Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Pierre Hérisson souhaite évoquer, au sein de la mission « Économie », deux sujets spécifiques qu’il a eu plus particulièrement à traiter en tant que rapporteur pour avis : la situation du groupe La Poste, pour lequel 2010 a été une année charnière, et le compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Commençons par La Poste. Vous vous souvenez sans doute des deux semaines d’examen de la loi du 9 février 2010 portant changement de statut, que Pierre Hérisson avait eu l’honneur de rapporter au nom de la commission de l’économie.
Le groupe se trouve aujourd’hui confronté à un marché postal difficile. Le secteur du courrier, qui a perdu 5, 3 % d’activité en volume en 2009, pourrait reculer de 30 à 40 % d’ici à 2015. Dans le même temps, la concurrence européenne s’intensifie. Ainsi, au 31 décembre de cette année, le marché du courrier sera entièrement libéralisé et des groupes aussi puissants que DHL, TNT ou Royal Mail pourront venir se mesurer à La Poste sur les segments de son activité les plus rentables.
Face à ces contraintes croissantes, La Poste s’est certes modernisée, mais cumule encore d’importants retards structurels.
Premièrement, son réseau de 17 000 points de vente est dense, et nous avions d’ailleurs tenu à l’inscrire dans la loi, mais il est également coûteux, et ses coûts n’ont pas encore été suffisamment optimisés, comme le souligne la Cour des comptes dans un récent rapport.
Deuxièmement, le processus industriel s’est modernisé avec le programme Cap qualité courrier, lancé en 2005, mais ses objectifs ne seront pas atteints d’ici à son terme, au 31 décembre prochain.
Troisièmement, l’endettement du groupe, représentant actuellement 5, 5 milliards d’euros, demeure excessivement élevé et handicape La Poste dans sa stratégie d’investissement.
Enfin, le financement des missions de service public demeure très largement incertain. Le fonds de compensation du service universel postal, alimenté par l’ensemble des opérateurs, paraît très hypothétique. Plus inquiétante encore est la mission d’aménagement du territoire, financée par un abattement sur les bases d’imposition locales, qui pourrait rapporter 170 millions d’euros. C’est à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, que nous avons confié le soin de déterminer le coût de cette mission et de fixer en conséquence le taux de l’abattement. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous informer de l’état d’avancement du décret subséquent, et de la date à laquelle l’ARCEP pourra commencer à travailler ?
Malgré ces éléments inquiétants, La Poste a pris son avenir à bras-le-corps. En effet, ses résultats pour l’année 2009 sont très encourageants. Dans une conjoncture extrêmement difficile, nous l’avons vu, La Poste a montré une belle capacité de résistance, en limitant au minimum le recul de son chiffre d’affaires et en améliorant sa qualité de service.
De surcroît, le changement de statut du groupe va lui permettre de se recapitaliser dans le respect du droit communautaire et de réaliser ainsi les investissements indispensables à son développement. Cette augmentation de capital est d’ailleurs en cours de formalisation, avec 1, 5 milliard d’euros provenant de la Caisse des dépôts et consignations et 1, 2 milliard d’euros apporté par l’État, dont 300 millions d’euros provisionnés dans le projet de loi de finances que nous examinons.
La libération des fonds, étalée jusqu’en 2012, est basée sur une valorisation du groupe à hauteur de 3 milliards d’euros, qui donnera à la Caisse des dépôts et consignations 26, 3 % des droits du capital, et pourrait être réévaluée à 5 milliards d’euros si La Poste tenait ou dépassait ses objectifs.
Monsieur le ministre, pourriez-vous faire le point sur l’avancement de cette procédure et sur son terme ? Nous ne manquerons d’ailleurs pas d’utiliser la clause de rendez-vous de 2013, que nous avons insérée dans la loi du 9 février 2010, comme un moyen de faire le point sur l’évolution du groupe…
Je dirai à présent quelques mots du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Créé par la loi de finances pour 2009 pour dynamiser la gestion de ce spectre par l’État, ce compte doit financer les investissements en matière de télécommunications des ministères ayant libéré des fréquences et contribuer au désendettement de l’État.
Comme l’an passé, on peut regretter que le compte soit demeuré inopérant, aucune procédure de mise sur le marché des fréquences n’ayant été lancée. Ce compte n’enregistre donc aucune recette depuis sa création.
Les recettes pour l’année prochaine ont cependant été réévaluées à 850 millions d’euros, du fait de la vente programmée de fréquences et systèmes de télécommunication militaire. L’absence de toute mise en vente en ce sens peut toutefois susciter des interrogations, et nous aurions souhaité, monsieur le ministre, avoir des éléments d’information sur ce point.
Pour conclure, monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne manquerai pas d’indiquer que la commission a donné un avis favorable à l’adoption tant des crédits de la mission « Économie » que de ce compte d’affectation spéciale.