La séance, suspendue à treize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Christian Poncelet.
La séance est reprise.
Jamais, dans ces lieux, l'application de l'article 40 de la Constitution n'aura été aussi sévère, et je pèse mes mots. Peut-être devrais-je dire antidémocratique. Toutefois, je n'irai pas jusque-là, je me contenterai de regretter que la commission des finances, en jetant l'anathème sur les amendements du groupe communiste républicain et citoyen, mais aussi sur ceux du groupe socialiste - même la commission des affaires sociales est touchée -, prive la Haute Assemblée d'un réel débat sur le financement de notre régime de protection sociale.
Pour ce qui est du groupe communiste républicain et citoyen, il est curieux de constater que notre « ordonnance », nos amendements prévoyant de nouvelles ressources et une meilleure satisfaction des besoins seront écartés de la discussion. Sans doute est-ce l'expression d'une crainte du débat...
En clair, il serait possible de débattre de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et après... plus rien ! Impossibilité de débattre de l'allongement du congé de maternité, de l'aide médicale d'État, du versement des allocations familiales dès le premier enfant, du financement des hôpitaux, impossibilité de débattre en profondeur de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, impossibilité encore de débattre des questions liées à l'amiante, à la juste indemnisation des salariés victimes du travail qui, souvent pour des questions de rentabilité, tue.
Ainsi donc, vous refusez de créer de nouvelles recettes pour justifier la non-satisfaction des besoins et faire avancer à pas masqués votre dangereuse réforme de privatisation de la sécurité sociale.
La réduction draconienne du droit d'amendement imposée par la majorité sénatoriale empêche le débat. Peut-on considérer que les conditions du débat démocratique sont réunies lorsque toute proposition économique et sociale alternative est censurée ? La droite sénatoriale - commission des finances en tête - entend confiner le Parlement dans une mission de contrôle. M. Arthuis a d'ailleurs rappelé aux membres de la commission des finances que le Parlement n'avait pas à créer de nouvelles dépenses ou de nouvelles recettes et devait garder un rôle de contrôle, sous le prétexte que la qualité des amendements n'était pas à la hauteur de la tâche.
De fait, la mission législative, qui est la raison d'être du Parlement dans une conception démocratique des institutions, est réduite à son strict minimum. En empêchant le débat parlementaire d'avoir lieu, vous vous attaquez au coeur de la démocratie. De toute évidence, la nouvelle interprétation de l'article 40 pose la question clé de la nécessité même d'un parlement, d'un pouvoir législatif.
Je demande donc, au nom de mon groupe, une réunion urgente de la commission des finances pour réexaminer les conditions générales de recevabilité des amendements et revenir à la possibilité pour chaque sénateur de présenter ses propositions en séance publique.
Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Je vous donne acte de votre rappel au règlement, madame David.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
Monsieur le président, nous avons nous-mêmes formulé un rappel au règlement hier ; je m'associe aujourd'hui à la demande qui vient d'être faite de réunir la commission des finances.
Je voudrais simplement vous rappeler que, lors de sa réunion du 20 juin 2007, la conférence des présidents a décidé, ...
M. le président. ...« pour tenir compte de la nouvelle jurisprudence du Conseil constitutionnel et des travaux collectifs menés par la commission des finances sur la mise en oeuvre de l'article 40 de la Constitution au Sénat, d'appliquer, à compter du 1er juillet, un dispositif de contrôle préalable de la recevabilité financière des amendements ». J'ai adressé à chacun d'entre vous une lettre à ce sujet. Par ailleurs, monsieur Bel, j'ai demandé à M. Arthuis d'adresser à tous les sénateurs ce vade-mecum de l'article 40.
M. le président montre le document.
Monsieur le président, je confirme ce que vous venez de dire. Cependant, les documents qui nous ont été adressés contenaient des critères précis, qu'il conviendrait de respecter. Or, à notre sens, l'interprétation qui en est faite est abusive.
Je voudrais aller dans le même sens que M. Bel, puisque je siège également au sein de la conférence des présidents.
Nous avons bien pris acte du fait qu'il fallait respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel, même si nous n'étions pas d'accord. Il n'empêche que l'on en fait une interprétation extensive. D'ailleurs, la commission des finances elle-même ne semble pas avoir toujours la même interprétation.
Si nous demandons une réunion de la commission des finances, c'est pour clarifier la situation. Car si on ne peut plus présenter d'amendements, le législateur n'a plus besoin de siéger !
Mes chers collègues, je vous ai informé de la décision de la conférence des présidents. J'ai demandé qu'un vade-mecum soit envoyé à chacun d'entre vous, mais je ne suis pas chargé de veiller à l'application du texte.
Puisque cette application pose problème, je demande à M. Jégou, qui est membre de la commission des finances, de bien vouloir apporter quelques précisions à cet égard.
Vous avez la parole, mon cher collègue.
M. Jean-Jacques Jégou, au nom dela commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Le président de la commission des finances et le rapporteur général n'étant pas encore là, je ne voudrais pas m'élever au-dessus de ma condition de simple membre de cette commission.
Sourires.
Je n'interviendrai pas sur les raisons politiques qui ont incité hier les membres du groupe socialiste et aujourd'hui les membres du groupe communiste républicain et citoyen, en y allant un peu fort, à dire qu'il n'y avait plus de démocratie.
Sachez simplement, mes chers collègues, qu'il y a un texte. En l'occurrence, la commission des finances n'a pas manqué à ses obligations en termes d'interprétation et de communication. Ainsi, tous les dépositaires d'un amendement retoqué ont reçu un courrier.
Signes de dénégation sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
M. le président de la commission des finances entre alors dans l'hémicycle.
Cela étant, maintenant que M. Arthuis est arrivé, je préfère lui laisser la parole.
Monsieur Arthuis, il y a eu un rappel au règlement du groupe communiste républicain et citoyen, qui considère, comme le groupe socialiste, que l'application de l'article 40 est interprétée de manière trop restrictive. Peut-être pourriez-vous apporter un complément d'information et rappeler que vous avez fait distribuer, à ma demande, un vade-mecum à tous les sénateurs.
Vous avez la parole, monsieur le président de la commission.
Merci de me permettre de dissiper un éventuel malentendu, monsieur le président.
Souvenez-vous, mes chers collègues, il y a un an, le Parlement adoptait le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Quelques semaines plus tard, le Conseil constitutionnel censurait certaines de ses dispositions en faisant explicitement reproche au Sénat de n'avoir pas appliqué l'article 40 et en le sommant de le respecter, faute de quoi il le ferait à sa place.
Je le souligne, cet exercice n'est pas gratifiant pour ceux qui en assument la responsabilité.
Il est arrivé à chacun d'entre nous de défendre avec enthousiasme un amendement, de susciter l'adhésion d'un nombre croissant de nos collègues, puis, après une demi-heure de débat, pensant emporter la décision, d'entendre le gouvernement invoquer l'article 40. Et là, tout s'arrêtait !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Le représentant de la commission des finances était alors chargé de dire si l'article 40 s'appliquait ou non. Sa réponse affirmative faisait naître une sorte d'incompréhension, quelquefois de la colère, qui se prolongeait dans les couloirs du Sénat au sortir de l'hémicycle.
Exclamationssur les travées du groupe CRC.
Il est également arrivé qu'un ministre ayant perdu un arbitrage interministériel suscite un amendement défendu par l'un d'entre nous et contre lequel il se gardait bien d'invoquer l'article 40. Une fois la disposition votée, l'opinion publique était immédiatement informée de cette bonne nouvelle. Mais la censure du Conseil constitutionnel était vécue sinon comme un désastre, du moins comme un désaveu constitutionnel.
C'est pourquoi nous avons décidé, sous votre autorité, monsieur le président, et avec l'accord de tous les groupes du Sénat, ...
Compte tenu de ces circonstances, j'ai signé ce matin plusieurs lettres indiquant que certains amendements n'étaient pas recevables. Mme David ou M. Godefroy, par exemple, vont en recevoir quelques exemplaires.
Je le rappelle, toute augmentation de la charge publique n'est pas gageable. Les nombreux amendements visant à augmenter la dépense en augmentant à due concurrence tel ou tel impôt sont donc irrecevables.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir permis de faire appel à la compréhension de nos collègues. Respecter la Constitution, ce n'est pas bafouer la démocratie !
Applaudissementssur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.
Pour la petite histoire, je rappelle que le Sénat a modifié l'application de l'article 40 sur l'initiative d'Étienne Dailly.
Vous vous êtes déjà exprimé, monsieur Bel.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
Je voudrais faire observer au président de la commission des finances que son argumentaire pourrait s'appliquer à tous les textes que nous examinons ici. Mais quand il s'agit de textes financiers, ne pas pouvoir déposer d'amendements prévoyant des dépenses gagées sur des recettes nous prive de tout moyen d'action.
Quand la commission des affaires sociales se réunit, nous ne savons même pas pourquoi nos amendements ont été écartés.
Il suffit de connaître la Constitution !
À ma connaissance, la commission des finances ne statue pas. C'est un comité restreint qui donne un avis.
Ensuite, il est trop tard pour rebondir, car nous ne pouvons plus déposer d'amendement. Une telle situation n'est pas acceptable !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Il y a deux poids deux mesures : des amendements sont acceptés alors qu'ils sont gagés sur des taxes additionnelles aux droits sur les tabacs !
L'orateur brandit un amendement.
Monsieur le président, je voudrais vous faire part de quelques réflexions.
Tout d'abord, grande a été ma surprise de voir qu'un amendement de la commission des affaires sociales tombait sous le coup de l'article 40 alors qu'un amendement identique du groupe CRC n'était pas écarté.
Rires et exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Ensuite, j'ai trouvé excessive l'interprétation qui a été faite d'un amendement que j'avais déposé à titre personnel. Je m'en suis expliqué avec le président de la commission des finances, et je pensais que le problème était réglé. Finalement, cet amendement a été invalidé alors qu'il ne créait pas de dépenses nouvelles : il modifiait l'imputation d'une dépense existante entre la maison du handicap et l'assurance maladie. Je ne comprends donc pas la décision qui a été prise.
Enfin, j'observe qu'au moment où vous apprenez que votre amendement a été refusé au titre de l'article 40, il est trop tard pour le rectifier, car le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a là une véritable entrave au travail parlementaire.
M. Bernard Frimat opine.
Cette situation est d'autant moins acceptable que le Conseil constitutionnel n'a jamais annulé un article de loi au motif qu'il aurait résulté d'un amendement déposé en contradiction avec l'article 40 de la Constitution.
Je comprends le processus qui a été engagé, et je l'admets tout à fait. Néanmoins, il faut que les parlementaires puissent déposer des amendements rectifiés, sinon on porte atteinte aux droits du Parlement.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre séance de ce jour débute par un débat thématique sur la démographie. Je m'en réjouis, car c'est un sujet sensible, préoccupant, sur lequel je n'ai eu de cesse, depuis que je siège dans cet hémicycle, de tirer la sonnette d'alarme.
L'an dernier, à la même époque, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, j'avais déposé des amendements afin d'améliorer la rémunération des médecins qui exercent en milieu rural ou dans les quartiers sensibles, et j'avais finalement obtenu partiellement gain de cause.
Les malades sont-ils égaux en matière de soins médicaux ? Le grand public se pose épisodiquement cette question dont nous débattons aujourd'hui. Pourtant, elle concerne au premier chef bon nombre de nos concitoyens !
Récemment, la réaction des internes en médecine a remis cette question sur la place publique, mais il est fort probable que, noyée dans le climat de mécontentement général, la vraie motivation des manifestations des médecins soit aujourd'hui oubliée.
Le mouvement des internes en médecine s'est soldé par une nouvelle rédaction des articles 32 et 33 du projet de loi, articles pâles et insipides, de portée très générale, pleins de bonnes intentions. En effet, suggérer des mesures incitatives dans un texte législatif n'est pas de nature à résoudre en profondeur un problème.
Pour ma part, tout en sachant que la démographie médicale est également défaillante dans des milieux urbains, je m'en tiendrai à évoquer le milieu rural.
Quelle est la situation et quel est le diagnostic ? Qui n'a pas été confronté à des délais d'attente très longs pour obtenir un rendez-vous chez un spécialiste ? Nous verrons plus loin que l'accès au généraliste n'est pas non plus toujours facile selon le lieu de résidence.
La répartition de l'offre médicale dans notre pays connaît donc aujourd'hui de graves disparités.
Pour schématiser : premièrement, il y a trop de médecins dans le Sud et il n'y en a pas assez dans le Nord ; deuxièmement, à l'échelle du département, de vastes secteurs sont de véritables déserts médicaux ; troisièmement, à l'échelle des agglomérations, pour certains quartiers, le service des urgences est le seul lieu de soins.
Je ne reprendrai pas les chiffres de la densité médicale sur le territoire. Cependant, si on examine la carte de la démographie médicale en France, on pourrait en conclure que la situation de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur est bonne.
En effet, la région compte 194 médecins pour 100 000 habitants. Cependant, à y regarder de plus près, dans le département des Alpes-de-Haute-Provence, qui cumule le double handicap de se situer en zone rurale et de montagne, cohabitent des secteurs avec une forte présence médicale, comme dans le val de Durance, et des secteurs où, sans un ressaisissement puissant et volontariste, se profilent de grandes difficultés.
Pour l'instant, dans mon département, certains cantons ne comptent aucun médecin. Plusieurs secteurs sont encore peu ou moyennement dotés. Mais pour combien de temps ?
En effet, aujourd'hui la vraie question est celle du remplacement des praticiens. Combien de médecins nous disent qu'ils ne trouvent pas de successeur au moment de leur départ à la retraite ? Ce problème concerne aussi bien les généralistes que les spécialistes dans les villes moyennes. Il y a peu de temps, avec amertume et tristesse, un spécialiste me disait : « Je vais fermer mon cabinet comme un commerçant qui a fait faillite ! »
Par voie de conséquence, ce non-remplacement met dans l'embarras les patients, qui ont bien du mal à trouver un médecin traitant.
Les mesures financières incitatives sont finalement nombreuses : exonérations fiscales, exonération de taxe professionnelle, exonération de charges patronales, primes à l'installation, majoration d'honoraires, aides des collectivités. Quoi qu'il en soit, il faut bien reconnaître que ces mesures n'ont pas répondu aux attentes. Il faut dire qu'elles sont encore mal connues et qu'elles mériteraient d'être mieux diffusées, expliquées et simplifiées sur le plan administratif.
J'évoquerai maintenant les causes de ce dysfonctionnement.
Des enquêtes ont été menées auprès des jeunes médecins afin de connaître les raisons de leur manque d'intérêt pour aller exercer dans des zones en difficultés, qu'elles soient rurales ou urbaines.
Ces raisons, d'une inégale pertinence, sont développées dans le rapport de notre collègue Jean-Marc Juilhard : crainte d'une disponibilité permanente et sans faille ; inadaptation au milieu, car le métier de médecin a évolué : les carrières sont plus courtes et ces professionnels ne souhaitent plus habiter sur le lieu de travail ; inadaptation à une vie personnelle, qui requiert une disponibilité familiale pour les week-end et pour les loisirs, des journées de travail moins longues, voire des temps partiels ; absence d'autres professions de soins et de plateau technique à proximité.
Pour ces futurs médecins, le milieu rural est souvent assimilé à une charge de travail importante et à la solitude. « J'ai peur d'être appelée à travailler seule », répondait une jeune interne lors d'une récente interview télévisée. Cette crainte de l'isolement professionnel et personnel n'est-elle pas l'illustration d'une carence de formation et d'information ?
J'en viens aux dangers de cette situation.
Premier danger, la pénurie de médecins peut remettre en cause la qualité des soins dispensés par des praticiens « surbookés ». En effet, un médecin pratique en moyenne quelque 5 000 actes par an. Or, dans les zones en difficultés, le chiffre s'élève à 7 500 !
Deuxième danger, l'absence de médecins engendrera inéluctablement des difficultés pour les hôpitaux ruraux, dont l'avenir est déjà compromis puisqu'on leur reproche une trop faible activité. Si ces hôpitaux ferment, la progression du « désert médical » s'accélérera.
De la même manière, il deviendra de plus en plus difficile de recruter des médecins pour le corps des sapeurs-pompiers volontaires.
Quels remèdes peut-on apporter afin d'améliorer cet état de fait ?
Il est indéniable que, partout où c'est possible, la médecine regroupée doit être accompagnée et favorisée. Le travail en équipe des maisons ou centres de santé offre aux praticiens un confort et une qualité de travail qui ne sont plus à démontrer.
Néanmoins, ne faut-il pas agir dès les études de médecine ? Pourquoi ne pas reconnaître une spécialité « médecine en milieu rural » ? Dotés de leur formation universitaire, les médecins ruraux n'exercent-ils pas, depuis toujours, la pédiatrie, la gériatrie, la microchirurgie ou les urgences ? Reconnaissons que la rémunération des médecins de campagne n'est pas à la mesure des missions exercées.
De même, on a pu constater que le lieu d'études et de stage des étudiants déterminait souvent leur lieu d'installation.
Les études de médecine se déroulent principalement dans les grandes villes universitaires. Pourquoi ne pas décentraliser une partie de la formation en zone rurale afin d'établir une première « accroche » avec la vie médicale des zones rurales ou sensibles ?
S'agissant des mesures incitatives, je soulignerai le rôle des collectivités territoriales, qui développent des politiques d'aides pour les études ou à l'installation.
Les aides offertes actuellement par l'assurance maladie et par les collectivités locales pour favoriser l'installation des médecins dans les zones sous-médicalisées sont utiles, mais insuffisantes, car elles ne sont pas toujours opérantes.
Lors de mes rencontres avec les maires, deux pistes m'ont été suggérées qui méritent d'être citées dans ce débat. Chacun en fera ce qu'il veut.
Tout d'abord, nous pourrions créer un corps de médecins civils qui, à l'image des médecins militaires, après une formation assortie d'un engagement décennal, seraient affectés dans les zones sous-médicalisées.
Ensuite, nous pourrions envisager la possibilité d'une promotion interne pour certaines professions médicales afin de compenser temporairement les effets du numerus clausus. Par exemple, un infirmier ou un kinésithérapeute disposant d'une certaine ancienneté pourrait, avec une formation complémentaire, accéder au doctorat.
Pour terminer, je m'élèverai avec force contre l'abandon dont est victime le milieu rural.
Comment s'étonner que les jeunes médecins se détournent des zones fragilisées ? Comment pourrait-il en être autrement ? Ces futurs médecins sont témoins d'un désengagement des services publics. Parmi les nombreux exemples, on peut citer les fermetures d'école, de centres EDF, la réduction ou la disparition de l'activité postale, la carence des moyens modernes de communication et, plus récemment, la réforme des services fiscaux ou de la carte judiciaire.
L'État doit montrer l'exemple ! Il est temps de mettre fin à cette insupportable fragilisation pour de prétendues raisons d'économie ou de rationalisation. En un mot, le service public doit-il être rentable ? La réponse est contenue dans la question !
Madame la ministre, mes chers collègues, la situation est plus grave qu'on ne le pense, et la politique d'abandon des services publics qui sévit depuis des décennies n'y est pas étrangère. Nous en payons aujourd'hui le prix.
Pour sortir de cette situation, il n'y a pas un seul remède, il y a un ensemble de solutions complémentaires qu'il est indispensable de mettre en oeuvre, et rapidement. Ces solutions complémentaires s'articulent autour de trois axes : l'adaptation de la formation médicale, la reconnaissance de la spécificité du milieu rural et le renforcement des aides financières. Certes, toutes ces mesures auront un coût, mais le monde rural, qui a tant été abandonné, le mérite bien !
En guise de conclusion, je vous invite, madame la ministre, mes chers collègues à méditer le premier alinéa de l'article 1er de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux : « L'état est garant de la solidarité nationale en faveur des territoires ruraux et de montagne et reconnaît leur spécificité. »
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
M. François Fortassin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c'est une évidence : il y a plus de médecins actuellement qu'il a trente ans ! Pour autant, on constate une pénurie dans un certain nombre de secteurs, qu'ils soient ruraux ou urbains.
