Intervention de Jean-Pierre Bel

Réunion du 14 janvier 2010 à 9h00
Application de l'article 68 de la constitution — Renvoi à la commission d'une proposition de loi organique

Photo de Jean-Pierre BelJean-Pierre Bel :

En conséquence, seule l’Assemblée nationale pouvait selon nous mettre en jeu cette responsabilité politique, puisque le Sénat ne peut être frappé de dissolution et que ses membres ne sont pas élus au suffrage universel direct.

Enfin, nous avions fait remarquer que, même destitué, le Président de la République pouvait continuer à siéger au Conseil constitutionnel.

Malgré leur bon sens, nos propositions de suppression de cette disposition baroque n’avaient pas été retenues.

Ces trois raisons avaient motivé notre abstention.

Le texte que François Patriat vient de présenter au nom du groupe socialiste aujourd’hui au Sénat a un but modeste : il vise en effet simplement à préciser les conditions de dépôt et d’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution portant réunion de la Haute Cour, d’une part, et les modalités de la procédure d’examen, de débat et de vote de la proposition de destitution, d’autre part.

Modeste, cette initiative parlementaire nous paraît cependant particulièrement opportune alors que, de notre point de vue, la pratique présidentielle depuis 2007 a substantiellement modifié l’équilibre que le constituant avait recherché avec cette réforme du statut pénal du chef de l’État.

Cette réforme voulait équilibrer immunité et destitution. Mais l’immunité était trop large, et la destitution était une arme trop facile en cas de cohabitation pour une majorité sénatoriale qui, jusqu’à ce jour, paraît immuable.

Or, cette réforme du statut pénal du chef de l’État a bien donné naissance, comme l’a indiqué à cette même tribune M. Frimat le 7 février 2007, « à des situations invraisemblables qui priveraient de manière choquante, pour une période de cinq ou dix ans, et peut-être davantage, des citoyens du droit de réclamer à la justice le respect des droits les plus élémentaires concernant leur personne ou leurs biens du simple fait que le Président serait concerné ».

Je ne souhaite pas non plus entrer dans la polémique, mais il faut tout de même aborder les questions telles qu’elles se posent, et constater – nous le voyons tous les jours, en particulier dans les colonnes de la presse – les changements de la fonction présidentielle en termes de style comme de contenu. Nous pouvons néanmoins faire de ce point un élément d’illustration de la question qui est posée.

Madame la ministre d’État, vous avez regretté la trop grande importance de la communication dans la vie publique. Mais l’hyper-présidence de M. Sarkozy est également une hyper-exposition de sa vie personnelle. Et lorsque la frontière entre la vie privée et la vie publique est aussi volontairement brouillée, les risques de dérapage s’en trouvent augmentés. C’est ce qui est arrivé.

Je veux simplement rappeler un certain nombre de faits qui dénotent cette évolution.

Le chef de l’État, qui a fait un choix concernant l’exposition de sa vie privée, a multiplié les procès : contre la publicité d’une compagnie aérienne, ce qui a permis à son épouse d’obtenir 60 000 euros de dédommagement

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