La séance est ouverte à dix heures cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Économie » et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
La parole est à M. André Ferrand, rapporteur spécial.
Monsieur le secrétaire d’État, je voudrais tout d’abord vous féliciter pour votre entrée au Gouvernement, vous souhaiter la bienvenue au Sénat et vous adresser tous mes vœux de succès, ce succès dont le pays a grand besoin.
Mes chers collègues, la mission « Économie » que nous rapportons ensemble, mon collègue François Rebsamen et moi, est composée de quatre programmes budgétaires. Pour l’ensemble de la mission, les crédits proposés pour 2011 s’élèveront à 2 063 millions d’euros, soit une augmentation de 6, 7 %.
J’évoquerai, quant à moi, les programmes 134, Développement des entreprises et de l’emploi, et 223, Tourisme, dont j’ai la charge. Contrairement à la mission dans son ensemble, ils voient leurs crédits diminuer.
J’aborderai ensuite rapidement le compte d’affectation spéciale, le CAS « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
S’agissant tout d’abord du programme 134, précisons qu’il regroupe à lui seul 51 % des crédits de la mission, soit 1 069 millions d’euros de crédits de paiement pour 2011 au lieu de 1 115 millions d’euros en 2010. Ce budget diminue de 4 %, et participe donc à la réduction des déficits publics. Les dépenses d’intervention sont tout particulièrement touchées, conformément à l’engagement du Premier ministre de réduire ces dépenses de 5 % dès 2011.
Cette baisse, dont les effets seront sensibles sur le terrain, n’est évidemment pas appréciée par les élus locaux ! En effet, elle signifie que la subvention au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, a été très fortement réduite : elle s’élèvera à 43 millions d’euros en 2011 au lieu de 64 millions en 2010. Le coup de rabot a été beaucoup plus important qu’ailleurs…
Les autres actions du programme connaissent également des diminutions notables de crédits. Le soutien aux pôles de compétitivité est ramené de 30 à 25 millions d’euros, et les subventions aux centres techniques industriels de 35, 2 à 28 millions d’euros.
M. André Ferrand, rapporteur spécial. Je dois donc appeler votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur les amendements de transfert de crédits que mes collègues ont déposés.
M. Denis Badré s’exclame.
J’observe une exception à la règle de réduction des dépenses. Elle concerne UBIFRANCE : l’exercice 2011 étant marqué par l’achèvement de la dévolution, par la direction générale du Trésor, de l’activité de service aux entreprises sur les marchés extérieurs à UBIFRANCE, la subvention sera portée à 104 millions d’euros pour 2011, contre 91 millions d’euros en 2010.
Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous présenter aujourd’hui le bilan de cette réorganisation très importante qui a rebattu les cartes attribuées aux différents acteurs de notre présence économique à l’étranger, et aussi nous en tracer les perspectives pour l’avenir ?
En ce qui concerne l’appui aux entreprises, UBIFRANCE, malgré son dynamisme et sa détermination, ne pourra pas être implantée partout où une présence économique est cependant nécessaire. Comment les rôles seront-ils partagés avec les autres opérateurs, principalement les chambres de commerce à l’étranger ? Quelles synergies comptons-nous développer pour profiter de la spécificité et de la valeur ajoutée potentielle de chaque acteur ?
Pour ce qui concerne les activités régaliennes, la direction générale du Trésor a-t-elle l’intention de les partager plus largement avec nos diplomates ? L’idée, souvent avancée, d’un transfert de ces responsabilités vers le Quai d’Orsay est-elle en train de prospérer ?
Je vous serais particulièrement reconnaissant de nous éclairer sur les intentions du Gouvernement quant à ces différents points.
Ce programme a aussi pour objet de créer un environnement favorable à la croissance et à la compétitivité des entreprises ; il permet à l’État d’afficher son volontarisme économique, mais les moyens qui lui sont dévolus paraissent bien limités. Plus que sur l’enveloppe des crédits budgétaires, les véritables moyens d’action du programme reposent sur les 74 dépenses fiscales, dont le montant atteint près de 8 milliards d’euros et dont il me paraît nécessaire, dans le contexte budgétaire actuel, d’en évaluer toujours plus finement l’efficacité.
Au sujet de la réduction du taux de TVA dans la restauration, nous avions exprimé l’an dernier de fortes réserves, comme beaucoup d’autres observateurs, car l’efficacité de cette mesure nous paraissait douteuse. Rappelons que son coût s’élève à 3, 1 milliards d’euros. Il nous faudra donc rester vigilants sur l’application des accords, même si, un an plus tard, le bilan semble moins négatif.
Dans un document diffusé lors de la récente conférence de presse tenue à Bercy « Agir pour la reprise », il est prévu à ce sujet « un avenant au contrat d’avenir sur l’emploi et les investissements » au premier trimestre 2011. Pourriez-vous nous exposer plus précisément vos intentions, monsieur le secrétaire d’État ?
J’en viens au programme 223, Tourisme, beaucoup plus modeste puisqu’il ne sera doté en 2011 que de 50, 6 millions d’euros de crédits de paiement, soit seulement 2, 5 % des crédits de la mission. Ce budget subit une réduction de plus de 10 % de ses crédits par rapport à 2010.
Toutefois, la subvention versée à l’agence de développement touristique Atout France, issue de la fusion de Maison de la France avec ODIT-France, est sanctuarisée et conserve son niveau de 2010, soit 34, 8 millions d’euros. Il serait utile de comparer les moyens de cet opérateur avec ceux de nos principaux concurrents, car, je le rappelle – vous le savez d’ailleurs parfaitement, monsieur le secrétaire d’État –, en dépit d’une première place mondiale en termes de visiteurs, la France n’occupe que la troisième place en termes de recettes touristiques internationales – 48, 7 milliards de dollars en 2009. Elle est précédée dans ce classement par l’Espagne, que nous avons dans le viseur – 53, 2 milliards de dollars –, et les États-Unis, loin devant avec 94, 2 milliards de dollars.
Aussi est-il primordial d’étudier la conception d’indicateurs fiables des dépenses touristiques effectuées en France par des visiteurs étrangers. L’initiative de notre collègue député, Jean-Louis Dumont, tendant à la création d’un document de politique transversale dédié à la politique du tourisme va également dans le bon sens, car près de 1 200 milliards d’euros sont consacrés par l’ensemble des intervenants publics à la politique du tourisme. Un tel document budgétaire doit permettre aux pouvoirs publics de mieux identifier les acteurs et d’orienter les actions stratégiques en faveur du tourisme.
Sur ce sujet, compte tenu du poids important du tourisme dans notre économie et en termes d’emplois, j’ai entrepris une mission d’information sur l’action d’Atout France et la promotion de l’image touristique de la France à l’étranger, que je souhaite mener à bien dans le courant du premier semestre 2011. J’ai déjà bien noté que, lors de la conférence de presse dont j’ai parlé tout à l’heure, vous aviez évoqué trois pistes de progrès prioritaires qui me paraissent effectivement très pertinentes. Autre signe encourageant, il faut retenir, sur un plan strictement budgétaire, qu’Atout France avait su, dès sa première année de fonctionnement, obtenir de ses partenaires extérieurs – collectivités territoriales, opérateurs touristiques – des concours financiers représentant près de 58 % de son budget, ce qui me parait un ratio fort appréciable.
Je dirai quelques mots, enfin, sur le compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », créé par la loi de finances pour 2009 afin d’optimiser la gestion des bandes de fréquences et de procurer à l’État de nouvelles recettes par la vente des fréquences ainsi libérées. L’arrêt complet de la télévision analogique, prévu au plus tard en novembre 2011, libérera d’autres fréquences, susceptibles d’intéresser différents professionnels de l’audiovisuel, des télécommunications et de la radio.
Je dois malheureusement formuler le même constat que l’an dernier : le CAS demeure inopérant depuis 2009, car aucune procédure de mise sur le marché de fréquences n’a encore été lancée. Ce compte n’enregistre donc aucune recette depuis sa création. Cette situation n’est évidemment pas satisfaisante.
Les opérations de cessions de fréquences ont été reconduites pour 2011 sur la base d’une nouvelle estimation de recettes de 850 millions d’euros au lieu de 600 millions d’euros en 2010. Cette réévaluation tient compte de la remarque que j’avais formulée l’an dernier. Il convenait en effet d’ajouter au produit des ventes potentielles des fréquences issues des systèmes Felin et Rubis, évalué à 600 millions d’euros, la cession future de tout ou partie des systèmes Syracuse de communication militaire par satellite, dont la durée de vie est estimée à dix ans. Il ne faudrait pas que cette nouvelle prévision de recettes pour 2011 au bénéfice des armées reste une ligne de crédit virtuelle. Le constat selon lequel le CAS est inopérant pour des raisons de procédure de marchés publics ne paraît pas suffire à expliquer une telle situation. Aussi, monsieur le ministre, nous aimerions savoir pourquoi, réellement, aucune mise en vente n’a été engagée.
Au bénéfice de ces observations, je vous propose, chers collègues, d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale.
Je vous invite aussi à adopter les crédits des programmes 134 et 223.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
M. François Rebsamen, rapporteur spécial, va nous rejoindre d’un moment à l’autre. En attendant son arrivée, je donne la parole est à M. Gérard Cornu, en remplacement de M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis.
Monsieur le secrétaire d’État, avant d’intervenir au nom de mon collègue Pierre Hérisson, je tiens à m’associer aux propos que vient de tenir André Ferrand : nous sommes très heureux que vous puissiez participer ce matin aux travaux du Sénat, et nous vous souhaitons bon courage pour votre mission.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, Pierre Hérisson souhaite évoquer, au sein de la mission « Économie », deux sujets spécifiques qu’il a eu plus particulièrement à traiter en tant que rapporteur pour avis : la situation du groupe La Poste, pour lequel 2010 a été une année charnière, et le compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Commençons par La Poste. Vous vous souvenez sans doute des deux semaines d’examen de la loi du 9 février 2010 portant changement de statut, que Pierre Hérisson avait eu l’honneur de rapporter au nom de la commission de l’économie.
Le groupe se trouve aujourd’hui confronté à un marché postal difficile. Le secteur du courrier, qui a perdu 5, 3 % d’activité en volume en 2009, pourrait reculer de 30 à 40 % d’ici à 2015. Dans le même temps, la concurrence européenne s’intensifie. Ainsi, au 31 décembre de cette année, le marché du courrier sera entièrement libéralisé et des groupes aussi puissants que DHL, TNT ou Royal Mail pourront venir se mesurer à La Poste sur les segments de son activité les plus rentables.
Face à ces contraintes croissantes, La Poste s’est certes modernisée, mais cumule encore d’importants retards structurels.
Premièrement, son réseau de 17 000 points de vente est dense, et nous avions d’ailleurs tenu à l’inscrire dans la loi, mais il est également coûteux, et ses coûts n’ont pas encore été suffisamment optimisés, comme le souligne la Cour des comptes dans un récent rapport.
Deuxièmement, le processus industriel s’est modernisé avec le programme Cap qualité courrier, lancé en 2005, mais ses objectifs ne seront pas atteints d’ici à son terme, au 31 décembre prochain.
Troisièmement, l’endettement du groupe, représentant actuellement 5, 5 milliards d’euros, demeure excessivement élevé et handicape La Poste dans sa stratégie d’investissement.
Enfin, le financement des missions de service public demeure très largement incertain. Le fonds de compensation du service universel postal, alimenté par l’ensemble des opérateurs, paraît très hypothétique. Plus inquiétante encore est la mission d’aménagement du territoire, financée par un abattement sur les bases d’imposition locales, qui pourrait rapporter 170 millions d’euros. C’est à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, que nous avons confié le soin de déterminer le coût de cette mission et de fixer en conséquence le taux de l’abattement. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous informer de l’état d’avancement du décret subséquent, et de la date à laquelle l’ARCEP pourra commencer à travailler ?
Malgré ces éléments inquiétants, La Poste a pris son avenir à bras-le-corps. En effet, ses résultats pour l’année 2009 sont très encourageants. Dans une conjoncture extrêmement difficile, nous l’avons vu, La Poste a montré une belle capacité de résistance, en limitant au minimum le recul de son chiffre d’affaires et en améliorant sa qualité de service.
De surcroît, le changement de statut du groupe va lui permettre de se recapitaliser dans le respect du droit communautaire et de réaliser ainsi les investissements indispensables à son développement. Cette augmentation de capital est d’ailleurs en cours de formalisation, avec 1, 5 milliard d’euros provenant de la Caisse des dépôts et consignations et 1, 2 milliard d’euros apporté par l’État, dont 300 millions d’euros provisionnés dans le projet de loi de finances que nous examinons.
