécision de la notion d'activité principale ou accessoire, le champ des personnes proposant un accès Internet au public se trouve dès lors considérablement élargi. Ainsi, au-delà des seuls cybercafés, seront désormais soumis à l'obligation de conservation des données techniques de connexion les universités, les mairies, les bibliothèques, les postes, les hôtels offrant à titre accessoire une connexion au réseau.

L'application d'une telle disposition semble d'ores et déjà difficilement réalisable en pratique. Elle concernerait, en effet, des milliers de communications électroniques et, par voie de conséquence, autant d'utilisateurs du réseau Internet.

Aurez-vous seulement les moyens humains, matériels et financiers de traiter ainsi toutes ces données ? M. Courtois en convient lui-même lors qu'il consigne dans son rapport que « la conservation des données ne garantit pas l'identification de l'utilisateur » que, s'agissant des « connexions par des bornes Wifi, l'identification d'un utilisateur est pratiquement impossible » et que « cet article, comme plusieurs autres articles du projet de loi, n'est pas à lui seul une réponse décisive au terrorisme ».

Nous l'avons dit et redit : la technologie n'est pas la solution miracle dans la lutte contre le terrorisme. Pour toutes ces raisons, l'article 4 nous paraît inutile et sans doute inefficace.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 39, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter le I de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :

Il sera précisé par décret d'application de la présente loi la liste des personnes concernées.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Cet article traduit la double tare de ce projet de loi : l'inefficacité et la dangerosité. En cela, il convient de le dire haut et fort aux Français.

Les dispositions de cet article se révèlent, en effet, être inefficaces pour une série de raisons à la simplicité imparable. Il est très simple, pour une personne s'apprêtant à participer à une opération de terrorisme, de passer à travers les fils du maillage électronique. Il lui suffit de se procurer en toute facilité une puce sans abonnement chez un quelconque opérateur et de la placer dans un téléphone mobile. Il ne lui reste plus alors qu'à passer des appels ou à brancher son mobile sur un ordinateur portable ou encore à se connecter à l'Internet.

Il en va de même si quelqu'un décide tout simplement, selon une habitude de plus en plus répandue aujourd'hui chez les jeunes, de se balader dans la rue avec son portable, de trouver un réseau Wifi et de se connecter à une borne. On n'a même plus besoin de cybercafé. Tout cela se fait en laissant derrière soi des traces infimes, très difficiles à remonter.

De plus, les communications par voie électronique, qui laissent inéluctablement des traces, sont d'ores et déjà traitées de façon beaucoup plus sévère que les autres modes de communication, à la différence du courrier par voie postale, par exemple. Le courrier postal, je le rappelle, ne laisse aucune trace facile à appréhender. Il bénéficie d'un régime de protection intégrale, qu'il s'agisse du contenu des lettres ou de l'identification des correspondances.

Enfin, ces dispositions sont dangereuses pour toutes les autres personnes, pour tous ceux qui ne sont pas des terroristes, c'est-à-dire l'étudiant dans son université, l'habitant dans son local municipal ou même l'usager d'Internet, chez lui ou dans un cybercafé. Tous, avec les dispositions de ce projet loi, seraient des victimes potentielles d'une atteinte à leur vie privée. Ils pourront encore plus être contrôlés, surveillés, observés, suivis. Chacune de leur connexion, chaque site où ils seront allés, l'heure à laquelle ils auront commencé ou arrêté de « surfer » sur le Web, la personne à qui ils auront envoyé un courriel, tout cela sera accessible, contrôlé, hors de toute garantie judiciaire.

En se fondant sur l'avis de la CNIL, il convient de reconnaître que la définition contenue dans ce projet s'agissant de la catégorie des données numériques qui devront être conservées est plus que floue, donc propice à l'arbitraire.

De la même manière, la plus grande incertitude plane sur les personnes morales ou physiques concernées. Une fois encore, les garanties que vous apportez sont plus qu'insuffisantes. Le critère consacré qui renvoie aux dispositions de l'article 33-1 du code des postes et des télécommunications électroniques ne me permet pas d'exclure catégoriquement de cette définition des établissements comme les mairies, les universités ou les bibliothèques.

Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande, mes chers collègues, dans un simple souci de bon sens, d'efficacité et de respect des principes de proportionnalité, mais aussi de respect de la vie privée, de voter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 89, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Compléter le texte proposé par le I de cet article pour compléter l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques par une phrase ainsi rédigée :

Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés détermine les catégories de personnes et le type d'activités professionnelles concernées, notamment les personnes dont l'activité même est d'offrir un service payant de connexion en ligne, et les personnes qui offrent à leurs clients, dans un cadre public, ou à des visiteurs une connexion en ligne.