M. Paul Blanc s'exclame.
Les médecins sont-ils mieux formés qu'il y a trente ans et disposent-ils d'une technicité supérieure ? La réponse est oui. Passent-ils plus de temps auprès de leurs malades ? La réponse est non.
Si la pratique de la médecine doit être libérale dans son exercice, comment considérer que ce libéralisme puisse exister dans son organisation dès l'instant où la plupart des médecins tirent l'essentiel de leur revenu de l'argent public ?
L'État doit organiser tout cela puisque le laisser-faire en la matière, quelle que soit la bonne volonté des uns et des autres, a conduit à un échec patent.
Quelques pistes ont été évoquées, qui peuvent être étudiées.
La première est l'augmentation du numerus clausus. C'est très bien, mais cela donnera des résultats dans dix ans. Cette mesure mérite donc sans doute d'être mise en oeuvre, mais elle est nettement insuffisante !
La deuxième piste est de demander aux médecins de travailler deux fois plus.
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
C'est irréaliste.
La troisième piste est le recours massif à des médecins étrangers.
C'est un pillage peu glorieux, qui - hélas ! - se pratique déjà mais ne fait pas honneur à notre pays. Ces médecins venus de pays pauvres permettent souvent à bon nombre de nos structures hospitalières privées et publiques de fonctionner. C'est bien, mais il faudrait avoir le courage de leur dire que, après quelques années, ils doivent retourner dans leur pays, car, sinon, cela équivaut à un transfert au détriment de territoires pauvres qui ont beaucoup investi pour former des médecins. C'est même une attitude relativement scandaleuse ! De surcroît, ils sont payés avec un lance-pierres, ...
...si vous me permettez cette expression familière, alors qu'ils font tourner ces structures hospitalières.
Il y a pire : la moitié environ des 13 500 médecins étrangers présents dans notre pays n'ont pas obtenu la validation de leurs diplômes ; ces derniers ne se sont pourtant pas tous perdus dans les déménagements... Et cela n'étonne personne !
Je proposerai quelques pistes, qui vont peut-être susciter des cris d'orfraie ou de rosière effarouchée, ...
M. François Fortassin. En effet, madame la ministre, vous n'avez rien d'une rosière !
Rires.
Comme l'ont évoqué le président Nicolas About et notre excellent collègue Claude Domeizel, on peut imaginer que des professionnels de santé, tels des infirmières ou des kinésithérapeutes, qui ont exercé durant dix ou douze ans, puissent, à l'issue d'une formation de trois ans, devenir médecins ou au moins obtenir l'équivalence du diplôme, à condition, bien sûr, qu'ils prennent l'engagement d'exercer pendant cinq ou dix ans dans des zones rurales ou urbaines déficitaires.
C'est ce qu'a fait Mao Tsé-Toung au moment de la Révolution culturelle !
Je ne prends pas, madame la ministre, mes références chez Mao Tsé-Toung, mais lorsqu'une idée est bonne, pourquoi pas ?
Certains considèrent peut-être que c'est une idée stupide, mais l'on sait très bien que bon nombre de structures hospitalières fonctionnent en grande partie grâce à ces professionnels de qualité.
Par ailleurs, dans certains pays - c'est le cas de l'Allemagne, de l'Espagne ou de la Suisse -, les opticiens, par exemple, peuvent pratiquer un certain nombre d'actes, comme la correction de la vue, ce qui est interdit en France.
M. le président de la commission des affaires sociales fait un signe de dénégation.
Nous avons fait une ouverture en ce sens l'an dernier pour les opticiens !
Vous avez fait une ouverture qui n'est pas mise en pratique ! Voilà qui est extraordinaire ! Vous considérez qu'elle porte sur le seul champ d'application, alors que ce n'est pas vrai !
On peut avoir d'autres références en matière d'ouverture !
En matière de santé, toutes les pistes doivent bien entendu être explorées, mais, de toute évidence, nous ne parviendrons à des solutions pertinentes que s'il existe un engagement politique fort.
Pour autant, cet engagement politique fort ne doit pas être coercitif. Toutefois, miser sur la seule bonne volonté des professions médicales ne permettra pas de régler le problème, car, alors, quelles que soient les mesures prises, elles auront à peu près autant d'effet qu'un sinapisme sur une jambe de bois !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
« La nation garantit à tous [...] la protection de la santé ». Ce principe constitutionnel, s'est naturellement traduit, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, par une croissance régulière des dépenses de santé.
La part de la consommation des soins et des biens médicaux, ou CSBM, dans le PIB est passée de 2, 5 % en 1950 à 8, 8 % en 2005, soit environ 150 millions d'euros en valeur.
Dans le même temps, la socialisation de la prise en charge de ces dépenses s'est affirmée. La sécurité sociale, qui finançait 51 % de la consommation médicale en 1950, en assume aujourd'hui 77 %. La part de l'État, quant à elle, fondait de 12 % à 1 %.
Au total, sécurité sociale, mutuelles et État, qui finançaient 68, 8 % de la consommation médicale en 1950, en supportent 85 % aujourd'hui. La part laissée à la charge des ménages et des assurances complémentaires hors mutuelles est passée de 31 % à 14 %.
En dépit du numerus clausus, le nombre de médecins a progressé de 11 % en vingt ans, pour atteindre 207 277 au 1er janvier 2006. Dans notre pays, il n'y a jamais eu autant de médecins, notamment de médecins libéraux et de spécialistes.
Avec une densité médicale de 340 praticiens pour 100 000 habitants, la France se situe légèrement au-dessus de la moyenne des Quinze, qui est de 326 praticiens pour 100 000 habitants. La densité des généralistes, ces vingt dernières années, a progressé de 10 % et celle des spécialistes de 50 %.
Le nombre d'actes a évidemment suivi la même pente. De 1995 à 2005, le nombre total d'actes réalisés par les généralistes s'est accru de 1, 8 % en moyenne chaque année, et celui des spécialistes de 3, 7 %. En tenant compte de la démographie, cela représente une augmentation moyenne annuelle de 1, 4 % par praticien pour les spécialistes et de 0, 5 % pour les généralistes. Il faut cependant noter que, pour eux, la tendance s'inverse à partir de 2000.
En termes de revenu, on ne peut pas dire non plus que la situation des praticiens se soit dégradée, même si une évaluation objective de celle-ci, comme le fait remarquer la Cour des comptes dans son dernier rapport, n'est pas simple.
Pour nous en tenir à ces dernières années, reportons-nous au projet de loi de financement de la sécurité sociale de 2007 : « Entre 2000 et 2004, en monnaie constante, les revenus des généralistes ont progressé annuellement de 2, 6 % et celui des spécialistes de 3, 1 %. Cette hausse du pouvoir d'achat des médecins est supérieure à celle qui a été observée sur la même période pour l'ensemble des salariés. » La progression du pouvoir d'achat du salaire moyen est en effet de 0, 4 % par an.
Au terme de son analyse, la Cour des comptes parvient à des chiffres qui, tout en étant un peu différents, sont du même ordre : la progression annuelle moyenne du revenu est de 1, 8 % pour les omnipraticiens et de 3, 3 % pour les spécialistes.
Au total, donc, c'est une situation que beaucoup de pays pourraient nous envier.
Malgré cela, mais j'ai envie de dire « à cause de cela », paradoxalement, notre système de santé paraît moins capable que par le passé de répondre aux attentes de nos concitoyens, qu'il s'agisse notamment des files d'attentes qui s'allongent pour l'accès à certaines spécialités ou de la surchauffe des urgences. La satisfaction des besoins essentiels d'une partie importante du territoire, les zones rurales, est devenue préoccupante.
Le diagnostic est connu, je serai donc bref.
La présence médicale varie beaucoup d'une région à l'autre, entre les départements d'une même région - Claude Domeizel en a fait la démonstration voilà quelques instants -, entre les villes et les cantons ruraux d'un même département.
En Provence-Alpes-Côte d'Azur, par exemple, la densité des généralistes est de 194 pour 100 000 habitants, alors qu'en Picardie elle est de 142 praticiens pour 100 000 habitants. S'agissant des spécialistes, la densité est de 223 pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, contre 114 pour la Picardie.
Ces chiffres sont significatifs aussi en ce qu'ils montrent que c'est pour les spécialistes que les disparités entre régions, entre secteur urbain et secteur rural sont les plus grandes.
Selon le rapport établi en 2005 par la commission « Démographie médicale » - vous le constatez, ce ne sont ni les rapports ni les commissions qui font défaut -, si les bourgs ruraux actifs et même le rural isolé tirent encore assez bien leur épingle du jeu s'agissant des omnipraticiens - 91, 5 pour 100 000 habitants dans le rural isolé, contre 99, 2 en moyenne nationale -, ce n'est déjà plus le cas des cantons agricoles et ouvriers, plutôt défavorisés. Surtout, pour tous ces secteurs, se pose le problème du renouvellement de ces omnipraticiens.
Certes, la population concernée reste modeste - entre 400 000 et 2 400 000 personnes, selon les critères retenus -, mais elle est dispersée sur un territoire très important, qu'il faut absolument préserver de la désertification.
Nous le savons bien, ce qu'il faut craindre, c'est une probable et rapide dégradation de la démographie médicale des zones rurales par l'effet des départs à la retraite avant que l'augmentation du numerus clausus ait produit ses effets.
Cependant, ce n'est là qu'un aspect du problème.
Une démographie médicale favorable en zone rurale ne signifie pas, notamment, que la permanence des soins y soit assurée. Vous pouvez très bien, comme j'ai pu l'observer dans mon département, le Var, bénéficier de la présence de 7 médecins pour 5 000 habitants aux heures ouvrables, mais qui, le reste du temps, sont aux abonnés absents.
Si, de surcroît, l'organisation des secours sanitaires d'urgence patauge, le résultat peut être catastrophique.
Depuis le décret du 15 septembre 2003, la garde n'est plus une obligation pour les médecins, elle procède du « volontariat », le préfet étant censé l'organiser en liaison avec l'ordre des médecins, dans le cadre de conventions et, si nécessaire, il doit procéder à des réquisitions, ce qu'il ne fait pratiquement jamais.
Résultat : comme le souligne pudiquement un rapport de l'IGAS, de mars 2006, malgré des efforts financiers non négligeables de l'assurance maladie, si le nouveau dispositif s'est déployé sur l'ensemble du territoire, ni sa « fiabilité » ni son « efficience » - c'est le langage pudique de l'IGAS - ne sont assurées.
Les territoires ruraux pâtissent de l'absence de structures du type « SOS médecins » qui, en zone urbaine, jouent un rôle de plus en plus important.
Un engagement supérieur des praticiens libéraux dans les départements et les secteurs les plus ruraux, comme le relève encore l'IGAS, le développement de structures telles que les « maisons médicales de garde » permettent encore pour l'heure de faire face. Mais pour combien de temps ? En effet, ces dispositifs sont fragiles. Reposant avant tout sur un engagement personnel - engagement d'un autre âge, si j'ai bien entendu les nouveaux Hippocrate -, ils n'ont pas la stabilité des institutions.
Cette situation préoccupante et connue a déjà suscité nombre d'initiatives d'origine gouvernementale ou émanant des collectivités locales. On manque encore de recul pour en apprécier la pertinence et les conclusions des études existantes sont généralement circonspectes.
Cependant, on sait déjà que l'installation de nouveaux médecins en zone rurale n'est qu'accessoirement une question d'argent. Les incitations financières et fiscales sont très peu efficaces.
Le problème est donc d'abord culturel, comme le souligne le rapport de notre collègue M. Juilhard, le milieu rural étant perçu comme « une zone de forte contrainte », pour l'exercice du métier comme pour la vie familiale.
Compte tenu de l'origine sociale des médecins, du caractère de plus en plus technique du métier et de la manière dont sont organisées les études, cela n'a rien d'étonnant.
On relève que 45 % des médecins se recrutent parmi les familles de cadres et d'intellectuels supérieurs, 17 % parmi les professions intermédiaires, lesquelles n'ont guère de connaissance réelle des contraintes, mais aussi des charmes, du monde rural.
Comme le remarque le rapport 2005 de l'Observatoire national de la démographie des professions de santé, « Il est clair qu'une formation hospitalo-centrée génère plus difficilement des vocations pour la médecine de famille. Les enseignements des expériences québécoises montrent d'ailleurs que l'organisation précoce de stages en milieu rural contribue à une moindre appréhension de ce lieu d'exercice. »
On peut aussi penser que toutes les dispositions permettant d'alléger et de mieux répartir charges de travail et responsabilités auraient des effets positifs : le développement des « cabinets de groupe » ou des « maisons de santé » permettant les échanges et la mutualisation des charges ou les incitations fiscales facilitant les remplacements, par exemple.
L'usage généralisé de la télémédecine - qui suppose un accès au haut débit sur l'ensemble du territoire, encore incomplètement réalisé - peut aussi fournir les moyens de diagnostic technique et les informations dont sont privés les praticiens non citadins.
On pourrait aussi faciliter, dans les zones déficitaires, l'installation de « centres de santé » mutualistes, associatifs, communaux ou intercommunaux, fonctionnant avec du personnel médical et paramédical, salarié ou non. Une résurrection des « dispensaires » du xixe siècle, en quelque sorte !
Comme la iiie République le fit pour ses instituteurs, la ve pour ses professeurs - jusqu'à ce que Raymond Barre n'y mette bon ordre libéral ! -, la collectivité pourrait aussi assurer des moyens d'existence et des conditions d'études favorables aux étudiants en médecine, en contrepartie d'engagements d'installation et d'exercice dans les zones déficitaires. Ce serait, en même temps, une manière de démocratiser l'accès à la profession.
Enfin, on pourrait assurer un support professionnel et technique de proximité aux praticiens, tout simplement en ne fermant plus les hôpitaux locaux et en ne leur appliquant plus la tarification à l'activité, la fameuse T2A.
Ce ne sont donc pas les propositions incitatives qui manquent. Suffiront-elles à régler le problème ? J'en doute fort. Comme je doute du succès de simples manoeuvres de « déconventionnement » - si tant est qu'un gouvernement, à commencer par celui-ci, ait vraiment l'intention de les mettre en oeuvre -, qui ignorent que ce n'est visiblement plus l'exercice de la solidarité qui est le moteur de notre système de santé, comme à l'époque de sa création, mais bien la recherche de l'intérêt personnel.
Notre système, jusque-là, présentait tous les avantages : liberté individuelle d'accès au soin quasi universelle pour le patient ; liberté de prescription, d'installation, de mode d'exercice pour le médecin ; socialisation des dépenses découlant de ses libres choix individuels. Un tel système ne peut durer sans autorégulation, sans régulation « éthique » des patients et surtout des praticiens, c'est-à-dire sans la prise de conscience par les bénéficiaires de leurs responsabilités et de leurs devoirs. Je ne vois pas comment un droit de tirage illimité, permanent et sans contrepartie sur la richesse collective pourrait être financièrement tenable et moralement justifiable.
Espérer réguler un tel système de l'extérieur, par des mesures comme le numerus clausus, les contraintes tarifaires, les incitations fiscales, les autorisations ou interdictions au coup par coup est un leurre. De telles mesures permettront tout au plus de retarder le moment du collapsus !
Les problèmes rencontrés dans le monde rural sont le symptôme d'un mal plus général et plus profond. On y portera remède non par des mesures ponctuelles et spécifiques, qui pourront cependant jouer un rôle conservatoire utile, mais par une remise à plat de l'ensemble du système avant qu'il ne soit trop tard. Une seule question se pose, madame la ministre : y êtes-vous prête ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Guy Fischer applaudit également.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, tout le monde l'a dit depuis le début de ce débat, la France fait face à un grave problème de démographie médicale.
Même s'il convient de rappeler que le nombre de médecins n'a jamais été aussi élevé, force est de constater que l'offre médicale est insuffisante pour satisfaire les besoins et qu'elle va fortement diminuer dans les prochaines années.
Notre pays compte aujourd'hui 339 médecins pour 100 000 habitants, contre une moyenne européenne de 337, l'Italie en ayant, quant à elle, 570, l'Espagne 440 et l'Allemagne 430.
Dans nos hôpitaux publics, 1 500 postes de praticiens hospitaliers à plein temps restent vacants, en dépit des 6 000 postes déjà occupés de façon « contractuelle » par des médecins à diplôme étranger et des 10 000 médecins étrangers régularisés entre 1995 et 2000 sur la base d'une évaluation de leur diplôme.
En ville, si globalement le nombre de médecins libéraux a augmenté de près de 10 % entre 1991 et 2006, comme la population française, les effets cumulés du numerus clausus, en baisse constante de 1983 à 1993, et des départs massifs à la retraite laissent craindre une chute des effectifs de médecins libéraux d'ici à 2025. Les effectifs seront amputés de près de 30 000 médecins, généralistes et spécialistes confondus.
Cette diminution globale des effectifs ne pourra être enrayée que par le maintien, pendant plusieurs années, du numerus clausus à son niveau actuel, soit 7 100 étudiants admis en deuxième année. Il nous faut une gestion sereine, adaptée et prospective du numerus clausus - c'est-à-dire qu'on se réserve la possibilité de l'augmenter. Une telle gestion est indispensable même si, étant donné la longueur des études, ses effets ne sont perceptibles qu'au terme d'une période de dix à douze ans.
Dans l'intervalle, le territoire français dans sa globalité connaîtra des difficultés pour répondre aux besoins d'une population exigeant, à juste titre, des soins conformes aux progrès de la médecine. Ce problème est d'autant plus crucial que l'espérance de vie augmente : le développement de soins adaptés aux pathologies chroniques, plus fréquentes chez la personne âgée, amplifiera les attentes de chacun à l'égard des médecins.
Qui plus est, les inégalités territoriales d'accès aux soins vont continuer à s'aggraver alors que 4, 3 millions de nos concitoyens vivent déjà dans des zones identifiées comme « en difficulté » ou « fragiles » en termes de présence médicale. Dès lors, comment faire pour que la baisse attendue du nombre de médecins en activité ne se traduise pas par un creusement de ces disparités, notamment en zone rurale, en zone de montagne ou dans les quartiers sensibles des périphéries urbaines ?
Deux voies sont possibles : l'incitation ou la contrainte. Faut-il inciter ou contraindre les professionnels de santé à s'installer dans les zones sous-médicalisées ? Nous avons déjà eu ce débat et la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a privilégié le recours à des mécanismes d'incitation financière pour favoriser l'installation ou le maintien des médecins.
Plusieurs aides à l'installation ont vu le jour : exonérations fiscales, exonérations de charges sociales, majorations d'honoraires, pour ne citer que les principales. On nous dit aujourd'hui que ces dispositifs ne sont pas suffisamment efficaces et qu'il est temps de passer à des mesures plus contraignantes, telles que le déconventionnement ! Je dois avouer, pour ma part, que cette proposition m'inspire une certaine réserve.
D'abord, parce que je suis très attaché au principe de la liberté d'installation des jeunes médecins. On ne fait pas le bonheur des gens malgré eux et, encore moins, contre eux. Vivant moi-même à la campagne, je sais qu'il faut la faire découvrir à ceux qui ne la connaissent pas, leur donner envie d'y venir et d'y vivre et, pour cela, créer un environnement qui permettra au jeune médecin, à son conjoint et à ses enfants, de s'y épanouir.
C'est parce qu'il y a une vie locale, une école, des commerces, des animations, des activités sportives et des facilités de communication que l'on peut désirer s'y installer. Cette liberté de choix est essentielle. À cet égard, il faut garder à l'esprit que les promotions de jeunes médecins sont à 70 % composées de femmes, qui doivent pouvoir concilier vie professionnelle, vie personnelle et vie familiale.
J'ajoute que les mesures contraignantes prises par les pouvoirs publics à l'étranger ont souvent démontré leur inefficacité. En Allemagne, comme en Suisse, la pénurie médicale dans les campagnes s'est aggravée et s'est propagée aux villes puisque, sur 100 étudiants en médecine formés, seuls 55 exercent effectivement, les autres ayant préféré renoncer. Dans ce cas, le libre choix demeure ; mais il est négatif et préjudiciable à la collectivité tout entière.
