Intervention de Roland Muzeau

Réunion du 17 novembre 2006 à 22h00
Financement de la sécurité sociale pour 2007 — Articles additionnels après l'article 60, amendement 356

Photo de Roland MuzeauRoland Muzeau :

Mon intervention vaudra également présentation de l'amendement n° 356, monsieur le président.

S'il est possible de relativiser les critiques suscitées par le coût croissant du dispositif de l'ACAATA - à champ constant, il avoisinerait 1, 1 milliard d'euros en 2009 -, dont le nombre de bénéficiaires s'étend, en prenant en compte l'évaluation des gains résultant des retraites non versées et des soins non dispensés du fait d'une morbidité plus précoce, les critiques portant sur le dispositif en lui-même et sur son fonctionnement ne souffrent, quant à elles, aucune contestation.

En effet, syndicats et associations de victimes sont unanimes à dire que le dispositif est très inégalitaire. L'IGAS, chargée d'une évaluation, a confirmé son caractère imparfait et inéquitable, dans le sens où il laisse sur la touche des personnes qui ont été réellement exposées dans des établissements non inscrits sur la liste, faute de relever du champ d'activité couvert ou parce que leur activité principale n'impliquait pas l'utilisation d'amiante, alors que des personnes non directement exposées peuvent néanmoins se prévaloir d'avoir travaillé dans des entreprises figurant sur la liste.

Pour autant, aucune recommandation n'a été faite concernant les critères jurisprudentiels d'éligibilité restrictifs de l'activité principale ou de l'activité significative. La prise en compte de la situation de travail, de l'exposition à l'amiante des salariés à l'occasion de leur activité n'est pas d'actualité.

Si l'IGAS a également confirmé que le dispositif est injuste, car il ne concerne pas les entreprises sous-traitantes, elle n'en a pas moins rejeté, dans son rapport, la notion de « sites industriels » avancée par les associations et préconisée par le Sénat, car « trop complexe à mettre en oeuvre », surtout en cas de disparition des entreprises donneuses d'ordre.

S'agissant maintenant de la gestion des listes, de la procédure d'inscription peu transparente, le rapport de l'IGAS est là aussi très décevant.

Certes, il est reconnu dans le rapport que la gestion centralisée des listes par la direction des relations du travail et la direction de la sécurité sociale est discutée, que la capacité de ces services à mener les enquêtes de terrain nécessaires à l'instruction des demandes est remise en cause. Au-delà du niveau de la charge de travail, est posée la question de savoir si ces tâches de gestion relèvent d'une administration centrale.

Pour autant, certaines propositions, dont celle de l'ANDEVA, en faveur du transfert à l'échelon départemental de l'inscription des établissements sur les listes, pour plus d'efficacité et de proximité, sont balayées d'un revers de main.

Le rapport qualifie de rigoureuses les enquêtes de terrain, alors que, par exemple, il est souligné que la consultation des services de prévention des CRAM porte essentiellement sur le nombre de maladies professionnelles reconnues dans l'établissement, ou que les services de santé au travail ne sont pas tenus de communiquer la liste des établissements dans lesquels le personnel est soumis à un contrôle médical renforcé attestant des conditions d'utilisation de l'amiante...

La gestion centralisée des listes est qualifiée de sérieuse, bien qu'il soit fait état des critiques formulées par les associations concernant le processus qui conduit le ministre à établir par arrêté la liste des établissements éligibles à l'ACAATA.

En fin de compte, les pistes de réforme envisagées s'imbriquent en vue non pas d'améliorer effectivement l'accès au dispositif via la voie collective et le système de listes, mais de faire disparaître celles-ci, à terme, et de leur substituer un dispositif auquel on accéderait de façon individuelle et dont la gestion serait entièrement assurée par le réseau de la CNAMTS et des CRAM, le tout sans que l'on soit convaincu de l'apport des scénarii privilégiés.

À rebours des options retenues par l'IGAS, nous faisons le choix d'un maintien et d'une amélioration du système collectif, démarche non exclusive de la création d'une voie d'accès individuelle.

Nous pensons que l'aménagement de la procédure actuelle d'instruction des demandes, d'actualisation des listes apporterait une réelle « plus-value ». Nous ne fermons pas la porte à la déconcentration de la gestion des listes, bien au contraire : nous proposons que, à l'échelon local, soient créées des commissions réunissant, dans chaque CRAM, les acteurs concernés par la mise en oeuvre du dispositif de l'ACAATA, afin que la liste indicative des secteurs d'activité, des métiers et des établissements éligibles puisse évoluer, être complétée en fonction de la connaissance des situations locales. C'est l'objet de notre amendement n° 355.

Concernant la transparence des décisions, pour éviter précisément toute discussion, notamment, sur le détournement de l'objet du FCAATA au profit de mesures relevant de la politique de l'emploi, nous proposons, a minima, que les décisions de refus d'inscription sur les listes soient motivées. C'est le sens de notre amendement n° 356.

Au-delà des réponses que nous attendons sur ces propositions, qui permettront de mieux cerner quels sont les scénarii de l'IGAS ayant la faveur du Gouvernement, nous avons voulu, en présentant ces amendements, rappeler la nécessité et l'urgence d'une réforme du dispositif du FCAATA, réforme attendue avec énormément d'impatience par les victimes de l'amiante et leurs associations.

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