Intervention de Dominique Braye

Réunion du 19 décembre 2006 à 10h00
Questions orales — Ouverture dominicale des commerces

Photo de Dominique BrayeDominique Braye :

Monsieur le ministre, le problème de l'ouverture des magasins le dimanche est aujourd'hui largement débattu, vous en conviendrez. Il concerne le secteur commercial, mais aussi nos concitoyens, dont tous les sondages nous affirment qu'ils sont très majoritairement favorables à l'ouverture du dimanche - dès lors, bien sûr, que les employés des magasins concernés sont volontaires -, et ce tout simplement parce que nombre d'entre eux ne peuvent faire leurs courses que le week-end !

L'ouverture dominicale des magasins ne peut plus aujourd'hui être écartée d'un revers de main, sous prétexte de protection du petit commerce. Elle répond, en France comme chez nos voisins européens, qui la pratiquent plus largement, à l'évolution des modes de consommation et à une nécessité économique, face à la concurrence des magasins automatiques et du commerce électronique par Internet, dont l'activité est permanente, 24 heures sur 24 et 365 jours sur 365.

Cette question se pose avec une acuité particulière dans les grandes agglomérations et leurs périphéries, où nos concitoyens travaillent tard et rentrent tard chez eux, du fait notamment de la longueur des temps de transport. Inévitablement, ils ne peuvent donc faire leurs achats que le week-end.

Or, comme je le constate dans ma commune de Buchelay, les zones commerciales sont totalement saturées le week-end, ce qui empêche tout report de l'activité dominicale sur le samedi. Tous ceux qui l'observent peuvent l'affirmer ! L'interdiction d'ouverture dominicale pénalise donc gravement les enseignes concernées et leurs salariés, mais aussi, et peut-être surtout, leurs clients.

Comme vous l'avez souligné dans votre réponse précédente, monsieur le ministre, l'ouverture dominicale des magasins dans les zones commerciales périurbaines ne peut être autorisée que dans le seul respect d'un équilibre entre le commerce de centre-ville et le commerce des zones périphériques, afin de préserver le petit commerce de proximité et l'animation des centres-villes. Mais ceux-ci ne dépendent nullement de l'ouverture des centres des zones périphériques le dimanche ; ils dépendent de la répartition des commerces entre la périphérie et le centre-ville.

C'est précisément cet équilibre qu'ont voulu instaurer les élus de la communauté d'agglomération de Mantes-en-Yvelines que j'ai l'honneur de présider, en interdisant l'implantation dans les zones commerciales d'enseignes concurrentes des commerces de centre-ville concernant, par exemple, l'alimentation spécialisée, l'équipement et les soins de la personne.

Sous cette réserve, et sous celle de fonder le travail dominical exclusivement bien entendu sur le volontariat et sur une compensation financière substantielle, l'ouverture dominicale est, nous le savons tous, inéluctable, et il appartiendra au législateur de se saisir de ce sujet.

En attendant cette nécessaire évolution, permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur l'exemple représentatif des zones commerciales de Buchelay, dans les Yvelines, dans la grande couronne parisienne, avec une activité concentrée le week-end, pour les raisons que j'ai précédemment évoquées.

Tous les acteurs et observateurs concernés constatent une application ubuesque, inéquitable et incompréhensible de la réglementation relative au régime d'autorisation d'ouverture dominicale.

Pourquoi ce régime varie-t-il, sur le plan régional, d'un département à l'autre ? Ainsi, dans le département de l'Essonne, la zone commerciale de Sainte-Geneviève-des-Bois voit ses commerces bénéficier régulièrement, tous les deux ans, du renouvellement de ses autorisations, ce qui n'est pas le cas des zones commerciales du département limitrophe, les Yvelines.

Vous en conviendrez, monsieur le ministre, cette situation est déjà surprenante et totalement injuste, mais peut s'expliquer par le fait que chaque département dépend d'une autorité compétente différente, à savoir le préfet, qui peut avoir son idée personnelle, voire originale, sur la manière de lire et d'appliquer la loi.

Mais ce qui est encore plus surprenant, encore plus inéquitable et encore plus inexplicable, c'est que, au sein d'un même département, les Yvelines, la même autorité, le préfet, peut, pour les mêmes activités commerciales, sur la même zone de chalandise, traiter de façon différente des commerces appartenant au même secteur d'activité.

Ainsi, à Buchelay, des responsables se voient refuser l'autorisation d'ouverture dominicale, et sont donc contraints de fermer leur magasin, tandis que leurs concurrents à Flins-sur-Seine ou à Orgeval et à Plaisir, des villes situées entre cinq minutes et quinze minutes en voiture dans la même zone de chalandise, restent ouverts sans être aucunement inquiétés.

Comment expliquer de telles disparités de traitement, qui semblent être pratiquées « à la tête du client » et qui faussent la loyauté de la concurrence ? Comment les services de l'État peuvent-ils créer et accepter de telles injustices ? Ne heurtent-elles pas, monsieur le ministre, votre sens de l'équité républicaine ?

Plus grave encore, les services de l'État, qui souhaitent aujourd'hui la fermeture dominicale des magasins de Buchelay, après l'avoir autorisée pendant sept ans, voire quinze ans, ont-ils mesuré les conséquences économiques et sociales d'une telle décision ?

Pendant toutes ces années, ils ont laissé ces magasins s'organiser, investir et recruter en fonction de l'ouverture dominicale, et viennent maintenant les menacer d'interdiction d'ouverture et de sanctions, ce qui signifierait, pour les magasins concernés, une perte de chiffre d'affaires de 20 % ; pour les salariés volontaires, une baisse de rémunération mensuelle de 20 % ; pour la cinquantaine d'étudiants employés à temps partiel, le licenciement et des difficultés pour financer leurs études, comme ils me l'ont tous confié ; et, pour les clients, enfin, une grande insatisfaction et une totale incompréhension devant cette politique de Gribouille.

Incompréhension, inéquité et révolte, tels sont les mots qui reviennent actuellement non seulement chez les responsables de ces magasins et les salariés, mais également chez les clients.

Quelles mesures entendez-vous prendre, monsieur le ministre, pour rétablir un minimum d'équité et de lisibilité concernant le régime des autorisations d'ouverture dominicale et pour ne pas pénaliser l'activité économique, l'emploi et les consommateurs ?

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