Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme notre collègue Gérard Longuet, j’interviens en tant que rapporteur spécial, mais un rapporteur spécial qui n’a pas approuvé les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
En fait, ces crédits témoignent d’une logique comptable de réduction des dépenses publiques et de suppressions de postes à laquelle je ne souscris pas.
Depuis la loi de finances pour 2008, ce sont ainsi près de 57 000 emplois qui ont été supprimés au sein de l’éducation nationale.
Centrer ainsi exclusivement la politique scolaire sur la diminution du nombre de fonctionnaires, c’est agir négativement sur la capacité de l’éducation nationale à remplir de manière satisfaisante ses missions !
D’ailleurs, monsieur le ministre, permettez-moi de m’étonner de votre silence sur le rapport de synthèse relatif à la préparation de la rentrée 2010, que l’inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche vous a remis au mois de juillet dernier, alors même que vous prétendez faire de l’évaluation de la performance une priorité.
J’évoquerai d’abord les emplois administratifs, qui, s’ils sont moins visibles que les enseignants, n’en constituent pas moins un rouage essentiel du fonctionnement du système éducatif.
En effet, 2 600 suppressions postes ont déjà été réalisées depuis 2007 et on en programme 600 nouvelles en 2011, alors même que le rapport précité évoque des personnels « sous tension », parfois même « en souffrance », et décrit le profond malaise qui règne dans les services administratifs départementaux, dont les capacités sont parfois « sollicitées au-delà du raisonnable ».
Le projet de budget prévoit la suppression de 15 400 postes d’enseignants.
Ainsi, le premier degré perd 8 967 postes. Selon le ministère, dont c’est la seule explication, ce chiffre comprend la résorption de « surnombres » liés à des départs en retraite plus faibles que prévus en 2010. Reste que, concrètement, pour 2011, seules 3 000 places seront ouvertes au concours externe, alors que plus de 9 000 enseignants doivent partir en retraite et que le nombre d’élèves devrait progresser de 4 000 à 5 000 à la rentrée 2011, et ce alors même que le rapport de la Cour des comptes publié en mai dernier préconisait un plus grand investissement en direction du primaire, lequel est sous-doté de 15 % par rapport à la moyenne des pays de l’OCDE.
À l’inverse, vous proposez, monsieur le ministre, d’augmenter la taille des classes, de mettre fin à la scolarisation dès deux ans, d’agir sur le remplacement des enseignants absents en créant un vivier constitué de retraités et d’étudiants. Remplacer ainsi au pied levé un enseignant devant une classe de maternelle ou de CE2 ne s’improvise pas !
Une fois encore, face à un problème réel – le non-remplacement des absences de courtes durées –, vous proposez une solution de bricolage. Ainsi, vous créez au passage de nouveaux emplois précaires… Nous sommes loin de la déclaration du Chef de l’État, qui se disait prêt, en janvier dernier, « à envisager la titularisation progressive des contractuels » dans la fonction publique.
Vous continuez de diminuer le nombre de postes du réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, ou RASED, – 2247 postes en moins entre la rentrée 2009 et la rentrée 2010 – alors que l’écart entre les meilleurs élèves et ceux les plus en difficulté va croissant. Ce ne sont pas les deux heures d’aide personnalisée qui peuvent permettre la bonne prise en charge de ces derniers.
Dans le second degré, la dernière rentrée, avec 25 000 élèves en plus et 3 000 à 4 000 emplois en moins du fait de la suppression des postes de stagiaires, s’est déjà caractérisée par une gestion « tendue » des enseignants et un recours accru aux non-titulaires.
Du fait de l’entrée en application de la réforme contestée du lycée, la contrainte budgétaire s’est donc portée sur les collèges et les moyens de remplacement : titulaires remplaçants insuffisants dans certaines disciplines, davantage de postes partagés entre plusieurs établissements, davantage de postes occupés par des contractuels, recours accru aux vacataires pour assurer la suppléance.
Ces difficultés vont s’amplifier en 2011 puisque, avec environ 60 000 élèves de plus, attendus principalement dans les collèges et les lycées professionnels, vous supprimez 4 800 emplois d’enseignants sans aucun motif si ce n’est celui de respecter le non-remplacement d’un départ sur deux à la retraite.