Sur le fond, il aura fallu une dizaine d’années à la Commission européenne pour adopter le projet de directive sur la responsabilité environnementale, preuve de la complexité du texte.
Quant à nous, nous devons nous contenter d’une semaine et de quelques minutes de temps de parole. Nos réflexions ne seront donc pas exhaustives.
Le texte communautaire issu d’une conciliation est déjà en retrait par rapport aux exigences qu’il eût été nécessaire d’avoir afin d’assurer une pleine responsabilité en matière environnementale.
Ainsi, le principe pollueur-payeur aurait pu être appliqué avec beaucoup plus de rigueur aux côtés d’un régime de garantie financière obligatoire et immédiat.
Rappelons que rien n’empêche la France, en vertu du principe de subsidiarité, de prendre des mesures plus contraignantes afin de garantir la mise en œuvre d’une politique forte en matière de développement durable, comme elle s’en est fixé officiellement l’objectif avec le Grenelle de l’environnement. Malheureusement, le projet de loi manque d’ambition au regard des enjeux de protection des sols, des eaux, des espèces et des habitats protégés.
En premier lieu, le texte reste flou sur un certain nombre de notions juridiques. Son champ d’application limité, les exonérations de responsabilité prévues sont autant de limites aux objectifs affichés.
L’article L. 161-1 fait allusion à des « dommages causés à l’environnement ». Conformément à l’article 2.2 de la directive, il fait référence à des « modifications négatives mesurables affectant gravement » les sols, eaux, espèces et milieux naturels.
Qu’entendez-vous par là exactement, madame la secrétaire d’État ? Je suppose que vous allez nous donner des précisions. La réponse à cette question est importante, car elle détermine en grande partie l’efficacité du dispositif. Il nous semble que la seule mention de dommages aurait suffi.
Ensuite, le dommage causé au sol n’est concerné que dans la mesure où la pollution aurait un risque d’incidence « négative grave » sur la santé humaine. Il paraît anormal d’écarter du dispositif toutes les autres pollutions des sols sous le prétexte qu’elles ne nuiraient pas gravement à la santé de l’homme.
Nous reviendrons dans le débat sur la limitation du champ d’application du dispositif. Nous avons d’ailleurs déposé des amendements afin d’apporter des corrections.
L’article L. 161-1 transpose également les exceptions prévues par la directive dans les cas où la responsabilité ou l’indemnisation est prévue par une convention internationale. Nous exposerons lors des débats pourquoi cette limitation ne se justifie pas et pourquoi nous demandons sa suppression.
En second lieu, je voudrais insister sur la notion d’ « exploitant ». Ce point est pour nous la pierre angulaire du dispositif. Le groupe communiste républicain et citoyen, je le dis clairement, demande que la responsabilité des sociétés mères puisse être engagée.
Le projet de loi prévoit un texte flou qui n’exclut pas cette possibilité, sans l’affirmer pour autant. Je reviendrai plus en détail, lors des débats, sur l’exemple de Metaleurop. S’il n’est pas possible d’engager la responsabilité des sociétés mères, celles-ci vont créer des filiales auxquelles elles vont apporter les outils utiles à l’activité. On aura des scissions de société et des apports partiels d’actifs. Tant qu’il n’y a pas d’accident grave, les bénéfices des filiales remontent à la société mère sous forme de dividendes.