Intervention de Bernard Vera

Réunion du 25 novembre 2009 à 22h45
Loi de finances pour 2010 — Vote sur l'ensemble de la première partie

Photo de Bernard VeraBernard Vera :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que le discours présidentiel disserte depuis plus d’un an sur la « moralisation » et la « refondation » du capitalisme, voici qu’un quotidien économique du matin nous apprend que les patrons des entreprises, hors CAC 40, perçoivent en moyenne une rémunération de 500 000 euros, les rémunérations les plus élevées allant jusqu’à 1 million d’euros ! Les éléments variables de rémunération dans ces entreprises hors CAC 40 sont tellement importants qu’on peut se demander ce qu’est devenu le « pacte éthique » du MEDEF, sur lequel s’est appuyé le Gouvernement pour ne pas légiférer.

Le même jour, un journal proche de la majorité présidentielle nous indiquait, sous le titre « Les entreprises françaises paient beaucoup d’impôts..: mais facilement » que notre pays se positionnait particulièrement bien sur le plan de l’attractivité en occupant la cinquante-neuvième position sur cent quatre-vingt-trois pays pour ce qui est de la pression fiscale sur les entreprises.

Les éléments qui commencent à nous parvenir sur la réalité des inégalités de revenus sont de plus en plus éclairants : les plus aisés des ménages ont connu, ces derniers temps, une très sensible amélioration de leur situation, marquée par une progression spectaculaire de leurs revenus.

Ainsi, les quartiers parisiens les plus dynamiques en termes de revenus sont les Ier, VIe et VIIe arrondissements. L’écart de revenu moyen entre l’arrondissement le plus modeste et le plus aisé de la capitale est désormais de un à cinq. Les 5 % de Parisiens les plus riches capitalisent aujourd’hui 40 % des revenus fiscaux et ont capté 82 % de la progression des revenus imposables !

Ces quelques éléments montrent à quel point les choix opérés à travers le projet de loi de finances pour 2010, dans son volet recettes, tournent le dos à la plus élémentaire exigence d’équilibre.

On supprime la taxe professionnelle, en ressuscitant l’antique patente et en la doublant d’un succédané de TVA, et on invente la taxe carbone, tandis que l’impôt sur le revenu est encore une fois et toujours plus injuste, victime de la constitution de niches sans cesse plus nombreuses.

Pour les collectivités locales, c’est moins de recettes fiscales, moins de services publics et plus de charges, puisqu’elles aussi paieront la « contribution carbone ».

Les options retenues par le Gouvernement et amplifiées par la majorité sont particulièrement significatives de cette logique fiscale, qui, comme souvent, ne profite qu’aux riches. Les dernières années viennent pourtant de nous montrer à quel point ces cadeaux fiscaux étaient sans efficacité sur la situation réelle du pays.

À quoi a servi la défiscalisation des heures supplémentaires ? À remplacer des embauches, même à durée déterminée, par des heures de travail sans impôt ni cotisations sociales !

À quoi a servi l’allégement sur les droits de succession et les donations ? À permettre à quelques contribuables bien conseillés d’optimiser leur patrimoine, alors même que les inégalités croissantes de patrimoines sont au cœur de la mise en cause du pacte républicain dans notre pays !

À quoi a servi l’allégement de la fiscalité des plus-values des groupes, au point de la faire disparaître ? À donner de la trésorerie à des entreprises qui en étaient déjà pourvues, une trésorerie qui semble leur avoir permis de poursuivre leur croissance externe, comme des rachats d’entreprises, par exemple, et de financer parfois des plans de restructuration dans notre pays. N’est-ce pas PSA qui annonçait il y a peu 6 000 suppressions d’emplois dans ses unités en France et la poursuite de son développement dans d’autres pays ?

La fiscalité n’a pas vocation à neutraliser les conséquences des choix de gestion des entreprises, pas plus qu’elle ne doit valoriser tel ou tel placement, comme nous le voyons avec les incitations à l’épargne boursière ou à l’investissement locatif dans sa version Robien-Borloo-Scellier.

La fiscalité devrait servir à donner à l’État les moyens de mener les politiques publiques dont l’ensemble de la collectivité, particuliers comme entreprises ou collectivités locales, peut ensuite tirer parti pour son propre développement.

Cette première partie du projet de la loi de finances ne répondant aucunement à cette orientation, nous ne pourrons que voter contre.

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