Intervention de Brice Hortefeux

Réunion du 14 janvier 2010 à 9h00
Application de la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale — Discussion d'une question orale avec débat

Brice Hortefeux, ministre :

… de telle sorte que nous pouvons terminer l’année avec une baisse générale de la délinquance supérieure à celle de l’année dernière. Si nous avons pu inverser la tendance en quatre mois, cela prouve qu’une volonté, une détermination, une mobilisation, une organisation différente ont permis d’obtenir des résultats. Cette tendance à la baisse est donc confirmée pour la septième année consécutive. La gendarmerie nationale contribue largement à ces résultats puisque, dans sa zone de compétences, nous avons enregistré une baisse de la délinquance de 2, 1 %. M. Kergueris a donc eu raison de souligner la qualité du travail des gendarmes, accompli dans le seul souci de la sécurité de nos concitoyens.

La loi du 3 août 2009 est la meilleure garantie d’un maintien du statut militaire de la gendarmerie, qui a été réaffirmé depuis deux siècles de manière constante et qu’il n’a jamais été question de remettre en cause. La police et la gendarmerie ont chacune leur culture, leur histoire, leur identité. Je pense même que la différence de statuts, loin de constituer un handicap, peut s’avérer un atout, car elle apporte une forme de diversité.

Dès l’annonce de sa volonté de rattacher la gendarmerie au ministère de l’intérieur, le Président de la République s’est engagé publiquement, clairement et sans ambiguïté à maintenir et garantir le statut militaire de l’arme.

La gendarmerie nationale conserve une pleine compétence en matière de police judiciaire, d’ordre public, de missions de renseignement ou dans le domaine international, comme l’ont rappelé à juste titre le président Josselin de Rohan et Mme Gautier.

En outre, par le respect du principe des zones de compétence territoriale, il n’est pas question de diminuer les effectifs d’une force pour renforcer l’autre, mais d’assurer une meilleure coordination sur le terrain et un appui mutuel lorsque les circonstances l’exigent.

L’équilibre passe également par la parité globale de traitement, qui ne signifie pas que toute mesure prise pour une force doive se traduire strictement à l’identique pour l’autre. Il est, en revanche, indispensable que la mise en œuvre d’une mesure concernant une force puisse être évaluée à l’aune de ses conséquences sur l’autre force, afin que le traitement des personnels de chacune soit globalement équilibré, comme l’a rappelé avec raison M. Kergueris.

Comme l’a souligné Jean Faure, la loi définit la gendarmerie comme « une force armée instituée pour veiller à l’exécution des lois ». L’expression « force armée » n’est pas une simple formule : il est défini précisément par le code de la défense et le protocole additionnel aux conventions de Genève.

Si la loi indique clairement que la gendarmerie est placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur, elle reste cependant sous l’autorité du ministre de la défense pour l’exercice de ses missions militaires. Ce partage est tout à fait simple, clair, net et transparent !

La loi précise également les sujétions et obligations particulières fixées aux officiers et sous-officiers en matière d’emploi et de logement en caserne, maintenant ainsi la capacité de la gendarmerie départementale à assurer ses missions à tout moment et en tout lieu dans sa zone de compétence territoriale. Cela signifie que l’ancrage territorial de la gendarmerie, auquel vous êtes tous attachés, mesdames, messieurs les sénateurs, est préservé et conforté. Je précise bien, une nouvelle fois – il vaut mieux se répéter que se contredire ! – que nous n’avons aucune volonté, affichée ou latente, de « démilitariser » la gendarmerie.

Bien au contraire, j’ajoute que le recrutement dans les grandes écoles militaires des officiers et la formation initiale et spécifique des gendarmes sont maintenus ; que le ministère de la défense continue d’assurer une partie des soutiens, qu’il s’agisse de la santé, du paiement de la solde ou du transport opérationnel ; que la concertation dans la gendarmerie reste soumise aux règles en vigueur au sein des forces armées.

Sur ce dernier point, M. le président de Rohan évoquait tout à l’heure des propositions du sénateur Boulaud qui se voulaient « décoiffantes ». Je n’ai pris mes fonctions au ministère de l’intérieur qu’au mois de juin, mais j’ai déjà pu constater que les gendarmes savent parfaitement se faire entendre ! Ils savent passer par le canal des associations d’anciens officiers, ce qui permet aux messages de passer assez vite. Parfois même, quand je me déplace dans les brigades et les casernes, les conjoints de gendarme savent très clairement exprimer, avec le sourire mais parfois avec fermeté, leurs messages.

