Sur cet amendement, pour lequel nous demandons un scrutin public, madame la présidente, je souhaite faire un court rappel, surtout après l'intervention de M. le rapporteur général.
C'est un amendement de l'Assemblée nationale qui a prévu cette taxation. Au Sénat, nous n'avons pas encore fait cette révolution, puisque M. le rapporteur pour avis de la commission des finances nous propose d'adopter des dispositions de moindre portée.
Pourtant, mes chers collègues, force est de constater que la taxation proposée par l'Assemblée nationale reste, comme cela a été dit, très largement « cosmétique ». Elle n'est à la hauteur ni des enjeux ni des attentes légitimes de justice sociale : 250 millions d'euros par rapport à un déficit prévisionnel de 8, 9 milliards d'euros en 2008, malgré les prévisions optimistes de M. Xavier Bertrand voilà à peine un an, c'est une goutte d'eau par rapport à une dette sociale cumulée de près de 80 milliards d'euros ; ce n'est même pas une « recette de poche », c'est une pièce jaune !
Faut-il en rester à la pièce jaune pour les dirigeants de nos entreprises ? Nous pouvons nous poser la question ! Que représentent, mes chers collègues, ces 250 millions d'euros, à propos desquels on semble véritablement s'alarmer ici, par rapport aux 850 millions d'euros que doivent rapporter les franchises introduites à l'article 35 du projet de loi, qui ne seront pas payées par les mêmes ?
Nous ne partageons pas cette conception de la justice sociale, qui consiste à faire payer les malades pour équilibrer les comptes de la sécurité sociale, au nom d'une prétendue politique qui veut que les malades payent pour les malades, épargnant du même coup aux dirigeants d'entreprise la participation à une véritable solidarité.
Je souhaite vous rappeler à cet égard le principe fondateur de la sécurité sociale, tel que l'avait défini Pierre Laroque : « Chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ». Personne ne doit s'en exonérer, pas même nos dirigeants les plus prestigieux. Or, de projet de loi de finances en projet de loi de finances, de franchise en franchise, plus on s'éloigne de la base, moins on veut participer ! Telle est la réalité !
J'ai entendu les inquiétudes de M. le rapporteur général, qui m'ont grandement alarmé, sur le risque de perte des cerveaux et de délocalisation. Mais ceux qui vont payer la franchise ne risquent pas de partir : ils sont attachés à leur travail ; on peut les taxer !
Au moment où vous contestez cet apport à la sécurité sociale de nos dirigeants, je vous mets en garde contre l'incompréhension que risque de provoquer une telle disparité de traitement. En effet, les franchises concerneront deux millions de travailleurs pauvres, qui n'ont pas accès à la couverture maladie complémentaire. Eux qui se lèvent tous les matins pour travailler, pour faire fonctionner les entreprises qui réalisent des bénéfices, paieront les 50 centimes sur le médicament, le 1 euro, qui est déjà prélevé, sur la consultation, les 18 euros sur les « actes lourds », les 2 euros sur les transports et le forfait hospitalier qui n'en finit pas de croître. Ils vont payer plein pot !
Pendant ce temps, on leur expliquera qu'on ne peut pas demander aux dirigeants d'entreprise d'accomplir un effort de solidarité. L'exemple doit venir de ceux qui sont à la tête du monde économique ! §Or, parfois, il faut le savoir, leur exemple est plutôt néfaste !
Je pense également, mes chers collègues, à ceux qui perçoivent l'AAH, l'allocation aux adultes handicapés, et à ceux qui sont victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, qui vont aussi payer la franchise. Vous ne les prenez pas en compte lorsque vous dites que, malgré toutes les critiques que l'on peut formuler à l'encontre des stock-options, il n'existe aucune raison de les taxer davantage pour permettre que se manifeste, dans ce pays, une véritable solidarité.