Intervention de Jean-Patrick Courtois

Réunion du 15 décembre 2005 à 15h00
Lutte contre le terrorisme — Article 8, amendement 72

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois, rapporteur :

La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 72, qui tend à la suppression de l'article. Je ne reviendrai pas sur le prétendu amalgame entre immigration et terrorisme, car M. le ministre et moi-même nous sommes suffisamment exprimés sur ce sujet.

L'amendement n° 46 tend à prévoir la publication d'un décret, pour que soient fixées les conditions d'application de l'article 8. Or il ne me semble pas nécessaire de viser explicitement un tel décret puisque celui-ci est de toute façon nécessaire. Il est d'ores et déjà rappelé dans l'article 8 que les données peuvent être consultées dans les conditions fixées par la loi de 1978. En outre, dans son amendement n° 31, la commission demande qu'un « arrêté interministériel détermine les services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de la prévention et de la répression des actes de terrorisme au sens de la présente loi ». Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 46.

L'amendement n° 94 tend à limiter à la seule consultation l'accès aux fichiers par les services spécialisés dans la lutte antiterroriste, et donc à proscrire l'extraction de données ou l'interconnexion. Il y est également prévu qu'un décret précise les modalités d'habilitation des agents, ainsi que la liste des données accessibles strictement nécessaires à la lutte contre le terrorisme.

À l'Assemblée nationale, le Gouvernement a indiqué qu'il n'y aurait ni interconnexion des sept fichiers ni constitution d'un fichier à partir de données extraites de ces différents fichiers. Toutefois, il me semble qu'il ne faut pas présager de l'avenir et, notamment, écarter la possibilité d'interconnecter certains de ces fichiers, notamment le fichier des cartes d'identité et celui des passeports dans le cadre du futur projet INES.

De plus, l'exclusion de l'extraction de données ne doit pas aboutir à empêcher une personne habilitée à enregistrer les données qu'elle vient de consulter.

En définitive, la commission des lois émettrait un avis favorable sur l'amendement n° 94, à la condition que l'alinéa qu'il tend à insérer se résume à la phrase suivante : « Les accès aux différents traitements automatisés susvisés sont limités à de simples consultations. » Dans le cas contraire, elle y serait donc défavorable.

L'amendement n° 58 rectifié bis, présenté par notre ami Robert Del Picchia, vise à étendre aux agents des services de renseignement du ministère de la défense, notamment de la DGSE, l'accès aux fichiers énumérés à l'article 8, c'est-à-dire, principalement, les fichiers des cartes d'identité, des passeports, des permis de conduire ou des étrangers.

Ces services, qui interviennent en effet directement dans la lutte antiterroriste, à la différence des douanes, doivent pouvoir notamment procéder, rapidement, dans le cadre de la surveillance des filières terroristes, aux vérifications nécessaires à propos de nationaux ou de résidents détectés hors du territoire national. L'accès à ces fichiers serait limité aux agents individuellement désignés et dûment habilités de ces services et ne serait possible qu'à la seule fin de prévenir le terrorisme. La répression ne serait pas concernée, ce qui permettrait d'éviter toute confusion avec la police judiciaire.

À la suite de la rectification de cet amendement, il y est désormais prévu qu'« un arrêté du ministre de l'intérieur et du ministre de la défense détermine les services du ministère de la défense qui sont autorisés à consulter lesdits traitements ». En effet, outre la DGSE, la Direction du renseignement militaire pourrait notamment être concernée.

En définitive, la commission est plutôt favorable à cet amendement, pour des raisons de cohérence et d'efficacité. Mais elle a néanmoins souhaité interroger le Gouvernement sur les garanties qui encadreraient l'accès de ces services à de tels fichiers, notamment en matière de traçabilité. Par ailleurs, si l'amendement devait être adopté, il me semble utile de préciser à la dernière phrase qu'il s'agit des services « de renseignement » du ministère de la défense.

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