La libération des fonds, étalée jusqu’en 2012, est basée sur une valorisation du groupe à hauteur de 3 milliards d’euros, qui donnera à la Caisse des dépôts et consignations 26, 3 % des droits du capital, et pourrait être réévaluée à 5 milliards d’euros si La Poste tenait ou dépassait ses objectifs.
Monsieur le ministre, pourriez-vous faire le point sur l’avancement de cette procédure et sur son terme ? Nous ne manquerons d’ailleurs pas d’utiliser la clause de rendez-vous de 2013, que nous avons insérée dans la loi du 9 février 2010, comme un moyen de faire le point sur l’évolution du groupe…
Je dirai à présent quelques mots du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Créé par la loi de finances pour 2009 pour dynamiser la gestion de ce spectre par l’État, ce compte doit financer les investissements en matière de télécommunications des ministères ayant libéré des fréquences et contribuer au désendettement de l’État.
Comme l’an passé, on peut regretter que le compte soit demeuré inopérant, aucune procédure de mise sur le marché des fréquences n’ayant été lancée. Ce compte n’enregistre donc aucune recette depuis sa création.
Les recettes pour l’année prochaine ont cependant été réévaluées à 850 millions d’euros, du fait de la vente programmée de fréquences et systèmes de télécommunication militaire. L’absence de toute mise en vente en ce sens peut toutefois susciter des interrogations, et nous aurions souhaité, monsieur le ministre, avoir des éléments d’information sur ce point.
Pour conclure, monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne manquerai pas d’indiquer que la commission a donné un avis favorable à l’adoption tant des crédits de la mission « Économie » que de ce compte d’affectation spéciale.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Les crédits de la mission ayant déjà été présentés de manière complète par notre collègue André Ferrand, je n’y reviendrai que pour faire deux remarques.
La première, d’ordre général, est que la forte réduction des crédits d’intervention et de fonctionnement de plusieurs actions de la mission « Économie » représente un effort sans doute difficile, mais nécessaire pour assainir nos comptes publics. Je crois que nous sommes bien obligés d’en passer par là.
Ma deuxième remarque est que ce nécessaire effort de rigueur doit être correctement dosé, de manière à ne pas « casser » des outils précieux de l’action publique. Je fais référence ici, par anticipation, à un amendement adopté à l’unanimité par la commission de l’économie, que je défendrai tout à l’heure, concernant le FISAC. Je pense en effet – et je ne suis pas le seul dans ce cas – que la réduction des crédits du FISAC va au-delà de la simple rigueur budgétaire et menace l’accomplissement même des missions de cet organisme au service de l’aménagement de nos territoires.
J’en viens maintenant au sujet que j’ai souhaité approfondir dans mon rapport pour avis, à savoir l’action de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF. Cette administration, si souvent évoquée au cours de nos débats, est au cœur de la politique économique de notre pays. Elle a connu ces dernières années une extension continue du champ de ses missions, un renforcement de ses objectifs de contrôle et une évolution remarquable de son organisation, dans le droit fil de l’effort de rationalisation commandé par la révision générale des politiques publiques. Dans bien des domaines, cette administration a montré l’exemple. C’est pourquoi j’ai voulu rendre compte de son action et des moyens dont elle dispose afin de remplir les objectifs qui lui sont fixés.
La DGCCRF constitue en quelque sorte le maillon principal d’une politique économique saine, concurrentielle et protectrice des consommateurs et des citoyens.
Vous le savez, plusieurs « temps forts » ont récemment eu une incidence directe sur ses missions.
Le premier temps fort a été la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, qui a notamment revu la répartition des compétences entre la DGCCRF et la nouvelle Autorité de la concurrence, la DGCCRF conservant malgré ce redéploiement une marge de manœuvre importante en matière de contrôle des concentrations. Cette loi a également élargi la marge de négociation entre fournisseurs et distributeurs dans le cadre de leurs relations commerciales.
Second temps fort, la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, dans le droit fil des Assises de la consommation d’octobre 2009, a modifié le cadre juridique applicable en matière consumériste, par le biais notamment d’un Institut national de la consommation rénové.
Face à ces bouleversements, et dans le cadre d’un budget de rigueur, conformément aux objectifs de rationalisation et d’assainissement des finances publiques, la DGCCRF a su faire preuve d’une grande adaptabilité de ses moyens – humains comme budgétaires – sans que ses objectifs ni ses missions en soient lésés.
Concernant les moyens humains, si la DGCCRF a vu ses effectifs baisser au cours des dernières années, cela n’a pas empêché une forte mobilisation de ses agents, tant en administration centrale qu’au sein des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les fameuses DIRECCTE. La DGCCRF dispose également d’un service national d’enquêtes, d’un service commun des laboratoires, d’une unité d’alerte en matière de sécurité du consommateur, ainsi que, depuis juin 2009, de brigades de contrôle de la loi de modernisation de l’économie, dont les effectifs ont été portés de quatre-vingts à cent vingt agents.
Concernant les moyens budgétaires, s’ils ont diminué à la faveur d’un effort général de maîtrise des dépenses publiques, ils ont été concentrés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 sur la sécurité des produits – c’est particulièrement important –, avec une augmentation de près de 10 % des autorisations d’engagement dans ce domaine.
On ne peut en outre que se féliciter aujourd’hui de l’accroissement de la réactivité des services de la DGCCRF.
Enfin, je voudrais insister sur la profonde réorganisation de ses services mise en œuvre par la DGCCRF. Aujourd’hui, le maillage du territoire par les administrations déconcentrées a été rationalisé à deux niveaux.
Au niveau régional, les DIRECCTE constituent désormais les services déconcentrés communs au ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi et aux ministères chargés du travail et de la solidarité, et, en leur sein, le pôle C est essentiellement dédié aux missions de la DGCCRF, notamment sur les sujets relatifs au respect de la concurrence et des relations entre les entreprises.
Au niveau départemental, des directions départementales interministérielles reprennent les missions de la DGCCRF plus spécifiques aux relations entre le consommateur et l’entreprise.
Cette nouvelle articulation permet donc bien de préserver les missions essentielles de la DGCCRF tout en consacrant l’échelon régional comme niveau de coordination des politiques publiques sur notre territoire.
Pour conclure, monsieur le président, la commission de l’économie, conformément à mon avis en tant que corapporteur, a donné un avis favorable aux crédits de la mission « Économie » pour 2011.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année, plus d’un an après le vote de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, j’ai décidé de mettre l’accent sur le programme Tourisme de la mission « Économie ».
En ce qui concerne les principales tendances de l’économie touristique, le tourisme se confirme être, à travers la crise, un secteur majeur de l’économie nationale. Il représente plus de 6 % du PIB et demeure le premier poste excédentaire de la balance des paiements, avec un solde positif de 7, 8 milliards d’euros. Le tourisme, c’est aussi près de 210 000 entreprises, qui emploient 844 000 salariés !
La fréquentation touristique a certes connu un infléchissement, mais, avec 76, 8 millions d’entrées en 2009, la France demeure la première destination touristique mondiale, devant l’Espagne, l’Italie et les États-Unis. Le tourisme bénéficie en outre d’un phénomène de chassés-croisés : en période de crise économique, les touristes étrangers viennent moins nombreux, mais les touristes français restent davantage en France. Inversement, en période de meilleure conjoncture, les touristes français sont plus nombreux à partir pour l’étranger, mais les touristes étrangers sont aussi plus nombreux à venir en France. Ces tendances inverses produisent un effet stabilisateur favorable à l’économie touristique. En 2009, le taux de départ des Français s’est élevé à 77, 9 %, ce qui signifie quand même qu’un Français sur quatre n’est pas parti en vacances, le taux de départ à l’étranger ou dans les collectivités d’outre-mer s’élevant à 23, 9 %.
L’importance du tourisme dans notre économie contraste avec la modicité des crédits qui lui sont consacrés. Non seulement le programme Tourisme se classe avant-dernier de tous les programmes budgétaires, mais sa dotation pour 2011 accuse également une réduction marquée par rapport à 2010. Les crédits de paiement passent de 55, 9 millions d’euros à 50, 6 millions d’euros, soit une baisse de 9, 6 %.
Cette diminution ne s’explique qu’en partie par des transferts de crédits et la non-reconduction d’opérations ponctuelles. Elle est d’autant plus préoccupante qu’elle est amenée à se poursuivre. En effet, la programmation pluriannuelle des finances publiques fait apparaître pour le programme Tourisme des dotations en baisse à 46, 3 millions d’euros en crédits de paiement pour 2012, puis à 45, 3 millions d’euros pour 2013, soit une réduction de 18, 9 % en quatre ans, de 2010 à 2013.
Les crédits du programme Tourisme apparaissent donc bien modestes au regard de l’importance économique du secteur. J’en avais fait la remarque à Mme la ministre Christine Lagarde lors de son audition devant la commission de l’économie, le 27 octobre dernier. Elle m’avait alors fait part de sa volonté de recentrer les moyens disponibles sur Atout France.
Effectivement, l’action de l’État dans le domaine du tourisme est relayée par certains établissements autonomes, qui jouent un rôle de levier efficace. C’est le cas d’Atout France, qui est un groupement d’intérêt économique résultant de la fusion, en 2009, de Maison de la France, chargée de la promotion de l’image de la France à l’étranger, et d’ODIT France, chargé de l’ingénierie touristique. Atout France intervient sur un marché international du tourisme dynamique, puisqu’il progresse de 4, 5 % à 5 % par an, mais très concurrentiel. Cet opérateur, qui dispose de trente-deux bureaux à l’étranger, doit donc réussir à prendre pied sur les marchés émergents, tout en conservant la part de la France dans les marchés matures.
Je ferai deux observations sur le budget d’Atout France.
D’une part, il fait largement recours au partenariat : sur un budget total de 81, 2 millions d’euros pour 2010, les ressources propres devraient s’élever à 42, 8 millions d’euros, et celles qui sont issues des partenariats devraient se monter à 38, 4 millions d’euros. Cet effet multiplicateur est intéressant, mais il ne saurait justifier le désengagement de l’État.
D’autre part, la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques a étendu les missions régaliennes d’Atout France, en confiant à ce GIE notamment le classement des hébergements touristiques, l’immatriculation des agents de voyages et le référentiel des offices de tourisme. Or, aucun crédit supplémentaire n’a été accordé à l’agence au titre de ces nouvelles missions, qui occupent pourtant douze emplois.
L’action de l’État dans le secteur du tourisme est également relayée par un autre établissement public, l’Agence nationale pour les chèques-vacances. Or, l’ANCV ne reçoit aucune subvention, mais se finance en prélevant une commission de 1 % sur les chèques-vacances qu’elle émet et rembourse. Elle dégage même ainsi des excédents de gestion qui lui permettent de contribuer à la rénovation du patrimoine du tourisme social et d’accompagner les actions de solidarité organisées par les associations.
En conclusion, j’estime que le dynamisme des établissements intervenant pour le compte de l’État dans le secteur du tourisme ne saurait suppléer le désengagement financier de celui-ci. La réduction sensible des crédits du programme Tourisme, qui étaient déjà très modestes, est sans commune mesure avec l’importance du tourisme pour notre économie.
Pour ces raisons, je me suis abstenue sur ces crédits de la mission « Économie » pour 2011, alors que la majorité des membres de la commission les ont adoptés.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Vous avez pu constater, mes chers collègues, que nous sommes confrontés à une sorte de dilatation de la durée d’examen des crédits des missions, en raison de la multiplication des articles rattachés aux missions, lesquels suscitent des débats très intéressants ainsi que de très nombreux amendements.
Au fil de l’examen des crédits des missions, nous nous sommes aperçus que nous ne pouvions pas tenir le calendrier qui avait été arrêté, et que cela mettait en péril notre capacité à respecter les délais constitutionnels.
Nous devons en effet impérativement nous prononcer sur le projet de loi de finances pour 2011 avant le mardi 7 décembre à minuit, et nous avons donc, en accord avec le Gouvernement, pris hier matin la décision de reporter en fin de discussion budgétaire l’examen des articles rattachés.
Nos collègues qui participaient hier soir à la discussion des crédits de la mission « Travail et emploi » sont conscients que, si nous avions dû examiner les articles rattachés et les amendements dans la foulée, nous serions probablement encore en train d’en débattre ce matin !
Je me dois donc à présent de vous indiquer l’ordre d’appel de ces articles rattachés et des différentes missions qui ont été reportées.
