Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 14 janvier 2010 à 15h00
Création des maisons d'assistants maternels — Adoption d'une proposition de loi

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le travail massif des femmes a radicalement bousculé les habitudes des familles en matière de garde d’enfants. Si, voilà deux siècles, cette responsabilité incombait automatiquement aux femmes, aux mères, cela n’est matériellement plus possible aujourd’hui. Cette question devient ainsi un véritable enjeu de société puisque la France, avec un taux de natalité supérieur à deux enfants par femme, est, avec l’Irlande, le pays le plus performant en la matière.

Cette situation est moins liée à une politique supposément nataliste de notre pays qu’à l’existence de mesures sociales et législatives protégeant les salariées désirant devenir mères. Pour autant, elle est souvent synonyme, pour de très nombreux parents, d’importantes difficultés. Il manque en effet près de 350 000 places de garde, tous modes confondus. Selon le Gouvernement, 200 000 places seulement feraient défaut ; ce constat explique les objectifs contenus dans la convention d’objectifs et de gestion liant l’État et la CNAF, convention qui ne prévoit la création que de 100 000 places en accueil collectif et de 100 000 places en garde individuelle, c’est-à-dire chez les assistants maternels.

Ce manque de place est aujourd’hui criant, comme nous l’avions dénoncé à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Notre collègue Guy Fischer faisait alors référence à une étude menée en Corse par une association familiale, et selon laquelle 43 % des couples qui n’ont pas recours à un mode de garde payant, soit qu’ils puissent compter sur leur famille, soit que l’un des deux parents ait réduit ou interrompu son activité professionnelle, en sont privés pour des raisons financières. Ce taux atteint même 63 % pour les familles monoparentales, particulièrement s’il s’agit de la mère.

La seconde justification de la renonciation au mode de garde payant est l’absence de place dans les structures collectives, en particulier dans les crèches. Cela est très logique et étroitement lié au premier motif dans la mesure où les crèches pratiquent des tarifs différenciés en fonction des revenus : pour les familles les plus modestes, la crèche reste le mode de garde le moins onéreux.

Il résulte de cette situation que 65 % des familles interrogées sur les améliorations à apporter à notre système de garde réclament clairement l’augmentation du nombre de places en crèche.

Loin de nous l’idée de stigmatiser les parents qui ont choisi de faire garder leur enfant par un assistant maternel, ou les professionnels concernés qui sont dans leur immense majorité des hommes et des femmes de qualité, totalement dévoués à leur métier.

C’est dans ce contexte de pénurie, néanmoins, que le Gouvernement, soutenu par la majorité, a fait le choix d’accroître par de nombreux moyens la capacité d’accueil des assistants maternels. C’est ainsi, monsieur le ministre, que vous avez modifié les règles d’attribution de l’agrément départemental, étendu l’extension du prêt à l’amélioration de l’habitat aux assistants maternels et décidé de porter à quatre le nombre d’enfants que les assistants maternels sont autorisés à garder. Il convient d’ajouter à cette liste la diminution du nombre d’heures de formation exigées pour bénéficier d’un agrément, qui est passé de soixante à trente heures. Cette dernière décision, contre laquelle nous nous sommes élevés, nous incite à penser que vous privilégiez le quantitatif sur le qualitatif ; ce n’est pas acceptable, en particulier dans un domaine aussi sensible que celui de l’accueil des jeunes enfants, personnes vulnérables s’il en est.

Chacun se souvient, bien sûr, de l’amendement de nos collègues Lardeux et Arthuis tendant à généraliser l’expérimentation menée en Mayenne et dans les Alpes-Maritimes concernant les regroupements d’assistants maternels et déposé à l’occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Il a été adopté par notre assemblée, mais la commission mixte paritaire ne l’a pas conservé ; on le retrouve aujourd’hui dans cette proposition de loi, avec la dénomination « maisons d’assistants maternels ».

Nous avions voté contre cette disposition, car nous considérions que la généralisation de cette expérimentation n’était pas de nature à répondre durablement aux difficultés que rencontrent les familles les plus modestes.

Je dois reconnaître que les trois regroupements que nous avons visités en Mayenne semblent fonctionner de manière convenable et qu’ils répondent, notamment, à la demande de certaines familles de bénéficier d’un mode de garde prenant en compte les horaires atypiques. Indéniablement, ces regroupements peuvent aussi correspondre à la volonté d’un certain nombre d’assistants maternels, qui éprouvent le besoin de travailler de manière plus collective ou qui souhaitent exercer leur activité professionnelle dans un lieu distinct de leur domicile, en raison notamment des changements qui interviennent au sein de leur famille, comme le vieillissement de leurs propres enfants.

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