Intervention de Bernard Frimat

Réunion du 2 juin 2009 à 15h00
Modification du règlement du sénat — Discussion d'une proposition de résolution

Photo de Bernard FrimatBernard Frimat :

Siéger souvent, légiférer vite, sous le regard permanent du Gouvernement, limiter le droit d’amendement, tenter de réduire le temps du débat parlementaire en séance publique, telle est la pratique du Gouvernement. Nous sommes bien loin de la revalorisation du Parlement.

Qui peut présenter comme un progrès, comme un droit nouveau pour le Parlement, la possibilité pour le Gouvernement, s’il le souhaite, d’être présent de manière permanente en commission ? Certes, le Gouvernement doit pouvoir se faire entendre quand il le veut mais, une fois qu’il s’est exprimé, ne peut-il laisser les parlementaires travailler entre eux à l’élaboration du texte de la commission ? Doute-t-il à ce point de sa majorité qu’il ait besoin de la mettre sous surveillance constante ? Si nous voulons rendre tout son intérêt à la séance publique, ne faut-il pas admettre qu’elle doit être le lieu où se confrontent, avant décision, les positions du Gouvernement, de la commission et des groupes politiques ?

Là où la démocratie exige la séparation des pouvoirs, la pratique du Gouvernement introduit la confusion des pouvoirs.

Le Gouvernement a décidé de permettre l’instauration du temps global dans le débat parlementaire. Alors que rien ne l’y obligeait, il a choisi de rendre possible la situation où un parlementaire ne pourrait pas défendre l’amendement dont il est l’auteur et ne pourrait donc pas tenter de convaincre ses collègues du bien-fondé de sa proposition. La révision constitutionnelle censée accroître les droits du parlementaire pourra donc aboutir à priver celui-ci de la plénitude du droit d’amendement. Quel paradoxe ! Ou, plutôt, quel aveu sur la réalité de cette révision ! Même si le Sénat n’instaure pas le temps global, ce dont nous nous réjouissons, la possibilité demeure.

Monsieur le président, nous avons voté contre la révision constitutionnelle, contre les lois organiques. Nous sommes aujourd’hui saisis de votre proposition de modification du règlement du Sénat qui n’a d’autre choix que de respecter la Constitution, les lois organiques et la récente décision du Conseil constitutionnel. Elle comporte, par conséquent, des aspects que nous ne pouvons approuver.

Pour élaborer votre proposition, monsieur le président, vous avez mis en place un groupe de travail auquel les sénateurs du groupe socialiste ont participé, sans réticence, en prenant pleinement part aux débats. Le texte, dont je ne reprendrai pas le contenu, présenté par M. Patrice Gélard de manière fidèle et exhaustive, au nom de la commission des lois, comporte quelques points de divergence mais aussi de nombreux points d’accord qui ont recueilli l’assentiment unanime des participants à ce groupe de travail, que vous avez présidé.

Un désaccord important subsiste toutefois entre nous : il tient à la volonté de la majorité d’exclure l’opposition de toutes les présidences de commission.

Néanmoins, le texte que vous nous proposez, monsieur le président, constitue, compte tenu des rapports de forces politiques au sein de notre assemblée, un point d’équilibre et, par rapport au règlement actuel, un indiscutable progrès. Le groupe socialiste a voulu le signifier en ne déposant pas d’amendements.

La commission des lois a amélioré la rédaction de certaines dispositions et levé quelques incertitudes, mais elle a respecté le point d’équilibre qui avait été trouvé.

En appliquant à la répartition des postes la représentation proportionnelle au plus fort reste, la proposition de résolution reconnaît des droits à chaque groupe politique. Elle rompt ainsi avec la pratique antérieure qui subordonnait la place des groupes d’opposition au bon vouloir de la majorité. C’est une avancée dans le fonctionnement démocratique de notre assemblée.

Enfin, et c’est fondamental, le temps globalisé ne sera pas instauré au Sénat. C’est un acquis essentiel pour le groupe socialiste. Chaque sénateur, qu’il soit de la majorité ou de l’opposition, doit pouvoir bénéficier en séance publique de la plénitude de sa capacité d’intervention.

Pour ces différentes raisons, et en me réjouissant du climat de dialogue qui a présidé aux travaux sur le règlement du Sénat, je conclurai, monsieur le président, en réaffirmant que les sénateurs socialistes ne s’opposeront pas à votre proposition et choisiront, si le scrutin est public, de déposer un bulletin rouge.

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