À la demande du Gouvernement, et avec l’accord de la commission des finances, l’ordre d’examen de ces articles a été organisé de façon à permettre aux ministres compétents d’être présents au banc du Gouvernement.
Les articles rattachés à la mission « Santé » seront ainsi examinés immédiatement après le vote des crédits de celle-ci, puis nous débattrons des articles rattachés aux missions « Travail et emploi », « Économie », « Médias, livre et industries culturelles », « Agriculture », « Aide publique au développement », « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », « Pensions », « Direction de l’action du Gouvernement » et, enfin, « Ville et logement ». M. Benoist Apparu, qui sera alors présent au banc du Gouvernement pour l’examen des articles rattachés à cette dernière mission, pourra ainsi enchaîner avec l’examen des mesures fiscales et budgétaires non rattachées, en l’occurrence l’article 56 relatif au prêt à taux zéro.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les indications que je souhaitais porter à votre connaissance.
Acte vous est donné de cette communication, monsieur le président de la commission des finances.
Un dérouleur reprenant ces informations va être distribué.
Soyez assuré, monsieur Arthuis, que je serai encore plus vigilant que d’habitude sur le respect des temps de parole !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Il vous sera difficile de faire mieux que d’habitude, monsieur le président !
Sourires.
Nous reprenons l’examen des crédits de la mission « Économie » et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Je rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Daniel Marsin.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2011, le budget consacré à la mission « Économie » sera de l’ordre de 2, 063 milliards d’euros, soit une augmentation d’ensemble de 6, 7 % par rapport à 2010.
Rappelons que ce budget ne comporte pas moins de quatre programmes tendant à financer le bon fonctionnement de notre économie, notamment par diverses aides et interventions au bénéfice de nos entreprises et dans certains secteurs-clés.
Aujourd’hui, la croissance est globalement en berne sous le triple effet du maintien d’un haut niveau de chômage, d’une politique encore inefficace d’aides aux entreprises, qui s’élèvent à 65 milliards d’euros, et d’un fonctionnement du crédit bancaire qui n’est pas stimulant.
Pourtant, en dépit des difficultés de la conjoncture, il semblerait que les clignotants de la croissance ne soient plus indéfiniment bloqués sur le rouge. Quelques signes avant-coureurs d’une reprise, même légère, sont là, et, sans tomber dans un optimisme béat, nous ressentons les prémices d’un retour à une croissance timide.
Notre expérience de terrain, au plus proche de nos PME et de l’ensemble des acteurs économiques dans nos départements, nous montre néanmoins que la situation économique, tant pour les entreprises que pour les ménages, reste fragile. Nous demeurons, en d’autres termes, entre crise et reprise.
La mission « Économie » revêt donc une importance particulière et a pour ambition de favoriser la mise en place d’un environnement propice à une croissance durable. La hausse globale des crédits de la mission en 2011 doit naturellement être mise en regard des efforts consacrés au soutien de l’investissement dans le cadre du grand emprunt. Cela étant, certaines baisses ciblées demeurent particulièrement contestables.
En premier lieu, on peut s’étonner de la diminution drastique des crédits consacrés à la protection des consommateurs, qui passent de 140 millions d’euros en 2010 à 118 millions d’euros en 2011. Il s’agit d’un sujet important, car la consommation est un indicateur essentiel pour la croissance. Sur cette diminution, monsieur le secrétaire d’État, nous écouterons attentivement vos explications.
À cette baisse de crédits s’ajoute la stagnation de ceux qui sont alloués à la mise en œuvre du droit de la concurrence. Or la croissance de notre pays, si elle passe évidemment par la relance de la consommation, dépend aussi de la confiance des consommateurs. Il convient donc de l’encourager, et non l’inverse.
S’agissant du tourisme, le recul des crédits de 11 % par rapport à ceux de l’année passée va se poursuivre pour la période triennale à venir, puisque les documents budgétaires annoncent une baisse de 10 % en euros courants. Diminuer les ressources d’un secteur aussi primordial constitue-t-il une bonne solution ? Nous ne le croyons pas. C’est même un choix peu rassurant pour les professionnels du tourisme et, au-delà, pour nos territoires, notamment ceux d’outre-mer, comme mon département de la Guadeloupe. Quoi qu’il en soit, ces professionnels du tourisme voient leurs dotations diminuer comme une peau de chagrin, alors qu’ils ont impérativement besoin d’une orientation stratégique dans ce domaine.
Compte tenu de l’importance majeure du secteur touristique pour notre économie, la compétitivité de notre pays ne doit pas pâtir de choix budgétaires timorés ou circonstanciels. Rappelons que, en dépit d’une première place mondiale en termes de touristes, la France n’occupe que la troisième place en termes de recettes touristiques internationales, loin derrière les États-Unis et l’Espagne.
Enfin, je ne reviendrai pas sur le choix, critiqué, de la TVA à 5, 5 % dans la restauration. Trois milliards d’euros de dépenses fiscales pour 50 000 emplois, soit 5 000 euros d’aides publiques par emploi et par mois, et une baisse des prix demeurée malheureusement un vœu pieux : l’efficacité économique et l’utilité sociale sont malheureusement aux abonnés absents dans ce domaine.
Partant de ces différentes remarques et observations, la majorité des membres du groupe RDSE, qui n’approuvent pas les choix opérés, voteront contre les crédits de cette mission. D’autres, comme moi-même, voteront pour ou s’abstiendront.
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, de l ’ Union centriste et de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’occasion des dernières Assises de l’industrie, le ministre de l’industrie Christian Estrosi déclarait : « Mon bilan repose sur une révolution industrielle, voulue par le Président de la République, qui met fin à vingt ans de gouvernements de gauche et de droite qui considéraient que les mots usines, techniciens ou ingénieurs étaient des gros mots, prônant davantage la finance, les services ou l’économie virtuelle. »
Si M. Estrosi était face à nous dans cet hémicycle, il ne manquerait sans doute pas de retomber dans l’angélisme, comme l’a d’ailleurs fait son successeur.
En réalité, avec ou sans remaniement, rien ne change : le capitalisme financier est toujours à l’honneur, au détriment des producteurs, des salariés et des consommateurs.
Le Gouvernement continue sa casse des entreprises publiques dans un secteur aussi sensible que celui de l’énergie. La facture énergétique des Français, mais également des entreprises et des artisans, ne cesse d’augmenter, et cela ne va pas s’améliorer.
Vous avez abandonné des territoires entiers et laissé dépérir le secteur industriel. Dans le Nord-Pas-de-Calais, tous les secteurs industriels qui ont marqué l’histoire et l’identité territoriale, comme la métallurgie, le textile ou les mines, périssent. Vous allez me dire que cela appartient au passé. Malheureusement, la désindustrialisation se poursuit.
Je ne prendrai que deux exemples issus de mon département.
À Calais, plus de 1 000 emplois industriels ont été détruits en 2009 dans des entreprises telles que Noyon, Brunet, Schaeffler, Cuno. Le secteur de la dentellerie, symbole du savoir-faire de nos travailleurs et travailleuses, a perdu à lui seul 700 emplois.
À Isbergues, ArcelorMittal vient de décider de suspendre le secteur de la tôlerie classique après avoir définitivement fermé en 2006 le secteur aciérie. C’est donc la mort lente de cet important site sidérurgique qui est programmée. À Arc International, la direction envisage la suppression de 1 000 emplois pour l’année prochaine.
Face à cette saignée de l’emploi industriel, les états généraux de l’industrie ont proposé de mobiliser 200 millions d’euros sur trois ans pour accompagner des projets de réindustrialisation, et M. Baroin rappelait à l’Assemblée nationale que le Gouvernement consacrera 6, 5 milliards d’euros au développement des filières industrielles et des PME sur les 35 milliards d’euros du grand emprunt. Chaque année, on nous lance des chiffres et, chaque année, la situation économique et sociale du pays se dégrade.
Aujourd’hui, les crédits de la mission « Économie » ne sont pas dignes d’une politique économique et industrielle responsable pour redresser la situation dans le pays.
M. André Ferrand, rapporteur spécial, résumait très justement la situation: « Ce programme a pour objet de créer un environnement favorable à la croissance et à la compétitivité des entreprises ; il permet à l’État d’afficher son volontarisme économique, mais les moyens qui lui sont dévolus paraissent bien limités. Davantage que sur l’enveloppe des crédits budgétaires, les moyens d’actions du programme reposent sur les 74 dépenses fiscales ».
En effet, les programmes « Développement des entreprises et de l’emploi » et « auto-entrepreneur » perdent respectivement 45 millions d’euros. Les aides aux entreprises représentent 65 milliards d’euros alors que le CAC 40 dispose d’une trésorerie de 146 milliards d’euros.
Voilà la politique économique qui nous a menés dans le mur, une politique faite d’exonérations fiscales et sociales à la botte du MEDEF. Une politique qui fait du salarié, des artisans et des petites entreprises les variables d’ajustement. Il est assez remarquable de voir à ce titre que les crédits budgétaires consacrés au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, passent de 64 millions d’euros, en 2010, à 43 millions d’euros en 2011, alors même que les élus locaux l’utilisent dans bien des cas pour accompagner les projets portés par leurs territoires. Quel message en faveur des activités économiques de proximité !
Depuis plusieurs années, vous laissez notre économie au jeu de la concurrence libre et non faussée ; parfois en aidant quand il s’agit des banques ou de la faible compétitivité des opérateurs privés comme dans le secteur énergétique.
Et ce faisant, partout la France s’offusque et porte de beaux discours sur le capitalisme responsable. On attend toujours les actes : à quand l’introduction de clauses de remboursement des aides en cas de délocalisation pour sanctionner les comportements opportunistes d’entreprises ? À quand l’interdiction des licenciements boursiers ? Combien de cas Molex va-t-il falloir pour vous voir réagir ? Combien de raffineries allez-vous laisser délocaliser, malgré les conséquences sur l’emploi et sur l’importance stratégique économique et politique du maintien de cette activité sur le territoire national ?
Monsieur le secrétaire d’État, la France traverse une crise économique et sociale grave, le secteur industriel est en déperdition. En ignorant les problèmes et en muselant ceux qui dénoncent les politiques délétères du Gouvernement, vous avez fait le choix du mépris.
Les sénateurs du groupe CRC-SPG disposent de six minutes pour discuter de la mission « Économie ». Voilà la réalité du débat parlementaire !
La méthode est claire : il faut faire taire les opposants !
Quand M. Coppé annonce une « réflexion » en vue d’interdire les blocages des raffineries de pétrole, des ports et des autres « fonctions vitales du pays », alors même que des réquisitions de salariés de droit privé ont tenté de briser les grèves, on est très inquiet sur l’avenir de notre pays et sur le devenir des travailleurs.
Vous l’aurez compris, les sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre ce budget…
M. Jean-Claude Danglot. … qui signe encore une fois le désengagement de l’État de ses responsabilités dans les domaines économique et social.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la crise économique, qui a débuté à la fin de l’année 2008, a eu des répercussions très importantes sur l’état de nos finances publiques et nous a rappelé l’ardente nécessité de mener une politique vertueuse pour réduire les déficits publics de façon importante.
Le Gouvernement a néanmoins voulu préserver l’avenir et soutenir l’activité économique par des mesures appropriées. Notre croissance est redevenue positive dès le deuxième trimestre 2009 et, grâce aux mesures ajustées de notre stratégie de crise, les trois moteurs de la croissance montent en puissance : en premier lieu, la consommation, qui n’a jamais faibli depuis le début de la crise et connaît une augmentation de 0, 3 % ; en deuxième lieu, l’investissement des entreprises qui a progressé de 1, 1 % et, en troisième lieu, les exportations en hausse depuis le début de l’année de 4, 5 % au premier trimestre et de 2, 8 % au deuxième.
Cependant, les temps sont difficiles pour les professionnels du tourisme car, en cette période de reprise, les grèves du mois d’octobre, notamment dans les transports, avec les pénuries d’essence que nous avons connues, ont pesé lourdement sur le tourisme de loisirs et d’affaires. Elles ont entraîné d’importantes annulations de séjours, d’ajournements de séminaires d’entreprise et ont particulièrement pesé sur les réservations de dernière minute, qui ont plongé de 30 % à 40 % par rapport à la même période de l’an dernier.
Les grèves ont entraîné des pertes de l’ordre de 50 millions d’euros dans l’hôtellerie et d’environ 50 millions d’euros dans les cafés et les restaurants. Si l’on y ajoute les pertes enregistrées à la SNCF, dans le transport aérien et chez les loueurs de voitures, le coût pour le tourisme dépasse les 200 millions d’euros.
