Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que nous arrivons au terme de l'examen de ce projet de loi, je voudrais souligner que les débats ont été riches et nourris ; ils l'ont même été parfois un peu trop : je ne suis pas sûr, par exemple, que le fait de discuter pendant plus d'une heure et demie, comme nous l'avons fait hier, de l'utilisation des sacs en plastique biodégradable ou non soit de nature à changer réellement la vie des agriculteurs !
Je tiens, monsieur le ministre, à saluer votre esprit d'ouverture, qui nous a permis d'effectuer plusieurs avancées importantes.
C'est ainsi que les amendements présentés par mon collègue Marcel Deneux concernant l'assolement en commun ont permis de rectifier une erreur d'interprétation de la loi relative au développement des territoires ruraux. Je me félicite également de la réflexion que nous avons pu mener sur les biocarburants et les huiles végétales pures.
Par ailleurs, mon amendement visant à réorganiser les contrôles des organisations de producteurs bénéficiaires d'aides nationales ou communautaires réalisés grâce au concours de vos services répond à une attente réelle sur le terrain et devrait permettre de résoudre bien des situations, parfois conflictuelles, y compris celles qu'a signalées mon collègue voilà quelques instants.
Enfin, nous avons pu aborder la question de l'assurance récolte qui, j'en suis convaincu, est l'une des voies d'avenir pour l'agriculture française, même s'il est vrai que cette problématique mérite encore d'être clarifiée et de faire l'objet de débats plus approfondis.
En effet, alors que certains proposent de limiter l'assurance récolte à une assurance risques climatiques, tels que la grêle ou la sécheresse, il convient selon moi de préciser que, dans un second temps, cette assurance pourra s'ouvrir sur une assurance revenus, ainsi d'ailleurs que l'a déclaré M. le Premier ministre lui-même.
Toutefois, un tel instrument ne peut être mis en place que grâce à un accord politique total non seulement avec l'ensemble des filières mais également avec les assureurs, et nécessitera un engagement financier important de l'Etat. D'où le dépôt par mon groupe d'un amendement d'appel visant à instaurer un fonds de réassurance, de façon à constituer un préalable indispensable au développement d'un tel système assurantiel.
Enfin, je tiens à mettre l'accent sur trois amendements émanant de la commission saisie au fond et qui vont dans le bon sens.
Le premier d'entre eux supprime la priorité accordée au bailleur en cas de cession du bail cessible hors du cadre familial, ce qui permet de restaurer le dispositif initial prévu par le Gouvernement.
Le deuxième amendement améliore la retraite des femmes polypensionnées. Cette mesure, qui était attendue depuis fort longtemps, représente une réelle avancée. Cela dit - mais nous savons tous quelles difficultés cela soulève -, il serait utile de poursuivre dans cette voie en favorisant sans attendre une revalorisation réelle et substantielle de l'ensemble des retraites agricoles qui, dans leur ensemble, sont beaucoup trop modestes, ce que nous ne pouvons que regretter, même si, je le répète, il nous faut tenir compte des problèmes financiers se posant dans ce domaine.
Enfin, le troisième amendement de la commission que je souhaite mentionner ici supprime la possibilité de déroger à la règle de réciprocité qui prévoit une distance de cent mètres entre les habitations et les exploitations agricoles.
Pour toutes ces raisons, le groupe UC-UDF, au nom duquel je m'exprime, votera ce texte.
Cela dit, monsieur le ministre, je regrette que l'installation des jeunes n'ait pas été plus au coeur de nos débats. Je dois avouer que les dispositions tendant à modifier le contrôle des structures et à l'assouplir très sensiblement pour les formes sociétaires m'inquiètent, car je crains qu'elles ne s'appliquent au détriment des jeunes.
En outre, nous nous sommes montrés très frileux, me semble-t-il, au sujet des prérogatives des SAFER. En effet, il aurait été souhaitable, selon moi, que de nombreuses petites communes rurales disposent d'un tel outil.
Un certain nombre de clarifications mériteraient encore d'être apportées concernant la mise en oeuvre des DPU - je pense notamment à leur traitement fiscal -, ainsi que le contrôle de l'activité productive des bénéficiaires.
Enfin, notre agriculture évolue dans un contexte européen et international de plus en plus contraignant. Les négociations actuelles de l'OMC menacent directement le compromis auquel nous étions parvenus avec nos partenaires européens sur la réforme de la PAC.
Dès lors, jusqu'où devrons-nous aller - ou plutôt jusqu'où sommes-nous prêts à aller - en matière de compromis ? Nous savons, monsieur le ministre, que vous êtes très impliqué dans la gestion de ce dossier et dans la défense de notre agriculture ; mais cela suffit-il à rendre la position de la France tenable ? En effet, notre pays, déjà isolé sur la scène européenne après le vote négatif sur la Constitution européenne, peut-il prendre le risque de faire échouer une conférence ministérielle de l'OMC ?
Monsieur le ministre, à ce stade du débat, j'ai tenu à vous faire part de mes soucis d'agriculteur, tout en vous remerciant de votre engagement fort au service de l'agriculture française, et ce à un moment qui, pour être difficile, n'en est pas moins capital pour notre avenir. Merci aussi de l'écoute dont vous avez fait preuve tout au long de nos débats et de l'ambiance que vous avez su créer.
Il me reste, enfin, à féliciter les rapporteurs, MM. Gérard César et Joël Bourdin, ainsi que les collaborateurs des deux commissions pour leur excellent travail.