Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 15 décembre 2005 à 9h30
Lutte contre le terrorisme — Article 5

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

... et qui ont conduit à mettre en oeuvre cette commission. Celle-ci compte en son sein des magistrats dont l'autorité est reconnue. Nous ne comprenons vraiment pas pourquoi vous voulez la disqualifier.

Certes, en matière d'écoutes téléphoniques, la CNIS ne dispose que d'un pouvoir consultatif. Mais l'on constate qu'au fil des différents gouvernements le Premier ministre suit presque toujours ses avis, preuve que ces derniers sont finalement reconnus.

Rien n'interdit - et vous auriez pu nous le proposer - de faire évoluer les compétences de cette autorité sur des sujets qui, en matière de respect des libertés publiques, requièrent une vigilance accrue. Le seul argument qui est donné est celui de l'urgence et de la rapidité. Mais, je tiens à le souligner, cette autorité a prouvé qu'elle pouvait faire preuve d'une réactivité importante.

Ainsi, en avril 2003, sans modification de la loi, et en accord avec M. Jean-Pierre Raffarin, alors Premier ministre, le régime d'avis préalable aux demandes d'écoute a été étendu aux demandes urgentes. Cette réforme a été motivée par la forte augmentation du nombre de décisions d'interception urgente, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, depuis les attentats du 11 septembre 2001.

Selon les indications de la CNCIS, cette évolution a été réalisée sans ralentissement, grâce à la disponibilité accrue de la structure permanente de la commission, qui est par conséquent en mesure de rendre un avis dans le délai maximal d'une heure en cas de saisine urgente, en se fondant sur la jurisprudence de la commission. Ainsi, le délégué général de la commission, ou son adjoint, informe systématiquement le président de l'autorité de toute saisine.

L'article 1er du règlement intérieur de la CNCIS prévoit en effet que celle-ci se réunit sur l'initiative de son président lorsque celui-ci estime que la légalité d'une autorisation d'interception n'est pas certaine.

Par conséquent, le dispositif actuel fonctionne et peut être très réactif.

Dans le cas qui nous occupe, ce qui est vraiment incompréhensible, surtout lorsqu'il s'agit d'un problème d'interception de communications, qui a donc trait aux libertés publiques, c'est que vous nous demandiez de vous affranchir des prérogatives de cette commission pour, si j'ai bien compris, mettre en place une personnalité qualifiée. Vous avez même obtenu à l'Assemblée nationale que celle-ci soit nommée par la commission, mais sur proposition du ministre de l'intérieur. Alors, foin d'hypocrisie ! Autant dire que cette personnalité qualifiée est nommée par le ministre de l'intérieur.

Dans ce cas précis, c'est d'autant plus incompréhensible que le pouvoir régalien de l'État intervient en dehors de toute autorité de justice et même en dehors de la commission mise en place à cet effet ! Pourtant, il a été démontré que cette commission, à laquelle M. Jean-Pierre Raffarin a fait référence, qu'il a lui-même utilisée - et je ne doute pas que M. de Villepin, fera de même - peut se prononcer en moins d'une heure !

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