Au-delà, ce sont les effets à long terme qui sont néfastes sur le secteur du tourisme, notamment en termes d’image hors de nos frontières, qui font craindre des campagnes de dénigrement de la part de nos concurrents étrangers promouvant d’autres destinations que l’Hexagone.
Chaque année, nous nous réjouissons de voir la France rester l’une des premières destinations vers lesquelles se tournent spontanément les touristes des pays émergents. Mais pour combien de temps encore ? Un pays où les grèves sont un phénomène récurrent ne peut plus séduire.
À maintes reprises, à l’occasion de l’examen du budget, je suis monté à cette tribune pour rappeler le même constat, celui de la place de la France de première destination touristique mondiale, avec un solde touristique qui demeure le poste excédentaire le plus élevé de notre balance des paiements, mais pourtant toujours au troisième rang mondial en termes de recettes.
Nous devrions sans doute améliorer la qualité de notre accueil – ce n’est pas encore notre point fort – ainsi que la qualité des infrastructures et celle des prestations proposées.
Monsieur le secrétaire d’État, votre prédécesseur à ce ministère, M. Novelli, avait engagé un vaste chantier dont le contenu tient en un mot : la requalification de l’offre touristique française – nous nous en félicitons –, avec notamment la loi de développement et de modernisation des services touristiques de 2009, la réforme du classement des hébergements touristiques marchands, la cinquième étoile pour l’hôtellerie haut de gamme, et bientôt la classe Palace actuellement en cours de définition, le développement des chèques vacances, et le nouveau statut des agents de voyage.
Nous sommes bien conscients de la nécessité de ce grand mouvement de révision de l’encadrement de l’offre, qui va remettre progressivement à niveau la qualité, et donc l’attractivité générale de la destination France, attractivité qui s’est dévalorisée au fil du temps par manque de réinvestissement.
Derrière ce dispositif, il y a des projets d’investissements, des emplois et une offre touristique régénérée. La loi de modernisation de l’économie a aussi permis d’acter la baisse de la TVA et a toute sa place aux côtés de la loi « Tourisme ». La restauration a bien évidemment besoin du tourisme, et le tourisme a besoin de la restauration. N’oublions pas que la gastronomie est l’un des principaux leviers de l’attractivité touristique de notre pays.
Avec la baisse de la TVA dans le secteur de l’hôtellerie-restauration, que le Sénat a finalement – heureusement, dirai-je – conservée pour 2011, ce secteur reste le secteur numéro un en France pour la création d’emplois, avec une progression de 3, 2 % de ses effectifs salariés et une baisse de 20 % des défaillances d’entreprises dans les six mois qui ont suivi son entrée en vigueur.
Le label officiel Maître restaurateur, décerné par l’État, qui reconnaît la qualité, les compétences et le savoir-faire des restaurateurs – ce label a été institué par votre prédécesseur en 2007, monsieur le secrétaire d’État –, doit absolument être valorisé et développé pour devenir le symbole de qualité, particulièrement pour les visiteurs étrangers.
Par ailleurs, il est temps de s’atteler au lourd problème de l’immobilier touristique dans les stations littorales et de montagne, qui date bien souvent des années soixante et soixante-dix. En effet, faute d’avoir fait l’objet d’investissements, un mouvement massif de réhabilitation s’impose aujourd’hui.
De plus, la Fédération autonome générale de l’industrie hôtelière touristique s’inquiète des investissements considérables que devront réaliser les hôteliers pour faire face aux nouvelles normes : incendie – en 2011 –, accessibilité aux personnes handicapées – en 2015. Il s’agit en effet d’investissements non amortissables par une quelconque valorisation commerciale. Ces investissements se cumulent éventuellement avec ceux qui sont induits pour la mise aux normes de classement des hôtels de tourisme, en 2012.
L’ensemble de ces investissements seront insupportables pour une grande partie des entreprises hôtelières indépendantes, d’où le risque certain d’une disparition d’un grand nombre d’établissements. Il en résultera un problème important dans les stations touristiques qui ont déjà perdu, en dix ans, 20 % des hôtels, mais également pour l’emploi, car les hôtels sont les plus gros employeurs de l’ensemble des hébergeurs.
Je voudrais donc tirer en quelque sorte la sonnette d’alarme, car il s’agit d’un dossier extrêmement préoccupant pour l’avenir de nos stations touristiques, et je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir nous apporter des précisions sur ce point.
Venons-en au projet de loi de finances proprement dit. Que prévoit-il pour 2011 ?
Les principales orientations du programme 223, Tourisme, s’articulent autour de trois grandes priorités : renforcer la promotion de la France à l’étranger, développer l’économie du tourisme et favoriser l’accès de tous aux vacances. Ce sont, bien entendu, des orientations que nous soutenons.
Pour autant, s’il faut regretter la baisse en 2011 des crédits de ce programme, pour les autorisations d’engagement et les crédits de paiement – restrictions budgétaires obligent –, il ne faut pas oublier non plus que les crédits de ce programme ne représentent qu’une part très marginale de l’effort public en faveur du tourisme.
Fort heureusement, la politique du tourisme est soutenue par d’autres moyens, dans d’autres missions budgétaires et surtout par les collectivités locales.
L’importance majeure du tourisme pour l’économie nationale n’est plus à démontrer ; c’est un secteur économique de première importance pour la France, qui représente un potentiel important de croissance et d’emplois.
Il convient de maintenir la compétitivité de la France dont la part dans les recettes du tourisme international baisse, alors que l’Espagne réussit à maintenir la sienne. Aussi, il serait intéressant de disposer d’un indicateur fiable des dépenses touristiques effectuées en France par des visiteurs étrangers.
Les conclusions, dans le courant de l’année 2011, de la mission d’information mise en place par nos collègues de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur l’action de l’Agence de développement touristique Atout France et la promotion de l’image de la France à l’étranger seront à ce sujet très précieuses.
Monsieur le secrétaire d’État, la France possède tous les atouts pour gagner la bataille du tourisme. C’est la raison pour laquelle mes collègues du groupe UMP et moi-même souhaitons vous soutenir dans l’action que vous allez mener, avec le Gouvernement, pour faire décoller cette activité économique stratégique pour notre pays, activité essentielle en cette période de sortie de crise.
Nous voterons en conséquence les crédits du programme, Tourisme, pour 2011.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M. Rebsamen, rapporteur spécial, a enfin pu nous rejoindre.
Je vous donne la parole, mon cher collègue.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je vous prie de m’excuser d’avoir quelque peu bousculé l’ordre du jour.
Je suis chargé de vous présenter les crédits du programme 220, Statistiques et études économiques, qui recouvre le budget de l’INSEE, et les crédits du programme 305, Stratégie économique et fiscale, qui regroupe les moyens de la direction générale du Trésor et de la direction de la législation fiscale.
J’aborderai, en premier lieu, le programme 220. En présentant le 6 octobre dernier un rapport d’étape sur la délocalisation de l’INSEE à Metz, je vous faisais part des fortes inquiétudes de la direction générale de l’Institut devant la réduction très importante de ses moyens de fonctionnement et d’intervention ces deux dernières années, 2009 et 2010 : hors dépenses de personnel, la dotation de l’INSEE est passée de 69, 1 millions d’euros en 2008 à 55 millions d’euros en 2009 et à 56, 5 millions d’euros en 2010.
Parallèlement, ses effectifs ont été réduits de 5, 75 %.
L’année dernière, à la même époque, je vous disais déjà qu’on ne saurait garantir, à terme, avec une telle pente, la qualité et l’indépendance de la statistique publique, à laquelle, je le sais, vous êtes tous profondément attachés. Jean-Philippe Cotis s’en était d’ailleurs ému publiquement le 19 février dernier.
Cette mise en garde était d’autant plus justifiée que l’INSEE doit faire face à de multiples chantiers : le lancement du projet « INSEE ambition 2015 », la réorganisation des directions régionales et le déménagement sur le plateau de Saclay de l’École nationale de la statistique et de l’administration économique, l’ENSAE, sans oublier la création du pôle statistique à Metz.
Dans ce contexte, la dotation globale de l’État pour 2011 marque, ce dont je me félicite, une consolidation du budget de l’INSEE. Avec l’ouverture de 434, 62 millions d’euros, celle-ci augmentera de 4 %. Les crédits de fonctionnement et d’investissement enregistrent un bond de 19, 1 %, pour s’établir à 67, 3 millions d’euros, contre 56, 5 millions d’euros cette année. Les crédits de personnel de titre 2, sous l’effet du glissement vieillesse-technicité, que tous les élus connaissent, augmenteront de 1, 66 %, pour s’établir à 367, 3 millions d’euros en 2011, contre 361, 6 millions d’euros en 2010.
À titre personnel, je tiens à souligner qu’il était urgent de ne plus attendre. En effet, souvenons-nous des fortes inquiétudes qui s’étaient exprimées au début de l’année 2010. Le directeur général de l’INSEE avait alors rappelé que la diminution des crédits de fonctionnement de son institut compromettait le bon accomplissement de ses missions, sans compter les milliers de factures impayées qui étaient en souffrance au printemps dernier.
De plus, il faut le savoir, l’INSEE doit également faire face à une augmentation de la demande : les statisticiens sont de plus en plus sollicités par Bruxelles. Ainsi, en 2009, la moitié des enquêtes françaises ont alimenté Eurostat et, dans le même temps, l’INSEE a travaillé à la mise en place de nouveaux indicateurs.
Pour toutes ces raisons, les crédits attribués à l’INSEE ne devront plus, à l’avenir, chuter.
L’augmentation des moyens budgétaires ne saurait masquer la réduction de 5 % des effectifs : avec un plafond d’emplois de 5 221 équivalents temps plein travaillé, les ETPT, l’INSEE perd 266 postes par rapport à 2010. Je constate donc que se poursuit la diminution globale des effectifs, qui avait déjà été dénoncée lors de l’examen de la loi de finances pour 2010.
Aussi, dans le contexte particulièrement difficile de la délocalisation de l’INSEE, et malgré l’entrée prévue, en 2011, de 150 nouveaux agents recrutés par voie de concours, ainsi que la création de 159 emplois nouveaux, je rappelle avec force le risque d’atteinte à la qualité et à l’indépendance de la statistique publique que représenterait, selon moi, une application stricte de la règle de non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux.
De la même manière, je déplore que soient très fortement réduits, dans le budget de l’INSEE pour 2011, les moyens consacrés à l’action n° 5, Action régionale, alors que ceux-ci sont destinés à mettre en valeur l’apport de cet institut et de ses directions régionales en matière d’information locale et d’aide à la décision des pouvoirs publics locaux.
La contraction de 12 % des crédits dévolus à cette action, qui sont ramenés de 60, 28 millions d’euros, en 2010, à 52, 75 millions d’euros, en 2011, correspond à une diminution des effectifs de l’ordre de 126 ETPT.
Plus globalement, la question des effectifs constitue un volet majeur de la réorganisation de cet institut, dans l’optique de la création du centre statistique de Metz et du redéploiement stratégique des équipes de l’INSEE vers une montée en gamme des études.
Prenons acte de la réévaluation à la hausse du budget global de l’INSEE pour l’année 2011, qui ne constitue d’ailleurs, je tiens à le souligner, qu’un retour à l’étiage financier des années 2006 et 2007.
Cette dotation devrait continuer à progresser dans le cadre de la programmation pluriannuelle, pour atteindre 442, 77 millions d’euros en 2013. Afin d’assurer la pérennité des moyens d’action de l’INSEE, il faudra veiller à ce que l’augmentation des moyens de la statistique publique, prévue dans le projet de loi de finances pour 2011 et dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014, soit effective.
Enfin, sans revenir dans le détail sur l’installation du pôle statistique à Metz, je rappelle que le coût de l’opération immobilière s’établit à environ 50 millions d’euros selon le premier bilan que j’ai dressé dans le rapport d’information que j’ai rédigé au nom de la commission des finances. Ce coût est très élevé et, même s’il ne relève pas de la mission « Économie », il sera directement pris en charge par le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
À cet égard, je vous rappelle, mes chers collègues, les fortes réserves que la commission des finances a émises sur le projet de réhabilitation des locaux de la direction régionale de la SNCF à Metz.
Avec un calendrier des travaux étalés sur cinquante et un mois, tous les élus le savent, les risques de dérive des coûts inhérents à toute opération de restructuration de bâtiments anciens et la nécessité de procéder à des déménagements multiples et croisés dans une ville qui ne dispose pas d’une offre de bureau suffisante font que ce choix ne garantit ni la meilleure utilisation des deniers publics ni l’adéquation optimale aux besoins exprimés par l’INSEE.
