La question soulevée par cet amendement est de savoir qui, dans notre assemblée, sera le juge de l’irrecevabilité au titre de l’article 40 ou des dispositions analogues qui peuvent figurer dans la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale.
Jusqu'à présent, mes chers collègues, il y avait une seule autorité, à savoir la commission des finances ou son bureau ou son président. Cette seule autorité, depuis 1958, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, a mis en œuvre une jurisprudence – une pratique plus exactement – qu’on peut toujours contester, mais qui n’a jamais vraiment été remise en cause par le Conseil constitutionnel. Les interprétations des deux commissions des finances ont en effet toujours été validées, ce qui a donné lieu à une grande homogénéité dans l’application de l’article 40.
Or nous allons vers un système qui risque d’introduire un énorme désordre dans la maison et beaucoup de mécontentement entre collègues. En effet, à partir du moment où le nouveau règlement nous propose de rompre avec le juge unique de l’article 40, en l’occurrence la commission des finances, pour laisser le soin aux présidents de commission – ce n’est pas désagréable à leur égard, ils s’en doutent –, dans le cadre des travaux de leur propre commission, d’être eux-mêmes juges de la recevabilité au titre de l’article 40, nous risquons d’aboutir à un parfait désordre dans l’application de l’article 40, même si les présidents de commission font l’effort de s’inspirer de la jurisprudence ancienne et traditionnelle de la commission des finances.
Monsieur le président, je vous le demande à vous qui présidez le Sénat et qui êtes l’auteur de la proposition de résolution : qu’est-ce qui se passera si on vous réveille à deux heures du matin pour trancher un différend, que le règlement ne vous donne pas le pouvoir de régler, parce qu’un président de commission aura déclaré recevable un amendement alors qu’un amendement extérieur identique aura été jugé irrecevable par le président de la commission des finances ?