Cet article traduit la double tare de ce projet de loi : l'inefficacité et la dangerosité. En cela, il convient de le dire haut et fort aux Français.
Les dispositions de cet article se révèlent, en effet, être inefficaces pour une série de raisons à la simplicité imparable. Il est très simple, pour une personne s'apprêtant à participer à une opération de terrorisme, de passer à travers les fils du maillage électronique. Il lui suffit de se procurer en toute facilité une puce sans abonnement chez un quelconque opérateur et de la placer dans un téléphone mobile. Il ne lui reste plus alors qu'à passer des appels ou à brancher son mobile sur un ordinateur portable ou encore à se connecter à l'Internet.
Il en va de même si quelqu'un décide tout simplement, selon une habitude de plus en plus répandue aujourd'hui chez les jeunes, de se balader dans la rue avec son portable, de trouver un réseau Wifi et de se connecter à une borne. On n'a même plus besoin de cybercafé. Tout cela se fait en laissant derrière soi des traces infimes, très difficiles à remonter.
De plus, les communications par voie électronique, qui laissent inéluctablement des traces, sont d'ores et déjà traitées de façon beaucoup plus sévère que les autres modes de communication, à la différence du courrier par voie postale, par exemple. Le courrier postal, je le rappelle, ne laisse aucune trace facile à appréhender. Il bénéficie d'un régime de protection intégrale, qu'il s'agisse du contenu des lettres ou de l'identification des correspondances.
Enfin, ces dispositions sont dangereuses pour toutes les autres personnes, pour tous ceux qui ne sont pas des terroristes, c'est-à-dire l'étudiant dans son université, l'habitant dans son local municipal ou même l'usager d'Internet, chez lui ou dans un cybercafé. Tous, avec les dispositions de ce projet loi, seraient des victimes potentielles d'une atteinte à leur vie privée. Ils pourront encore plus être contrôlés, surveillés, observés, suivis. Chacune de leur connexion, chaque site où ils seront allés, l'heure à laquelle ils auront commencé ou arrêté de « surfer » sur le Web, la personne à qui ils auront envoyé un courriel, tout cela sera accessible, contrôlé, hors de toute garantie judiciaire.
En se fondant sur l'avis de la CNIL, il convient de reconnaître que la définition contenue dans ce projet s'agissant de la catégorie des données numériques qui devront être conservées est plus que floue, donc propice à l'arbitraire.
De la même manière, la plus grande incertitude plane sur les personnes morales ou physiques concernées. Une fois encore, les garanties que vous apportez sont plus qu'insuffisantes. Le critère consacré qui renvoie aux dispositions de l'article 33-1 du code des postes et des télécommunications électroniques ne me permet pas d'exclure catégoriquement de cette définition des établissements comme les mairies, les universités ou les bibliothèques.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous demande, mes chers collègues, dans un simple souci de bon sens, d'efficacité et de respect des principes de proportionnalité, mais aussi de respect de la vie privée, de voter cet amendement.