Aussi la commission des finances a-t-elle appelé à un réexamen approfondi de toutes les propositions, y compris l’installation du centre statistique de l’INSEE dans des immeubles neufs, comme le souhaitait d’ailleurs la direction de cet institut.
Si le bâtiment en lui-même n’est pas classé, il se situe dans un périmètre de protection des monuments historiques, ce qui impliquera beaucoup de doigté et de temps pour faire avancer les travaux.
En outre, il conviendra d’évaluer l’impact financier des mesures d’accompagnement de cette opération et de mesurer ses répercussions sur les moyens de fonctionnement et le personnel, notamment au sein des directions régionales.
J’en viens maintenant à l’examen du programme 305, Stratégie économique et fiscale.
Ce programme soutient la direction générale du Trésor et la direction de la législation fiscale non seulement dans la conception et la mise en œuvre de la politique économique et financière de la France au niveau national, international et européen, mais aussi dans l’élaboration de la législation fiscale, ce qui est très important.
Il assure également la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France pour le compte de l’État, en particulier l’activité des commissions de surendettement.
Le programme est doté de 508, 6 millions d’euros au titre des crédits de paiement. Par rapport aux crédits votés dans la loi de finances pour 2010, la dotation pour 2011 augmente globalement de 46, 6 %.
Or l’évolution des crédits de l’action n° 1, Définition et mise en œuvre de la politique économique et financière de la France dans le cadre national, international et européen, est principalement marquée par l’augmentation du montant versé pour la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France, qui passera de 145, 8 millions d’euros cette année à 317 millions d’euros en 2011.
Il faut rappeler que cette dotation a été constamment sous-évaluée au cours des trois dernières années. Ainsi, en 2009, la dépense effectivement réalisée a dépassé de 30 millions d’euros le montant des crédits votés. Pour l’exercice 2010, le Gouvernement juge probable que le montant du remboursement effectivement versé soit une nouvelle fois supérieur à la dotation budgétaire inscrite dans la loi de finances. L’augmentation notable de la dotation allouée à la Banque de France en 2011 répond aux exigences du Système européen de banques centrales, qui impose la rémunération au « coût complet », et non plus au coût estimatif.
Il faut en conclure que la budgétisation du programme pour 2011 sera beaucoup plus conforme au principe de sincérité budgétaire, ce dont tout le monde ne peut, j’en suis certain, que se satisfaire.
Au final, bien que je ne souscrive pas à tous les objectifs de la politique budgétaire du Gouvernement – cela ne surprendra personne ! –, et sous réserve des remarques et observations formulées précédemment, je vous propose, mes chers collègues, d’adopter, sans modification, les crédits proposés pour les deux programmes dont j’ai la charge.
Applaudissements
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer !
Aussi vous parlerai-je, cette année encore, de la construction navale – un secteur qui fonctionne sans GPS ! –, car le pilotage de l’économie fait partie, monsieur le secrétaire d'État, des missions qui vous ont été confiées. À cet égard, j’évoquerai tout particulièrement les Chantiers de l’Atlantique.
Je partage avec nos collègues Jean-Pierre Godefroy, élu de la Manche, Charles Revet, élu de Seine-Maritime, et Joseph Kergueris, élu du Morbihan, une vive inquiétude quant au devenir de nos chantiers navals.
Le 1er septembre 2005, nous avions présenté à Christine Lagarde, alors ministre déléguée au commerce extérieur, un projet stratégique pour l’industrie navale française, civile et militaire, dont nous anticipions les problèmes de survie.
Toujours d’actualité, ce plan concernait les Chantiers de l’Atlantique et la DCN, la Direction des constructions navales. Nous souhaitions unir les talents de ces deux entreprises au service d’un vrai projet de diversification vers le secteur pétrolier offshore.
De plan de relance en grand emprunt, de visites ministérielles en promesses présidentielles, où en sommes-nous ?
S’agissant d’Alstom, permettez-moi de revenir sur le jeu de Monopoly dont cette société semble avoir été l’objet.
En 2003-2004, le groupe connaissant alors de graves difficultés, l’État lui a procuré une facilité de trésorerie à hauteur de 300 millions d’euros et une contre-garantie importante.
Le 31 mai 2006, Alstom, renforcé grâce aux fonds publics, cède les Chantiers de l’Atlantique au groupe norvégien Aker Yards, lequel s’empresse, en octobre 2007, de vendre à son tour 39 % du capital des Chantiers de l’Atlantique à une société coréenne, pour un montant de 800 millions de dollars.
En novembre 2008, retour à la case départ : l’État, donc le contribuable, rachète 34 % du capital des Chantiers de l’Atlantique par l’intermédiaire du Fonds stratégique d’investissement.
En cinq ans, nous avons paupérisé notre industrie et les territoires, perdu du savoir-faire, licencié des centaines de salariés, et ce au prix de millions d’euros sortis de la poche du contribuable !
Aujourd’hui, les plans de charge des Chantiers de l’Atlantique présentent des carences inquiétantes. N’est-il pas temps, monsieur le secrétaire d'État, de décider d’une véritable stratégie industrielle pour nos chantiers navals, en créant un outil performant, sans être entravé par des considérations qui relèvent plus de la paresse que de la fatalité ?
Avec l’une des plus grandes entreprises pétrolières du monde, en l’espèce, Total, l’entreprise Technip et des Chantiers de l’Atlantique performants, capables de produire des plateformes et du matériel offshore, pourquoi sommes-nous obligés d’en commander à Singapour ?
Quoi qu’il en soit, j’attends votre réponse, monsieur le secrétaire d'État.
C’est une victoire de l’optimisme sur l’expérience, comme l’affirmait Henri VIII à son sixième mariage, mais je ne désespère pas qu’un jour nous arrivions enfin à unir les efforts de ces entreprises, qui bénéficient, pour la plupart d’entre elles, de financements publics, par le biais notamment du Fonds stratégique d’investissement.
Je le répète, il est extrêmement dommage que ces négociations se fassent sur le dos d’un certain nombre de salariés et contribuent à la paupérisation de notre capacité industrielle. C’est la raison pour laquelle j’ai tenu à prendre la parole ce matin.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme 134, Développement des entreprises et de l’emploi, et, plus particulièrement, sur l’action n° 4, Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information.
Les crédits prévisionnels de l’action, en baisse de 0, 8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, s’établissent à 209, 8 millions d’euros tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement.
Alors que les crédits pour 2010 étaient déjà jugés insuffisants par beaucoup, comment l’État va-t-il pouvoir assumer ses obligations à l’égard de La Poste ou encore son rôle d’aménageur du territoire dans le domaine des télécommunications ?
Qu’en est-il réellement du financement des quatre missions de service public de La Poste, que je déclinerai ?
La première de ses missions de service public concerne le transport et la distribution de la presse.
Tout d’abord, permettez-moi de formuler une remarque de forme : les 242 millions d’euros inscrits pour ce secteur le sont au titre de deux missions, la mission « Économie » et la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Cette présentation nuit à la lisibilité. Il serait plus efficace de rassembler les crédits sous une même mission.
Cela étant, si le soutien de l’État à La Poste pour l’exercice de cette mission de service public est réel, il n’en demeure pas moins insuffisant, puisque la dépense restant à la charge de La Poste est estimée à plus de 170 millions d’euros.
Quant à l’accord tripartite de 2008 entre l’État, la presse et La Poste, il ne permet pas d’être optimiste pour l’avenir, puisqu’il prévoit une réduction progressive de l’accompagnement de l’État, qui disparaîtra en 2016.
La deuxième mission de service public concerne la présence postale.
Pas plus que dans les budgets annuels précédents, cette mission n’est soutenue par l’État. En réalité, ce sont les collectivités territoriales qui la financent pour partie, en consentant, comme la loi les y oblige, un abattement maximal de 95 % sur la nouvelle contribution économique territoriale, le reste étant supporté par La Poste.
Le 3 novembre dernier, les ministres Michel Mercier et Christian Estrosi se sont engagés à porter le budget annuel du fonds postal national de péréquation territoriale de 135 millions d’euros à 170 millions d’euros. Cela étant, le décret sur les conditions de fixation du taux des abattements n’est toujours pas paru, ce qui empêche l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, de déterminer les coûts de la présence postale.
J’en viens maintenant à la troisième mission de service public de La Poste : le service universel postal.
Son financement, assuré jusqu’à présent par les recettes du secteur réservé, ne le sera plus à partir du 1er janvier prochain, les postes nationales perdant, à cette date, leur monopole résiduel. La compensation sous forme d’une aide de l’État, pourtant permise par la dernière directive postale, a été écartée par le Gouvernement au profit d’un fonds de compensation, alimenté par les contributions de l’ensemble des prestataires de services postaux titulaires d’une autorisation de l’ARCEP.
Le mauvais fonctionnement du fonds de compensation en vigueur en matière de téléphonie fixe m’a toujours amené à considérer que ce dispositif n’est pas satisfaisant.
Dans son rapport sur La Poste, la Cour des comptes a d’ailleurs également bien mis en évidence les risques de défaillance de ce mécanisme de compensation.
La Poste remplit une quatrième mission de service public : l’accessibilité bancaire.
La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a prévu un mode de financement spécifique à cette mission, avec une rémunération complémentaire dégressive visant à assurer à La Banque Postale une compensation proportionnée aux missions de services d’intérêt économique général qui lui sont confiées. Là encore, le manque à gagner pour La Poste est important.
Cela explique que la Cour des comptes exhorte l’État à couvrir les charges de service public afférentes au transport de la presse, à l’aménagement du territoire et à l’accessibilité bancaire.
Avec un tel projet de budget, preuve est à nouveau faite que l’État ne donne pas à La Poste les moyens nécessaires à la compensation du surcoût des missions de service public qui lui sont confiées.
J’en viens à la recapitalisation de La Poste.
Face au refus déterminé de l’opposition – tout particulièrement sénatoriale – d’un changement de statut, le Gouvernement expliquait que la transformation de La Poste en société anonyme visait avant tout à permettre sa recapitalisation par l’État et la Caisse des dépôts et consignations.
Où en sommes-nous, un an après ? La Caisse des dépôts et consignations ne semble pas se précipiter pour apporter sa participation, fixée à un total de 1, 5 milliard d’euros. Quant à l’État, que constatons-nous ? Le programme 731 du compte d’affectation spéciale, Participations financières de l’État, prévoit 890 millions d’euros pour des augmentations de capital, dotations en fonds propres et autres avances d’actionnaires et prêts assimilés. Le groupe La Poste est notamment visé.
Les informations sur ces prévisions de dépenses sont toutefois insuffisantes : aucune indication n’est fournie, ni sur le calendrier de l’augmentation du capital de La Poste ni sur la manière dont la « libération progressive » de ces fonds aura lieu.
Faut-il en conclure que l’augmentation du capital du groupe La Poste n’est pas si urgente que cela ? Si oui, comment croire que le changement de statut ait été réalisé seulement pour renforcer les fonds propres de La Poste ?
J’en viens à la partie relative aux télécommunications et à la société de l’information.
Dans ce budget, des crédits de fonctionnement sont prévus pour l’ARCEP, ainsi que des crédits d’intervention pour l’attribution de subventions à divers organismes internationaux et associations accompagnant le développement des télécommunications et de la société de l’information.
À ma connaissance, aucun crédit n’est prévu pour achever la couverture du territoire en téléphonie mobile et renforcer sa desserte en haut et très haut débit. Huit millions d’euros sont prévus dans les contrats de projet État-région au programme 112. Quant au Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT, il participe seulement à hauteur de 1, 5 million d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement au financement de l’élaboration des schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique, qui conditionnent l’aide de l’État aux projets haut débit et très haut débit des collectivités.
Reste également entière, à ce jour, la question de la couverture des zones grises en téléphonie mobile, c’est-à-dire celles qui sont desservies seulement par un ou deux opérateurs.
Monsieur le secrétaire d’État, quand le Gouvernement va-t-il enfin réellement s’engager pour la desserte en haut et très haut débit, et ne pas laisser aux seules collectivités locales, comme c’est le cas actuellement, la responsabilité de cette mission d’aménagement du territoire ?
L’État n’assumant pas ses obligations à l’égard de La Poste et n’exerçant pas réellement ses missions d’aménagement du territoire dans le domaine des télécommunications, le groupe socialiste ne votera pas les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
M. le secrétaire d’État ayant une contrainte horaire impérative, Mme Bariza Khiari a fort obligeamment accepté – et je lui en sais gré – que celui-ci réponde dès à présent aux différents orateurs qui se sont exprimés.
