Intervention de Denis Badré

Réunion du 15 juin 2005 à 15h00
Conseil européen — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Denis BadréDenis Badré :

L'exercice de définition des perspectives financières n'incite pas aux vraies remises en cause. De perspective en perspective, on « ravaude », on continue, on va au fil de l'eau, sans réelles perspectives européennes au sens fort, c'est-à-dire au sens politique.

Pourtant, une révision profonde du contenu et de la forme du budget européen s'impose aujourd'hui.

S'agissant du contenu, je prendrai deux exemples : d'une part, les crédits de recherche du PCRD justifieraient une vraie réflexion ; d'autre part, l'accident du tunnel du Mont-Cenis, « renvoyant » sur le Mont-Blanc un trafic de camions dont plus personne ne veut, confirme la fécondité de l'idée des réseaux transeuropéens. Encore faut-il la mener au bout, en lançant, par exemple, comme nous l'avons déjà demandé, un programme de percées alpines de statut européen. Ne s'agit-il pas de protéger les Alpes, poumon de l'Europe et pas simplement de l'Autriche, de la France ou de l'Italie ? Car les poids lourds qui traversent les Alpes vont non seulement de Savoie en Lombardie, mais souvent aussi de Finlande en Grèce.

Je pourrais multiplier les exemples, en évoquant également la PESC, la politique étrangère et de sécurité commune, mais je m'arrête là.

Monsieur le Premier ministre, pour conclure, nous aimerions voir la France proposer aujourd'hui à l'Europe un vrai programme politique, organisé autour de trois priorités.

Première priorité : réussir l'élargissement.

A cet égard, tout n'a pas été fait le 1er mai 2004, loin s'en faut. Il convient aujourd'hui de réussir l'élargissement, dans l'intérêt des pays qui nous ont rejoints comme dans celui des anciens Etats de l'Union, ce qui constitue déjà une vaste entreprise.

Deuxième priorité : appeler l'Union et ses membres à mettre en oeuvre, ensemble, une vraie politique scientifique, nous permettant d'améliorer notre compétitivité et de rivaliser avec nos grands concurrents, actuels ou futurs, notamment les Etats-Unis, l'Inde et la Chine.

Troisième priorité : lancer une vraie politique d'aide aux pays les plus pauvres, politique nécessaire si nous voulons lutter contre les délocalisations, politique indispensable si nous voulons aller vers un monde de paix, respectueux de tout homme.

Dans ces deux dernières priorités, vous aurez retrouvé, monsieur le Premier ministre, une nouvelle présentation de la stratégie de Lisbonne. A mon sens, présenter la stratégie de Lisbonne en affirmant que nous voulons retrouver notre compétitivité par rapport à nos grands concurrents et aider ceux qui sont à la traîne est une conception dans laquelle tout le monde peut se retrouver beaucoup plus facilement, car cette conception est beaucoup plus lisible et a un sens beaucoup plus fort sur le plan politique.

N'est-ce pas sur de tels sujets - compétitivité de l'Europe et de chacun de ses Etats membres, aide aux pays en développement -, qui s'avèrent vitaux pour nous, pour l'Europe et pour le monde, que la France doit de nouveau savoir ouvrir des voies ?

Monsieur le Premier ministre, nous avons mal à la France, nous avons mal à l'Europe !

Nous voulons que la France retrouve sa fierté de servir avec autant d'humilité que d'ambition l'extraordinaire projet humaniste engagé voilà cinquante ans par la France et l'Allemagne, et que le monde attend.

Nous attendons de vous, monsieur le Premier ministre, que vous fassiez tout pour que les Français renouent avec le rêve européen et pour que les Européens reconnaissent de nouveau en la France le pays qui donne du souffle à l'Europe !

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