J'en viens maintenant à la taxe foncière sur les propriétés non bâties.
L'autre disposition, à mon avis contestable, du présent projet de loi de finances concernant les collectivités territoriales, communales et intercommunales, c'est l'article 9 : il instaure une exonération de 20 % sur la taxe foncière sur les propriétés non bâties dans le cas de terrains agricoles. Il s'agit d'une mesure coûteuse - 140 millions d'euros - qui vient alourdir le déficit prévisionnel du budget de l'État.
Le rapporteur général, Philippe Marini, vous présentera tout à l'heure, au nom de la commission des finances, un amendement de suppression de l'article 9. Croyez bien, messieurs les ministres, que cette initiative a été mûrement réfléchie.
En tant que président du groupe de travail de la commission des finances sur la réforme de la taxe foncière sur les propriétés non bâties - vous aviez souhaité, monsieur le président, que notre commission travaille précisément sur ce sujet -, je tiens à exprimer mon soutien total à cet amendement.
Les conclusions du groupe de travail, qui réunissait des membres de l'ensemble des sensibilités politiques du Sénat, ont été présentées en commission le 7 juillet dernier. Le jour même, elles ont fait l'objet d'un communiqué de presse, dans lequel la commission des finances s'opposait nettement au principe d'une telle réforme. Je souhaite m'en expliquer.
J'insiste sur le fait que l'opposition de la commission à cette exonération n'est pas une prise de position arbitraire : il s'agit d'une prise de position purement technique et de principe. Si l'Inspection générale des finances et l'Inspection générale de l'agriculture ont estimé, l'une et l'autre, dans le Rapport sur la suppression de la taxe foncière sur les propriétés non bâties de juin 2005, que la mesure était inopportune, c'est qu'il y avait de bonnes raisons à cela !
Tout d'abord, cette disposition est un exemple type de mesure de saupoudrage. C'était déjà le cas de l'exonération totale qui avait été envisagée au départ. Selon ce même rapport, cette mesure n'aurait accru le revenu des agriculteurs que de 2, 5 %. Une exonération de 20 % n'augmenterait donc ce revenu que de 0, 5 %, et encore, avant que la révision des baux annule la mesure pour les preneurs.
Dans ces conditions, comment le Gouvernement peut-il soutenir une telle mesure, alors même qu'il justifie sa réforme de la DGE des départements par la nécessité de réduire le saupoudrage ? D'un côté, on supprime 130 millions d'euros de saupoudrage et, de l'autre, on crée 140 millions d'euros de saupoudrage. Où est la logique, messieurs les ministres ? Je m'interroge !
Ensuite, cette disposition réduirait fortement les ressources propres des plus petites communes. En effet, la taxe foncière sur les propriétés non bâties représente 21 % du produit des impôts directs locaux des communes de moins de 500 habitants ; pour 2 167 d'entre elles, ce pourcentage s'élève à plus de 50 %.
Les agriculteurs sont de moins en moins nombreux à siéger dans les conseils municipaux. Parviendraient-ils encore à se faire entendre, pour les dépenses d'entretien des chemins vicinaux, si, par hypothèse, ils ne payaient plus d'impôts locaux ?
S'il n'est donc pas forcément opportun d'instaurer une exonération supplémentaire de la TFPNB, il semble en revanche nécessaire de réformer cet impôt, en particulier de permettre la révision de ses bases. Alors que nous venons d'inscrire dans la Constitution le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales, sommes-nous condamnés, mes chers collègues, une fois encore, à réformer la fiscalité locale en supprimant un nouvel impôt, comme cela se fait depuis maintenant une quinzaine d'années ?
Enfin, compte tenu de la situation contractuelle entre les propriétaires fonciers, redevables de la TFPNB, et les preneurs exploitants agricoles, cette exonération à hauteur de 20 % contredit toutes nos déclarations relatives à la simplification administrative. J'essaie d'imaginer ce que seront demain les relations entre les propriétaires et les preneurs...
J'évoquerai, en conclusion, quelques facteurs d'optimisme.
D'une part, je me réjouis que le Sénat soit sur le point de se doter d'une base de données relatives aux finances locales, comme je l'avais demandé à l'occasion de ce même débat, voilà un an.