La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Peyronnet

Notre position est un peu différente de celle des deux collègues qui viennent de s'exprimer.

Cet amendement vise à compléter l'article 4 en prévoyant qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale d'informatique et des libertés - mais je suis prêt à retirer cette référence à la CNIL si l'essentiel de mon amendement est accepté -, détermine les catégories de personnes et le type d'activités professionnelles concernées, notamment les personnes dont l'activité est d'offrir un service payant de connexion en ligne et les personnes qui offrent à leurs clients, dans un cadre public ou à des visiteurs, une connexion en ligne.

Monsieur le ministre, la cybercriminalité existe. Nous ne sommes donc pas du tout hostiles à la conservation des données pendant un certain temps pour pouvoir les examiner afin de permettre la poursuite des délinquants qui utilisent le web. Cela étant, il faut éviter les dérives. Il convient donc de prévoir un encadrement adapté.

C'est pourquoi nous proposons qu'un décret en Conseil d'État précise le dispositif, après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. Les organismes dont l'activité même est d'offrir un service payant de connexion en ligne, les cybercafés, doivent être clairement ciblés. Mais sont également concernés ceux qui offrent, dans un cadre public, une connexion en ligne à leurs clients ou à des visiteurs, comme les hôtels ou les compagnies aériennes. Le décret devra définir dans quelles conditions seront examinées toutes les données recueillies à partir d'une connexion établie dans ces lieux ou par ces prestataires de services.

À l'Assemblée nationale, le ministre de l'intérieur a déclaré que cette disposition ne visait « pour l'essentiel » ou « directement » - ce n'était pas très clair - que les cybercafés. Il a, en particulier, précisé que les mairies, les universités et les bibliothèques publiques n'étaient pas concernées « en principe » par cette mesure. Mais il n'a pas exclu, pour autant, que les données émises à partir d'une connexion dans ces lieux doivent être conservées. Pour quel usage ? Nul ne le sait, vraisemblablement pour être examinées ultérieurement. Pourquoi pas ?

En tout cas, monsieur le ministre, nous attendons vos explications, afin de savoir, notamment pour les bibliothèques d'universités, quelle sera votre politique dans ce domaine. Nous pensons que cette disposition est utile mais mérite d'être précisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 11, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer le II de cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour présenter l'amendement n° 11 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n° 68, 39 et 89.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

L'amendement n° 11 tend à supprimer le II de l'article 4 puisque l'Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant que les opérateurs de communications électroniques « doivent » différer l'effacement des données aux fins de constatation des infractions pénales. Le texte actuellement en vigueur prévoit seulement qu'il « peut » être différé, à charge pour le décret d'application d'en définir les conditions.

L'Assemblée nationale a motivé son amendement par le souci d'obliger les opérateurs de communications électroniques, notamment les cybercafés, à conserver leurs données sans attendre la publication du décret attendu lui-même depuis quatre ans.

Bien que comprenant cette impatience, je ne suis pas favorable à cet amendement pour deux raisons.

D'une part, le principe général doit être l'effacement des données. L'amendement de l'Assemblée nationale peut faire croire que le principe est renversé. J'ajouterai que la portée du texte de l'Assemblée nationale est limitée car même avec l'expression « doit différer », un décret restera nécessaire pour fixer les modalités de cette conservation des données et les modalités de la compensation financière du surcoût engendré.

D'autre part, en créant une obligation de conservation, la loi empêcherait le décret de prévoir des exceptions ou des modalités différentes dans l'application de cette obligation de conservation. Je pense aux mairies qui mettent à disposition des ordinateurs en accès libre.

À cet égard, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous nous précisiez l'étendue de cette obligation de conservation des données techniques, notamment quant aux personnes auxquelles elles devraient s'appliquer.

Enfin, pouvez-vous prendre l'engagement que le décret attendu depuis près de quatre ans paraisse très rapidement ?

S'agissant de l'amendement n° 6, qui tend à la suppression de l'article 4, la commission a émis un avis défavorable, dans la mesure où, tout en l'amendant, elle souhaite que l'article soit conservé.

L'amendement n° 39 renvoie à un décret le soin de fixer la liste des catégories de personnes soumises à l'obligation de conservation des données techniques de connexion. Je crains qu'un tel décret ne fige par trop l'étendue de l'obligation de conservation des données et qu'on oublie, dans cette liste, certains services. Une série de décrets complémentaires suivra alors, au risque de compliquer inutilement la réglementation.

