Nous proposons la suppression de l'article 3. Je ne reviens pas sur l'objet de ce dernier, qui a été décrit largement.
Pour nous, comme pour beaucoup de magistrats, justifier une telle mesure par la lutte contre le terrorisme procède d'une pure hypocrisie : il s'agit plus, en effet, d'un essai de renforcement des mesures contre l'immigration irrégulière que de la lutte contre le terrorisme.
Certes, nous ne sommes pas favorables à l'immigration irrégulière. Nous participons, d'ailleurs, à une commission d'enquête parlementaire sur l'immigration clandestine. Je rappelle qu'un texte sera déposé prochainement sur ce sujet, qui n'est pas celui dont nous débattons aujourd'hui. Je tiens simplement à préciser que nous sommes hostiles à l'amalgame constant qui est fait dans le présent texte, notamment, sur cette question.
La modification envisagée par le biais de l'article 3 apparaît en l'état comme un moyen de contourner les autres procédures plus encadrées de contrôle d'identité.
Cette mesure n'est pas une disposition autonome visant précisément à la lutte contre les membres de cellules terroristes. Au contraire, elle s'insère dans un texte existant, l'article 78-2 du code de procédure pénale, dont l'objet est la lutte contre les réseaux d'immigration irrégulière et de criminalité organisée. Parmi ces immigrants peuvent, bien entendu, se trouver des terroristes, mais ce n'est que par ricochet, d'une certaine façon, que l'on peut en rencontrer.
Je rappelle également que la dernière modification de l'article 78-2 du code de procédure pénale date de la loi du 26 novembre 2003, relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.
Elle prévoit que, lorsqu'il existe une section autoroutière démarrant dans la zone des vingt kilomètres, les contrôles d'identité peuvent avoir lieu jusqu'au premier péage autoroutier, même si celui-ci se situe au-delà des vingt kilomètres, sur la voie ou les aires de stationnement, ainsi que sur le lieu de ce premier péage et les aires de stationnement attenantes. Son objet est bien la lutte contre l'entrée et le séjour irréguliers en France dans des sections du territoire national ouvertes au trafic international et ayant les caractéristiques des zones frontalières.
On perçoit bien qu'une telle disposition n'est destinée qu'à faciliter les contrôles pour lutter, d'abord et avant tout, contre l'immigration irrégulière.
Monsieur le rapporteur, je note que vous êtes très prudent sur le respect de cet équilibre entre sécurité publique et respect des libertés individuelles, dont vous assurez, à la page 53 de votre rapport, qu'il est respecté en employant le conditionnel : « Eu égard aux spécificités du transport ferroviaire, ces dispositions semblent respecter l'équilibre entre les nécessités de l'ordre public et la sauvegarde de la liberté individuelle. Elles ne méconnaîtraient pas la compétence du législateur, conformément aux exigences du juge constitutionnel. »
Je souligne surtout que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 5 août 1993, s'est exprimé sur une mesure d'extension analogue. Il a déclaré qu'une telle disposition devait être accompagnée de justifications appropriées tirées d'impératifs constants et particuliers de la sécurité publique.
Il ne me semble pas que ces dispositions, ces prescriptions, ces préconisations soient parfaitement respectées dans le texte.