Intervention de Jean-Patrick Courtois

Réunion du 25 septembre 2007 à 16h00
Création d'une délégation parlementaire pour le renseignement — Adoption définitive d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Jean-Patrick CourtoisJean-Patrick Courtois :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi portant création d'une délégation parlementaire au renseignement représente une innovation démocratique de première importance, qui permettra à la France de rejoindre l'ensemble des États démocratiques, lesquels disposent tous de structures ad hoc pour suivre l'activité de leurs services de renseignement.

Ce texte manifeste clairement la volonté du Gouvernement d'associer plus étroitement le Parlement aux questions de renseignement. Après plusieurs tentatives avortées, il répond également au large consensus qui s'est dégagé ces dernières années en faveur de la création d'une instance parlementaire chargée de suivre le secteur du renseignement.

Il s'agit d'une promesse du Président de République et je tiens à remercier le Gouvernement et, en premier lieu, notre ancien collègue Roger Karoutchi, de l'avoir concrétisée rapidement et avec efficacité. Je voudrais féliciter aussi notre collègue René Garrec pour la clarté de son rapport et la qualité de son travail.

En bref, ce projet de loi répond à un double impératif : il permet l'information du Parlement sur l'activité des services spécialisés, tout en assurant la sécurité de ces spécialistes qui accomplissent une mission essentielle pour la sécurité de notre pays. Une telle ambition peut être partagée sur toutes les travées de notre assemblée.

Ce texte constitue en effet un premier pas très important en faveur de l'information du Parlement et sans doute est-il utile de bien en analyser la mise en oeuvre à venir dans la perspective de rénovation de nos institutions, et plus particulièrement du Parlement, rénovation dont le processus. Le mouvement plus général de renforcement de la fonction de contrôle et d'information du Parlement sur l'action de l'exécutif me semble indiscutable, légitime et irréversible. Il s'agit d'une tendance lourde, aboutie chez certains de nos voisins anglo-saxons, et que nous devons accompagner. Soyez-en persuadés, mes chers collègues : la rénovation du Parlement est la condition même de sa survie. Cette idée doit conduire nos travaux ; nous en écarter serait pure folie.

Dans ce contexte, la création d'une délégation parlementaire au renseignement constituera une avancée importante pour le Parlement. Il trouvera enfin la place lui revenant dans un domaine qui, s'il obéit à des contraintes de secret bien compréhensibles, ne peut cependant échapper à l'évaluation extérieure, d'autant que le renseignement est devenu un instrument de tout premier plan de la politique de défense et de sécurité.

La création de cette délégation représente aussi un progrès pour l'exécutif, qui disposera d'un regard extérieur susceptible de mieux l'orienter vers d'éventuelles réformes. La délégation sera un lieu où pourront être abordées des questions allant au-delà de la seule analyse des ressources humaines et financières, notamment le cadre juridique dans lequel évoluent les services de renseignement. Elle constitue également une amélioration significative pour ces derniers, desservis par un isolement institutionnel parfois plus subi que voulu.

Il reste que cette réforme ne pourra produire ses effets de manière instantanée. Le temps sera sans aucun doute un élément essentiel dans le succès de la démarche d'information et d'évaluation, tant seront importantes les relations de confiance mutuelle qu'il conviendra de tisser progressivement.

Compte tenu des spécificités des activités de renseignement, la mise en oeuvre d'un suivi parlementaire exigeait de prendre des précautions afin de ne pas nuire à la confidentialité nécessaire à leur fonctionnement. Nous estimons que ce projet de loi parvient à un équilibre, toujours difficile à obtenir, entre les impératifs de la confidentialité et ceux du contrôle démocratique, entre les droits de l'État et l'état de droit, pour reprendre les termes d'un débat traditionnel. Les travaux des deux assemblées ont permis d'atteindre cet équilibre entre la transparence et le secret, deux notions vitales au regard de la protection et de la pérennité de toute démocratie.

Pour autant, si le renseignement est l'affaire de l'exécutif, le Parlement peut s'interroger légitimement sur les conditions de fonctionnement des services, les moyens techniques et les programmes dévolus, l'orientation des missions, les modes de recrutement et le statut des personnels. La future délégation assurera donc cette mission importante, sans interférer avec les activités opérationnelles des services de renseignement. La qualité et l'utilité du travail de la délégation reposeront en effet davantage sur l'existence d'une relation de confiance que sur des prérogatives légales apparemment étendues, mais dépourvues d'efficacité.

L'instauration de ce climat de confiance sera facilitée par les dispositions du texte qui encadrent l'étendue des missions de la délégation et mettent en place la confidentialité nécessaire à sa crédibilité. Les améliorations apportées par notre assemblée en première lecture vont pleinement dans ce sens. Elles ne remettent pas en cause l'équilibre du texte et elles sont soucieuses de tisser une relation de confiance entre les membres de la future délégation et les responsables des services, sans laquelle - j'y insiste une nouvelle fois - aucun travail efficace ne sera possible. Nous avons souhaité ménager à la délégation parlementaire une liberté d'action plus conforme au rôle de la représentation nationale.

La plupart de ces mesures ont été reprises par les députés. Ils ont par ailleurs étendu la compétence de la délégation aux services de renseignement placés sous l'autorité des ministres chargés de l'économie et du budget, c'est-à-dire la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et la cellule chargée du traitement du renseignement et de l'action contre les circuits financiers clandestins, connue sous le nom de TRACFIN. Ces dispositions sont les bienvenues, car elles soulignent la nécessité d'une coordination étroite des services de renseignement et la part croissante prise par le renseignement économique.

Avant de conclure, je voudrais, au nom du groupe UMP et en mon nom personnel, rendre hommage à ces hommes et à ces femmes qui travaillent dans un contexte difficile et remplissent pleinement leurs missions.

La création d'une délégation parlementaire pour le renseignement représente une grande innovation pour le Parlement, en lui permettant d'être informé et associé aux questions de renseignement, fonction régalienne, mais aussi pour les services spécialisés, car cet organe doit contribuer à une meilleure prise en compte des enjeux de la politique du renseignement, plus que jamais essentielle pour notre sécurité nationale.

Monsieur le secrétaire d'État, le groupe UMP votera donc avec conviction ce projet de loi.

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