Nous préférerions que le ministre précise oralement, comme il l'a fait à l'Assemblée nationale, la liste approximative des catégories de personnes visées par cette obligation de conservation afin de permettre l'application de cette loi.

Il en va de même pour l'amendement n° 89 de nos collègues socialistes, qui renvoie également à un décret en Conseil d'État, mais pris après avis de la CNIL, cette dernière exigence alourdissant encore la procédure. J'ai bien compris que M. Peyronnet était prêt à modifier son texte sur ce point, mais cela nous ramènerait à l'amendement précédent.

En conséquence, j'émets un avis défavorable sur ces deux amendements.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

L'amendement n° 68 de Mme Josiane Mathon, qui est un amendement de suppression, démontre une méconnaissance des modes opératoires des terroristes. Plusieurs affaires ont montré l'importance de ces points d'accès, notamment pour organiser des actions criminelles. Est-il besoin de rappeler l'affaire Richard Reid, ce terroriste interpellé aux États-Unis après avoir transité par la France et utilisé les services de cybercafés ainsi qu'un accès Wifi de l'aéroport de Roissy pour recevoir ses propres instructions. C'est exemple me semble suffisamment significatif.

Je pourrais compléter mes explications en informant la Haute Assemblée que, parmi les 25 personnes interpellées lundi dernier, figurent deux gérants de cybercafés de Seine-Saint-Denis.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Ces éléments sont suffisamment probants pour justifier cet article 4. Le Gouvernement souhaite compléter le dispositif législatif existant afin d'éviter que les terroristes n'utilisent des moyens de cette nature, facilement accessibles en toute confidentialité, pour mettre en place leurs réseaux. Je suis donc défavorable à cet amendement de suppression.

Concernant les amendements n° 39 de Mme Alima Boumediene-Thiery et n° 89 de M. Jean-Claude Peyronnet, qui sont pratiquement identiques, le deuxième n'ajoutant que la consultation de la CNIL, je vais être très clair puisque les orateurs, ainsi que M. le rapporteur m'ont demandé des explications détaillées.

Monsieur Peyronnet, nous visons d'abord les cybercafés, c'est-à-dire les personnes qui, au titre d'une activité professionnelle principale, offrent au public une connexion au réseau Internet. Ce sont eux que nous voulons soumettre au même régime que les opérateurs classiques : obligation de conservation des données techniques de connexion, numéros de terminaux, dates, horaires et durée des communications, indépendamment du contenu des messages électroniques dont la conservation est complètement exclue, je tiens à le dire.

Les mairies, les universités, les bibliothèques ne sont pas concernées, en principe, car leur activité ne consiste pas principalement à proposer au public des connexions au réseau Internet. Mais, comme vous le rappelez vous-même, nous savons, hélas, que les universités sont souvent des lieux d'utilisation des technologies de la communication qui y sont installées. Si l'on nous signalait que telle université ou bibliothèque devenait une sorte de cybercafé déguisé, elles pourraient entrer dans le champ des personnes soumises à cette obligation de conservation de données au titre de leur activité accessoire. De toute façon, il ne serait pas question de mener des investigations et d'utiliser quelque donnée que ce soit concernant la fonctionnalité de l'université et de sa bibliothèque, la recherche porterait exclusivement sur l'activité accessoire, liée à l'utilisation d'Internet dans les mêmes conditions que dans un site public tel qu'un cybercafé.

Il faut se ménager cette possibilité. Nous avons en effet l'exemple de Mohammed Atta, le chef des commandos kamikazes du 11 septembre 2001, qui avait entretenu une partie de son réseau à partir des postes Internet que l'université de Hambourg mettait à disposition de ses étudiants.

La définition proposée par le projet du Gouvernement a été élaborée, je le précise, par le Conseil d'État. Il serait donc inutile de la compléter par un décret en Conseil d'État. Voilà pourquoi je suis défavorable à ces deux amendements.

Vous m'aviez demandé des explications détaillées sur le contenu de cet article 4 et ses objectifs ; après vous les avoir données, je souhaiterais que ces amendements soient retirés.

Enfin, l'amendement n° 11 de la commission recueille l'avis favorable du Gouvernement car je suis en mesure de confirmer que, malgré les vicissitudes du travail interministériel, le décret d'application de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques va enfin être publié dans les premières semaines de 2006. La consultation du Conseil d'État est en cours et devrait aboutir dans les délais les plus brefs.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 89.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous maintenons cet amendement, d'autant plus que la réponse donnée par M. le ministre semble le justifier.

L'article 4 vise les personnes qui, au titre d'une activité professionnelle principale, offrent au public une connexion permettant une communication en ligne par l'intermédiaire d'un accès au réseau. On peut donc considérer qu'un objet est ainsi défini : l'activité professionnelle. Cependant, lorsqu'on interroge le ministre, on se rend compte que l'objet est élargi. En effet, M. le ministre aurait pu répondre que les universités, les mairies, les bibliothèques ne sont pas visées, que seuls sont visés ceux qui exercent cette activité professionnelle à titre principal. C'eût été clair.

Mais M. le ministre nous dit, et nous pouvons le comprendre, qu'on ne peut pas exclure qu'elles soient visées.

Nous savons ce qui se passe dans une université. Si quelqu'un veut préparer un acte terroriste, le fera-t-il dans la cafétéria, dans la bibliothèque... ? On ne peut exclure que n'importe quel ordinateur soit utilisé : le problème devient donc extrêmement complexe. Au nom de l'efficacité du contrôle, on aboutit à son extension illimitée. Par conséquent, il faut adopter des dispositions précises.

Nous sommes donc bien fondés à conclure, après avoir entendu la réponse du ministre, qu'il faut préciser et clarifier. C'est pourquoi un décret en Conseil d'État ne serait pas inutile. En effet, vient forcément un moment où il faut procéder à une appréciation. La question est de savoir qui apprécie et comment, ce qui renvoie à notre argumentation générale. À partir du moment où celui qui apprécie est clairement désigné, avec toutes les garanties, notamment celles de l'autorité judiciaire, le problème se pose différemment.

Ainsi, notre amendement constitue une précaution, ô combien nécessaire, compte tenu du caractère éminemment vague de la réponse du ministre.

Debut de section - Permalien
Christian Estrosi, ministre délégué

Monsieur Sueur, je ne pense pas du tout avoir répondu de manière vague. Au contraire, je vous ai très précisément expliqué que nous visions d'abord les cybercafés, c'est-à-dire les personnes qui, au titre d'une activité professionnelle principale, offrent au public une connexion au réseau Internet.

Nous ne visons pas les universités et les bibliothèques, dont l'activité principale ne consiste pas à proposer des connexions Internet au public, même si M. Peyronnet sait par expérience, et pour être attentif à l'actualité du monde, qu'il arrive ou qu'il est arrivé, malheureusement, que les universités soient aussi concernées, les personnes qui fréquentent ces lieux pouvant, de manière publique, avoir accès à Internet. C'est donc à cette activité seule et non aux autres activités de l'université que les dispositions de l'article pourraient éventuellement s'appliquer

Pour répondre à vos préoccupations et tenter de vous convaincre de toutes mes forces, monsieur Sueur, je compléterai les informations que je vous ai déjà apportées en précisant que, l'année prochaine, comme le prévoit l'article 15 du projet de loi, le Gouvernement soumettra chaque année au Parlement un rapport sur l'application de la loi, et donc sur cet aspect accessoire de l'article 4. A cette occasion, vous aurez l'opportunité de faire le bilan et, ensemble, nous évaluerons ce qu'il y a lieu de modifier dans la définition figurant à l'article 4.

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 4 est adopté.

I. - Après l'article L. 34-1du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un article L. 34-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 34 -1 -1. - Afin de prévenir et de réprimer les actes de terrorisme, les agents individuellement habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement désignés en charge de ces missions peuvent exiger des opérateurs et personnes mentionnés au I de l'article L. 34-1 la communication des données conservées et traitées par ces derniers en application dudit article.

« Les données pouvant faire l'objet de cette demande sont limitées aux données techniques relatives à l'identification des numéros d'abonnement ou de connexion à des services de communications électroniques, au recensement de l'ensemble des numéros d'abonnement ou de connexion d'une personne désignée, aux données relatives à la localisation des équipements terminaux utilisés ainsi qu'aux données techniques relatives aux communications d'un abonné portant sur la liste des numéros appelés et appelants, la durée et la date des communications.

« Les surcoûts identifiables et spécifiques éventuellement exposés par les opérateurs, prestataires et personnes mentionnés au premier alinéa pour répondre à ces demandes font l'objet d'une compensation financière.

« Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision d'une personnalité qualifiée, placée auprès du ministre de l'intérieur. Cette personnalité est désignée par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité sur proposition du ministre de l'intérieur, pour une durée de trois ans renouvelable. Des adjoints pouvant la suppléer sont désignés dans les mêmes conditions. La personnalité qualifiée établit un rapport d'activité annuel adressé à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité. Les demandes, accompagnées de leur motif, font l'objet d'un enregistrement et sont communiquées à la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité.