Ensuite, je crains que l'on n'alimente encore ce que le professeur Martine Lombard, éminente juriste, appelle dans un récent essai, « l'État schizo ». Victime d'un dédoublement de personnalité, l'État voudrait contraindre des professionnels de santé à s'installer dans des zones sous-médicalisées, alors que ces mêmes zones sont parfois en voie de désertification : suppression de perceptions, de gendarmeries ou de services publics, indispensables à la vie locale. Cela ne date pas d'aujourd'hui, on observe ce phénomène sous tous les gouvernements depuis une vingtaine d'années. Je suis élu depuis suffisamment longtemps pour le savoir !
Je le dis clairement, madame le ministre, l'aménagement du territoire est un tout cohérent. Tous les élus qui ont mis en oeuvre, dans leurs collectivités locales, des politiques innovantes de redynamisation rurale le savent.
Enfin, et avant d'envisager toute solution contraignante, il me paraît indispensable d'évaluer l'efficacité des mesures incitatives qui ont été prises : les étudiants et les jeunes médecins les connaissent-ils suffisamment ? Je crois que la réponse est négative : il faudrait donc les faire connaître plus. Ne pourrait-on pas non plus simplifier les démarches administratives pour l'obtention de ces aides ? Très certainement.
Avant même l'installation, toutes les formules développées par certains de nos collègues pour attirer les étudiants en zone sous-médicalisée, qu'il s'agisse de bourses de scolarité ou des aides pour développer les stages, méritent d'être étudiées. L'État pourrait peut-être s'engager dans un cofinancement de ces mesures pour encourager leur développement.
Dans cette logique d'innovation, les « maisons de santé », qui s'implantent un peu partout, constituent incontestablement une réponse à la crise de la démographie médicale, comme l'a bien démontré, dans son rapport, notre collègue Jean-Marc Juilhard. Sur ce point aussi, il faudrait peut-être une coordination entre l'État et les collectivités locales. La définition d'un statut juridique et la création d'un label « maison de santé » me semblent devoir être largement privilégiées.
Aussi, madame le ministre, il nous faut vraiment explorer sereinement toutes les pistes - je sais que telle est votre volonté -, combiner les solutions, faire confiance aux initiatives locales pour éviter in fine que le remède ne soit pire que le mal.
Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Jean Boyer applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite d'abord vous remercier pour la très grande qualité et la richesse de vos interventions, qui, soyez-en certains, éclaireront la réflexion et l'action du Gouvernement.
Il est d'ailleurs rare et réconfortant d'assister à des échanges aussi nourris, tant en évaluations qu'en propositions. Le Sénat, monsieur le président, a parfaitement rempli son rôle de réflexion dans ce domaine.
Très bien ! sur les travées de l'UMP.
Avant toutes choses également, je veux souligner l'excellence du rapport d'information sur la démographie médicale de M. Juilhard, qui établit un constat pertinent, sans concessions, de la situation et propose des solutions cohérentes et déterminées. J'insisterai pour que ce document soit analysé avec précision lors des états généraux de l'organisation de la santé.
Des débats de ce matin, je retiens volontiers deux enseignements. Un certain nombre de sujets recueillent un consensus : c'est une bonne nouvelle qui nous permettra, j'en suis sûre, d'avancer rapidement. En revanche, sur d'autres sujets, le débat reste entier. Je tiens à vous faire part de ce constat important, qui doit nous inciter à bien peser les termes de ce débat et les options proposées.
Tout d'abord, de quoi est-il question dans un débat sur la démographie médicale ? S'agit-il uniquement des médecins ou, plus largement, - c'est mon intime conviction - de l'ensemble des acteurs et des professionnels de santé ? Il serait sans doute plus juste de parler de démographie sanitaire
MM. Paul Blanc et Francis Giraud opinent
...car, M. Juilhard l'a fort opportunément rappelé, il convient également d'évoquer la situation des infirmières, des chirurgiens dentistes ou d'autres professionnels de santé comme les kinésithérapeutes.
S'agissant de l'acuité de la crise sanitaire, la plupart des intervenants partagent la conviction que la situation est aujourd'hui préoccupante et remettra en cause, demain, le principe d'égalité d'accès aux soins.
Mais nous avons entendu un large éventail d'opinions. J'ai noté l'optimisme de M Autain, par exemple, qui m'a semblé accueillir avec une certaines réticence les images noires esquissées par certains de ses collègues.
M. Autain acquiesce.
Il semble donc tout à fait important d'asseoir nos réflexions sur un diagnostic partagé. Je veillerai à ce que les états généraux de l'organisation de la santé établissent les faits d'une manière incontestable.
Un des éléments importants de ce diagnostic sera bien sûr la détermination des territoires sur lesquels l'action des pouvoirs publics devra être prioritaire.
À ce titre, il n'est pas interdit de repenser la répartition des zones sous-denses et des zones surdenses. Il a été demandé, notamment par M. Autain, qu'un travail de cartographie très fin soit accompli. Cela est évidemment tout à fait indispensable.
Un autre point du diagnostic a fait débat : quels sont les déterminants de cette inégalité de répartition des professionnels de santé ?
M. Collombat et d'autres orateurs, par exemple Mme Dini, ont établi un lien très fort entre cette inégalité de répartition et l'aménagement et l'équipement des territoires, dressant pour certains de ceux-ci une image de déshérence qui amènerait finalement les professionnels de santé à ne pas s'y installer. Toutefois, M. Godefroy a noté, à juste titre, que certaines zones urbaines, par ailleurs fort bien équipées, présentaient également des problèmes en matière d'accès aux soins.
En ce qui concerne la nature des mesures à mettre en oeuvre pour accompagner une meilleure répartition des professionnels de santé sur le territoire, je constate également des divergences très importantes.
J'ai bien noté que MM. Godefroy et Cazeau préconisent des mesures qu'ils qualifient pudiquement de mesures de régulation de l'installation. Cependant, tout le monde sait bien que, en réalité, il s'agit d'interdire et de contraindre. Cette prise de position ne m'étonne d'ailleurs pas de leur part, puisqu'ils ne font là que reprendre les propositions faites par Mme Royal lors de la campagne présidentielle. En effet, interrogée sur l'opportunité d'imposer à des médecins de s'installer dans les zones sous-denses, la candidate du parti socialiste à l'élection présidentielle s'était clairement prononcée en faveur de telles mesures. Nous savons tous quel succès ses propositions ont rencontré !
Je l'ai dit à de nombreuses reprises, je ne suis pas favorable à la remise en cause de la liberté d'installation, partageant en cela l'avis de M. Fouché.
Un autre thème de débat a trait à l'efficacité des incitations financières. Mme Dini, s'appuyant sur des expériences étrangères, et M. Autain nous ont fait part de leurs doutes sur l'efficacité à long terme d'une action principalement fondée sur ce genre de mesures.
M. Domeizel, quant à lui, estime que l'échec de ces mesures n'est peut-être dû qu'à un déficit d'information. Cependant, dans le même temps, M. Othily dit sa conviction que, dans le cas très spécifique de la Guyane, la création d'une zone franche serait seule de nature à améliorer la situation sanitaire de la population.
Dans ce contexte, que faut-il penser de la généralisation des bourses pour les étudiants ? Mme Dini n'y est pas favorable, au contraire de M. Godefroy, qui semble les plébisciter. Pour accompagner notre réflexion, M. Murat imagine la situation de compétition entre les collectivités territoriales qui pourrait s'instaurer, compétition que nous connaissons déjà bien, d'ailleurs, en matière d'octroi d'aides à l'industrialisation : quand viendront les générations les plus creuses, quand le problème de la démographie médicale sera non plus seulement quantitatif, mais aussi qualitatif, les collectivités les plus riches...
Sourires.
... pourront en quelque sorte « se payer » plus facilement l'installation de médecins que les collectivités plus pauvres. Nous serons alors revenus à la case départ.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, quelques-uns des sujets qui font débat, mais je veux maintenant mettre en lumière les points de convergence qui me sont apparus importants.
Tout d'abord, la formation des jeunes professionnels de santé est sans doute le sujet sur lequel le plus large consensus s'est manifesté sur toutes les travées. Bien sûr, il faut adapter le numerus clausus aux besoins de la population. C'est ce que nous avons fait en le portant à 7 100 places cette année, et c'est ce que nous continuerons à faire dans les années à venir.
Toutefois, plus que leur nombre, c'est la répartition des étudiants sur le territoire qui est importante ; Nicolas About a parfaitement raison sur ce point. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai engagé, avec Mme Pécresse, une action pour orienter les flux de formation vers les régions les moins bien dotées.
Il faut également valoriser, vous avez été nombreux à le dire, la filière de médecine générale, qui est anormalement délaissée par les étudiants. Pour cela, je compte sur le développement des stages de médecine générale dès le second cycle - le projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte des mesures financières à cet effet -, afin de susciter l'intérêt et les vocations pour ce métier central qu'est celui de médecin généraliste.
Je crois que, comme l'a rappelé M. Vasselle, les étudiants et les professionnels sont encore confrontés à un déficit d'information sur les dispositifs d'aide à l'installation et à l'exercice.
Des actions en ce domaine ont pourtant été mises en oeuvre sur l'initiative de l'assurance maladie et de ses partenaires régionaux. Je suis d'accord avec vous, monsieur le rapporteur, quand vous dites qu'il faut aller plus vite et plus loin dans la mise en place d'un guichet unique performant et clairement identifié par les professionnels.
Je pense que les futures agences régionales de santé permettront largement de répondre à cette attente.
Un deuxième point de convergence, et nous sommes bien ici au coeur du débat, concerne l'amélioration de la qualité de l'exercice professionnel des médecins.
Beaucoup d'entre vous l'ont souligné, il faut que les professionnels de santé puissent se concentrer sur leurs activités de soin. M. About et Mme Dini, en particulier, ont évoqué le partage des tâches et la coopération entre professions de santé. J'y suis bien entendu favorable. J'ai d'ailleurs présenté un amendement au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale qui vise à permettre aux infirmières de pratiquer certaines vaccinations. Je souhaite que nous puissions aller plus vite à cet égard, peut-être en levant certains a priori des médecins. Nous devons vraiment nous battre sur cette question du partage des tâches. Il nous faudra là encore pousser plus loin, en nous appuyant notamment sur les réflexions en cours à la Haute Autorité de santé.
Plusieurs intervenants ont également évoqué la simplification des tâches administratives. C'est un chantier important, et je veux que le travail se poursuive en vue par exemple de dématérialiser les échanges entre l'assurance maladie et les professionnels de santé, ou encore de réduire le nombre croissant de certificats que les patients demandent à leur médecin.
Enfin, et c'est certainement l'un des points majeurs qui sont ressortis de nos débats d'aujourd'hui, les maisons de santé devront jouer un rôle important dans la réorganisation de l'offre de soins de premier recours.
Il est essentiel, comme l'ont dit Mme Dini ou M. Domeizel, de rompre l'isolement des professionnels de santé et de leur permettre d'atteindre la taille critique nécessaire pour envisager une réelle amélioration de leur qualité de vie et de leurs conditions d'exercice. Il est indispensable de faciliter la participation à des activités de formation continue, de permettre une amélioration du service rendu à la population, notamment en termes de continuité et de permanence des soins.
À cet égard, les maisons de santé permettront d'installer et de mutualiser des plateaux techniques, de développer les fonctions de secrétariat et de favoriser le partage des tâches entre les professionnels. Je vous rejoins sur ce point, monsieur Vasselle : leur financement et leur implantation nécessiteront une coordination importante entre l'État, l'assurance maladie et les collectivités territoriales. Il n'est pas interdit, dans ce domaine, d'envisager d'autres partenariats.
Cela étant, j'indiquerai, pour faire écho au débat engagé par M. Collombat, que nous ne pourrons pas faire, sur ce sujet, l'économie d'une réflexion philosophique.
Quand la puissance publique, c'est-à-dire le contribuable local, le contribuable national ou le cotisant à la sécurité sociale, aura financé à grand renfort de subventions des maisons médicales de garde ou des centres de santé, participé au fonctionnement de ces installations, réglé les cotisations sociales des médecins, augmenté les rémunérations - comme nous le faisons déjà, avec une progression de plus de 20 % dans certains secteurs -, rémunéré la permanence des soins en plus des consultations et des visites majorées - 150 euros la nuit -, payé forfaitairement la prise en charge des malades chroniques, pourrons-nous toujours arguer qu'il s'agit de médecine libérale ?
Les jeunes médecins pourront-ils toujours revendiquer la liberté d'installation ? Certains médecins refusent d'assumer les tâches les plus contraignantes, comme les gardes de nuit, puisque le système repose sur le volontariat.
J'indique aussi qu'un principe irréfragable veut que qui paie commande ! Certaines exigences présentées benoîtement, ici ou là, sur toutes les travées, comme des mesures techniques impliquent in fine un changement de système et l'instauration d'un service public étatisé ou para-étatisé. Il faut avoir le courage de dire les choses ! §
Je répondrai maintenant à M. Othily.
Monsieur le sénateur, je connais la situation des professionnels de santé guyanais et je ne la sous-estime pas. Comme vous l'avez souligné, la densité médicale de la Guyane est de trois à quatre fois inférieure à celle de la métropole et la moyenne d'âge des médecins y est plus élevée. Le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales et de l'Inspection générale des finances que vous avez mentionné m'a été transmis la semaine dernière seulement. J'ai demandé à mes services d'en analyser les conclusions. Je ne manquerai pas de revenir vers vous une fois que j'en aurai pris connaissance et avant toute décision.
J'indiquerai enfin à M. Fortassin, qui a soulevé le problème éthique de l'installation des médecins étrangers, que celle-ci n'a résolu aucun de nos problèmes de démographie médicale, puisque les médecins étrangers eux aussi vont s'installer dans les zones surdenses ! En effet, sur 6 700 médecins étrangers, 3 700 exercent en Île-de-France et plus de 1 000 en région Rhône-Alpes. Finalement, les médecins étrangers ne s'installent pas, eux non plus, dans les régions déficitaires.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons vraiment eu, sur tous les sujets que j'ai évoqués, des débats extrêmement denses et riches. Ils ne font que débuter, et toutes les réflexions que nous avons menées ensemble ce matin nourriront la démarche des états généraux de l'organisation de la santé, qui se dérouleront à partir de février 2008. J'en attends beaucoup pour l'amélioration de l'accès aux soins pour nos concitoyens.
Je vous remercie de vos contributions, le débat et l'action ne font que commencer.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Mme Michèle André remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.
Nous reprenons l'examen des articles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Nous en sommes parvenus à l'examen de la troisième partie, concernant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour 2008.
TROISIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL POUR 2008
Article 8 et annexe B
Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2008-2011), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes, ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.
ANNEXE B
Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour les quatre années à venir
Hypothèses d'évolution moyenne sur la période 2009-2012
Scénario bas
Scénario haut
Produit intérieur brut en volume
Masse salariale du secteur privé
Objectif national de dépenses d'assurance maladie (en volume)
Variante de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (en volume)
Inflation hors tabac
Les projections présentées sont construites autour de deux scénarios économiques et en l'absence de toute ressource supplémentaire. Ces deux scénarios reprennent les hypothèses d'évolution du produit intérieur brut (PIB), de la masse salariale et de l'inflation retenues dans les scénarios présentés dans le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation annexé au projet de loi de finances pour 2008.
Les hypothèses retenues pour la progression des dépenses Famille et Vieillesse sont des évolutions tendancielles. Les dépenses de prestations en faveur de la famille progressent en volume à un rythme inférieur à 1 % sur la période. Les prestations évoluent moins vite à partir de 2010, la montée en charge des prestations en faveur de l'accueil des jeunes enfants se terminant en 2009. Le rythme de progression des prestations vieillesse en volume diminue très progressivement entre 2008 et 2012 (de 4 % à 3, 2 % sur la période). Cette évolution prend en compte les dispositions de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Elle intègre ainsi l'impact de l'allongement, à partir de 2009, des périodes validées pour obtenir une retraite à taux plein sur les conditions de départs anticipés à partir de 2009. En revanche, elle n'anticipe pas les mesures susceptibles d'être mises en oeuvre à la suite du « rendez-vous retraite » de 2008.
À la différence des autres branches, les comptes de la branche Maladie sont présentés, non pas avec une évolution tendancielle des dépenses mais avec un objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) d'au plus 2 % en volume par an sur la période, conformément à la stratégie pluriannuelle de finances publiques présentée par le Gouvernement lors du débat d'orientation budgétaire.
Cet objectif est ambitieux et demandera des efforts à l'ensemble des acteurs du système de santé. Il est cependant réaliste. En effet, les différences de productivité entre établissements de santé, les écarts de consommation de soins entre régions, les divergences de pratiques médicales ou de consommation avec des pays comparables à la France montrent que des gisements d'économie existent. Ces gains d'efficacité peuvent être exploités, tout en continuant d'assurer un service de santé de qualité pour l'ensemble des Français. Ceci nécessite des modifications des comportements et appelle l'introduction de nouveaux mécanismes de régulation, qui devront être négociés et concertés avec l'ensemble des acteurs. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 constituera une première étape dans cette stratégie. Le scénario alternatif basé sur un ONDAM fixé à 1, 5 % en volume suppose un effort complémentaire de régulation, mais permet de dégager des économies substantielles par rapport au scénario précédent à l'horizon 2012.
Ces différents scénarios montrent la nécessité d'approfondir les réformes mises en oeuvre jusqu'ici. Concernant l'assurance maladie, un débat sur le financement de la santé doit s'ouvrir pour aboutir au premier semestre 2008. Le rendez-vous sur les retraites prévu par la loi du 21 août 2003 permettra également de définir les conditions d'un équilibre pérenne de l'assurance vieillesse.
Dans le scénario bas, le déficit du régime général passerait de 8, 9 milliards en 2008 à 7, 6 milliards d'euros en 2012. L'amélioration très sensible de la situation financière de la branche Famille, et, dans une moindre mesure, de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles vient compenser la dégradation de la situation financière de la branche Vieillesse. Si la branche Famille passe d'une situation équilibrée à un excédent de près de 5 milliards d'euros sur la période, la branche Vieillesse passe d'une situation déficitaire de 5, 1 milliards en 2008 à un déficit de plus de 10 milliards d'euros.
Dans ce scénario bas, avec des dépenses en croissance de 2 % en volume, le déficit de la branche Maladie du régime général en 2012 serait ramené à 3 milliards d'euros. Avec un effort accru de maîtrise des dépenses d'assurance maladie, la situation financière de l'assurance maladie s'améliorerait tout au long de la période pour atteindre l'équilibre en 2012. Dans ce dernier cas, le déficit du régime général est ramené à moins de 5 milliards d'euros en 2012.
Dans le scénario haut où le PIB s'accroîtrait de 3 % par an, le régime général bénéficie d'un surcroît de recettes de près de 6 milliards d'euros à l'horizon 2012, complément qui ne permet cependant pas de retrouver spontanément l'équilibre. Le solde du régime général qui s'améliore à partir de 2010 de 2 milliards d'euros par an, serait déficitaire de 1, 7 milliard d'euros en 2012. Par rapport au scénario précédent, la branche Maladie serait au voisinage de l'équilibre en 2012. En revanche, ces hypothèses plus favorables sont insuffisantes pour renverser la tendance à la dégradation des comptes financiers de la branche Vieillesse.
L'obtention de l'équilibre du régime général est possible dans le scénario haut associé à un effort complémentaire de maîtrise des dépenses d'assurance maladie (ONDAM à 1, 5 % en volume).
Conformément au scénario retenu lors de la réforme des retraites de 2003, la réduction du besoin de financement de l'assurance vieillesse peut être obtenue sans augmentation des prélèvements obligatoires, en raison des excédents potentiels des autres branches ou régimes de protection sociale.