En raison du caractère militaire du statut, la création de groupements professionnels demeure proscrite : on ne peut pas à la fois demander le respect de l’identité militaire et la battre en brèche ! Il faut choisir : soit on demande le maintien de l’identité militaire de la gendarmerie et on est contre la création de groupements professionnels, soit on y renonce et on en tire un certain nombre de conséquences. Mais on ne peut pas vouloir les deux à la fois, sans s’exposer à un risque d’incohérence !

Dans le même esprit, la participation des gendarmes aux opérations extérieures, dans un cadre militaire ou civilo-militaire, permet de maintenir et de renforcer les liens avec leurs camarades des autres armées.

C’est le cas en Afghanistan, comme plusieurs d’entre vous l’ont évoqué. La gendarmerie nationale y forme la police afghane dans les conditions d’un théâtre de guerre. J’ai d’ailleurs assisté, avec le général Roland Gilles entre autres, au départ de 150 militaires qui exercent, dans des zones extrêmement sensibles, une mission particulièrement difficile et, pour être tout à fait clair, périlleuse. Je me rendrai sur place au mois de mars ou d’avril.

Ainsi, à l’instar de Mme Gautier et de M. Faure, je veux souligner la qualité de l’engagement et la compétence de nos gendarmes à l’étranger.

Enfin, la gendarmerie nationale participe à la modernisation du ministère de l’intérieur et de l’action de l’État territorial.

Sa relation avec les préfets est rénovée et clarifiée, comme l’ont également souligné Mme Gautier et M. Faure.

Selon les termes de la loi, dans le respect du statut militaire pour ce qui concerne la gendarmerie nationale, le responsable du commandement de la gendarmerie nationale est placé sous l’autorité du préfet et lui rend compte de l’exécution et des résultats de ses missions.

Sa première des missions consiste, bien entendu, à lutter contre la délinquance et à assurer la sécurité de nos concitoyens, grâce à une présence physique de proximité à leurs côtés. Tel est l’objectif prioritaire que j’ai fixé aux responsables de la gendarmerie.

Les textes d’application de la loi du 3 août 2009 relative à la gendarmerie nationale ont été publiés ou sont en cours d’élaboration.

Comme l’a remarqué M. Jean Faure et pour répondre à l’interrogation de M. Joseph Kergueris, nous avons progressé, puisque 17 décrets et 9 arrêtés ont d’ores et déjà été publiés.

Les travaux se poursuivent dans un cadre interministériel et à un rythme soutenu. Il reste une vingtaine de textes à élaborer ou à toiletter. Je voudrais donc rassurer M. Kergueris sur la dynamique engagée. Nous serons très clairement au rendez-vous !

De par la suppression de la réquisition, la représentation nationale a souhaité encadrer précisément l’usage des armes, ce qui constitue une garantie, tant pour nos concitoyens que pour les militaires de la gendarmerie. Comme je m’y étais engagé lors de la présentation du texte, un décret d’application est en cours d’élaboration. Ce décret garantira une traçabilité complète des ordres donnés. De cette façon, je pense répondre à l’interrogation et au souhait de M. Jean Faure.

Il en sera de même, bien entendu, s’agissant des moyens militaires spécifiques de la gendarmerie utilisés dans le cadre du maintien de l’ordre.

En outre, je tiens à préciser que nous modernisons nos méthodes de lutte contre la délinquance.

Les règles en vigueur concernant la compétence territoriale tant de la police que de la gendarmerie ne sont pas remises en cause. Toutefois, des redéploiements entre les deux forces sont effectivement possibles. Ils sont même souhaitables en ce qu’ils permettent d’améliorer la cohérence et l’efficacité du dispositif de lutte contre la délinquance.

Le rapprochement des deux forces au sein du ministère de l’intérieur permettra de trouver, j’en suis convaincu, les répartitions les plus adaptées aux situations locales. Cela doit se faire au cas par cas et en étroite concertation avec les élus.

Tel est d’ailleurs l’objectif de la création de la police d’agglomération et de la police des territoires.

II s’agit tout simplement d’adapter l’organisation territoriale des forces de sécurité aux bassins de vie et de délinquance en mettant en place, ce qui constitue pour moi une préoccupation majeure, un commandement cohérent sur une zone donnée. Le dispositif doit, dans ce domaine également, être totalement transparent.

Comme le savent les élus parisiens, altoséquanais ou val-de-marnais qui sont présents, j’ai créé la police d’agglomération en septembre 2009, à Paris et dans les départements de la petite couronne – Val-de-Marne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion