Intervention de André Dulait

Réunion du 15 avril 2008 à 16h00
Emplois réservés et défense — Adoption d'un projet de loi

Photo de André DulaitAndré Dulait, rapporteur :

… rend indispensable la mobilisation de tous les instruments de reconversion qui se trouvent à notre disposition, y compris les emplois réservés.

Il importe, par conséquent, d’enrayer la décrue des nominations et de dynamiser autant que possible ce dispositif. Les amendements que vous nous proposerez d’adopter, monsieur le secrétaire d'État, afin de modifier le mode d’accès aux emplois réservés devraient permettre de remédier pour partie à la désaffection qui touche celui-ci et qui tient, notamment, à la rigidité et à la complexité du dispositif, tant pour les administrations que pour les candidats.

La suppression de l’examen professionnel et des listes de classement au profit d’un mécanisme qui emprunte à la fois à la reconnaissance des acquis de l’expérience professionnelle et aux procédures de nomination de la fonction publique territoriale nous paraît de nature à lever de nombreux obstacles.

Les administrations ne seraient plus obligées de recruter dans l’ordre de la liste, et le candidat ne serait plus tenu d’accepter la proposition qui lui est faite. Seule la caducité des listes lui serait opposable : deux ans sur une liste régionale, suivis d’une année sur une liste nationale, soit trois ans au maximum.

La commission souscrit pleinement à l’assouplissement du dispositif qu’apportent vos amendements, monsieur le secrétaire d'État, et elle se félicite de ce que le Gouvernement ait mis à profit le temps qui s’est écoulé depuis le dépôt de ce texte pour prolonger sa réflexion et faire évoluer le projet de loi. Elle s’interroge simplement sur la place qui sera faite aux bénéficiaires prioritaires dans cette nouvelle configuration : y aura-t-il pour eux une liste séparée, un ordre de classement ? Quelle sera la marge de manœuvre des administrations dans l’examen de leur profil ?

L’incitation des administrations à recruter se trouve renforcée par la combinaison de ce système avec l’article L. 407 du statut général des fonctionnaires, aux termes duquel elles ne pourront remettre directement au concours les postes non pourvus, comme c’est le cas actuellement, mais devront les proposer à d’autres publics prioritaires, notamment aux personnes handicapées.

Cette réforme est tout à fait positive, me semble-t-il, et elle va davantage dans le sens de l’intérêt commun des administrations et des candidats. Comme vous l’avez indiqué, monsieur le secrétaire d'État, les amendements que vous nous soumettrez font passer le texte déposé au Sénat du simple « toilettage » à la réforme de fond.

Sous le bénéfice de ces observations, la commission propose, pour l’essentiel, d’apporter trois modifications à ce texte.

La première proposition concerne les militaires réformés qui, dans l’équilibre du nouveau dispositif, doivent rejoindre la catégorie des personnes prioritaires, sauf à considérer, par exemple, qu’un policier blessé en service serait davantage prioritaire qu’un gendarme qui aurait accompli la même mission à ses côtés. Cette proposition fait l’objet des trois premiers amendements qui vous seront soumis, mes chers collègues, cette modification s’étendant aux ayants droit.

La deuxième proposition de la commission vise à exclure du dispositif les militaires radiés des cadres ou ayant fait l’objet d’une résiliation de contrat pour motif disciplinaire. En effet, un accès dérogatoire à la fonction publique ne saurait profiter à des personnes dont la défense a souhaité se séparer. Le ministère doit jouer le jeu à l’égard des administrations d’accueil, dont il fait au demeurant partie, sinon l’ensemble du dispositif risque de ne pas bien fonctionner.

Enfin, la troisième proposition de la commission consiste à ouvrir l’accès à la catégorie A. Nous considérons en effet que dans le nouveau dispositif, tel qu’il sera proposé, rien ne justifie désormais de restreindre l’accès par la voie des emplois réservés aux seules catégories B et C. Une telle restriction nous semble même dommageable à la nécessaire dynamisation de ce dispositif. Tous les garde-fous nécessaires sont en place : pourcentage d’emplois réservés et corps exclus prévus par décret en Conseil d’État, listes d’aptitude et libre choix des administrations. Je précise, par ailleurs, que le projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels, qui sera soumis à l’examen du Sénat à la fin de ce mois, prévoit, quant à lui, l’accès des fonctionnaires à tous les corps militaires par la voie du détachement.

Nous pensons qu’il serait logique, à terme, de rapprocher le dispositif des emplois réservés de celui de la loi 70-2, au profit d’un mécanisme unique de mobilité des militaires vers la fonction publique, et réciproquement. Il faudrait alors réserver un dispositif spécifique aux personnes prioritaires qui relèvent fondamentalement d’une autre logique, celle de la solidarité nationale. Dans l’immédiat, ce texte constitue une avancée.

Pour le reste, la commission présente une série d’amendements de clarification ou de correction d’erreurs matérielles qui n’appellent pas de commentaire particulier.

En dernier lieu, monsieur le secrétaire d'État, la commission souhaiterait attirer votre attention sur la nécessité impérative de modifier et d’améliorer l’image de ce dispositif auprès tant des administrations que des personnels auxquels il s’adresse.

Sa désignation même est ambiguë et prête à confusion. Avec les modifications que vous nous soumettez, elle ne correspond plus véritablement à la réalité du dispositif. Nous pensons donc, monsieur le secrétaire d'État, que vous devriez la modifier.

Nous nous sommes interrogés sur l’opportunité de le faire par voie législative, mais cela nous est apparu malaisé, dans la mesure où, sur le plan juridique, il s’agit d’un droit accessoire au droit à pensions, inséré comme tel dans le code des pensions militaires d’invalidité.

En revanche, monsieur le secrétaire d'État, rien ne vous interdit d’en modifier l’appellation « grand public », au profit d’une désignation plus attrayante. Nul ne doit plus penser qu’un emploi lui est précisément « réservé » dans une administration ; chacun doit plutôt considérer qu’une nouvelle carrière peut s’ouvrir à lui après qu’il a servi une première fois l’État au sein des armées.

Voilà, madame la présidente, mes chers collègues, les principales observations de la commission sur ce projet de loi, dont elle vous recommande l’adoption sous réserve de la prise en compte des amendements qu’elle vous soumet.

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