Intervention de Anne-Marie Payet

Réunion du 2 décembre 2008 à 22h00
Loi de finances pour 2009 — Articles additionnels après l'article 65

Photo de Anne-Marie PayetAnne-Marie Payet, rapporteur pour avis :

En métropole, la vente au détail du tabac est assurée dans le cadre d'un monopole défini à l'article 568 du code général des impôts. Lors de la départementalisation de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion, le législateur n'a pas souhaité appliquer ce régime de monopole à ces territoires, et ce à titre provisoire.

Il en résulte que les ventes de tabac s'y effectuent librement par tout commerçant, sans agrément quelconque de l'administration. L'accès au tabac est donc particulièrement aisé dans les départements d'outre-mer, alors qu'il est très réglementé en métropole, ce qui est éminemment nuisible en termes de santé publique.

Ainsi, dans la rue principale de mon village, qui fait quelques centaines de mètres, il existe sept points de vente, et la plupart d’entre eux sont non pas des débits « secs », ainsi que les dénomme le rapport de Bercy, mais des débits « humides », parce qu’ils vendent aussi de l’alcool.

L’année dernière, le Gouvernement s’est engagé à expertiser les modalités d’extension du monopole d’État outre-mer. Le rapport est enfin disponible depuis quelques jours et l’amendement que je présente aujourd'hui, au nom de la commission des affaires sociales, tient compte de ses préconisations.

Ce rapport précise que l’extension du monopole n’est pas envisageable compte tenu des spécificités des économies locales. J’ai donc accepté d’atténuer la portée de cet amendement, que j’ai déjà présenté les années précédentes : il prévoit non pas une extension pure et simple du monopole, mais un encadrement plus strict de la vente au détail du tabac.

La commission vous propose ainsi, mes chers collègues, de réserver la vente au détail du tabac aux seules personnes qui bénéficieront d'une licence délivrée, contre redevance, par les conseils généraux des départements d'outre-mer. Il prévoit également l'extinction pure et simple, au plus tard le 1er janvier 2011, des points de vente dépourvus d'une telle licence.

Ces licences ne pourront toutefois être délivrées dans des zones d'exclusion fixées par arrêté préfectoral aux abords des établissements d'enseignement et des équipements sportifs, c'est-à-dire les lieux de rassemblement des jeunes. Ces zones d'exclusion s'appliqueront également en métropole, sans remettre en cause, j’y insiste, monsieur le secrétaire d'État, l'implantation existante des débits de tabacs.

C’est rassurant de se dire que le tabagisme des jeunes est moins important dans les DOM qu’en métropole et que, globalement, la proportion de fumeurs dans la population y est plus faible. Mais la Réunion, monsieur le secrétaire d’État, c’est « l’île intense ». C’est également l’île des paradoxes.

Si, effectivement, nous avons une faible proportion de fumeurs dans la population, la plupart d’entre eux sont des fumeurs excessifs. Ainsi, rien qu’à la Réunion, près de 600 décès par an sont liés directement au tabac, c’est-à-dire six fois plus que ceux causés par les accidents de la route. De surcroît, ce chiffre a progressé de 20 % entre 2001 et 2004. Le taux de mortalité dû au tabac chez les femmes a également augmenté de 13 % en quelques années seulement à la Réunion.

Nous ne pouvons rester insensibles à ces données, mes chers collègues. Les représentants de la direction générale des douanes et droits indirects sont allés à la rencontre des acteurs publics et privés du marché du tabac afin de recueillir leurs avis et observations. Cette mission a reçu l’assistance du secrétariat d’État à l’outre-mer. La concertation a été le plus large possible et je pense que nous devons aujourd’hui mettre fin à toutes ces dérives commerciales, d’autant que le système prévu par cet amendement permettra de faciliter les contrôles en matière de vente aux mineurs et de vente à l’unité.

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