Bien évidemment, notre collègue interviendra dès après.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi d’abord de remercier Mme Khiari de m’avoir autorisé à m’exprimer dès à présent. Il se trouve que, lorsque j’étais député, nous avons eu l’occasion d’échanger nos points de vue à de nombreuses reprises sur un sujet qui nous intéresse tous deux de près, …
Sourires.
… à savoir les chèques-vacances.
Madame la sénatrice, je constate, comme vous, que les objectifs qui avaient été fixés n’ont manifestement pas été atteints. Ce sujet avait fait l’objet de longs débats lors de l’examen de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, et je me souviens que vous vous étiez montrée très hostile, avec d’autres, aux dispositions relatives aux chèques-vacances.
Aujourd’hui, je veux simplement vous dire que l’objectif de 500 000 bénéficiaires reste un objectif prioritaire, dût-il être atteint plus tardivement que nous ne l’avions escompté. Il faut développer les chèques-vacances !
Mme Bariza Khiari acquiesce.
Sans doute le moment est-il donc venu de se remettre autour de la table avec l’ensemble des acteurs concernés pour envisager le meilleur moyen d’atteindre cet objectif, dont je sais qu’il est aussi le vôtre, Mme Khiari, tant la question des chèques-vacances revêt pour vous une importance particulière.
Je tiens à saluer la qualité des travaux conduits tant par la commission des finances que par la commission de l’économie. Les rapporteurs spéciaux André Ferrand et François Rebsamen ont, sur plusieurs points, éclairé le Sénat. Bien évidemment, le Gouvernement tiendra le plus grand compte de ces observations dans son action.
De même, j’ai pris connaissance avec attention des propos de Mme Terrade et de Gérard Cornu, et de la position de Pierre Hérisson rapporteur pour avis.
La question du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce, le FISAC, semble préoccuper l’ensemble du Sénat. J’en veux pour preuve que l’amendement que la commission de l’économie a déposé à ce sujet a été adopté à l’unanimité de ses membres, comme l’a signalé tout à l’heure Gérard Cornu.
Je ne vous contredirai pas sur ce point : les crédits du FISAC ont effectivement été réduits. D’ailleurs, comme cela a été rappelé, les députés s’en étaient émus qui avaient adopté un amendement visant à abonder les crédits de ce fonds, lequel amendement a fait ensuite l’objet d’une seconde délibération conduisant à sa suppression.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la vérité m’oblige à dire que la situation des finances publiques nous contraint à d’importants efforts. Croyez-le bien, ce n’est pas de gaieté de cœur que le Premier ministre a fixé, dans ses lettres de cadrage, la réduction des dépenses d’intervention à 10 % sur trois ans, dont 5 % dès 2011.
Dès lors, pour compenser l’augmentation mécanique de plusieurs dépenses d’intervention, par exemple celles qui sont liées à l’allocation aux adultes handicapés – dont les crédits ne relèvent pas d’une mission entrant dans mon champ de compétence –, il a été nécessaire de réaliser des économies substantielles dans d’autres programmes, comme le programme 134, Développement des entreprises et de l’emploi, qui recouvre à la fois OSEO et le FISAC.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais votre attachement à ces dispositifs, surtout dans une période où il faut évidemment soutenir nos entreprises, mais, dans ce contexte de restrictions budgétaires, la priorité doit aller au financement d’actions innovantes et non pas « répétitives ». Sachez cependant que je veillerai à préserver l’action territoriale du FISAC, action essentielle parmi toutes aux élus locaux.
Un rapport d’activité du FISAC a clairement démontré son utilité, que, d’ailleurs, personne ne remet en cause. Il n’en demeure pas moins que les actions nationales du FISAC devront être réduites : je pense évidemment aux crédits de formation versés aux chambres régionales de métiers et de l’artisanat ou à la dotation annuelle allouée à l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, chargé de la réhabilitation des centres commerciaux.
Évidemment, mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends vos interrogations. Je note d’ailleurs que, outre l’amendement de la commission de l’économie visant à abonder de 21 millions d’euros les crédits du programme 134, a été déposé un autre amendement visant à abonder ces crédits à la hauteur de ce qu’avaient proposé les députés, soit 27 millions d’euros.
De fait, vous comprendrez aisément que le Gouvernement soit défavorable à ces deux amendements : comme je l’ai dit en introduction de mon propos, la situation des finances publiques ne permet pas de réserver une suite favorable à de telles initiatives.
Je voudrais également rassurer MM. les rapporteurs spéciaux, M. Cornu, rapporteur pour avis, ainsi que M. Marsin et apaiser leurs craintes : la DGCCRF reste une priorité de l’action gouvernementale. Vous avez, les uns et les autres, rappelé les propos que j’ai tenus lors de ma conférence de presse, à l’occasion de laquelle j’ai longuement rendu hommage à cette direction.
Dans les mois qui viennent, je proposerai d’ailleurs un certain nombre de modifications législatives visant à renforcer ses pouvoirs. Alors que nous sortons de la crise, je considère que la défense des consommateurs est une action essentielle. Si la DGCCRF voit effectivement ses crédits diminuer, il n’en demeure pas moins qu’un certain nombre de crédits et de dépenses, en particulier en matière immobilière, ont été regroupés au sein d’un nouveau programme budgétaire, à la suite de la nouvelle organisation territoriale de l’État mise en œuvre et du fait de la révision générale des politiques publiques.
Les ressources de la DGCCRF prévues dans le projet de loi de finances pour 2011 s’élèvent à 230 millions d’euros : 207 millions d’euros en crédits de paiement et 23 millions d’euros en crédits de fonctionnement, d’investissements et d’interventions.
La baisse des crédits de personnel est essentiellement liée au transfert de certains emplois vers les directions départementales interministérielles, qui relèvent désormais des services du Premier ministre. Elle est également liée au non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.
Sur le spectre hertzien, je serai très bref puisque la question a déjà été évoquée par l’ensemble des rapporteurs.
L’attribution de la quatrième licence de téléphonie mobile à l’opérateur Free, le 13 janvier 2010, a décalé le calendrier. C’est la raison pour laquelle les objectifs fixés n’ont pas pu être réalisés à temps. Dès lors, la recette globale attendue est de 850 millions d’euros.
Messieurs les rapporteurs spéciaux, vous vous êtes inquiétés du devenir des centres techniques industriels, question qui fait l’objet de deux amendements identiques. Les réductions budgétaires résultent, pour une importante, des changements relatifs à l’assujettissement à la TVA de ces centres, survenus l’an dernier, et, pour une moindre part, des économies de fonctionnement et d’intervention demandées à l’ensemble des opérateurs de l’État.
Un audit est actuellement conduit dans le cadre de la révision générale des politiques publiques et le Gouvernement ne manquera pas de vous en communiquer les résultats.
M. Cornu, au nom de M. Hérisson, a abordé la question de La Poste, sur laquelle M. Teston est longuement revenu.
D’abord, l’État s’est très fortement engagé pour soutenir La Poste. La loi du 9 février 2010 relative à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales a ouvert la voie à sa modernisation, à une augmentation de capital significative et lui a donné les moyens de faire face à la concurrence. Chacun le sait, le service de La Poste est apprécié et aimé de nos compatriotes.
Le 19 octobre dernier, l’État et la Caisse des dépôts et consignations se sont accordés sur les modalités d’une augmentation de capital de l’entreprise de 2, 7 milliards d'euros, financée à hauteur de 1, 5 milliard d'euros par la Caisse des dépôts et de 1, 2 milliard d'euros par l’État.
Des échanges sont en cours avec la Commission européenne pour dissiper les doutes éventuels, mais, soyez-en certains, l’État a la volonté d’être aux côtés de La Poste.
Enfin, s’agissant de la question de l’aménagement du territoire, un accord est sur le point d’être signé entre l’État, l’Association des maires de France et le groupe La Poste.
Sur toutes ces questions, il faut donc non pas faire de procès d’intention au Gouvernement, mais, au contraire, s’en tenir aux actes, qui parlent d’eux-mêmes !
Monsieur Rebsamen, en tant que rapporteur spécial, vous avez bien voulu saluer l’augmentation de la dotation allouée à la Banque de France. Je reçois avec plaisir ces compliments adressés au Gouvernement et je vous en remercie. Effectivement, les crédits sont en augmentation, puisqu’ils passent de 145, 8 millions d’euros pour 2010 à 328, 2 millions d’euros pour 2011. Cela est dû à la modification des modalités de facturation, laquelle s’opère aujourd’hui non plus à coût direct, mais à coût complet.
Vous avez souligné une autre évolution importante, à savoir la réduction des crédits de personnel et de fonctionnement de la direction générale du Trésor. Celle-ci est essentiellement due au redimensionnement du réseau international de la direction générale du Trésor. Vous avez, les uns et les autres, salué l’importance d’UBIFRANCE. Il faut non pas s’inquiéter, mais, au contraire, saluer cet objectif de renforcement d’UBIFRANCE, objectif auquel vous êtes d’ailleurs nombreux à souscrire, ainsi que vous l’avez dit ce matin.
Les résultats de cette agence sont aujourd’hui positifs. À ce jour, 834 emplois ont été transférés de la direction générale du Trésor à UBIFRANCE, dont les missions économiques sont désormais présentes dans quarante-quatre pays. Avant la fin de 2012, UBIFRANCE aura une compétence universelle dans l’accompagnement des entreprises à l’international. Notre commerce extérieur et nos PME en ont bien besoin !
J’en viens à l’installation de l’INSEE à Metz, à laquelle vous attachez une particulière importance, monsieur Rebsamen, puisque vous y avez consacré un rapport. Vous avez défendu les personnels et les missions de cet institut si important pour notre pays, dont les statistiques ne sont jamais contestées ou le sont très rarement.
Vous avez rappelé que le Premier ministre avait décidé cette installation en compensation des pertes d’emplois occasionnées par la restructuration de la carte militaire. Pour l’INSEE, 625 emplois seront délocalisés. Comme toujours dans ces cas-là, l’annonce de ces délocalisations n’a pas été très bien accueillie par les personnels. Mais les conditions d’organisation par l’État de ce transfert et les perspectives d’installation à Metz sont aujourd’hui plutôt bien acceptées par une grande partie d’entre eux.
Vous avez insisté sur l’aspect immobilier de ce transfert. Permettez-moi tout d’abord de rappeler ce que les personnels savent déjà : aucun d’entre eux ne sera contraint au départ. L’État, parmi les différentes solutions qui s’offraient à lui, a choisi de susciter des départs volontaires et, pour les agents qui refuseraient leur transfert, de les affecter dans de nouvelles fonctions sans modification de leur situation statutaire.
Concernant le volet immobilier de l’installation, l’objectif longuement étudié avec France Domaine est assez simple : il est de trouver un bâtiment dans la ville de Metz idéalement desservi par les transports publics et permettant les aménagements nécessaires.
La solution retenue est la rénovation d’un bâtiment qui abrite actuellement la direction régionale de la SNCF. Vous avez raison de parler d’opérations à tiroirs, car c’est à ce type de difficulté que l’on se heurte dans ce genre d’opération.
France Domaine et l’INSEE avaient fixé un cahier des charges très précis, auquel, cependant, la solution proposée par le maire de Metz, qui présentait sans doute un grand intérêt, ne correspondait pas. En effet, les bâtiments sont trop petits – il manque 4 000 mètres carrés, ce n’est pas rien ! –, ce qui obligerait les services à être logés dans trois bâtiments distincts. Si les personnels de l’INSEE sont plutôt heureux aujourd’hui d’aller à Metz, ils souhaitent néanmoins pouvoir travailler dans des conditions idéales. Or le fait d’être répartis dans trois bâtiments distincts, avec les difficultés que l’on imagine, n’est pas vraiment idéal !
Il reste un point essentiel pour nous tous, celui de coût de l’opération pour les finances publiques. La solution proposée par le maire de Metz d’installer le centre statistique dans des bâtiments neufs est beaucoup plus onéreuse, puisque, rapporté au mètre carré, le coût est supérieur de 75 %.
Je vous confirme donc que l’installation sur le site de la direction régionale de la SNCF reste privilégiée par l’État. Il faut surtout retenir que l’INSEE sera en partie transféré à Metz.
J’en viens maintenant aux crédits d’Atout France.