« Cette instance peut à tout moment procéder à des contrôles relatifs aux opérations de communication des données techniques. Lorsqu'elle constate un manquement aux règles définies par le présent article ou une atteinte aux droits et libertés, elle saisit le ministre de l'intérieur d'une recommandation. Celui-ci lui fait connaître dans un délai de quinze jours les mesures qu'il a prises pour remédier aux manquements constatés.

« Les modalités d'application des dispositions du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, qui précise notamment la procédure de suivi des demandes et les conditions et durée de conservation des données transmises. »

I bis. - Après le II de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. - Afin de prévenir et de réprimer les actes de terrorisme, les agents individuellement habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement désignés en charge de ces missions peuvent exiger des prestataires mentionnés aux 1° et 2° du I la communication des données conservées et traitées par ces derniers en application du présent article.

« Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision de la personnalité qualifiée instituée par l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques selon les modalités prévues par le même article. La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce son contrôle selon les modalités prévues par ce même article.

« Les modalités d'application des dispositions du présent paragraphe sont fixées par décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés et de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, qui précise notamment la procédure de suivi des demandes et les conditions et durée de conservation des données transmises. »

II. - 1 A. Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article 4 de la loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, les mots : « ou de la personne que chacun d'eux aura spécialement déléguée » sont remplacés par les mots : « ou de l'une des deux personnes que chacun d'eux aura spécialement déléguées ».

1 B. Dans le premier alinéa de l'article 19 de la même loi, les mots : « de l'article 14 et » sont remplacés par les mots : « de l'article 14 de la présente loi et au ministre de l'intérieur en application de l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques et de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, ainsi que ».

1. Il est inséré, dans la même loi, un titre V intitulé : « Dispositions finales » comprenant l'article 27 qui devient l'article 28.

2. Il est inséré, dans la même loi, un titre IV ainsi rédigé :

« TITRE IV

« COMMUNICATION DES DONNÉES TECHNIQUES RELATIVES À DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES

« Art. 27. - La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce les attributions définies à l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques et à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique en ce qui concerne les demandes de communication de données formulées auprès des opérateurs de communications électroniques et personnes mentionnées à l'article L. 34-1 du code précité ainsi que des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 précitée. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 69, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Josiane Mathon.

Debut de section - PermalienPhoto de Josiane Mathon-Poinat

L'article 5 du projet de loi tend à permettre, dans le cadre des pouvoirs de police administrative, l'accès des agents individuellement habilités des services de police et de gendarmerie nationale à certaines données de trafic générées par les communications électroniques.

Alors qu'actuellement ces données sont systématiquement communiquées dans un cadre judiciaire, demain elles le seront dans un cadre administratif adapté et donc en dehors de tout contrôle du juge judiciaire. Nous ne saurions l'accepter.

En effet, comme le relève à juste titre la CNIL dans son avis du 10 octobre dernier : « L'obligation ainsi faite aux opérateurs de communiquer, dans le cadre des pouvoirs de police administrative et hors contrôle des autorités judiciaires, les traces des connexions qui, par recoupement avec d'autres données, peuvent dévoiler l'identité des utilisateurs d'internet, leur navigation sur le Web et, de manière plus générale, l'usage privé que l'on fait du réseau, déroge aux principes fondamentaux de protection des libertés individuelles. » Comprenons le respect de la vie privée.

Quoi qu'en dise notre rapporteur, cette réquisition administrative n'est pas entourée de garanties permettant de préserver les libertés individuelles, dont le droit au respect de la vie privée est l'une des composantes. Le fait que ces mesures soient limitées dans le temps, à savoir jusqu'au 31 décembre 2008, ne nous rassure pas pour autant. L'expérience nous a montré qu'en la matière le provisoire est fait pour durer.

Rappelons, enfin, que des dispositions antiterroristes insérées dans la loi relative à la sécurité quotidienne au lendemain des attentats du 11 septembre, bien qu'initialement limitées dans le temps, ont été cependant prorogées.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Les trois amendements suivants sont présentés par M. Courtois, au nom de la commission.

L'amendement n° 12 est ainsi libellé :

I. - Au premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article L. 34-1-1 dans le code des postes et des communications électroniques, supprimer les mots :

et de réprimer

II. - En conséquence, procéder à la même suppression au premier alinéa du texte proposé par le I bis de cet article pour insérer un II bis à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

L'amendement n° 13 est ainsi libellé :

I. - Au premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article L. 34-1-1 dans le code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :

les agents individuellement habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement désignés en charge de ces missions

par les mots :

les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de ces missions

II. - En conséquence, procéder au même remplacement au premier alinéa du texte proposé par le I bis de cet article pour insérer un II bis à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.

