Intervention de Yvon Collin

Réunion du 25 novembre 2009 à 22h45
Loi de finances pour 2010 — Vote sur l'ensemble de la première partie

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Au terme de l’examen des articles relatifs aux recettes du projet de loi de finances prévu pour 2010 et des débats qui y ont été associés, je rappellerai que ce budget atteint un record historique en termes de niveau de la dépense publique puisque celle-ci qui devrait représenter 56% de la richesse nationale.

Le niveau du déficit public - 8, 5 % du PIB - est devenu insoutenable à moyen terme. La seule reprise économique annoncée à partir de 2011, avec un taux réaliste de 1, 5 % de croissance en volume, ne sera pas susceptible de résorber un déficit structurel compris, selon le gouvernement lui-même, entre 45 milliards et 50 milliards d’euros, sur un déficit total de 101 milliards d’euros, hors plan de relance.

Le taux de croissance de la dépense s’élève officiellement à 1, 2 % mais, en réalité, il est de 2, 7 % si l’on tient compte de trois facteurs : l’effet à moyen terme de la réforme de la taxe professionnelle, soit 4, 2 milliards d’euros ; la hausse des remboursements et des dégrèvements, soit 1, 8 milliard d’euros ; la hausse des dépenses fiscales hors plan de relance, soit 1, 1 milliard d’euros.

Ce budget est l’occasion de rappeler l’impérieux besoin de justice dans notre système fiscal. Plus de justice signifie surtout la fin du « bouclier fiscal », qui profite principalement à une frange quantitativement minoritaire et économiquement privilégiée de la population, alors que notre pays a tant besoin de recettes fiscales pour que l’État puisse remplir tous ses devoirs régaliens.

Les membres de mon groupe prônent le retour aux fondamentaux en matière fiscale : que chacun contribue aux charges publiques en fonction de ses moyens. Il est grand temps que la progressivité de l’impôt redevienne la règle, redevienne la norme.

D’ailleurs, je regrette la timidité de la commission des finances de notre assemblée, et plus encore la rigidité des positions du Gouvernement, qui persiste à maintenir un système aussi inéquitable qu’inefficace. L’instauration d’une taxe additionnelle à l’impôt sur les sociétés aurait pu être une simple mesure de justice fiscale.

Au moment où la BNP s’apprête à verser 1 milliard d’euros de bonus et de primes diverses, peut-on nous faire croire que les banques ne pourraient pas contribuer aux finances du pays à hauteur de 700 millions ou de 1 milliard d’euros ?

Pour obtenir davantage de justice fiscale - et donc sociale –, il convient de lutter contre les niches fiscales. Sur ce point, en dépit des efforts consentis cette année encore, nous ne sommes pas parvenus - par manque de volonté politique - à éradiquer l’ensemble de ces niches. Au lieu de faire un pas dans le sens d’une plus grande solidarité, laquelle manque cruellement à notre politique fiscale en ces temps de crise, le Gouvernement maintient le cap.

Je tiens ici à saluer la qualité des débats relatifs à la réforme de la taxe professionnelle, notamment dans la réécriture complète de l’article 2, même si, avec plusieurs collègues du groupe du RDSE, nous avons défendu un amendement de suppression de cet article, ultime tentative pour sauver la taxe professionnelle et, avec elle, le principe de l’autonomie fiscale des collectivités.

Cet article a été totalement récrit. La nouvelle contribution économique territoriale, dont les modalités ont été adaptées, permet le maintien d’un lien formel entre l’entreprise et la collectivité territoriale.

En dépit du caractère plus que contestable d’une réforme qui porte atteinte non seulement à l’autonomie fiscale des collectivités, mais aussi et surtout à leur équilibre financier, je me félicite que deux sous-amendements présentés par des membres de mon groupe et moi-même aient été adoptés afin d’atténuer les dommages collatéraux que ne manquera pas de provoquer la suppression de la taxe professionnelle.

Le premier a permis – avait permis, devrais-je dire – le maintien du plafonnement de la valeur ajoutée à 3, 5 % et non à 3 %. Hélas ! le Gouvernement vient d’user de toutes ses prérogatives - et elles sont nombreuses - pour revenir sur ce vote acquis par le Sénat la semaine dernière. Décidément, révision de la Constitution ou pas, nous ne sommes toujours pas, mesdames et messieurs les ministres, à armes égales !

Le deuxième sous-amendement, auquel tenaient beaucoup les radicaux de gauche et dont le vote a été pour nous une réelle satisfaction, permet, d’une part, d’atténuer le renforcement du poids de l’imposition sur les entreprises de l’économie sociale que sont les mutuelles, unions, institutions de prévoyance et entreprises d’assurance, et, d’autre part, d’affirmer la reconnaissance des missions de solidarité et d’intérêt général qui sont remplies par l’économie sociale.

Enfin, concernant la nouvelle contribution carbone, je ne pense pas qu’elle favorisera la reprise de la croissance et une vraie sortie de crise.

Un impôt écologique intelligent aurait donné aux entreprises comme aux ménages le moyen d’adopter des comportements compatibles avec le développement durable. Il n’en sera rien. Ce n’est pas une centaine d’euros reversés aux familles avant les élections régionales qui leur permettra de changer de voiture ou de chaudière ! En réalité, il s’agit d’une taxe additionnelle à la taxe intérieure sur les produits pétroliers, et donc d’une taxe de plus - la dix-septième créée depuis 2007 - qu’acquitteront d’abord les familles modestes éloignées des lieux de travail, des lieux de scolarisation des enfants et des centres-villes, et vivant dans des communes non desservies par des transports collectifs.

Pour toutes ces raisons et pour d’autres encore que je n’ai pas le temps de développer, la grande majorité des membres du groupe RDSE ne votera pas les dispositions de la première partie du projet de loi de finances pour 2010.

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