Vous avez, les uns et les autres, en particulier M. le rapporteur spécial, André Ferrand, et Daniel Marsin, salué l’action de cette agence. Toutefois, Mmes Terrade et Khiari se sont inquiétées de notre engagement en matière de tourisme.
Je rassure tout le monde : dans ce domaine, nous sommes parfaitement décidés à respecter nos engagements et nous menons une politique très dynamique. Les crédits d’Atout France sont en forte progression, contrairement à ceux de la plupart des services de l’État ou des organismes rattachés, qui sont en baisse. J’ai déjà annoncé, vous y avez fait référence, que les objectifs de promotion et d’accueil resteront prioritaires.
Je ne reviendrai pas en détail sur la question de la TVA à 5, 5 %. Dans son formidable rapport qu’il y a consacré, votre collègue Michel Houel explique parfaitement à quel point cette mesure a finalement été un bon choix, notamment pour l’emploi. Je rappelle que 29 500 emplois ont été créés, alors que 7 000 emplois disparaissaient chaque année avant l’application de la réforme, si l’on retient les chiffres de 2008 et de 2009.
Au premier trimestre de l’année prochaine, je réunirai tous les professionnels pour signer un nouvel avenant, avec des objectifs en matière d’investissements notamment. En période de sortie de crise, nous devons préparer l’avenir.
Monsieur Danglot, j’ai bien entendu vos propos et je n’ai pas envie d’engager une polémique avec vous, mais, franchement, le Gouvernement défend l’industrie ! Il suffit de rappeler ce que nous avons fait pour l’industrie automobile, pour Heuliez, avec deux cents emplois sauvés, et même pour Molex
Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Je veux également citer les 2, 5 milliards d’euros investis grâce au Fonds stratégique d’investissement.
Je ne vous rappellerai pas Vilvorde et l’État passif, mais chacun a en mémoire l’époque où se déroulaient ces événements !
Monsieur Bécot, vous avez évoqué les nouvelles normes en matière de sécurité incendie et d’accessibilité aux personnes handicapées. J’ai déjà eu l’occasion de dire publiquement qu’il me paraissait sain de fixer la date butoir à 2015 pour l’ensemble de ces opérations. C’est en tout cas ma position. Ces sujets font actuellement l’objet de discussions interministérielles.
Madame Goulet, personne ne peut douter que les chantiers navals comptent pour le Président de la République et pour le Gouvernement, en particulier les Chantiers de l’Atlantique, à Saint-Nazaire.
Je ne reviendrai pas sur les vicissitudes de son capital. En revanche, n’oubliez pas que les commandes que vous appeliez de vos vœux pour préserver l’emploi se sont concrétisées. Je pense à deux d’entre elles qui, chacune, ont suscité plus de cinq millions d’heures de travail sur le bassin d’emploi.
Par ailleurs, quand vous parlez de Total, vous savez parfaitement qu’il s’agit d’une entreprise privée. Toutefois, je transmettrai vos inquiétudes à qui de droit, en l’occurrence à mes collègues de l’industrie et du commerce extérieur.
Mesdames, messieurs les sénateurs, messieurs les rapporteurs, je vous remercie du travail que vous avez accompli et de la pertinence de vos questions. Sur tous ces sujets de préoccupation pour la Haute Assemblée, le Gouvernement est bien décidé, au moment où notre pays sort de la crise, à privilégier l’action sur le terrain pour répondre aux attentes de nos compatriotes.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
La parole est à Mme Bariza Khiari, que je remercie de sa compréhension, cependant que nous accueillons M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce extérieur, en remplacement de M. Frédéric Lefebvre.
Mme Bariza Khiari. Monsieur le président, la courtoisie que vous avez eue à l’égard de François Rebsamen valait bien un geste de complaisance de ma part !
Applaudissements sur certaines travées de l ’ UMP.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’UNESCO vient inscrire le repas gastronomique des Français sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Cette distinction nous honore et sera profitable à notre industrie touristique.
Elle doit aussi nous faire réfléchir. Cette décision est intervenue presqu’en même temps que disparaissait le ministère de l’immigration et de l’identité nationale, …
… intitulé qui posait l’altérité comme étant incompatible avec l’identité de la France.
Mme Bariza Khiari. Cette distinction me donne ainsi l’occasion de dire que l’identité nationale française n’est pas une couleur, une religion ou une origine géographique ; elle est un art de vivre
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.
Le repas gastronomique français, intégrant les plats et les saveurs des autres cultures, en les sublimant par un savoir-faire, dans une pratique sociale, est un rituel particulier. Ce n’est pas « la gastronomie la meilleure du monde », c’est celle qui a ce talent si particulier de rendre meilleures les traditions culinaires du monde entier.
Je regrette que M. Lefebvre soit parti avant d’entendre mes propos !
Sourires.
Je me félicite donc de cette distinction qui, j’en suis sûre, va « booster » notre gastronomie et, ce faisant, notre industrie touristique, ...
Et notre commerce extérieur !
... dont le cadre juridique opérationnel a été profondément modifié en 2009, notamment avec la création du groupement d’intérêt économique Atout France et l’adoption de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques.
En effet, ces dernières années, le cadre juridique et opérationnel en matière de tourisme a été profondément modifié, afin de répondre au défi qui, depuis dix ans, anime les acteurs de ce secteur et qui se résume à deux questions.
Premièrement, pourquoi la France, première destination touristique mondiale, ne figure-t-elle pas au premier rang des recettes engendrées par le tourisme ?
Deuxièmement, pourquoi la France, riche de ses monuments, restaurants et paysages, n’est-elle qu’un lieu de transit pour un touriste étranger sur sept ?
L’activité économique engendrée par le tourisme est colossale : c’est le poste excédentaire le plus élevé de la balance des paiements, avec un solde de 7, 4 milliards d’euros. Elle représente 6, 3 % du produit intérieur brut, 2 millions d’emplois directs et indirects. Tous les acteurs du secteur en témoignent, le potentiel est encore important. Aussi, chaque euro investi a son importance.
Nous sommes nombreux à souligner ce paradoxe, et pourtant, rien n’y fait : le budget du tourisme demeure déraisonnablement insuffisant. Après avoir accusé une baisse de près de 10 % l’an passé, il subira une diminution de même importance cette année, la même punition lui étant infligée l’année prochaine.
Votre conception de la politique économique repose uniquement sur l’affichage de la diminution de la dépense publique en direction des agences de notation. Elle ne se soucie ni de l’emploi, ni du service rendu, ni même de ses vertus économiques.
Ces remarques valent pour la TVA à 5, 5 % dans le secteur de la restauration, qui, avec le bouclier fiscal, demeure l’un des péchés capitaux de votre majorité. Certes, cette mesure fiscale est non pas rattachée au programme 223, Tourisme, mais au programme 134, Développement des entreprises et de l’emploi.
Je ne partage pas l’avis de mon collège Michel Houel, selon lequel cette mesure aurait « fait ses preuves ». Son coût, qui s’élève à 2, 4 milliards d’euros, n’a profité ni à la baisse des prix ni à la création d’emplois, comme l’a relevé récemment le Conseil des prélèvements obligatoires. Elle a permis une légère revalorisation des salaires – c’est bien le moins ! – et, surtout, la reconstitution de la trésorerie des restaurateurs, ce qui n’était pas l’objet de cette mesure fiscale. Ce point de vue est d’ailleurs partagé par certains au sein de votre majorité, monsieur le secrétaire d’État.
En attendant, le nombre d’emplois créés est décevant et le coût pour les finances publiques de chacun d’eux – 130 000 euros – est exorbitant.
Aussi suis-je favorable à ce que la baisse de la TVA dans la restauration soit rattachée au programme Tourisme.
Souhaitant tout au moins que ce débat ait lieu …
… je vous invite, mes chers collègues, à réfléchir à un taux de TVA intermédiaire, plus juste pour nos finances publiques.
Je remercie Jean-Louis Dumont d’avoir fait adopter à l’Assemblée nationale, dans un souci de transparence, le principe d’un document de politique transversale budgétaire permettant d’identifier le concours de chaque ministère à la politique du tourisme, ce qui nous permettra de mieux en suivre les évolutions.
En compilant les crédits des ministères et des institutionnels du tourisme, on obtient un budget global de près de 1, 2 milliard d’euros. Ce montant important met à contribution huit ministères et, surtout, les collectivités locales, au travers de 23 comités régionaux du tourisme, de 96 comités départementaux et de 3 098 offices de tourisme et syndicats d’initiative.
Mais le « bras armé » de notre ambition touristique, Atout France, dont je salue l’efficacité, notamment dans une période de transition difficile, n’a pas, de toute évidence, les moyens budgétaires nécessaires à ses missions de promotion, de régulation et de « chef d’orchestre ». L’agence est donc pénalisée par rapport à nos concurrents directs.
Si l’on constate le maintien de la subvention qui lui est allouée, on ne peut que déplorer, cette année encore, son insuffisance manifeste au regard des missions nouvelles qui lui sont confiées par la loi de développement et de modernisation des services touristiques, notamment sa mission de promotion de la destination France, en termes d’enjeu économique.
Ce budget n’exploite pas – c’est son péché majeur ! – le formidable potentiel de développement touristique de notre pays. Plus inquiétant encore, la programmation pluriannuelle des finances publiques prévoit une réduction de 19 % des dotations du programme 223 sur quatre ans ! Alors que tous s’accordent à reconnaître que l’investissement touristique est une « dépense d’avenir », les emplois de ce secteur n’étant pas délocalisables, ce budget témoigne une fois de plus d’une application dogmatique du désengagement de l’État.
Je terminerai cette intervention en évoquant l’aspect social du tourisme, notamment l’ANCV, l’Agence nationale pour les chèques-vacances, acteur majeur dans le domaine de l’accès aux vacances pour tous. Désormais, 3, 3 millions de salariés bénéficient des chèques-vacances, dont le volume d’émission a augmenté, malgré la crise, ou plutôt grâce à la crise, de 2 %. En effet, nos concitoyens ont dorénavant besoin d’un coup de pouce pour partir en vacances.
La loi de développement et de modernisation des services touristiques prévoyait d’élargir la distribution des chèques-vacances aux salariés des TPE-PME, avec un objectif de 500 000 bénéficiaires, indicateur de l’impact des politiques sociales de l’ANCV, pour la fin 2012.
Quelle est la situation aujourd’hui ? L’ANCV a conclu des conventions avec de grands opérateurs et élaboré pour eux un outil informatique permettant aux chefs d’entreprise d’accomplir toutes les démarches en ligne. Or cet outil n’est opérationnel que depuis peu. Sans doute l’objectif de 500 000 bénéficiaires est-il quelque peu ambitieux au regard de la date de mise en place de cette nouvelle boutique en ligne. Je souhaite que l’on donne du temps au temps afin que l’ANCV dispose d’un délai nécessaire pour atteindre ses objectifs.
J’ai noté la réponse de Frédéric Lefebvre sur ce sujet qui continuera de retenir toute mon attention.
Pour conclure, je dirai que le montant de ce budget n’est malheureusement pas à la hauteur du potentiel formidable de notre économie touristique, seul secteur créateur d’emplois, comme nous le rappelle l’Organisation mondiale du tourisme. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Économie », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Économie
Développement des entreprises et de l’emploi
Dont titre 2
419 202 774
419 202 774
Tourisme
Statistiques et études économiques
Dont titre 2
367 322 803
367 322 803
Stratégie économique et fiscale
Dont titre 2
146 197 740
146 197 740
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-236, présenté par MM. Badré et About, Mme N. Goulet et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et de l’emploi Dont Titre 2
Tourisme
Statistiques et études économiquesDont Titre 2
Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Denis Badré.
M. Lefebvre ayant annoncé que le Gouvernement n’était pas favorable à cet amendement, il a facilité, mais aussi compliqué ma tâche.
Je m’efforcerai cependant, mes chers collègues, de vous expliquer les raisons pour lesquelles cet amendement me paraît, au contraire, fort opportun.
En tant que membre de la commission des finances, monsieur le président de la commission, et en tant qu’européen convaincu, monsieur le secrétaire d’État, je suis très attaché à la résorption du déficit de nos finances publiques et donc à la réduction de la dépense publique.
M. le secrétaire d’État approuve.
Je vous remercie, monsieur Lellouche, de le reconnaître !
Encore faudrait-il que les choix que nous effectuons pour parvenir à cette réduction soient bien ciblés. Or, selon moi, la réduction des crédits alloués au FISAC n’est pas la meilleure opération que nous puissions faire.