L'amendement n° 14 est ainsi libellé :

Au troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article L. 34-1-1 dans le code des postes et des communications électroniques, supprimer les mots :

, prestataires

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ces trois amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Avec l'amendement n° 12, je vous propose de rétablir la rédaction initiale du projet de loi à propos des finalités pour lesquelles les réquisitions administratives des données techniques des communications peuvent être demandées.

Le projet de loi initial prévoyait une seule finalité, la prévention des actes de terrorisme. L'Assemblée nationale a souhaité élargir ces finalités à la répression des actes de terrorisme.

Je suis conscient que la limite entre répression et prévention est souvent délicate en matière de terrorisme. Les articles 6, 7 et 8 du projet de loi font d'ailleurs référence à cette double finalité.

Toutefois, en l'espèce, il semble préférable de se limiter à la seule prévention du terrorisme. En effet, dans les trois articles précités, il s'agit de permettre la consultation de fichiers constitués à des fins de police administrative. Le dispositif prévu au présent article est de nature différente, puisqu'il s'agit de consulter des données recueillies dans un cadre privé.

En introduisant la finalité de répression du terrorisme, un risque de confusion avec la procédure judiciaire de réquisition de ces données existe. S'agissant en effet des interceptions de sécurité, c'est-à-dire les écoutes administratives, la loi du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques est très claire. Elle ne permet des écoutes administratives que pour prévenir le terrorisme et non pour le réprimer. Dans ce dernier cas de figure, on bascule dans le cadre juridique des écoutes judiciaires.

L'amendement de précision et d'harmonisation rédactionnelle n° 13 répond à une recommandation de la CNIL, qui souhaite que soient parfaitement encadrées les conditions d'accès à ces données.

Enfin, l'amendement n° 14 est un amendement de coordination.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 40, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

En parallèle de la procédure de réquisition judiciaire, il est mis en place une procédure de réquisition administrative qui ne respecte pas le principe de proportionnalité, garantie essentielle à la protection des droits et des libertés.

Ce qui marque la logique de ce projet - je l'ai déjà dit -, c'est la volonté de déjudiciariser la lutte contre le terrorisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Alima Boumediene-Thiery

Les mesures permettant l'accès direct aux données retenues par les opérateurs, en dehors de tout contrôle judiciaire, sont au fond de même nature que celles qui autorisent les interceptions téléphoniques administratives. Prévoir un dispositif d'autorisation et de contrôle distinct constitue donc une source de complexité injustifiée qui affaiblit l'effectivité des garanties offertes, déjà toutes relatives.

Il conviendrait au moins d'aligner ces deux régimes et de prévoir, pour ce qui concerne l'accès aux données de trafic, un contingentement, comme en matière d'écoutes.

Il est d'ailleurs paradoxal, d'un côté, de placer la commission nationale de contrôle de sécurité au coeur du processus de lutte contre le terrorisme, notamment en étendant ses missions et ses compétences, et, de l'autre, de ne pas lui assurer les moyens financiers et d'autonomie juridique indispensables à l'exercice effectif de ses fonctions. Encore une fois, nous sommes beaucoup trop dans l'annonce et dans l'affichage, et pas assez dans les moyens et le bon sens.

Enfin, à cet article, comme dans d'autres articles, l'exercice d'un contrôle effectif par la CNIL n'est pas encore rendu possible. Malheureusement pour l'ensemble de nos citoyens, la CNIL est le parent pauvre de ce projet de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 90, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I - Remplacer le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques par un alinéa ainsi rédigé :

Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité. Ces demandes, accompagnées de leur motif, font l'objet d'un enregistrement. Cette instance établit un rapport d'activité annuel adressé au ministre de l'intérieur et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

II - En conséquence :

1) Au début du cinquième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques, remplacer les mots :

Cette instance

par les mots :

La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité

2) Remplacer le deuxième alinéa du texte proposé par le I bis de cet article pour insérer un II bis après le II de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 janvier 2004 par un alinéa ainsi rédigé :

Les demandes des agents sont motivées et soumises à la décision de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité selon les modalités prévues par l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques. La Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité exerce son contrôle selon les modalités prévues par ce même article.

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Nous sommes très préoccupés par ce dispositif qui vise à intercepter toute une série d'informations relatives aux communications entre les individus. Nous l'avons dit et nous ne cesserons de le répéter, car c'est notre position, cela doit se faire dans un cadre strict et sous l'autorité de la justice.