Dans les deux scénarios, le Fonds de solidarité vieillesse retrouve une situation excédentaire en 2008 (0, 6 milliard d'euros). Les excédents du fonds s'accroissent sur la période, celui-ci bénéficiant de la baisse du chômage. En revanche, avant toute mesure nouvelle de redressement, la situation financière du Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles se dégrade de l'ordre de 300 millions d'euros par an.
La plupart des autres régimes de base bénéficient de mécanismes d'ajustement qui équilibrent leur solde (contribution d'équilibre de l'État ou du régime général, impôts affectés, cotisations fictives...) ; seuls la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales et le régime des industries électriques et gazières voient leur situation excédentaire se dégrader progressivement sur la période.
Prévision de recettes et de dépenses sur la période 2007-2012 Scénario économique bas
Régime général
(En milliards d'euros)
Maladie
Recettes
Dépenses
Solde
Variante avec un ONDAM à 1, 5 % en volume à partir de 2009
Solde
Accidents du travail - maladies professionnelles
Recettes
Dépenses
Solde
Famille
Recettes
Dépenses
Solde
Vieillesse
Recettes
Dépenses
Solde
Toutes branches consolidé
Recettes
Dépenses
Solde
Variante avec un ONDAM à 1, 5 % en volume à partir de 2009
Solde
Ensemble des régimes obligatoires de base
En milliards d'euros
Maladie
Recettes
Dépenses
Solde
Accidents du travail - maladies professionnelles
Recettes
Dépenses
Solde
Famille
Recettes
Dépenses
Solde
Vieillesse
Recettes
Dépenses
Solde
Toutes branches consolidé
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d'euros)
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles
(En milliards d'euros)
Recettes
Dépenses
Solde
Prévision de recettes et de dépenses sur la période 2007-2012 Scénario économique haut
Régime général
En milliards d'euros
Maladie
Recettes
Dépenses
Solde
Variante avec un ONDAM à 1, 5 % en volume à partir de 2009
Solde
-5, 9
-6, 2
-4, 1
-3, 3
-1, 4
0, 8
3, 1
Accidents du travail - maladies professionnelles
Recettes
Dépenses
Solde
Famille
Recettes
Dépenses
Solde
Vieillesse
Recettes
Dépenses
Solde
Toutes branches consolidé
Recettes
Dépenses
Solde
Variante avec un ONDAM à 1, 5 % en volume à partir de 2009
Solde
-8, 7
-11, 7
-8, 8
-7, 2
-4, 3
-1, 6
1, 5
Ensemble des régimes obligatoires de base
(En milliards d'euros)
Maladie
Recettes
Dépenses
Solde
Accidents du travail - maladies professionnelles
Recettes
Dépenses
Solde
Famille
Recettes
Dépenses
Solde
Vieillesse
Recettes
Dépenses
Solde
Toutes branches consolidé
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de solidarité vieillesse
(En milliards d'euros)
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles
(En milliards d'euros)
Recettes
Dépenses
Solde
La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.
Mme Demontès, qui a dû momentanément s'absenter, m'a prié de s'exprimer à sa place sur cet article.
L'article 8 revêt une importance toute particulière, puisqu'il a trait aux prévisions de recettes et aux objectifs de dépenses pour la période 2008-2011. Il nous est donc proposé d'approuver l'annexe B, rapport qui présente un cadrage pour les cinq prochaines années.
La lecture de cette annexe appelle une première observation.
Que l'on considère le scénario dit « bas » ou celui dit « haut », un constat s'impose : l'un et l'autre anticipent des exercices déficitaires. Il s'agirait donc d'approuver des politiques qui, chiffres à l'appui, s'inscrivent dans une dynamique d'échec, ce qui est proprement stupéfiant. Voilà pour la forme.
Pour ce qui est du fond, la deuxième de mes observations porte sur le fondement même de vos travaux.
En effet, monsieur le ministre, comment pouvez-vous nous demander d'adopter cet article quand, dans une économie mondialisée où les interdépendances sont de plus en plus prégnantes, plus rien n'est sûr ?
Je ne prendrai qu'un seul exemple à cet égard, celui du prix du baril de pétrole. En un peu moins d'un an, il s'est accru de 46 %, et avoisine maintenant les 98 dollars.
Je n'ai pas l'intention de jouer les cassandres, mais qui vous garantit que la situation au Kurdistan ou dans le golfe Persique ne se dégradera pas ? Qui vous assure que le prix du baril ne connaîtra pas une nouvelle envolée ? Rien. Or, vous le savez très bien, de tels événements influent directement sur notre économie, nos emplois, notre croissance et, in fine, le chapitre des recettes.
Dès lors, comment qualifier vos hypothèses ? Sont-elles irréalistes ou, plus gravement, insincères ? En outre, je rappelle que, voilà un peu moins d'un an, le ministre de l'économie et des finances de l'époque s'était engagé, devant la Commission européenne, à maintenir la croissance des dépenses des organismes de sécurité sociale sous le seuil de 1 %. Tout laisse penser que cet engagement ne sera pas tenu, puisque ces dépenses devraient croître, semble-t-il, de 1, 5 %, voire davantage...
Vous avez tenu les propos suivants à l'Assemblée nationale : « Il n'y a pas de crise, mais une situation difficile, et nous sommes là pour l'affronter. » J'en prends donc acte, mais que nous proposent le Gouvernement et la majorité, si ce n'est de persévérer dans la politique de démantèlement de notre système de protection sociale engagée voilà cinq ans ?
Faut-il rappeler que, en retenant ces prévisions, le déficit cumulé sera alourdi de quelque 50 milliards d'euros en 2012, et que la dette dont devront s'acquitter les générations à venir avoisinera une centaine de milliards d'euros ?
L'ensemble de ces chiffres prouve une seule chose : notre pays a besoin d'une réforme structurelle permettant de redresser les comptes de la sécurité sociale.
Selon le Gouvernement, ce projet de loi comporte des mesures de fond et de structure. Soit ! Mais quelles sont-elles ?
L'instauration de franchises ? Elles ne sont qu'un instrument d'injustice sociale supplémentaire, que vous osez imposer aux malades, aux petits revenus et même aux accidentés du travail ! Qui plus est, elles sont destinées à financer le plan Alzheimer. Le Gouvernement s'en tient à la logique d'augmentation des recettes via la hausse de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, ou C3S, la multiplication des déremboursements et l'élargissement de l'assiette de la CSG, et son augmentation pour les non-retraités.
Au-delà du fait que les assurés sociaux sont très majoritairement mis à contribution, les effets comptables de ces dispositions vont peu à peu se dissiper alors que nous ne savons toujours pas ce que vous comptez faire pour que nos comptes ne dérapent pas davantage - mais manifestement cela ne vous préoccupe pas.
Visiblement, vous vous en remettez à un taux de croissance que vous espérez meilleur, mais vous ne faites rien pour le soutenir, l'anticiper, le conforter.
Cette manière de procéder tranche avec votre empressement à accorder 15 milliards de cadeaux fiscaux à ceux qui en avaient le moins besoin.
De même, rien n'est fait pour que les 32 milliards d'exonérations de cotisations sociales accordés cette année, dont 2, 5 milliards sans compensation, soient assortis de contreparties en termes de maintien ou de création d'emplois. Cela est particulièrement choquant et donne un relief tout particulier à l'équité que vous vous plaisez à mettre en exergue.
À ce sujet, nous ne pouvons manquer d'évoquer la question des retraites, qui, nous le savons tous, connaîtra un rendez-vous décisif en 2008.
Depuis des mois, le Gouvernement et sa majorité nous expliquent que rien ne se fera si, par mesure d'équité, les salariés des services publics de transport ne cotisent pas comme les autres citoyens.
Si nous sommes favorables à une harmonisation, à une réelle équité et à une prise en compte de la pénibilité ainsi que des différences d'espérance de vie selon les catégories socio-professionnelles, tel n'est pas votre cas puisque vous venez d'annoncer la retraite à 55 ans pour les avocats des tribunaux d'instance victimes de la réforme de la carte judiciaire !
Parle-t-on d'équité ou de mesure clientéliste destinée à faire taire la grogne légitime et nationale qui s'empare peu à peu de toutes les juridictions ? Ce n'est vraiment pas très sérieux !
Concernant l'assurance maladie, nous sommes entrés depuis quelques années dans l'ère des restrictions. Elles frappent sans distinction nos concitoyens mais aussi les hôpitaux publics qui, quand ils ne sont pas menacés de disparition, sont en proie à des déficits budgétaires quasi insurmontables. Je vous renvoie au rapport de la Fédération hospitalière de France.
Or je rappelle que le dossier médical personnel, le médecin traitant et la tarification à l'activité que vous portez à 100 % cette année, notamment, devaient générer un retour à l'équilibre de la branche en 2007.
Nous ne pouvons que constater que nous sommes loin du compte et qu'il y a un manque évident de pilotage politique. Si l'adoption d'une loi de santé publique est une nécessité, son suivi et sa mise en cohérence avec les évolutions de notre société sont des impératifs incontournables. Ils exigent une gouvernance qui ne se limite pas à des considérations d'ordre comptable. Or telle est pourtant la politique menée depuis 2002.
Enfin, comment pouvez-vous raisonnablement penser que nous pourrions voter en faveur de cette annexe B alors qu'elle acte dans les faits une aggravation du déficit budgétaire ? Sans réforme structurelle, il y a un risque évident de voir se transformer ce déficit en dette sociale, et donc en hausse de prélèvements. Cela sera annoncé non pas tout de suite, mais l'année prochaine, après les élections municipales...
Décidément, l'article 8 n'a pas de crédibilité sociale ni même - je le regrette, monsieur le ministre - de crédibilité budgétaire. C'est pourquoi nous demandons au Sénat de le supprimer.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Hier soir, à l'occasion de la discussion de la motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité, Mme Bachelot-Narquin nous a affirmé que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale était bon : « Nous assurons une progression de l'ONDAM de 3, 2 %, soit un taux supérieur à la progression de la richesse nationale. On peut sans doute en déplorer l'insuffisance, mais de là à parler de rationnement des soins ! ».
Or, en réalité, ce qui nous importe, c'est bel et bien la progression de l'ONDAM pour 2008 par rapport à celui de 2007. Car, et je ne reviens pas sur les propos que nous avons tenus hier, si l'ONDAM de 2007 a été dépassé, ce n'est vraiment pas dû à une série d'épidémies, comme vous l'avez affirmé à l'Assemblée nationale, sans d'ailleurs préciser, malgré l'insistance de nos collègues, la nature de ces prétendues épidémies. Non, le dépassement tient à votre minoration des besoins, car le Gouvernement avait besoin de cet artifice comptable.
Monsieur le ministre du budget, puisque le ministère de la santé est, semble-t-il, désormais sous la tutelle de votre ministère, vous auriez pu et même dû prévoir un ONDAM plus important.
Il ne s'agit pas, contrairement à ce que je vous entends déjà dire, d'ouvrir les vannes des dépenses de santé, il s'agit tout simplement de prendre la mesure de la situation et de répondre aux besoins humains et sociaux.
Ainsi, vous ne pouvez pas ignorer davantage que les dépenses de santé ne sont pas seulement de simples coûts ; elles sont également des investissements pour l'avenir.
Je vous rappelle, par exemple, les positions des économistes Grossman, Lancaster ou encore Becker pour qui les dépenses de santé sont bénéfiques dans la mesure où ces sommes sont autant de temps de travail de gagné, alors que de faibles investissements en santé se traduisent inéluctablement par la résurgence de maladies que l'on croyait oubliées. Ainsi, la maladie représente du temps de travail perdu et une moindre richesse créée ; cela mérite d'être pris en compte.
Utilisons l'éclairage de ces économistes afin de revenir à votre ONDAM 2008. Nous constatons une augmentation de 2, 8 % par rapport à l'ONDAM 2007. Or, pour mémoire, l'année dernière, vous aviez accru l'ONDAM de 2, 6 %. La différence de majoration n'est donc que de 0, 2 %.
Votre ONDAM est effectivement, comme vous l'affirmez, bien supérieur à la progression de la richesse nationale. Je me garderai bien d'ironiser ; je me contenterai de vous répondre que cette progression est facile dans le contexte économique actuel, dont vous êtes d'ailleurs en partie responsable. Mais imaginons un instant que votre scénario haut se réalise. Votre ONDAM ne sera alors que très faiblement supérieur à la croissance.
Scénario haut irréaliste, scénario bas encore trop optimiste ou tout simplement réalité actuelle, votre ONDAM est insuffisant. Le différentiel entre la progression de 2007 et celle pour 2008 ne suffira pas à compenser l'augmentation du coût de la vie et tous vos discours n'y changeront rien.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 142 rectifié est présenté par Mme Demontès, M. Cazeau, Mme Le Texier, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. Domeizel, Mme Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 275 est présenté par M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Cazeau, pour présenter l'amendement n° 142 rectifié.
Lors de ses interventions sur l'article 8 et sur la motion d'irrecevabilité présentée hier par notre groupe, ma collègue Annie David a dénoncé à juste titre un budget insincère. Cet article en témoigne, d'autant qu'il vise à approuver une projection sur quatre ans.
Vous souhaitez que l'article 8 soit adopté ; il le sera sans aucun doute. Mais vos prévisions de recettes sont très largement insuffisantes et celles des dépenses ne permettront pas de satisfaire les besoins humains et sociaux, quel que soit le scénario choisi.
Ce budget, comme le projet de loi de finances, est fondé sur une prévision de croissance de 2, 25 % et ne tient absolument pas compte des réalités internationales, notamment de l'effondrement de la croissance aux États-Unis. Les prévisions de croissance qui viennent d'être publiées à l'échelon européen indiquent que, en termes de croissance, les années 2008 et 2009 ne seront malheureusement pas satisfaisantes.
Comme M. Woerth et Mme Bachelot-Narquin l'ont dit, le premier semestre de l'année 2008 devrait être consacré à une réflexion sur le financement de la protection sociale centrée sur trois points qui sont au coeur de nos préoccupations : la maladie, la retraite et la dépendance. Des dispositions seront donc sans doute prises au second semestre, qui seront de toute évidence au centre de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Les débats récents, notamment sur les prélèvements obligatoires, ont permis de cerner la réalité à laquelle nous sommes confrontés et de voir le chemin sur lequel la droite veut nous entraîner. Faut-il créer une TVA sociale, que l'on appellera peut-être « TVA écologique » ? Faut-il augmenter la CSG, la CRDS ? Sur tous ces points, le Gouvernement prépare à l'évidence une fiscalisation accrue de la sécurité sociale. Dans le même temps, avec le dossier de la dépendance, il ouvrira la porte aux assurances privées.
L'ONDAM 2008 et les prévisions sont complètement sous-estimés et sont remis en cause par de nombreux économistes. C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 8.
Monsieur Fischer, il est toujours possible de considérer que les prévisions ne sont pas réalistes. Les résultats des années précédentes ne peuvent que vous conforter dans cette analyse et vous faire douter de la sincérité des prévisions qui figurent dans les annexes.
Cela étant, je dois reconnaître, comme je me suis plu à le faire devant les membres de la commission des affaires sociales, que le Gouvernement, en la personne du ministre des comptes publics, M. Éric Woerth, a réalisé des progrès indéniables dans le contenu des annexes. Ces dernières sont bien plus précises, et les différentes simulations m'apparaissent beaucoup mieux coller à la réalité que les années antérieures.
Si vous considérez que ces prévisions ne sont pas sincères pour le projet de loi de financement de la sécurité sociale, elles ne le seront pas non plus pour le projet de loi de finances. Votre sanction porte donc à la fois sur le budget des affaires sociales et sur le budget de l'État.
Je vais laisser le soin au Gouvernement de vous répondre, mais la commission des affaires sociales a considéré que les prévisions étaient suffisamment réalistes - même si elles ont un caractère très volontariste - pour approuver l'article 8 et rejeter les amendements de suppression.
Permettez-moi de vous signaler au passage que, en matière de sincérité et de réalisme, Martine Aubry, lorsqu'elle était ministre de la santé, était beaucoup plus loin du compte que ne le sont les gouvernements qui se sont succédé depuis.
Je prendrai pour exemple, monsieur Cazeau, le fait que l'ONDAM doublait ou triplait par rapport aux prévisions. Le déficit de l'assurance maladie « cavalait » ! En la matière, nous pouvons tous battre notre coulpe.
Essayons donc de faire des prévisions qui soient les plus réalistes possible, comme s'y est attaché le Gouvernement, même si rien n'est parfait dans ce monde.
Beaucoup de progrès, me semble-t-il, ont été réalisés concernant l'annexe B. Nous y avons veillé particulièrement cette année, sous votre amicale pression, monsieur le rapporteur.
Aujourd'hui, le but de ce document est d'éclairer le Sénat. Il ne constitue pas un objectif à atteindre pour le Gouvernement. Au contraire, il montre à quel point les choses sont difficiles. D'un côté, la branche vieillesse est présentée sans modification, sans réforme particulière ; c'est la tendance naturelle. De l'autre, concernant l'assurance maladie, nous présentons un ONDAM contraint, avec deux scénarios. Ensuite, nous examinons très précisément comment les choses se passent. Cela nous permet de disposer d'un éclairage pour les débats à venir.
Évidemment, nous souhaitons aller au-delà des objectifs de l'annexe B, grâce à des réformes structurelles, mais cette annexe est un bon outil, fiable, transparent, que le Gouvernement livre au Parlement.
Aussi, je vous demande bien sûr de rejeter ces deux amendements de suppression.
Les conclusions du rapport figurant à l'annexe B donnent les tendances lourdes pour les cinq prochaines années concernant les différentes branches.
Nous aurions souhaité vous entendre dire que l'année 2008 ne sera pas neutre. Nous le savons, le tableau quadriennal qui nous est présenté aujourd'hui risque d'être remis en cause dès l'année 2009. Les informations et les programmes du Président de la République, que nous connaissons bien, constituent un avant-goût de cette évolution.
Concernant l'assurance maladie, le panier de soins sera redéfini, ce qui entraînera pour les malades une prise en charge personnelle et un coût de plus en plus élevé.
Tous ces éléments seront au coeur de nos débats et de nos préoccupations jusqu'à la fin de la semaine.
Le taux de croissance de 2, 25 % retenu pour l'élaboration du budget est de toute évidence surévalué par rapport à la réalité économique et sociale actuelle.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'article 8 et l'annexe B sont adoptés.
Section 1
Dispositions relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement
I. - Après le premier alinéa des articles 46 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relative à la fonction publique de l'État, 65 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et 53 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le fonctionnaire détaché pour l'exercice d'un mandat parlementaire ne peut, pendant la durée de son mandat, acquérir de droits à pensions dans son régime d'origine. »
II. - Le dernier alinéa de l'article 4 de l'ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement est supprimé.
III. - Le présent article entre en vigueur, pour les députés et les sénateurs, à compter, respectivement, du prochain renouvellement intégral de l'Assemblée nationale et du prochain renouvellement triennal du Sénat.
L'article 9 A prévoit notamment - c'est sa phrase essentielle - que « le fonctionnaire détaché pour l'exercice d'un mandat parlementaire ne peut, pendant la durée de son mandat, acquérir de droits à pensions dans son régime d'origine ».
Cet article, qui a été introduit par un amendement déposé en séance à l'Assemblée nationale, prévoit que les fonctionnaires, statutairement en position de détachement pour exercer un mandat parlementaire, ne pourront acquérir un droit à pension dans le régime de retraite de la fonction publique dont ils sont détachés.
En effet, aux termes de la législation actuelle, les fonctionnaires, comme d'autres parlementaires, peuvent cotiser volontairement à leur régime de retraite antérieur alors qu'ils n'ont pas de revenu professionnel. Cela équivaut, en quelque sorte, à un rachat de droits à pensions.
Cet article, qui ne traite du principe du cumul d'acquisition de droits à pensions que d'une seule catégorie d'élus, est loin d'instaurer la transparence nécessaire sur un sujet sensible : le statut des parlementaires et, plus généralement, de tous les élus.
Cependant, on s'interroge sur l'introduction d'une telle modification dans la précipitation, sans que le sujet ait été approfondi, d'autant plus que l'article 9 A n'aborde que partiellement la question de la double constitution de droits à pensions. Encore une fois, par cet article, on oppose les Français les uns aux autres, les fonctionnaires aux autres catégories.
Par ailleurs, cette modification législative, qui consiste essentiellement à réviser l'ordonnance du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement, trouverait mieux sa place, à mon avis, soit dans un projet de loi de finances, soit dans un projet de loi spécifique sur le statut des élus en général au regard de leurs indemnités et de la retraite.
En effet, ce sujet, qui est complexe car il porte à la fois sur le statut de l'élu et sur les retraites, doit être abordé en s'appuyant sur une expertise détaillée prenant en compte les divers statuts dans les fonctions publiques électives, la diversité des régimes de retraite, de base et complémentaires, le cumul de mandats, entre eux d'une part, et avec une activité professionnelle d'autre part, la possibilité de racheter ou de valider des droits à pensions dans les régimes de base, mais également le besoin pour tout élu d'exercer son métier, soit par nécessité de service, soit pour garder la main, dans la perspective d'une reprise de son activité professionnelle au terme de son mandat.
Cette réflexion, qui a toute sa place dans le cadre du rendez-vous de 2008 sur les retraites, pourrait déboucher sur des conclusions avant le délai fixé par l'article 9 A, à savoir le 1er octobre 2008 pour les sénateurs et le 1er juillet 2012 pour les députés.
Aussi, sans remettre en cause l'esprit de cet article - je rappelle qu'il s'agit de ne plus permettre la constitution dans le même temps de droits à pensions en tant qu'élu et en tant que fonctionnaire -, mais considérant qu'il n'est pas équitable, je suggère à M. le président de la commission des affaires sociales de lancer rapidement une étude portant notamment sur les thèmes que je viens de citer afin qu'une nouvelle rédaction de cet article puisse être proposée en commission mixte paritaire ou dans un autre texte, le projet de loi de finances par exemple.
L'article 9 A concerne, disons-le clairement, la réforme du régime particulier des parlementaires.
Cet article, qui résulte d'un amendement introduit à l'Assemblée nationale, supprime la faculté ouverte aux fonctionnaires devenus parlementaires de continuer à cotiser à leur régime de retraite d'origine. On voit bien qu'il a certainement été introduit pour envoyer un signe dans le cadre du débat sur les régimes spéciaux, avant la grève qui, j'en suis persuadé, va marquer la journée du 14 novembre, notamment.
Je pense qu'on aurait pu aller plus loin. Je suppose que le Sénat entérinera la proposition qui nous est faite aujourd'hui dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale lors de la réunion du bureau au mois de décembre.
Nous allons laisser passer cet article, mais j'aimerais que, dans le cadre de la réflexion que nous devons avoir sur une éventuelle adaptation du régime particulier des sénateurs et des députés, nous examinions la possibilité d'étendre l'interdiction de cotiser double aux autres professions à qui c'est aujourd'hui permis et qui sont représentées dans notre assemblée. Cette question mérite réflexion.
Pour ma part, je considère que cet article résulte d'une décision précipitée. Il n'a pas pu faire l'objet d'une véritable discussion au sein des groupes à partir des propositions qui auraient pu être présentées par l'exécutif. Cela se fera dans un mois.
On sait que, en 2004 déjà, le Sénat s'était aligné sur les principaux points de la loi portant réforme des retraites, qu'il s'agisse de la durée de cotisation ou de l'établissement d'une décote et d'une surcote.
Cet article suscite certainement une interrogation chez les Français. Des cas célèbres ont été mis en avant à l'approche de la réforme de 2004 lorsqu'il s'est agi de modifier les conditions d'accès aux droits à la retraite. En ce qui me concerne, je ne suis pas concerné, car je n'ai jamais été fonctionnaire.
Bref, il y aurait beaucoup à dire sur cette question.
Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je pense que nous aurions pu prendre le temps de la discussion et de la réflexion concernant le régime particulier des parlementaires et nous interroger sur les doubles cotisations d'un certain nombre de professions représentées dans notre assemblée.
Je souhaite revenir sur la proposition que j'ai faite au président de la commission des affaires sociales. Il est bien évident que s'il acceptait de faire procéder à une expertise afin que nous puissions mieux cerner le problème, je voterais cet article, que je ne remets pas en cause, mais que je souhaite plus équitable. Dans le cas contraire, je ne le voterais pas.
Ce sujet, qui, je le répète, est très délicat et complexe, est tentaculaire. Il doit concerner d'autres élus, pas uniquement les parlementaires, et pas seulement ceux qui sont fonctionnaires. Il faut aller au bout de cette question.
Il est vrai qu'il s'agit là d'un sujet important. À l'évidence, nous ne pouvons pas limiter notre réflexion à la seule question du cumul de retraites entre mandat parlementaire et fonction publique. Nous devons également considérer l'ensemble du statut des élus, par exemple en nous interrogeant sur la possibilité pour ceux-ci d'exercer une activité salariée, sans pour autant cumuler les droits à pension pendant leur mandat. Le problème est donc complexe.
C'est pourquoi je m'engage à mettre en place un groupe de travail pour nous permettre de mieux comprendre les défis que nous devons relever en la matière.
L'article 9 A est adopté.
L'article 575 du code général des impôts est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque le prix de vente au détail homologué des cigarettes et des tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes est inférieur, respectivement, à 95 % et 97 % du prix moyen de ces produits constaté par le dernier arrêté de prix, le montant des minimums de perception prévu à l'article 575 A peut être relevé par arrêté du ministre chargé du budget.
« Pour les cigarettes, le minimum de perception qui résulte de cette augmentation ne peut excéder le montant du droit de consommation applicable aux cigarettes de la classe de prix la plus demandée.
« Pour les tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes, l'augmentation du minimum de perception ne peut dépasser 25 % du montant figurant au dernier alinéa de l'article 575 A. » -
Adopté.
L'article 575 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans l'avant-dernier alinéa, le montant : « 128 € » est remplacé par le montant : « 155 € » ;
2° Dans le dernier alinéa, le montant : « 75 € » est remplacé par le montant : « 85 € ».
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 99 rectifié est présenté par MM. Adnot, Darniche et Türk.
L'amendement n° 182 est présenté par M. Lecerf.
L'amendement n° 216 est présenté par M. de Montesquiou.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Dans le dernier alinéa (2°) de cet article, remplacer le montant :
par le montant :
Ces trois amendements ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l'article 9 C.
L'article 9 C est adopté.
L'amendement n° 460, présenté par M. Vasselle au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Avant l'article 9 D, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le IV de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« IV. - En cas d'écart positif constaté entre le produit des impôts et taxes affectés en application du II et le montant définitif de la perte de recettes résultant des allégements de cotisations sociales mentionnés au I, le montant correspondant à cet écart est affecté à la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, selon des modalités fixées par arrêté des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.
« En cas d'écart négatif constaté entre le produit des impôts et taxes affectés en application du II et le montant définitif de la perte de recettes résultant des allégements de cotisations sociales mentionnés au I, le montant correspondant à cet écart fait l'objet d'une régularisation par la plus prochaine loi de finances suivant la connaissance du montant définitif de la perte. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant, le cas échéant, des dispositions du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur.
En l'état actuel des dispositions de l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, aucune mesure d'ajustement automatique n'est prévue dans le cas où le coût des exonérations de cotisation patronale excéderait le montant du panier de taxes affectées à la sécurité sociale pour compenser ces allégements.
Le dispositif qui avait été voté en ce sens, sur l'initiative de la commission des affaires sociales, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, a immédiatement été annulé par une mesure contraire dans le collectif budgétaire. Cet amendement vise à rétablir ledit dispositif.
Par ailleurs, il est proposé de pérenniser la mesure prévoyant qu'un excédent éventuel du panier de recettes fiscales serait reversé à la CNAM en 2007.
Tout cela me paraît véritablement le bon sens et je ne vois pas comment le Sénat ou le Gouvernement pourraient s'y opposer.
Certes, le Gouvernement est peut-être confronté à des difficultés majeures qui nous amèneraient à analyser ses inquiétudes et, le cas échéant, à infléchir notre position. Mais, pour le moment, je ne suis pas mandaté pour cela par la commission des affaires sociales. Je suis donc tout ouïe...
Sourires.
Monsieur le rapporteur, j'ai bien compris le sens de votre amendement, mais la mesure que vous proposez a un peu tendance à cadenasser la gestion du dispositif.
À mon sens, mieux vaut laisser à la situation le temps de s'améliorer.
Par ailleurs, et il ne faut pas l'oublier, qu'il s'agisse de la « poche » de la sécurité sociale ou de la « poche » de l'État, c'est toujours le contribuable qui est, in fine, sollicité. Comme vous le savez, la « poche » de l'État est assez tendue en ce moment.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
M. Éric Woerth, ministre. C'est un scoop que je vous livre au cas où vous l'ignoreriez, mesdames, messieurs les sénateurs.
Sourires
En l'occurrence, nous avons fait preuve de beaucoup de bonne volonté - je dirais même d'un souci de bonne gestion - en particulier sous la pression de la commission des affaires sociales.
Monsieur le rapporteur, je connais votre souhait d'une compensation à l'euro près par l'État des allégements qui sont consentis dans les textes législatifs adoptés. C'est donc conformément à votre volonté que nous oeuvrons en ce sens.
Actuellement, la règle de base est la suivante : les allégements sont compensés par un panier de recettes fiscales, qui est réévalué lorsque l'écart entre les recettes et les dépenses est de 2 %. Une commission indépendante travaille sur ces questions, elle établit un rapport, et l'État a donc globalement deux ans pour se mettre aux normes.
Nous n'avons pas voulu attendre inutilement aussi longtemps. C'est pourquoi, lorsque nous avons constaté un tel écart sur l'année 2007, nous avons immédiatement pris des mesures qui vont, me semble-t-il, totalement dans le sens que vous souhaitez. En effet, le Gouvernement s'est engagé devant la Haute Assemblée à compenser les insuffisances du panier fiscal, et il l'a fait.
Ainsi, pour l'année 2007, il a mobilisé 1 milliard d'euros supplémentaires, ce qui pèse lourd dans le budget de l'État. Je ne prétends pas que nous n'aurions pas dû prendre une telle décision, mais nous n'étions pas tenus de le faire, notamment compte tenu de la situation ô combien tendue de nos finances publiques.
De même, 500 millions d'euros ont été ajoutés pour l'année 2008. Si cette somme se révélait insuffisante, ce que je ne souhaite naturellement pas, l'écart serait compensé d'une manière ou d'une autre.
Permettez-moi de vous donner quelques chiffres. La compensation que je viens d'évoquer est financée par les reliquats pour l'État des droits de consommation sur les tabacs et de la taxe sur les salaires, à hauteur respectivement de 629 millions d'euros et de 557 millions d'euros, et par les droits de licences sur les débitants de tabacs, ce qui représente 300 millions d'euros. Cela fait beaucoup d'argent !
Vous le voyez, monsieur le rapporteur, je partage votre état d'esprit. Pour l'année prochaine, je souhaite même - nous en discuterons au sein du Gouvernement avant d'en débattre avec le Parlement - que nous allions plus loin en vue d'une clarification totale des rapports entre l'État et le système de sécurité sociale.
Cela dit, pour le moment, il ne me semble pas pertinent de cadenasser le dispositif. Je préférerais que vous me laissiez agir avec le même état d'esprit que celui dont j'ai essayé de faire preuve s'agissant de l'année 2007.
M. Alain Vasselle, rapporteur. M. Éric Woerth étant un ancien collègue, puisqu'il a été député de l'Oise, je ne peux naturellement pas ne pas lui faire confiance a priori.
M. Guy Fischer s'exclame.
Au demeurant, et l'opposition comme la majorité pourront en convenir, un point peut être mis à son crédit : M. le ministre n'a pas appliqué la disposition tendant à reporter de deux années la nécessaire régularisation du panier fiscal, que M. Copé avait fait adopter contre la volonté du Sénat.
Je le rappelle tout de même, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, alors qu'il manquait 500 millions d'euros, le Gouvernement avait imposé au Parlement une disposition renvoyant à l'année 2009 la régularisation constatée par l'insuffisance de la compensation par le panier fiscal.
Le Gouvernement actuel n'a pas attendu 2009 pour agir et a pris des dispositions dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Certes, en déposant cet amendement, nous voulions aider le Gouvernement et le rendre le plus vertueux possible en matière de compensation. Mais comme le Gouvernement n'a pas besoin de dispositions législatives et réglementaires pour se montrer vertueux, nous lui faisons confiance a priori.
Aussi, monsieur le ministre, je suis prêt à accéder à votre demande, du moins s'agissant du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Mais que les choses soient bien claires : l'année prochaine, nous ferons preuve de la plus grande fermeté à votre égard ou à l'égard de votre successeur, même si je ne peux pas imaginer que vous ayez un successeur, compte tenu de la compétence et du talent avec lesquels vous exercez vos responsabilités.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'année prochaine, si les engagements qui viennent d'être pris devant nous n'étaient pas respectés, nous serions alors très fermes et nous maintiendrions les dispositions que nous venons de vous proposer.
Dans ces conditions, mes chers collègues, je vous suggère de faire crédit au Gouvernement.
C'est la raison pour laquelle j'accepte de retirer l'amendement n° 460.
La quatrième phrase du premier alinéa du III de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : «, et hors rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007 ».
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1 est présenté par M. Vasselle, au nom de la commission des affaires sociales.
L'amendement n° 77 est présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1.
Comme vous le savez, au mois de juillet dernier, nous avons adopté le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat. À cette occasion, nous avions voté un amendement tendant à faire disparaître les allégements sur les temps de pause, et ce avec l'accord du Gouvernement.
Or l'Assemblée nationale a adopté une nouvelle disposition tendant à rétablir ces allégements, ce qui aura pour conséquence d'augmenter la nécessaire compensation au titre du panier fiscal par le Gouvernement sur le budget de l'État. De fait, le montant du dispositif est évalué entre 200 millions et 250 millions d'euros.
Par conséquent, nous proposons la suppression de l'article 9 D, qui ne prévoit pas de compensation.
Le Gouvernement et la commission des finances peuvent-ils nous apporter des assurances s'agissant de la compensation de ces allègements, par le panier fiscal ou par une autre voie ? J'attends de connaître leur position pour décider des suites que nous devrons réserver au présent amendement.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 77.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. M. le rapporteur place la barre très haut.
Sourires
En l'occurrence, la commission des finances souhaite également la suppression de cet article, monsieur le ministre.
Je ne reviens pas sur l'explication de notre excellent rapporteur, Alain Vasselle.
Toutefois, nous sommes surpris que l'Assemblée nationale soit revenue sur le dispositif que nous avions adopté au mois de juillet dernier.
J'ai le sentiment qu'une telle décision est, en réalité, destinée à favoriser des entreprises très spécifiques.
Je n'en dirai pas plus.
À l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait émis un avis favorable sur l'amendement déposé par M. Dominique Tian, ce qui est en contradiction avec la position prise explicitement par Christine Lagarde au mois de juillet dernier.
Monsieur le ministre, alors que vous venez d'évoquer la situation de nos finances publiques et que vous vous êtes vaillamment défendu s'agissant de la compensation à l'euro près, je n'ose pas croire que vous seriez prêt à mobiliser 200 millions d'euros, puisque tel est le coût du dispositif adopté sur l'initiative de notre collègue Dominique Tian.
Toutefois, si tel était le cas, une clause de revoyure serait prévue dans le projet de loi de finances pour 2008, afin que vous puissiez nous expliquer où vous comptez trouver ces 200 millions d'euros.
L'amendement n° 209, présenté par Mme Dini, MM. Vanlerenberghe, Mercier, Amoudry et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
I. - Dans l'article 9 D, remplacer les mots :
ou d'un accord collectif étendu
par les mots :
, d'un accord collectif étendu ou d'un accord d'entreprise
II. - Pour compenser la perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de l'extension de l'assiette des allègements aux temps de pause, d'habillage et de déshabillage par voie d'accord d'entreprise est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Muguette Dini.
Si les amendements de suppression sont adoptés, l'amendement n° 209 deviendra sans objet. Il vise à compléter l'article 9 D du PLFSS, introduit par nos collègues députés.
Cet article redéfinit l'assiette retenue pour le calcul des allégements « Fillon ». À leur création par la loi du 17 janvier 2003, ces réductions de charges patronales étaient calculées sur la base du nombre d'heures rémunérées. La loi TEPA du 21 août dernier a changé cela en fondant le calcul de la réduction sur le temps de travail effectif.
À l'occasion de l'examen du présent PLFSS, l'Assemblée nationale a encore modifié le dispositif en réintégrant les temps de pause, d'habillage et de déshabillage rémunérés dans l'assiette des allégements, dès lors que ceux-ci ont fait l'objet d'une convention ou d'un accord de branche étendu au 11 octobre 2007.
Notre amendement vise à compléter le dispositif qui a été adopté à l'Assemblée nationale en prévoyant que les temps de pause, d'habillage et de déshabillage rémunérés entrent dans l'assiette des allégements même s'ils n'ont pas fait l'objet d'une convention ou d'un accord de branche dès lors qu'ils sont régis par un accord d'entreprise.
Il s'agit de prendre en compte les efforts des entreprises qui, grâce à un dialogue social ouvert et fécond, vont au-delà des conventions collectives par le moyen d'accords spécifiques à l'entreprise.
Madame Dini, je ne sais pas si vous avez trouvé la juste compensation, mais l'esprit qui sous-tend votre amendement fait plaisir à la commission des affaires sociales.
Nous ne sommes pas allés dans le sens que vous proposez, car nous savions que le Gouvernement avait beaucoup de mal à assurer la compensation ; nous voulions non pas lui créer de difficulté, mais lui rendre service. Pour votre part, vous essayez de trouver des recettes afin de permettre au Gouvernement de maintenir le dispositif et de l'assumer.
Nous allons entendre l'avis du Gouvernement ; peut-être a-t-il une autre solution qui le mettrait moins en difficulté. Ce qui importe pour nous, c'est que la compensation soit effective.
Il s'agit de modifier le dispositif qui a été adopté au mois de juillet. L'amendement voté à l'Assemblée nationale a élargi la volonté initiale à d'autres secteurs d'activités qui emploient une main-d'oeuvre importante. Cette mesure augmente le coût du travail, alors que tel ne devait pas être le cas.
Je souhaite le retrait des amendements de suppression du dispositif, qui conduit, il est vrai, à une moindre économie de l'ordre de 200 millions d'euros par rapport à une hypothèse de 600 millions d'euros.
On s'est aperçu que la modification relative aux temps de pause aboutissait à une augmentation du coût du travail, notamment pour les bas salaires. Dès lors, cela mettait en péril de nombreux emplois. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité restreindre la mesure et il a accepté l'amendement déposé à l'Assemblée nationale par M. Dominique Tian.
Cette moindre économie de 200 millions d'euros sur les allègements généraux sera compensée par l'État - je sais que c'est ce qui vous préoccupe - au titre du panier des recettes fiscales ; près de 27 milliards d'euros sont affectés à ces compensations dans le projet de loi de finances pour 2008.
L'effet du dispositif relatif aux temps de pause devrait donc être couvert par ces recettes.
Je vous propose de faire très précisément le point devant votre commission, à la fin du printemps, sur le coût des allègements de charges. Il est préférable de ne pas s'en remettre uniquement à une commission indépendante. Je vous présenterai un bilan, y compris pour ces 200 millions d'euros. Mais ce ne sont que des évaluations ; il s'agit d'une matière vivante, que l'on ne peut donc pas totalement appréhender. Par principe, l'État compense 27 milliards d'euros dans le budget de l'État ; les 200 millions d'euros trouvent leur place dans ces 27 milliards d'euros. Inscrire 27, 2 milliards d'euros n'aurait pas de sens puisqu'il s'agit, je le répète, d'évaluations. Et si l'on juge que les allègements ne sont pas suffisamment compensés, le Gouvernement devra prendre des mesures.
L'amendement n° 209 vise à étendre le dispositif. Le coût de cette mesure serait trop important. Je demande donc le retrait de cet amendement.
Nous ne sommes pas arrivés au bout de cette discussion, monsieur le ministre. Vous avez parlé de 27 milliards d'euros, ce qui est quand même considérable.
Mon collègue Alain Vasselle est dans son rôle en insistant sur la compensation. Mais permettez-moi de rester dans le mien en m'interrogeant sur l'efficacité de la dépense. D'ailleurs, ce devrait être le rôle de l'ensemble de nos collègues. Car toute niche fiscale est une dépense fiscale, et une dépense fiscale est une dépense, tout court. M. le rapporteur général ne dira pas le contraire !
Comment allez-vous compenser, monsieur le ministre ? Vous ne nous l'avez pas encore expliqué clairement.
Nous avons déposé des amendements de suppression de l'article. Mme Dini propose une autre solution. Pour ma part, je ne m'arrêterai pas à la compensation, parce que je m'inscris dans le cadre de l'efficacité de la dépense publique.
Monsieur le ministre, vous avez vous-même reconnu la difficulté à financer toutes ces mesures. Il faut tout de même se rendre compte que ces 200 millions d'euros concernent en grande partie des entreprises qui ne sont pas soumises à la concurrence internationale et qui maintiennent des bas salaires. Finalement, vous risquez de pérenniser les trappes à bas salaires.
Si vous compensez, vous donnerez satisfaction à M. Vasselle, mais vous ne donnerez pas satisfaction à la commission des finances qui souhaite, quant à elle, mesurer l'efficacité de la dépense et qui n'est pas favorable à cette dépense de 200 millions d'euros, alors que vous êtes déjà loin du compte.
Je veux bien convenir que l'erreur est humaine ! Lors de l'examen du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, Mme Lagarde savait pertinemment quels seraient les besoins en termes de compensation tant pour l'intérim que pour les entreprises visées au travers de ces 200 millions d'euros ; elle avait elle-même donné le chiffre, qui s'élevait à 600 millions d'euros : 400 millions d'euros pour l'intérim, 200 millions pour les entreprises en question.
Personne n'a cité les entreprises concernées par cette exonération et je ne vais pas être le premier à le faire, mais au vu du celles qui sont visées, cela ne m'incite pas à vous suivre. En effet, leur situation est telle que l'on rencontre d'autres problèmes avec certaines d'entre elles, problèmes qui mériteraient un débat spécifique. Quant à dire que les emplois vont être menacés dans les entreprises auxquelles je pense, permettez-moi d'en douter.
Ce qui m'importe, en tant que rapporteur de la commission des affaires sociales, c'est que la compensation soit effectuée. Je ne vois pas pourquoi je changerai de position ! M. le ministre prend l'engagement de nous donner rendez-vous à la fin du printemps pour faire le point et prendre les mesures qui permettront la compensation à l'euro près de ces 200 millions.
Le rôle de la commission des affaires sociales est de veiller à l'équilibre des comptes dans la limite de ce qui est prévu dans le cadre du PLFSS pour 2008. C'est la raison pour laquelle je vais accepter, au nom de la commission des affaires sociales, de retirer l'amendement - c'est la deuxième fois cet après-midi -, compte tenu des engagements qui ont été pris. Mais il est certains arguments sur lesquels il ne faut peut-être pas trop s'étendre au regard de la position de Mme Lagarde lors de l'examen de la loi TEPA, au mois de juillet dernier.
On ne va pas, au travers d'un amendement, faire un débat sur la politique d'allègement des charges. C'est une politique ancienne, qui aboutit à la diminution du coût du travail, notamment lorsque les rémunérations sont faibles.
Revenir aujourd'hui sur la réduction du coût du travail pour les bas salaires concernerait probablement 800 000 emplois : si vous supprimez brutalement les allègements de charges, c'est 800 000 emplois qui risquent d'être exposés de façon dramatique.
Ce sont des sujets extrêmement concrets. On peut contester ces allègements de charges ! Ils représentent 27 milliards d'euros dans le budget de l'État et certains d'entre vous considèrent que nous en avons singulièrement besoin,
Cependant, ces allègements de charges répondent à une logique économique : la réduction du coût du travail, qui favorise l'emploi. Il s'agit donc d'une démarche vertueuse. Un tel débat nécessite une approche plus globale.
Vous dites que toutes les entreprises concernées ne sont pas soumises à la compétition internationale ; ce n'est pas tout à fait exact.
Il y a la grande distribution, par exemple, puisque c'est à elle que vous pensez.
Mais il y a aussi les petites et moyennes entreprises dans le secteur de la mécanique qui, pour des raisons de conventions collectives, sont visées par le dispositif. S'il est des entreprises qui sont soumises à la compétition internationale, ce sont bien ces PME, qui sont plutôt performantes en France ; elles sont implantées dans certains bassins de population et concernent un nombre d'emplois considérable. Ce dispositif s'applique donc non pas à tel ou tel secteur, mais à un assez grand nombre de secteurs.
Par ailleurs, des conventions collectives anciennes ont intégré cette démarche et ce serait revenir un peu brutalement sur le résultat d'un dialogue social.
C'est pourquoi j'apprécie que M. Vasselle ait accepté de retirer cet amendement. En échange, je prends l'engagement important d'assurer la compensation de l'allègement à l'euro près. En outre, je souhaite que l'on clarifie la relation entre l'État et la sécurité sociale. J'imagine que tel est également le souhait de la commission des finances du Sénat.
Je prends donc l'engagement de venir devant votre commission au mois de juin, si vous m'y invitez, pour vous dire comment s'est déroulée l'exécution de la mesure pour 2008.
Tels sont les différents éléments que je souhaitais vous apporter, monsieur le rapporteur. Je ne conteste pas ce que vous dites, mais ces quelques éléments permettront d'éclairer un peu plus ce débat.
L'amendement n° 1 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur général, pour explication de vote sur l'amendement n° 77.
La préoccupation de M. le rapporteur de veiller, dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale, à équilibrer les comptes ou à ne pas dépasser un certain niveau de déséquilibre est parfaitement justifiée. De manière symétrique, la commission des finances a la même préoccupation pour ce qui concerne le solde des comptes de l'État, préoccupation rappelée fort justement par M. le rapporteur pour avis, Jean-Jacques Jégou.
J'ai cru comprendre, monsieur le ministre, que les 200 millions d'euros en question sont d'ores et déjà compris dans la masse des 27 milliards d'euros financés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008.
La clause de rendez-vous de 2008 que vous avez fixée doit permettre, en fonction de l'évolution réelle des charges et des produits, de la conjoncture économique et de la réalité des dépenses sur une masse aussi considérable, de trouver des marges de manoeuvre de nature à résorber ce différentiel de 200 millions d'euros. En valeur absolue, il s'agit, il est vrai, d'une somme importante, mais il faut la relativiser par rapport à la masse globale.
Monsieur le ministre, il ne faut pas, bien entendu, alourdir le déficit de l'État.
Dès lors que vous nous indiquez que la clause de rendez-vous de 2008 doit permettre de mieux paramétrer les éléments à prendre en compte et que vous nous assurez que ces 200 millions d'euros sont compris dans la masse des exonérations déjà prévues dans le projet de loi de finances initial pour 2008, nous pouvons retirer cet amendement.
Toutefois, la commission des finances sera particulièrement vigilante sur cette question lors de l'examen, dans quelques jours, du projet de loi de finances pour 2008.
C'est lors de la revue générale des politiques publiques que nous pourrons apprécier l'efficacité du dispositif ; et sans doute pourrons-nous alors nous poser toute une série de questions.
Au demeurant, nous pouvons nous interroger sur la « barémisation » de ces exonérations. Si celles-ci doivent être permanentes, pourquoi ne pas les répercuter dans le barème retenu pour le calcul des cotisations sociales ?
Par ailleurs, nous sommes confrontés à un problème global de maîtrise de la masse considérable des dépenses au sein de nos finances publiques ; M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique le sait mieux que quiconque.
Monsieur le ministre, je vous remercie des explications que vous avez données. Vous pouvez compter sur notre vigilance, qui sera au moins égale à celle de la commission des affaires sociales. Vous le savez, il existe entre nos deux commissions une saine émulation pour parvenir à maîtriser nos finances publiques.
Sourires
Monsieur le ministre, j'aimerais revenir sur les 800 000 emplois dont vous avez parlé.
Comme vient de le souligner excellemment M. le rapporteur général, nous devrions nous demander si ces allégements doivent être ou non pérennisés, question récurrente que pose Serge Dassault, rapporteur spécial.
Pour éclairer notre assemblée, je ne donnerai qu'un seul chiffre : en retirant les heures supplémentaires, la mesure coûte non pas 27 milliards d'euros, mais 22, 7 milliards d'euros, ce qui revient, pour 800 000 emplois, à un allégement de 28 400 euros par emploi.
Certes, mais cette somme est tout de même considérable, et nous devons nous demander si la mesure est réellement efficace.
Je vous le dis franchement, monsieur le ministre, je n'y crois pas ! Comme vous l'avez vous-même souligné, il existe tout un panel d'emplois qui ne sont pas attaquables, si j'ose dire, comme la grande distribution, les emplois relatifs au décolletage ou à la petite mécanique de précision, qui doivent affronter une concurrence au sein même de l'Union européenne. Cette question doit faire l'objet du rendez-vous de 2008.
Cela dit, le rapporteur pour avis de la commission des finances retire l'amendement n° 77.
L'amendement n° 77 est retiré.
Madame Dini, l'amendement n° 209 est-il maintenu ?
Cet amendement visait à rétablir une certaine équité entre les entreprises. Mais notre souci étant également de ne pas accroître le déficit, je retire l'amendement.
L'amendement n° 209 est retiré.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'article 9 D.
Le débat qui vient de se dérouler montre bien le souci permanent des uns et des autres à vouloir équilibrer les comptes de l'État, souci que je partage.
Je tiens simplement à vous faire part d'une réflexion. Lors des négociations qui ont eu lieu dans les entreprises pour la mise en place des 35 heures, les temps de pause et d'habillage et de déshabillage ont été décomptés du temps de travail effectif des salariés.
En effet, sur une journée de huit heures, si l'on estime, par exemple, que le temps d'habillage et de déshabillage représente un quart d'heure, le temps de travail effectif n'est que de sept heures quarante-cinq. C'est sur cette base que se sont ouvertes les négociations pour les 35 heures.
Or on va alléger les charges des entreprises sur la durée totale, quel que soit le temps de pause retenu, alors que celui-ci est décompté, pour les salariés, de leur temps de travail effectif.
Je m'interroge sur cette volonté de donner toujours plus, toujours aux mêmes !
J'ai participé, dans une vie antérieure, à différentes négociations sur les 35 heures, et je puis vous dire que, dans les entreprises, cela ne s'est pas fait sans peine. Le temps de pause étant décompté du temps de travail effectif, une semaine de quarante heures n'est pas comptée quarante heures, notamment pour l'attribution des jours de RTT. Je tenais à vous faire part de cette réflexion, qui me ramène quelques années en arrière.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
L'article 9 D est adopté.
I. - Le chapitre VII du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est complété par une section 7 ainsi rédigée :
« Section 7
« Contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les attributions d'actions gratuites
« Art. L. 137-13. - I. - Il est institué, au profit des régimes obligatoires d'assurance maladie dont relèvent les bénéficiaires, une contribution due par les employeurs :
« - sur les options consenties dans les conditions prévues aux articles L. 225-177 à L. 225-186 du code de commerce ;
« - sur les actions attribuées dans les conditions prévues aux articles L. 225-197-1 à L. 225-197-5 du même code.
« En cas d'options de souscription ou d'achat d'actions, cette contribution s'applique, au choix de l'employeur, sur une assiette égale soit à la juste valeur des options telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 19 juillet 2002, sur l'application des normes comptables internationales soit à 25 % de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options, à la date de décision d'attribution. Ce choix est exercé par l'employeur pour la durée de l'exercice pour l'ensemble des options de souscription ou d'achat d'actions qu'il attribue ; il est irrévocable durant cette période.
« II. - Le taux de cette contribution est fixé à 10 %. Elle est exigible le mois suivant la date de la décision d'attribution des options ou des actions visées au I.
« III. - Ces dispositions sont également applicables lorsque l'option est consentie ou l'attribution est effectuée, dans les mêmes conditions, par une société dont le siège est situé à l'étranger et qui est mère ou filiale de l'entreprise dans laquelle le bénéficiaire exerce son activité.
« IV. - Les articles L. 137-3 et L. 137-4 s'appliquent à la présente contribution. »
II. - Le chapitre VII du titre III du livre Ier du même code est complété par une section 8 ainsi rédigée :
« Section 8
« Contribution salariale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les attributions d'actions gratuites
« Art. L. 137-14. - Il est institué, au profit des régimes obligatoires d'assurance maladie dont relèvent les bénéficiaires, une contribution salariale de 2, 5 % assise sur le montant de l'avantage défini au I de l'article 80 bis du code général des impôts ainsi que celui de l'avantage défini au 6 bis de l'article 200 A du même code.
« Les articles L. 137-3 et L. 137-4 s'appliquent à la présente contribution. »
III. - Le I est applicable aux attributions consenties à compter du 16 octobre 2007.
IV. - Le II est applicable aux levées d'options réalisées et aux actions gratuites cédées à compter du 16 octobre 2007.
Faut-il taxer les stock-options pour alimenter le budget de la sécurité sociale ? Telle est la question qui est posée par l'article 9 E.
Certes, cette suggestion a été faite par la Cour des comptes elle-même. En effet, dans un récent rapport d'activité, elle a indiqué, par la voix de son président, que le montant des stock-options aujourd'hui versées en France s'élève à quelque 9 milliards d'euros, ce qui pourrait représenter une recette de plus de 3 milliards d'euros pour le budget de la sécurité sociale si l'on appliquait les prélèvements retenus pour les autres traitements et rémunérations.
Bien entendu, la question qui nous est aujourd'hui posée est celle de l'intérêt à accompagner ce dispositif et, éventuellement, à le renforcer. Dans leur philosophie, la finalité première des stock-options est de permettre aux entreprises de croissance, les entreprises dites schumpeteriennes, si je puis dire, de trouver les moyens de rémunérer, certes à terme, des cadres de haut niveau ou des chercheurs, pour leur assurer un développement plus rapide.
Mais, chacun ici le sait, ce dispositif a été perverti au cours des années, puisqu'il vise maintenant à assurer un complément de rémunération aux grandes entreprises ou aux entreprises du CAC 40.
Cette perversion a été notée par de nombreux observateurs, et je citerai simplement l'un des spécialistes en France de ces questions. À propos des stock-options, ce dernier indique que « pour justifier les plans qu'elles vont présenter, les sociétés mettent en avant la nécessité de ?motiver les troupes?, de recruter et de retenir dans l'entreprise du personnel et des cadres qualifiés. C'est sans doute vrai en partie, mais il reste que les stock-options permettent aussi à une poignée de privilégiés d'engranger en quelques années des fortunes colossales sans prendre aucun risque. Le scandale est à son apogée lorsque les bénéficiaires sont précisément ceux dont les erreurs sont à l'origine de la baisse des cours. » Cette citation illustre aujourd'hui le malaise qui s'est progressivement instauré.
Dans le passé, nous avons déjà émis un certain nombre de propositions visant à trouver des sources de financement pour le compte de la sécurité sociale. Aujourd'hui, il nous semble opportun de chercher du côté des stock-options, dans la partie correspondant au complément de rémunération octroyé aux grandes sociétés notamment, des moyens supplémentaires, qui dépasseront les 400 millions d'euros prévus par l'amendement Bur adopté par l'Assemblée nationale.
Donc, nous avons déposé plusieurs amendements tendant, d'abord, à favoriser la situation des « gazelles », c'est-à-dire les sociétés de croissance, qui ne seraient pas soumises à ces prélèvements, ensuite, à alourdir le prélèvement sur les sociétés de grande dimension dans lesquelles les stock-options sont purement et simplement des compléments de rémunération et, enfin, à prévoir une sorte de bonification pour les entreprises qui les utilisent pour alimenter les plans d'épargne entreprise.
En adoptant ces amendements, nous pourrions atteindre plusieurs objectifs essentiels en donnant à l'article 9 E un véritable sens politique et en répondant à l'attente des Français dans le domaine de l'éthique.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Monsieur le ministre, vous vous en êtes remis à la sagesse de l'Assemblée nationale lors du vote sur l'amendement de M. Yves Bur, devenu l'article 9 E, visant à instaurer une double contribution, patronale et salariale, sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les attributions d'actions gratuites.
Sur l'initiative de notre collègue rapporteur pour avis, Jean-Jacques Jégou, la commission des finances a adopté un amendement tendant à supprimer la contribution salariale. Le rapporteur du projet de loi de financement de la sécurité sociale ne propose pas, pour sa part, de modifier le texte initial, mais il est favorable, dans son rapport, à une flat tax pour alimenter le budget de la sécurité sociale.
Pour éviter que ce débat ne soit interne à la majorité et afin de vous faire connaître notre position, nous vous proposons, comme mon collègue François Marc vient de le rappeler, une série d'amendements que nous estimons être en cohérence avec nos principes de justice sociale et d'efficacité économique.
Selon nous, il y a non pas la justice d'un côté et l'efficacité de l'autre, mais la justice par l'efficacité et l'efficacité dans la justice. En effet, depuis que les stock-options ont été introduites dans notre droit, au début des années soixante-dix, le monde a changé du tout au tout et les impératifs financiers l'ont emporté sur les besoins de l'économie réelle.
Le dispositif a connu des dérives illustrées par une succession régulière de dirigeants qui en bénéficient, mais sans commune mesure avec les résultats économiques de l'entreprise auxquels ils appartiennent, quelquefois même au détriment des actionnaires et, dans la plupart des cas, au détriment des salariés.
On a ainsi parlé d'enrichissement sans cause et en tout cas sans risque, ce qui est quand même un comble, reconnaissez-le, dans une économie de marché ! Des fortunes ont pu ainsi être engrangées dans des espaces de temps très courts. Au fil des ans et de l'inventivité financière, le mécanisme s'est perverti et ne répond plus à ses objectifs premiers qui sont d'attirer et de fidéliser des cadres hautement qualifiés, tout en permettant la croissance de jeunes entreprises.
On aboutit à des effets néfastes. Il en est un qui est paradoxal, c'est celui qui aboutit à désolidariser de l'entreprise qu'ils sont censés faire prospérer ceux qui bénéficient de ce mécanisme ! Le cours de bourse étant la boussole, la porte est ouverte aux communications trompeuses pour les marchés financiers, sans compter que la distribution massive de stock-options liées à l'ampleur de la capitalisation boursière des entreprises du CAC 40 en modifie la nature. C'est ce qui conduit certains à prôner une position radicale, à savoir la suppression du système.
Dans l'idéal de ce que devrait être une réforme - c'est l'occasion d'en parler -, il conviendrait de plafonner le volume des distributions, d'en limiter l'avantage fiscal et social, et d'introduire de la transparence.
Tel n'est pas l'objet de l'article 9 E ; tout au plus s'agit-il d'abonder fort modestement - nous y reviendrons - le financement de la sécurité sociale. Le produit attendu serait de 250 millions d'euros pour la contribution patronale et de 150 millions d'euros pour la contribution salariale. Effectivement, on est loin du chiffrage avancé par la Cour des comptes, même si celui-ci mérite d'être précisé, et loin de la somme des niches sociales cumulées, qui seraient de l'ordre de 30 milliards d'euros.
Notre collègue Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis, conteste d'ailleurs la qualité de niche pour la contribution salariale. Il est certain qu'il faudrait clarifier le régime de taxation applicable aux levées d'options et aux distributeurs d'actions. Il y a une ambiguïté quant à leur nature : plus-value ou élément de rémunération différée ?
Quoi qu'il en soit, il est juste que ces dispositifs contribuent au financement de la protection sociale. Il est économiquement efficace d'exonérer les PME en croissance, afin de leur donner un avantage compétitif, et il est hautement souhaitable qu'un signal soit donné en faveur de l'épargne collective lorsque les souscriptions, une fois levées, viennent abonder un plan d'épargne d'entreprise.
C'est d'ailleurs une suggestion que Mme le ministre de l'économie, des finances et de l'emploi avait faite, mais elle l'a bien vite oubliée ! C'est ce que nous défendrons tout à l'heure. On nous objectera sans doute les arguments habituels : la concurrence fiscale, la perte d'attractivité, l'alourdissement des prélèvements obligatoires.
Mme Nicole Bricq. Mais nous n'attendons pas de leçon d'une majorité qui, depuis 2002, de gouvernement en gouvernement - cela ne se dément pas dans l'actualité budgétaire -, n'a cessé de créer des niches fiscales et sociales, d'amputer les marges de manoeuvre de la puissance publique, d'aggraver les déficits budgétaires et sociaux, sans pour autant encourager l'investissement de long terme capable d'armer notre appareil productif dans la mondialisation. C'est donc avec pugnacité que nous défendrons nos amendements.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais, de façon synthétique, vous indiquer les cinq grandes raisons pour lesquelles cet article 9E me paraît mauvais.
La première raison est d'ordre constitutionnel. Il s'agit de taxer une plus-value sur des valeurs mobilières. Il convient d'expliquer le motif d'intérêt général qui justifie de déroger au principe d'égalité, alors même que la réalisation d'une plus-value liée au mécanisme des options de souscription d'actions et aux actions gratuites est en tout point semblable, d'un point de vue économique, financier et juridique, à la réalisation d'une plus-value sur une valeur mobilière. De plus, je relève une distorsion fiscale au sein de l'épargne salariale. Cela me paraît regrettable après tant de signaux positifs donnés à l'épargne salariale et à la participation des salariés au capital des entreprises.
Deuxièmement, sur un plan technique, il paraît impropre de parler de contribution « salariale » dès lors que la plus-value d'acquisition, et a fortiori de cession, est de plus en plus réalisée lorsque la personne dirigeante n'est plus salariée de l'entreprise. Ensuite, le prélèvement par les URSSAF est incohérent avec le recouvrement par la Direction générale des impôts, la DGI, des 11 % de prélèvements sociaux. En outre, la date d'entrée en vigueur, jusqu'ici fixée au 16 octobre 2007, conduit à une taxation rétroactive des options distribuées par les entreprises.
Troisièmement, sur le plan fiscal, l'incohérence est manifeste et il faut avoir une vision consolidée. Les stock-options et les actions gratuites font déjà l'objet d'une taxation significative à l'impôt sur le revenu, voire élevée par rapport à certains de nos partenaires, en particulier le Royaume-Uni.
Pour le contribuable - permettez-moi de le dire, chers collègues de la commission des affaires sociales -, la distinction entre fiscalité et prélèvements sociaux est indifférente. En effet, le contribuable peut être taxé à 53, 5 % sur le gain d'acquisition, puis à nouveau sur la plus-value de cession. Cette surtaxation de 2, 5 % n'est d'ailleurs pas comprise dans le périmètre du bouclier fiscal, mais aurait clairement vocation à l'être. Si l'article devait être voté, j'imagine de déposer un amendement en seconde partie du projet de loi de finances.
Je relève en outre que l'on crée un nouveau prélèvement social sans ouverture de droit à prestation.
Quatrièmement, sous un angle budgétaire, monsieur le ministre, quel sera l'impact réel de la création de la contribution patronale ? Ne conduira-t-elle pas les entreprises à ajuster à due concurrence le volume de distribution des stock-options et des actions gratuites, afin de maintenir inchangé le coût global de leurs plans d'épargne salariale, ce qui limiterait d'autant l'intérêt budgétaire de la mesure ? Je conteste l'estimation à 400 millions d'euros du rendement de la mesure par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. J'estime que ce rendement est considérablement surévalué. Je déplore que l'on se rassure à bon compte en se voilant la face sur les effets collatéraux d'ordre économique, qui sont préoccupants.
Cinquièmement, sur un plan économique, on peut redouter un impact négatif de ces mesures sur l'attractivité de la France et la localisation des sièges sociaux. Il y a là un signal contradictoire avec ce que nous a dit Mme Christine Lagarde, et la préparation d'une loi d'attractivité qui devrait être examinée dans quelques semaines. L'attractivité n'est ni un vain mot ni un objet de discours. Cela signifie des revenus taxables et des richesses supplémentaires. C'est cette fameuse « dynamique de l'assiette » que nous appelons de nos voeux.
Les stock-options et actions gratuites, c'est la rémunération de la compétence et de la performance ; c'est le moyen d'attirer sur notre sol des cadres et des dirigeants français ou étrangers de haut niveau, de conforter le dynamisme et les exportations de nos entreprises, donc l'emploi. L'emploi ne se décrète pas ; il ne vient que parce que l'entreprise a des perspectives de croissance et de profit. Et la croissance ne vient que si les salariés sont motivés pour y contribuer.
Or je rappelle que de nombreux pays n'assujettissent les plus-values sur options ou actions gratuites à aucun prélèvement social. Deux situations existent.
Soit les stock-options bénéficient d'un régime spécifique qui les assimile à une plus-value et écarte, de ce fait, l'application de toute cotisation sociale ; c'est le cas, entre autres, aux États-unis, au Royaume-Uni et en Irlande.
Soit elles sont imposées dans les conditions de droit commun à l'impôt sur le revenu et aux cotisations sociales, moyennant des plafonds de cotisations sociales qui font que, en pratique, les plus-values sur options ou sur actions gratuites ne sont pas assujetties aux cotisations de sécurité sociale. Ces plafonds sont de 63 000 euros de revenu annuel en Allemagne, de 36 000 euros en Espagne et de 87 000 euros en Italie.
Monsieur le ministre, en termes d'ingénierie juridique, je crains beaucoup la création de structures de portage des contrats de travail des cadres dirigeants hors de France ou, le cas échéant, des changements de résidence fiscale.
Dans un monde ouvert, j'ai le sentiment qu'il ne faudrait toucher à ces dispositifs que d'une main tremblante !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
L'amendement n° 224, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après les mots :
sur l'application des normes comptables internationales
supprimer la fin du quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
L'article 9 E a pour objet d'instituer des contributions patronales sur les stock-options et actions gratuites.
L'assiette qui nous est proposée par l'Assemblée nationale pour cette contribution nous paraît aboutir à un résultat très homéopathique, surtout si nos collègues ont la volonté d'abonder le budget de la sécurité sociale, car cette assiette est réduite.
En effet, l'article 9 E prévoit que l'assiette de cette contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions est limitée à 25 % de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options à la date de décision d'attribution.
Je partage un point de l'intervention de notre rapporteur général, M. Marini : le chiffrage qui a été indiqué ne correspond pas à la réalité. Si l'on veut vraiment abonder le budget de la sécurité sociale, il faut le faire de manière ouverte et franche. C'est pourquoi nous proposons de supprimer la limitation qui a été introduite par nos collègues de l'Assemblée nationale, afin que la cotisation repose sur une assiette égale à la juste valeur des options, en référence aux normes comptables internationales.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer la possibilité pour l'employeur de choisir la base de la cotisation et de rétablir une assiette correspondant à la réalité de la valeur des options. Je précise, ce qui m'évitera d'y revenir, que l'amendement suivant prévoit une autre taxation.
Notre dispositif a pour objet de confirmer la ligne tracée par l'amendement de M. Yves Bur, tout en instituant une véritable taxation des stock-options et en donnant à cette dernière un contenu réel et non pas « cosmétique ».
Madame Bricq, nous comprenons bien l'objectif qui est le vôtre avec cet amendement : vous voulez modifier l'assiette de la contribution patronale.
Dans l'article 9 E, le taux est fixé à 25 %. Pourquoi pas 30 %, 50 %, 75 %, voire la totalité ? Il nous paraît raisonnable de rester dans la limite de ce qui est prévu. De plus, la proposition que vous venez de faire n'est certainement pas de nature à emporter l'enthousiasme de la commission des finances et de son rapporteur général, mais il serait intéressant d'entendre l'avis du Gouvernement.
Toujours est-il que la commission des affaires sociales n'a pas jugé pertinente une telle initiative. Même à considérer que la dose proposée a un caractère trop homéopathique, je vous rappelle que, l'année dernière, le Gouvernement avait rejeté une initiative comparable que nous avions prise lorsque nous avions déjà prévu de taxer les stock-options. Pourtant, la taxation que nous proposions alors était très modeste au regard de celle qui nous est présentée aujourd'hui, sur l'initiative de M. Bur !
C'est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales considère qu'il aurait été préférable d'adopter une flat tax, ce qui aurait été dans le sens suggéré par M. le rapporteur général, lequel estime qu'il faut être relativement prudent...
... dans la mise en oeuvre d'un dispositif d'une telle nature.
Cependant, vous avez eu raison, madame Bricq, de rappeler que la Cour des comptes a fait valoir que les niches sociales ne représentaient pas moins de 30 milliards à 35 milliards d'euros de recettes perdues chaque année pour la sécurité sociale.
Il nous faut donc, à l'instar de la commission des finances, examiner ces niches sociales. Il convient de les toiletter les unes après les autres et de distinguer celles qui ont un caractère pertinent et un véritable effet sur le plan économique, social et de l'emploi, et qui doivent donc subsister en totalité, de celles pour lesquelles on pourrait imaginer une taxation permettant d'alimenter le budget de la sécurité sociale.
Les recettes induites par cette taxation sont très modestes : 400 millions d'euros, alors que les besoins annuels sont plus proches de 3 ou 4 milliards d'euros.
Nous ne pouvons pas, au détour d'un amendement, adopter des mesures de cette nature, qui vont d'emblée très loin, sans avoir procédé à une évaluation et mesuré tous les effets pervers qui pourraient en résulter.
Notre collègue Isabelle Debré pourrait également s'inquiéter des effets négatifs des dispositifs mis en place afin de favoriser la participation, l'intéressement et l'investissement des salariés dans l'entreprise.
Il existe sans doute des effets négatifs, que vous avez relevés, madame Bricq, monsieur Marc, et il convient peut-être de moduler cette taxation. Mais, s'agissant l'assiette de la contribution patronale, la commission ne pense pas utile de vous suivre.
Elle a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
J'ai bien entendu ce qui a été dit par l'ensemble des orateurs. Sur le sujet des stock-options, il me semble nécessaire d'adopter une approche qui ne soit pas idéologique. D'un côté, il s'agit d'un produit diabolique, de l'autre, d'un produit nécessaire, et l'on ne parvient pas à trancher ce type de débat.
Bien évidemment, un tel produit financier a ses avantages. Cependant, l'application du dispositif ne doit pas déraper, nous en sommes tous d'accord. De ce point de vue, la responsabilité des conseils d'administration a été encadrée. Nous avons effectué un travail que vous n'avez pas fait, mesdames, messieurs de l'opposition !
Parallèlement, il convient bien sûr de ne pas « tuer » l'assiette des stock-options, qui constituent une modalité de rémunération ou de participation très particulière, et dont l'intérêt pour la compétitivité des entreprises est évident.
Dans cette approche assez pragmatique, le Gouvernement considère qu'à partir du moment où les stock-options constituent un revenu elles doivent participer au financement de la protection sociale. Une fois ce principe de base posé, nous avons voulu le mettre en oeuvre d'une façon équilibrée, en veillant à ce que les pourcentages de la contribution soient significatifs, mais ne mettent pas en péril la nature du produit qui leur sert de support.
Yves Bur a proposé, dans la première partie de son amendement, une cotisation patronale, considérant que rien n'existait dans ce domaine, sans qu'une raison particulière explique une telle situation. Le taux de cette cotisation patronale est de 10 %, taux significatif, qui n'empêche cependant pas la distribution de stock-options.
En présentant l'amendement n° 224, vous avez évoqué, madame Bricq, la valorisation des actions sur lesquelles portent ces options. Nous pensons qu'il faut laisser le choix de cette valorisation aux entreprises : soit elles adoptent les standards comptables internationaux, les normes IFRS, et, dès lors, elles se réfèrent à des formules mathématiques permettant d'aboutir à une valeur de l'action ; soit elles décident, n'ayant pas accès à ces normes, de retenir 25 % de la valeur sous-jacente de l'action.
Sur ce point, la situation semble assez claire. Selon moi, il faut laisser ce choix aux entreprises, car certaines d'entre elles n'appliquent pas les normes IFRS. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Plus globalement, lors de l'examen, également riche et intéressant, de cette question par l'Assemblée nationale, le Gouvernement a émis un avis de sagesse sur l'amendement, estimant que sa deuxième partie instaurant une contribution salariale, qui a d'ores et déjà une base importante, n'était pas utile, comme j'ai eu l'occasion de l'expliquer aux députés.
La proposition de fixer une contribution salariale de 2, 5 % a été retenue. Ce taux, qui est relativement faible, ne met pas en péril l'attribution de stock-options.
Nous examinerons ultérieurement d'autres amendements qui nous permettront peut-être de parfaire ce dispositif, mais nous ne devons pas adopter une approche trop idéologique du sujet.
La Cour des comptes affirme que les stock-options peuvent représenter jusqu'à 3 milliards d'euros de revenus pour l'État et elle considère que cette taxation ne met pas en péril la distribution de ce produit.
Je ne prends pas parti, je rappelle simplement ce qui figure dans le rapport de la Cour des comptes !
Dans le même temps, certains disent que, quel que soit le pourcentage de la contribution, celle-ci mettrait en péril les stock-options. Vous le constatez, il existe deux approches différentes et il est assez difficile de savoir quelle est la bonne.
Pour notre part, nous nous sommes efforcés d'avoir la vision la plus équilibrée possible. Lors de l'examen des différents amendements, nous pourrons peut-être progresser encore dans la voie de l'équilibre.
Sur cet amendement, pour lequel nous demandons un scrutin public, madame la présidente, je souhaite faire un court rappel, surtout après l'intervention de M. le rapporteur général.
C'est un amendement de l'Assemblée nationale qui a prévu cette taxation. Au Sénat, nous n'avons pas encore fait cette révolution, puisque M. le rapporteur pour avis de la commission des finances nous propose d'adopter des dispositions de moindre portée.
Pourtant, mes chers collègues, force est de constater que la taxation proposée par l'Assemblée nationale reste, comme cela a été dit, très largement « cosmétique ». Elle n'est à la hauteur ni des enjeux ni des attentes légitimes de justice sociale : 250 millions d'euros par rapport à un déficit prévisionnel de 8, 9 milliards d'euros en 2008, malgré les prévisions optimistes de M. Xavier Bertrand voilà à peine un an, c'est une goutte d'eau par rapport à une dette sociale cumulée de près de 80 milliards d'euros ; ce n'est même pas une « recette de poche », c'est une pièce jaune !
Faut-il en rester à la pièce jaune pour les dirigeants de nos entreprises ? Nous pouvons nous poser la question ! Que représentent, mes chers collègues, ces 250 millions d'euros, à propos desquels on semble véritablement s'alarmer ici, par rapport aux 850 millions d'euros que doivent rapporter les franchises introduites à l'article 35 du projet de loi, qui ne seront pas payées par les mêmes ?
Nous ne partageons pas cette conception de la justice sociale, qui consiste à faire payer les malades pour équilibrer les comptes de la sécurité sociale, au nom d'une prétendue politique qui veut que les malades payent pour les malades, épargnant du même coup aux dirigeants d'entreprise la participation à une véritable solidarité.
Je souhaite vous rappeler à cet égard le principe fondateur de la sécurité sociale, tel que l'avait défini Pierre Laroque : « Chacun contribue selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ». Personne ne doit s'en exonérer, pas même nos dirigeants les plus prestigieux. Or, de projet de loi de finances en projet de loi de finances, de franchise en franchise, plus on s'éloigne de la base, moins on veut participer ! Telle est la réalité !
J'ai entendu les inquiétudes de M. le rapporteur général, qui m'ont grandement alarmé, sur le risque de perte des cerveaux et de délocalisation. Mais ceux qui vont payer la franchise ne risquent pas de partir : ils sont attachés à leur travail ; on peut les taxer !
Au moment où vous contestez cet apport à la sécurité sociale de nos dirigeants, je vous mets en garde contre l'incompréhension que risque de provoquer une telle disparité de traitement. En effet, les franchises concerneront deux millions de travailleurs pauvres, qui n'ont pas accès à la couverture maladie complémentaire. Eux qui se lèvent tous les matins pour travailler, pour faire fonctionner les entreprises qui réalisent des bénéfices, paieront les 50 centimes sur le médicament, le 1 euro, qui est déjà prélevé, sur la consultation, les 18 euros sur les « actes lourds », les 2 euros sur les transports et le forfait hospitalier qui n'en finit pas de croître. Ils vont payer plein pot !
Pendant ce temps, on leur expliquera qu'on ne peut pas demander aux dirigeants d'entreprise d'accomplir un effort de solidarité. L'exemple doit venir de ceux qui sont à la tête du monde économique ! §Or, parfois, il faut le savoir, leur exemple est plutôt néfaste !
Je pense également, mes chers collègues, à ceux qui perçoivent l'AAH, l'allocation aux adultes handicapés, et à ceux qui sont victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles, qui vont aussi payer la franchise. Vous ne les prenez pas en compte lorsque vous dites que, malgré toutes les critiques que l'on peut formuler à l'encontre des stock-options, il n'existe aucune raison de les taxer davantage pour permettre que se manifeste, dans ce pays, une véritable solidarité.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Nous voterons l'amendement n° 224 présenté par Mme Nicole Bricq. Bien entendu, nous aurons l'occasion, au moment de l'examen d'autres amendements, de développer notre point de vue, que tout le monde connaît : nous sommes pour une mesure plus radicale, à savoir la suppression des stock-options.
Aujourd'hui, au travers de la discussion de ce premier amendement déposé sur l'article 9 E, on voit bien où se situe la ligne de partage dans notre assemblée concernant le financement de la sécurité sociale. De toute évidence, l'intervention de M. le rapporteur général a donné le la : « pas touche aux riches ! »
Nous pourrions énumérer les chefs d'entreprise qui sont partis avec des stock-options - pour un certain nombre d'entre eux, ce sont leur famille, en particulier leurs enfants, qui en ont profité -, en laissant l'entreprise dans la plus grande difficulté. Des enquêtes et un procès sont en cours. Au sujet des affaires EADS et Moulinex, qui avait mis en cause M. Blayau, il y aurait beaucoup à dire !
Même si nous n'allons pas débattre maintenant de l'article 35, je souhaite rappeler que les franchises sont injustes, dangereuses et inefficaces.
Certains des amendements que nous avons déposés nous permettront d'énumérer tous ceux qui, finalement, sont laissés sur la touche et que l'on veut aujourd'hui taxer.
À l'heure actuelle, la précarité explose en France. Il s'agit d'ailleurs d'un phénomène qui touche tous les grands pays industrialisés. L'apparition de la grande pauvreté, que ce soit au Japon, aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Russie, où la situation devient dramatique, ou en Allemagne, où la précarité est institutionnalisée, est l'une des réalités qui n'est pas véritablement portée à la connaissance du plus grand nombre.
D'un côté, vous dramatisez la situation des riches en raison des propositions exorbitantes contenues dans les différents amendements présentés et, de l'autre, vous ignorez les millions de travailleurs pauvres. Car c'est bien de cela qu'il s'agit ! La trappe à bas salaires évoquée tout à l'heure par M. Jégou est en train de créer en France des millions de travailleurs pauvres, dont la rémunération est bien souvent inférieure à 1 000 euros !
Donc, nous voterons cet amendement.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Je veux dire, très calmement, que je ne voterai pas l'amendement n° 224 pour une raison très simple : en tant que membre du Conseil supérieur de la participation, je regrette infiniment que nous n'ayons pas eu le temps suffisant pour étudier ce dossier dans le calme et de façon approfondie avec les partenaires sociaux qui sont représentés au sein de cet organisme, de toutes tendances politiques, j'y insiste.
En conséquence, je demande à mes collègues de la majorité de ne pas voter cet amendement, de façon à laisser le temps au Conseil supérieur de la participation de travailler dans la sérénité afin de trouver des mesures adéquates, susceptibles de satisfaire tout le monde.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
Je mets aux voix l'amendement n° 224.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 20 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisie de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 269 rectifié, présenté par MM. Murat et P. Blanc et Mme Debré, est ainsi libellé :
I. Compléter le I du texte proposé par cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas d'attribution gratuite d'actions, cette contribution s'applique, au choix de l'employeur, sur une assiette égale soit à la juste valeur des actions telle qu'elle est estimée pour l'établissement des comptes consolidés pour les sociétés appliquant les normes comptables internationales adoptées par le règlement (CE) n° 1606/2002 du Parlement européen et du Conseil du 19 juillet 2002, sur l'application des normes comptables internationales, soit à la valeur des actions à la date de la décision d'attribution par le conseil d'administration ou le directoire. Ce choix est exercé par l'employeur pour la durée de l'exercice pour l'ensemble des attributions gratuites d'actions. Il est irrévocable durant cette période. »
II. Modifier ainsi le II de cet article :
1° Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 137-14 du même code, les mots : « de l'avantage défini au I de l'article 80 de l'article 200 A du code général des impôts ».
2° Le second alinéa du texte proposé pour l'article L. 137-14 du même code est ainsi rédigé : « Cette contribution est établie, recouvrée et contrôlée dans les conditions et selon les modalités prévues au III de l'article L. 136-6.»
III. Au IV, les mots : « cédées » sont remplacés par les mots : « attribuées définitivement ».
La parole est à Mme Isabelle Debré.
Les dispositions votées par l'Assemblée nationale sur l'assujettissement à cotisations patronales des stock-options et des actions distribuées gratuitement ne tiennent que partiellement compte des nouvelles normes comptables applicables aux entreprises.
En effet, les entreprises soumises aux normes IFRS peuvent choisir, pour définir l'assiette de la cotisation patronale sur les stock-options, soit une assiette forfaitaire égale à 25 % de la valeur de l'action, soit la valeur précise qu'elles souscrivent dans leurs comptes en fonction des nouvelles normes comptables IFRS.
En revanche, l'article voté par l'Assemblée nationale n'ouvre pas cette possibilité pour définir l'assiette de la contribution patronale sur les attributions gratuites d'actions.
Le paragraphe I de l'amendement tend à remédier à cet oubli en permettant d'asseoir cette contribution patronale sur le montant provisionné dans les comptes selon les mêmes normes IFRS.
Je précise qu'il s'agit non pas d'offrir aux entreprises soumises aux normes IFRS une possibilité d'optimisation particulière, mais tout simplement de leur simplifier la vie en se conformant au principe sain selon lequel la fiscalité doit être, autant que possible, assise sur les données comptables lorsqu'elles sont incontestables.
Le paragraphe II vise à préciser les modalités de recouvrement de la contribution à la charge des bénéficiaires : la nouvelle contribution sera recouvrée et contrôlée selon les mêmes règles que celles qui sont appliquées en matière de contribution sociale généralisée, ou CSG, sur les revenus du patrimoine, afin d'éviter de doublonner avec le mode de recouvrement existant.
Comme c'est déjà le cas actuellement, les sommes resteront déclarées pour l'impôt sur le revenu et les services fiscaux se chargeront de mettre en recouvrement l'ensemble des contributions sociales - CSG, CRDS, nouvelle contribution - assises sur ces revenus, avant de reverser les recettes aux organismes de sécurité sociale
Le paragraphe III apporte une précision rédactionnelle relative à l'assiette de la contribution à la charge des bénéficiaires des actions gratuites.
L'amendement n° 406, présenté par MM. Juilhard et Carle, est ainsi libellé :
I - À la fin de la première phrase du II du texte proposé par cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, remplacer le pourcentage :
par le pourcentage :
II - Supprimer les II et IV.
La parole est à M. Jean-Marc Juilhard.
L'amendement de la commission prévoit l'instauration de deux contributions salariales sur les stock-options et les attributions d'actions gratuites.
La première est une contribution patronale de 2, 5 % sur les options et de 10 % sur les actions gratuites, acquittée par l'employeur au moment de leur attribution.
La seconde est une contribution salariale de 2, 5 % portant sur la plus-value d'acquisition des stock-options acquittée par les bénéficiaires au moment de leur levée ou sur l'avantage résultant de la cession des actions gratuites.
S'agissant de la contribution patronale, nous pensons, Jean-Claude Carle et moi-même, qu'il convient de ne pas prévoir un taux trop élevé
Protestations sur les travées du groupe socialiste.
Le taux retenu apparaît dissuasif pour la distribution d'actions gratuites. C'est pourquoi cet amendement a pour objet de porter le taux de cette contribution à 5 %.
Quant à la contribution salariale, la fiscalité qui pèse sur les stock-options est déjà très importante.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Si, mon cher collègue ! En effet, les levées d'options ou les cessions d'actions gratuites sont déjà assujetties à la CSG et à la CRDS, qui représentent un prélèvement de 11 % sur les avantages mentionnés par le présent amendement et déjà acquitté par les bénéficiaires.
Ainsi, l'ensemble des prélèvements supportés par les bénéficiaires en France sont largement supérieurs à ceux qui sont supportés au Royaume-Uni, en Belgique ou aux États-Unis et ils sont quasi identiques aux situations allemandes ou néerlandaises. Il en résulterait une expatriation des cadres. Les entreprises françaises deviendraient également très peu attractives pour l'embauche de cadres étrangers de haut niveau.
C'est pourquoi cet amendement vise à supprimer cette contribution salariale.
L'amendement n° 225, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés est ainsi libellé :
Dans la première phrase du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, remplacer le pourcentage :
par le pourcentage :
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Puisque le Sénat a rejeté tout à l'heure la modification de l'assiette que nous proposions, qui permettait d'abonder beaucoup plus sérieusement la sécurité sociale, cet amendement vise à porter la limitation du taux de la cotisation patronale de 10 % à 28, 2 %.
Ce pourcentage, dont le contour est bien identifié, correspond à une réalité économique et budgétaire : il s'agit tout simplement de l'addition des cotisations patronales relatives à la famille, à la maladie, au chômage et aux retraites.
Vous qualifiez la position que nous défendons d'idéologique. J'attends la discussion que nous allons avoir prochainement, lors de l'examen du projet de loi de finances, à propos de la mesure qui a été introduite à la va-vite par l'Assemblée nationale, avec l'accord du Gouvernement, et qui permet, une fois encore aux plus aisés, ceux qui perçoivent 25 000 euros de dividendes par an, de bénéficier d'un prélèvement très avantageux. Je ne sais pas si c'est de l'idéologie, mais cela y ressemble très fortement !
L'amendement n° 226, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale par une phrase ainsi rédigée :
« Cette contribution de 28, 2 % n'est pas applicable lorsque les options de souscription ou d'achat d'actions, une fois levées, et les actions gratuites sont affectées à un plan d'épargne entreprise, les modalités de cette affectation seront définies par décret. »
La parole est à M. François Marc.
Il s'agit de compléter le dispositif très cohérent que nous avons conçu en prévoyant un système incitatif pour que le fruit des stock-options, c'est-à-dire le produit de l'option une fois exercée, puisse être affecté aux plans d'épargne entreprise.
Comme vous le savez, c'est une formule d'épargne salariale collective - même si cet adjectif fait visiblement peur à certains - et facultative, qui permet au salarié de participer avec l'entreprise à la constitution d'un portefeuille de valeurs mobilières, très utile pour le financement de la retraite.
Ces plans, assujettis à une taxation globale de 11 %, sont bénéfiques pour les salariés, puisque les entreprises doivent abonder cette épargne soit avec un apport financier soit en supportant les frais de gestion. En outre, l'obligation de bloquer les fonds pendant cinq ans aide les salariés à prévoir le financement de leur retraite.
L'idée d'inciter les entreprises à abonder les plans d'épargne entreprise ne peut que profiter à toutes les parties prenantes : certes l'entreprise, mais aussi les bénéficiaires des stock-options, ainsi que les caisses de sécurité sociale. En effet, ces dernières percevront quoi qu'il en soit davantage de cotisations, puisque le taux proposé dans l'article 9 E produit une recette cinq fois moins élevée que celui qui est applicable aux plans d'épargne entreprise.
La mesure que nous proposons présente donc un double intérêt : encourager le développement de l'épargne retraite et accroître les ressources de la sécurité sociale.
L'amendement n° 222, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
I. - Compléter le II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, les attributions d'actions qui excluent les personnes mentionnées au II de l'article L. 225-197-1 du code de commerce, lorsque celles-ci ont un mandat social dans la société qui attribue les actions, sont exonérées de la contribution. »
II. - Les pertes de recettes résultant du I sont compensées par le relèvement à due concurrence du taux des contributions sociales visées aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
Cet amendement prévoit d'exonérer de la cotisation patronale les plans qui ne bénéficient pas aux mandataires sociaux de la société émettrice des actions. Cela paraît quelque peu excessif, mais je m'en explique.
Il importe de ne pas entraver le développement de ces mécanismes d'association des salariés au capital de leurs sociétés, qui constituent un outil très efficace et bénéfique de gouvernance des entreprises autant que de démocratisation de l'actionnariat salarié.
Ces mécanismes concernent aujourd'hui 150 000 salariés, qui sont en quelque sorte le fer de lance de notre économie.
Il convient de ne pas faire payer à ces salariés l'impéritie dont quelques-uns ont fait preuve.
Pour ne pas le citer !
De plus, trop lourdement charger les stock-options, dont le niveau de taxation est déjà très élevé dans notre pays, pourrait être particulièrement contre-productif.
Les stock-options sont payées non par l'entreprise, mais par les actionnaires. À la Bourse de Paris, 60 % d'entre eux sont étrangers ! Les stock-options constituent un retour indirect des fonds de pension étrangers vers la consommation et l'investissement des cadres français en France
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
M. Yves Pozzo di Borgo. Nous avons eu un débat identique sur l'impôt de solidarité sur la fortune. Je mesure les conséquences de ces taxations. Même si je suis élu du VIIe arrondissement, ce sont non pas les riches que je défends, mais les richesses de la France.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Ne soyez pas ridicules ! Je ne paie pas l'ISF et je ne possède pas de stock-options. Je ressens moi aussi ce sentiment d'injustice, mais, pour autant, je ne peux ignorer la réalité.
N'oubliez pas que cette taxation excessive des stock-options favorise l'émigration fiscale. J'en ai assez de voir les jeunes partir à Londres une fois leurs études achevées !
M. Yves Pozzo di Borgo. À Londres, on parle plus français qu'anglais ! Interrogez-vous ! En outre, Paris a besoin d'accueillir des sièges sociaux. Or ce sont bien plus les dispositions fiscales en vigueur que le coût des écoles ou des appartements qui guident les grands groupes internationaux dans leur décision de s'implanter dans tel ou tel endroit.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Une trop lourde taxation des stock-options et des actions gratuites pourrait remettre en question leur attractivité et entraîner tout simplement leur disparition, donc cette assiette de taxation.
Je suis conscient du sentiment d'injustice qui prévaut, mais la réalité économique nous oblige à défendre ces arguments.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.
L'amendement n° 227, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises éligibles au statut de PME de croissance telles que définies par l'article 220 decies du code général des impôts. »
La parole est à M. François Marc.
Avant de présenter cet amendement, je souhaite relever les contrevérités qui ont été proférées, selon lesquelles les stock-options subiraient en France une taxation insupportable. C'est totalement faux ! Elles bénéficient d'un dispositif relativement favorable ; les chiffres le démontrent.
Cet amendement n° 227 vise à compléter le dispositif tel que nous l'avons envisagé par une taxation correcte des stock-options. Ou bien on fait quelque chose, ou bien on ne fait rien !
La Cour des comptes estime qu'il est possible d'opérer un prélèvement important sur les stock-options. Nous proposons simplement d'augmenter un peu le taux prévu, qui nous paraît dérisoire.
En outre, pour être cohérent avec nos idées, nous proposons, non pas par idéologie, mais dans un souci de développement économique et de croissance, d'une part, de favoriser les plans d'épargne entreprise - c'était l'objet de l'amendement précédent -, d'autre part, que les PME de croissance soient exonérées du paiement de la cotisation patronale - c'est l'objet du présent amendement. Chers collègues de la majorité, vous ne proposez même pas une telle mesure !
Pour être considérées comme telles, les entreprises de croissance doivent satisfaire simultanément à un certain nombre de conditions définies à l'article 220 decies du code général des impôts : elles doivent employer entre 20 et 250 salariés ; leurs dépenses de personnel doivent avoir crû d'au moins 15 % au cours de chacun des deux exercices précédents ; elles doivent répondre aux critères européens de la PME, notamment en termes de taille, de chiffre d'affaires, de bilan et d'indépendance ; enfin, elles doivent être assujetties à l'impôt sur les sociétés.
Ce sont ces entreprises en forte croissance qui doivent bénéficier d'un statut favorable en matière de charges sociales. De fait, les stock-options distribuées à leurs salariés ne doivent pas être assujetties aux cotisations patronales.
Cet amendement de bon sens, qui fait logiquement suite à ceux que nous avons précédemment défendus, s'inscrit dans une cohérence d'ensemble.
L'amendement n° 78, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer les II et IV du présent article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Le présent amendement vise à supprimer la surtaxe salariale applicable aux gains d'acquisition des stock-options et des actions gratuites.
En effet, contrairement à ce que voudraient nous faire croire certains de manière fort démagogique, bien relayés en cela par la radio et la télévision, les stock-options et les actions gratuites sont déjà soumises à des prélèvements sociaux, à hauteur de 11 %.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Comme l'a rappelé M. le rapporteur général, elles entrent également dans l'assiette du calcul de l'impôt sur le revenu, au taux significatif de 40 %.
Cela n'implique pas nécessairement un accroissement de la fiscalité.
Le contribuable perçoit le poids fiscal global et non le rapport relatif entre prélèvements au profit de l'État et prélèvements au profit de la sécurité sociale.
D'un point de vue économique, il convient de se demander, à l'heure de la mobilité des talents et des compétences, quel impact aura la mesure en termes d'attractivité de notre territoire. Voilà le vrai sujet pour notre pays !
Sur le plan financier, l'estimation du rendement de la mesure pourrait être surévaluée, car les entreprises, si cet amendement n'était pas adopté, réduiraient la distribution de stock-options à proportion du surcoût fiscal.
Cette surtaxe soulève ensuite une question juridique. Le dispositif proposé conduit à introduire, au sein de la catégorie des revenus du patrimoine, imposés aux prélèvements sociaux à hauteur de 11 %, un traitement particulier pour les stock-options et les actions gratuites, qui seraient taxées à hauteur de 13, 5 %.
Pour quel motif d'intérêt général serait-il nécessaire de déroger au principe d'égalité devant l'impôt, alors que la réalisation d'une plus-value liée aux stock-options et aux actions gratuites est en tout point semblable, d'un point de vue économique et financier, à la réalisation d'une plus-value sur une valeur mobilière, dont le taux d'imposition est fixé à 11 % ?
Enfin, sur un plan technique, la date d'entrée en vigueur de la mesure conduirait à une taxation rétroactive des options distribuées par les entreprises.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission des finances doute de la pertinence d'une nouvelle taxation qui viendrait s'ajouter aux prélèvements existants, lesquels sont, et c'est normal, déjà très élevés.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.
L'amendement n° 228, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 137-14 du code de la sécurité sociale, remplacer le pourcentage :
par le pourcentage :
La parole est à M. François Marc.
Cet amendement, par cohérence avec nos amendements précédents, vise à crédibiliser la taxation des stock-options s'agissant de la contribution salariale.
Sur différentes travées, le dispositif prévu par le projet de loi a été qualifié de « cosmétique ». De fait, il est à nos yeux bien trop insuffisant au regard des objectifs visés. Comment voulez-vous, avec un taux de cotisation salariale fixé à 2, 5 %, réduire le déficit de la sécurité sociale ? Cette mesure aura un rendement estimé à 150 millions d'euros ; c'est une goutte d'eau !
Le présent amendement s'inscrit dans la logique de notre propos introductif. Aujourd'hui, en France comme dans d'autres pays, les raisons qui avaient présidé à la création des stock-options ont été quelque peu perverties : très souvent, notamment dans les grandes entreprises, ces dernières sont devenues de simples compléments de rémunération accordés a posteriori. Dès lors, rien ne justifie qu'elles ne soient pas assujetties aux cotisations salariales concernant la maladie, le chômage et la retraite. C'est pourquoi nous proposons de porter le taux à 11 %.
L'amendement n° 229, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Cazeau, Domeizel et Godefroy, Mme Demontès, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, San Vicente-Baudrin, Printz, Schillinger, Alquier et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 137-14 du code de la sécurité sociale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux entreprises éligibles au statut de PME de croissance telles que définies par l'article 220 decies du code général des impôts. »
La parole est à M. François Marc.
Cet amendement vise à exonérer de la contribution salariale les stock-options dès lors que les entreprises de croissance qui les distribuent respectent leur vocation initiale, à savoir être un élément de motivation pour leurs cadres. Cette mesure fait écho à celle que nous avons proposée s'agissant de la contribution patronale.
Comme je l'ai expliqué précédemment, pour être considérées comme innovantes, ces PME doivent satisfaire simultanément à un certain nombre de conditions définies à l'article 220 decies du code général des impôts.
La gouvernance des entreprises doit répondre à des exigences éthiques. Nous avons à coeur que les mesures que nous proposons soient le plus équitables possible au regard des objectifs visés par les entreprises.
L'amendement n° 268 rectifié, présenté par MM. Murat et Paul Blanc et Mme Debré, est ainsi libellé :
I. Au III de cet article, les mots : « Le I est applicable » sont remplacés par les mots : « Les dispositions du présent article sont applicables ».
II. Supprimer le IV de cet article.
La parole est à Mme Isabelle Debré.
À titre liminaire, je veux vous dire, madame Bricq, que j'ai qualifié d'idéologique non pas votre amendement, mais la tournure de notre débat.
Les dispositions votées par l'Assemblée nationale comprennent à la fois une contribution patronale et une contribution salariale.
La contribution patronale ne pose aucun problème au regard de la rétroactivité puisque, recouvrée au moment de l'attribution des options de souscription, elle ne concerne, aux termes du texte adopté par l'Assemblée nationale, que les options attribuées à compter du 16 octobre 2007, date à laquelle la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté l'amendement de M. Yves Bur.
En revanche, la contribution salariale est recouvrée lors de la levée de l'option. Selon la rédaction actuelle du texte, les levées d'options postérieures au 16 octobre donneront toutes lieu au paiement de cette cotisation.
De fait, la contribution salariale portant sur des options attribuées avant le 16 octobre, elle présente un caractère rétroactif.
Pour ne pas remettre en cause ce principe général de sécurité juridique qui veut que l'on évite, autant que faire se peut, tout prélèvement à caractère rétroactif, cet amendement vise à ce que seules les options de souscription et les actions gratuites attribuées à compter du 16 octobre 2007 soient soumises à la contribution salariale. De la sorte, le fait générateur sera le même.
L'amendement n° 407, présenté par MM. Juilhard et Carle, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le IV de cet article :
IV. - Le II est applicable aux levées d'options réalisées et aux actions gratuites cédées résultant des plans d'attribution établis à compter du 16 octobre 2007.
La parole est à M. Jean-Marc Juilhard.
Cet amendement a pour objet de mettre fin à la rétroactivité s'appliquant à la contribution salariale. Il prévoit donc de limiter cette contribution aux levées d'options et aux cessions d'actions gratuites intervenant à l'issue des futurs plans d'attribution et non dans le cadre des plans en cours.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures quarante-cinq.