Nous l’avons déjà dit, le développement du livre numérique va bouleverser d’ici à quelques années toute la chaîne du marché de l’édition, au sens large. Il est à craindre que certains secteurs n’en souffrent. Nous avons abordé le problème spécifique des librairies indépendantes, dont certaines risquent de voir leur chiffre d’affaires substantiellement diminuer.
De la même façon, le secteur de l’imprimerie et celui du papier en général risquent aussi de souffrir beaucoup. Le transfert d’une partie du commerce de livres imprimés vers la transaction sous forme numérique va affecter de plein fouet ces industries, qui subissent déjà les conséquences du développement de la presse numérique. Il en résultera inévitablement des plans sociaux.
La maîtrise du prix du livre numérique permettra sans doute d’éviter des situations comme celles qui existent outre-Atlantique, où quelques opérateurs dont l’édition n’est pas le métier se positionnent désormais sur le marché en situation monopolistique, voire oligopolistique, et commercialisent comme produits d’appel des livres numériques à prix cassés, afin de mieux vendre d’autres services qui constituent le cœur de leur métier.
Ces pratiques, comme l’a justement indiqué Mme Mélot dans son rapport, mettent en péril la rémunération de l’ensemble des acteurs de la filière.
Nous sommes tous d’accord aujourd’hui pour tenter de trouver une solution afin de préserver l’ensemble de la filière. Aussi souhaitons-nous que le Gouvernement présente au Parlement un rapport d’information qui fasse l’objet de débats au sein respectivement de la de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat et de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale.
Ainsi pourront être mesurées les conséquences du développement du livre numérique pour l’ensemble de la chaîne du livre papier.
Surtout, pourra être examinée la façon dont les baisses de coût pour les éditeurs – nous venons de les évoquer –, estimées dans certains pays en avance sur la France à 40 %, peuvent aussi bénéficier aux différents acteurs de cette filière, qu’il s’agisse de ceux de l’imprimerie ou de l’industrie papier.
Loin de moi l’idée de faire une analogie facile, mais un grand nombre de secteurs de l’industrie, notamment dans les années quatre-vingt, ont subi des reconversions massives en raison de la robotisation, de l’informatisation : on les a regardés mourir. On aurait pu anticiper en octroyant des aides à la reconversion pour que les entreprises concernées ne soient pas laissées au bord du chemin.
En l’espèce, je propose d’anticiper. Grâce à l’élaboration du rapport que je préconise, la situation pourrait être appréciée et le développement du livre numérique pourrait être vécu comme un bonheur, un progrès, même par ceux qui en subiront les conséquences, notamment le secteur l’imprimerie, qui tient une place importante dans nombre de nos régions, mes chers collègues…