En raison de l'urgence, de l'imminence, de la gravité évidente de la menace terroriste, nous devons, nous dit-on, faire fi des procédures mises en oeuvre sous l'autorité de la justice. Nous ne le pensons pas. En l'espèce, il est quand même tout à fait étonnant que le Gouvernement nous demande, avec ce projet de loi, de renoncer aux prérogatives de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la CNCIS.

Chacun se souvient des nombreux débats que nous avons eus sur les écoutes téléphoniques...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

... et qui ont conduit à mettre en oeuvre cette commission. Celle-ci compte en son sein des magistrats dont l'autorité est reconnue. Nous ne comprenons vraiment pas pourquoi vous voulez la disqualifier.

Certes, en matière d'écoutes téléphoniques, la CNIS ne dispose que d'un pouvoir consultatif. Mais l'on constate qu'au fil des différents gouvernements le Premier ministre suit presque toujours ses avis, preuve que ces derniers sont finalement reconnus.

Rien n'interdit - et vous auriez pu nous le proposer - de faire évoluer les compétences de cette autorité sur des sujets qui, en matière de respect des libertés publiques, requièrent une vigilance accrue. Le seul argument qui est donné est celui de l'urgence et de la rapidité. Mais, je tiens à le souligner, cette autorité a prouvé qu'elle pouvait faire preuve d'une réactivité importante.

Ainsi, en avril 2003, sans modification de la loi, et en accord avec M. Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, le régime d'avis préalable aux demandes d'écoute a été étendu aux demandes urgentes. Cette réforme a été motivée par la forte augmentation du nombre de décisions d'interception urgente, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Selon les indications de la CNCIS, cette évolution a été réalisée sans ralentissement, grâce à la disponibilité accrue de la structure permanente de la commission, qui est par conséquent en mesure de rendre un avis dans le délai maximal d'une heure en cas de saisine urgente, en se fondant sur la jurisprudence de la commission. Ainsi, le délégué général de la commission, ou son adjoint, informe systématiquement le président de l'autorité de toute saisine.

L'article 1er du règlement intérieur de la CNCIS prévoit en effet que celle-ci se réunit sur l'initiative de son président lorsque celui-ci estime que la légalité d'une autorisation d'interception n'est pas certaine.

Par conséquent, le dispositif actuel fonctionne et peut être très réactif.

Dans le cas qui nous occupe, ce qui est vraiment incompréhensible, surtout lorsqu'il s'agit d'un problème d'interception de communications, qui a donc trait aux libertés publiques, c'est que vous nous demandiez de vous affranchir des prérogatives de cette commission pour, si j'ai bien compris, mettre en place une personnalité qualifiée. Vous avez même obtenu à l'Assemblée nationale que celle-ci soit nommée par la commission, mais sur proposition du ministre de l'intérieur. Alors, foin d'hypocrisie ! Autant dire que cette personnalité qualifiée est nommée par le ministre de l'intérieur.

Dans ce cas précis, c'est d'autant plus incompréhensible que le pouvoir régalien de l'État intervient en dehors de toute autorité de justice et même en dehors de la commission mise en place à cet effet ! Pourtant, il a été démontré que cette commission, à laquelle M. Jean-Pierre Raffarin a fait référence, qu'il a lui-même utilisée - et je ne doute pas que M. de Villepin, fera de même - peut se prononcer en moins d'une heure !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 54 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, Türk et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier, Cambon, Goujon et Lecerf, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit la deuxième phrase du quatrième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques :

Cette personnalité est désignée pour une durée de trois ans renouvelable, par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité parmi les personnes figurant sur une liste établie par le ministre de l'intérieur et comportant trois noms.

La parole est à Mme Lucienne Malovry.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucienne Malovry

Aux termes du projet de loi, la personnalité qualifiée est désignée par la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité sur proposition du ministre de l'intérieur.

Le présent amendement vise à prévoir que le ministre de l'intérieur établira une liste comportant trois noms.

Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucienne Malovry

Le choix entre plusieurs candidats apportera une plus grande objectivité à la désignation de la personnalité qualifiée par la CNCIS.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 55 rectifié bis, présenté par MM. Türk, Portelli et Nogrix, Mme Malovry, MM. Mouly, Seillier et Cambon, est ainsi libellé :

Compléter l'avant-dernière phrase du quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 34-1-1 du code des postes et des communications électroniques par les mots :

et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés

La parole est à Mme Lucienne Malovry.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucienne Malovry

L'article 5 du projet de loi prévoit l'accès des services de police aux données de connexion.

Au regard de la sensibilité particulière des informations auxquelles les agents des services de police et de gendarmerie nationales chargés des missions de prévention des actes de terrorisme peuvent avoir accès, les garanties entourant cet accès doivent être améliorées.

En la matière, l'intervention de la CNIL est justifiée par la nature des données, qui relèvent directement de la loi du 6 janvier 1978 modifiée le 7 août 2004. Dès lors, la CNIL devrait être également destinataire du rapport annuel établi par la personnalité qualifiée. Cette transmission était d'ailleurs prévue dans l'avant-projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

L'amendement n° 15, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après le premier alinéa du texte proposé par le I bis de cet article pour insérer un II bis à l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les surcoûts identifiables et spécifiques éventuellement exposés par les prestataires mentionnés au premier alinéa du présent II bis pour répondre à ces demandes font l'objet d'une compensation financière. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

De la même manière que le paragraphe I de l'article 5 prévoit une compensation financière des surcoûts résultant, pour les opérateurs de communications électroniques, des demandes de réquisitions administratives des données techniques, cet amendement prévoit une compensation financière des éventuels surcoûts pour les fournisseurs d'accès ou les fournisseurs d'hébergement visés par la loi pour la confiance dans l'économie numérique de 2004.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Quel est l'avis de la commission sur les autres amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

S'agissant de l'amendement n° 69 tendant à supprimer l'article 5 du projet de loi, la commission ne peut qu'y être défavorable puisqu'elle propose elle-même d'amender cet article.

L'amendement n° 40 vise à supprimer la procédure spéciale selon laquelle seront autorisées les demandes de réquisition administrative des données de connexion. Les auteurs de cet amendement souhaitent que cette procédure spéciale soit confondue avec la procédure applicable aux écoutes administratives. Une procédure distincte me semble préférable, car les données de connexion ne sont pas de même nature que les écoutes administratives.

En effet, une donnée de connexion ne porte pas sur le contenu des communications ; au regard du respect des libertés individuelles, leur réquisition est donc beaucoup moins instructive.

J'ajoute que, contrairement aux écoutes administratives, la procédure proposée offre des garanties fortes puisqu'il s'agit non pas d'un contrôle a posteriori, mais d'un contrôle a priori.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Quant à l'amendement n° 90, il tend à attribuer à la Commission nationale des contrôles d'interception de sécurité les pouvoirs de contrôle des réquisitions administratives des données techniques que le projet de loi attribue à une personnalité qualifiée nommée par ses soins.

Le choix de confier à une personnalité qualifiée le contrôle de ces réquisitions a été guidé par le souci de ne pas alourdir les missions de la CNCIS.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

En outre, en confiant ce contrôle à une personnalité qualifiée, on conjugue les impératifs opérationnels de rapidité et les garanties nécessaires au regard du respect des libertés individuelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Une personnalité qualifiée respecterait mieux les libertés individuelles ! C'est incroyable !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Si la CNCIS était compétente, il serait très difficile, pour des raisons matérielles, qu'elle exerce un contrôle a priori. Je le répète, en matière d'écoutes administratives, la CNCIS exerce un contrôle a posteriori.

Le projet de loi prévoit un contrôle a priori par l'intermédiaire d'une personnalité qualifiée, nommée par la CNCIS.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Le régime est donc très protecteur, sachant que la CNCIS peut exercer un contrôle a posteriori.

Le projet de loi issu de l'Assemblée nationale prévoit que la personnalité qualifiée qui autoriserait chaque demande de réquisition administrative des données de connexion serait désignée par la CNCIS, sur proposition du ministre de l'intérieur. L'amendement n° 54 rectifié ter vise à proposer que la commission devrait choisir parmi trois noms proposés par le ministère de l'intérieur.

Je suis favorable à ce dispositif : de la sorte, la CNCIS ne se verra pas imposer un candidat, elle aura le choix.

L'amendement n° 55 rectifié bis prévoit que le rapport annuel d'activité établi par la personnalité qualifiée et adressé à la CNCIS devrait être également adressé à la CNIL.

Je ne suis pas fondamentalement contre cet amendement, mais je me demande s'il apporte réellement quelque chose de plus. Je crains qu'il n'engendre un enchevêtrement entre les missions de la CNCIS et celles de la CNIL.

Au vu de ces observations, je demande à Mme Malovry de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, la commission s'en remettra à la sagesse du Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Mes chers collègues, la sagesse veut que nous interrompions maintenant l'examen du projet de loi. Nous entendrons l'avis du Gouvernement après les questions d'actualité.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Par lettre en date du 15 décembre 2005, M. le Premier ministre a fait connaître à M. le président du Sénat qu'en application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution le Gouvernement déclare l'urgence du projet de loi de programme pour la recherche (91, 2005-2006).

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.