M. Lefebvre indiquait tout à l’heure à quel point le FISAC lui paraissait un bon instrument, et ce pour diverses raisons. J’abonde en son sens, en affirmant que chaque euro placé dans le FISAC a une utilité certaine. Dès lors, la réduction des dotations du FISAC aurait un effet déplorable à divers titres.
Je souhaite en effet insister sur le rôle de starter de ce fonds, destiné à financer les opérations de redynamisation des centres-villes, de revitalisation de zones laissées à l’abandon, notamment dans les banlieues.
La création de ce fonds a constitué une initiative géniale : s’il n’existait pas, il faudrait l’inventer ! Il nous faut le sauver et l’aider à remplir ses missions.
En outre, grâce au FISAC, commerçants, artisans, collectivités locales, représentants des chambres consulaires, entreprises de services, qu’il s’agisse de transport, de logistique, d’économies d’énergie, d’urbanisme ou d’aménagement, se réunissent autour d’une table pour faire en sorte que la vie dans les centres-villes soit harmonieuse, équilibrée et agréable. Le FISAC joue donc parfaitement son rôle de rassembleur.
Amputer les crédits du FISAC aurait un effet psychologique dévastateur. Cela découragerait en effet nos commerçants et artisans, acteurs essentiels du redémarrage de notre économie.
Une telle mesure serait également néfaste d’un point de vue politique, vous le savez aussi bien que nous, monsieur le secrétaire d’État.
Mes chers collègues, le maintien des crédits du FISAC à son niveau de 2010 avait été adopté par l’Assemblée nationale. Or le Gouvernement, en procédant à une seconde délibération, a annulé cette décision. Si cet amendement, qui vise à rétablir ces crédits, faisait l’objet d’un large assentiment au sein de notre assemblée, il me semble que le Gouvernement aurait mauvaise grâce à refuser d’entendre la voix des élus, qu’ils siègent à l’Assemblée nationale ou au Sénat.
D’un point de vue psychologique, il est important que les crédits du FISAC soient maintenus, en 2011, à leur niveau de 2010.
L'amendement n° II-143, présenté par M. Cornu, au nom de la commission de l'économie, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et de l'emploi Dont Titre 2
Tourisme
Statistiques et études économiquesDont Titre 2
Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis.
Je souscris complètement aux propos que vient de tenir notre collègue Denis Badré concernant le FISAC. Je n’y reviendrai donc pas.
Le plus étonnant, dans cette affaire, c’est que, chaque année, lors de l’examen du projet de loi de finances, nous devons défendre le FISAC ! Pourtant, on ne parlait pas de rigueur budgétaire l’année dernière ! Quelqu’un, à Bercy, doit avoir une dent contre ce fonds !
En agissant de la sorte, on méconnaît la réalité de la France et de ses campagnes. Car le FISAC constitue un atout considérable pour la défense du commerce de proximité, notamment dans les zones rurales.
En outre, les bénéfices de son action sont en réalité démultipliés. Par exemple, une subvention de 10 000 euros accordée à un commerçant pour l’aider à s’installer – je destine ces propos aux fonctionnaires de Bercy – engendre des retombées financières, notamment par le biais de la TVA, cinq ou six fois supérieures. En participant à ces investissements, le FISAC contribue à assurer le maintien des commerces de proximité. Ce faisant, il rend service à nos compatriotes.
Or, par rapport à 2010, ce projet de budget pour 2011 vise à diminuer de 45 % les autorisations d’engagement destinées au FISAC et de 33 % les crédits de paiement. Nous sommes bien loin des règles affichées en matière de rigueur budgétaire, qui prévoient une baisse de 10 % des crédits sur trois ans et auxquelles je consens bien volontiers pour préserver un certain équilibre. En effet, contrairement à Denis Badré, je considère que le FISAC doit lui aussi faire l’objet de mesures de restriction budgétaire.
Alors que l’amendement de notre collègue vise à abonder le FISAC à hauteur de 27 millions d’euros, ce qui correspond à la proposition initiale de l’Assemblée nationale, je soumets à votre approbation, mes chers collègues, un amendement tendant à inscrire une somme de 21 millions d’euros sur l’action n° 2 du programme 134.
Ce montant stabilisera les crédits de paiement à leur niveau de 2010, puisqu’il permettra d’atteindre un total de 64 millions d’euros. Les autorisations d’engagement, en revanche, enregistreront une baisse de 18 %.
L’amendement n° II-143 est donc plus mesuré que celui qui a été défendu par M. Badré. Je me méfie en effet des décisions prises en commission mixte paritaire.
Je vous propose donc, monsieur Badré, de vous rallier à cet amendement, qui a été adopté à l’unanimité par la commission de l’économie.
Notre unité, qui nous donnera une force extraordinaire, nous permettra d’envoyer un signal fort au Gouvernement, ainsi qu’aux commissions des finances des deux assemblées, en particulier dans le cadre de la commission mixte paritaire.
Nous avons donc tout intérêt à nous rallier à l’amendement n° II-143, qui prévoit d’abonder le FISAC à hauteur de 21 millions d’euros, ce qui me semble raisonnable et pragmatique dans le cadre de la défense de notre ruralité.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
M’exprimant sous le contrôle de son président, je crois pouvoir dire que la commission des finances a parfaitement entendu aussi bien MM. Cornu et Badré que M. le secrétaire d’État.
Elle est à la fois consciente non seulement de la nécessité d’assainir nos finances publiques, mais aussi de l’efficacité d’un outil tel que le FISAC.
Par conséquent, mes chers collègues, la commission des finances considère que, le Gouvernement ayant repoussé à l’Assemblée nationale, en seconde délibération, un amendement destiné à abonder le FISAC à hauteur de 27 millions d’euros, la sagesse, monsieur Badré, serait d’adopter l’amendement défendu par la commission de l’économie, lequel prévoit un montant de 21 millions d’euros.
D’ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, si vous pouviez nous confirmer qu’il n’y aura pas de seconde délibération, quitte à ce que la commission des affaires économiques fasse encore un petit effort, il y aurait peut-être moyen de se mettre d’accord. Ce serait formidable !
En conclusion, mes chers collègues, la commission des finances s’en remet à la sagesse de notre Haute Assemblée, tout en espérant, vous l’aurez bien compris, que M. Badré retirera son amendement au profit de celui de la commission des affaires économiques.
M. le président. Monsieur Badré, l'amendement n° II-236 est-il maintenu ? Ce marchandage peut être constructif…
Sourires.
Je suis plongé dans un abîme de perplexité, monsieur le président…
Comme je l’indiquais tout à l’heure, l’amputation des crédits du FISAC aurait un effet psychologique dévastateur et porterait préjudice à tout un secteur de la vie de notre pays.
J’étais donc personnellement très attaché à ce que, par principe, ces crédits ne soient pas affectés et mon hésitation à retirer mon amendement s’explique par mon souci que ce secteur de l’économie n’interprète pas cette décision, le cas échéant, comme un geste de repli.
J’ajoute que l’opération est gagée. Nous amputerions, à due concurrence, l’action n° 01 du programme 305, précédemment décrite par notre collègue François Rebsamen.
Ce dernier a rappelé que, sur cette action, il s’agissait d’aller vers la sincérité. Que cette évolution se fasse très rapidement ou un tout petit peu plus lentement me paraît, en définitive, assez neutre. Dès lors que nous progressons sur le chemin de la sincérité, c’est déjà bien !
J’y insiste, il me semble souhaitable, sur un plan psychologique, de ne pas toucher à ces crédits. Toutefois, notre collègue André Ferrand vient de demander au Gouvernement si celui-ci pouvait s’engager à ne pas demander de seconde délibération.
Je fais donc face à un problème tactique. En définitive, je pourrais me rallier à l’amendement de la commission des affaires économiques, mais je veux pouvoir être certain, si celui-ci est adopté, d’une part, que le Gouvernement ne demandera une seconde délibération, d’autre part, qu’il sera maintenu par la commission mixte paritaire. À tout le moins, pour dissuader le Gouvernement de demander une seconde délibération, il faut, mes chers collègues, que le vote soit lourd et massif !
J’ai compris que le président de la commission des finances m’incitait à me replier sur l’amendement de la commission des affaires économiques.
En tout cas, il est hors de question, pour moi, d’aller en deçà !
J’accepte donc, monsieur le président, de retirer mon amendement au bénéfice de celui de la commission des affaires économiques, tout en regrettant profondément que, dans ce domaine revêtant une dimension psychologique et politique, nous n’ayons pas opté pour le maintien des crédits.
Applaudissements sur quelques travées de l ’ UMP.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’interviens de façon un peu impromptue dans le débat entamé par mon collègue Frédéric Lefebvre.
Denis Badré, pour lequel j’ai beaucoup d’amitié, …
… nous invite à cheminer vers la sincérité. Alors, monsieur le sénateur, permettez-moi d’être totalement sincère avec vous : le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° II-143, comme, d’ailleurs, il l’était à votre amendement n° II-236, que vous avez finalement retiré.
La raison en est simple, et je ne doute pas que mon collègue vous l’ait exposée tout à l’heure : autant nous avons pleinement conscience de l’importance du FISAC, autant la situation des comptes publics nous contraint impérieusement de faire des économies et de gérer de façon beaucoup plus efficace les crédits budgétaires.
Aux termes de la rédaction proposée par le Gouvernement, le FISAC disposera de 43 millions d’euros. Il nous appartiendra, aux uns et aux autres, de faire en sorte que cet argent soit utilisé le plus efficacement possible.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’attire également votre attention sur le fait que le gage proposé n’est pas raisonnable.
Les auteurs de l’amendement n° II-143 nous invitent à revoir les crédits de la Banque de France et de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer, alors même que nous ne pouvons pas le faire, puisqu’ils résultent, comme vous le savez, d’une obligation internationale. Le Système européen de banques centrales oblige effectivement les États à rembourser, en coût complet, les charges assurées par leur banque centrale nationale pour leur compte. Une révision à la baisse de ces crédits, d’une façon quelconque, ne peut pas être envisagée.
S’agissant de la sincérité des comptes de la Banque de France, je suggère aussi à Gérard Cornu, qui s’est exprimé avec beaucoup de force sur ce point, de relire le rapport pour avis qu’il a lui-même cosigné. C’est bien par souci de sincérité que nous mettons les crédits de la Banque de France à hauteur de ses obligations internationales.
Mesdames, messieurs les sénateurs, étant moi-même parlementaire depuis un certain nombre d’années, à l’Assemblée nationale – M. Cornu n’est pas le seul élu de terrain ici ! –, je sais parfaitement que des fonds comme le FISAC peuvent avoir un effet d’entraînement sur le plan local. Mais nous devons tous, collectivement, faire un effort de réduction de la dépense publique. Tel est le sens du message du Gouvernement !
J’ai été très intéressé par les propos de notre collègue Bariza Khiari sur l’art de vivre à la française. Mes chers collègues, de l’art de vivre à la française, il résulte 1 650 milliards d’euros de dette publique !
Nos déficits et notre dette publique atteignent un tel niveau que nous courons un risque majeur, celui de voir, demain, les taux d’intérêt augmenter de façon significative. Tous les artisans, tous les commerçants et toutes les communes qui participent à des opérations de restructuration urbaine ou de rénovation de quartier pour relancer le commerce pourraient alors être confrontés au renchérissement considérable de ces opérations, rendant pratiquement impossible leur réalisation.
J’ai entendu les plaidoyers vibrants qui ont été prononcés en faveur de toutes ces aides et, étant moi-même élu local, j’y adhère. Mais nous n’avons pas encore, me semble-t-il, pris la mesure de ce qui nous attend.
Le Gouvernement nous présente un budget placé sous le signe de la rigueur. Permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, que c’est optiquement vrai, mais en réalité très relatif si l’on analyse bien les choses. Ne nous laissons pas abuser par l’idée que nous serions déjà dans la rigueur : nous n’y sommes pas ! Ce qui nous attend risque d’être d’une force que nous avons du mal à imaginer !
Certes, les montants en jeu présentement – 27 millions d’euros, 21 millions d’euros – ne sont pas exceptionnels, mais, comme le faisait remarquer un premier ministre britannique : « Tout le monde est en faveur d’économies générales et de dépenses particulières ».
C’est un déchirement que nous devrons bien surmonter, mes chers collègues.
Par ailleurs, nous sommes toujours sous la menace d’une seconde délibération.
Lorsqu’elle traduit les souhaits du Parlement, une seconde délibération est politiquement recevable. En revanche, lorsqu’elle vient contredire son vote, elle est vécue comme une violence faite par l’exécutif au Parlement.
Pour que nous soit épargné ce type de traitement, peut-être faudrait-il envisager une compression un peu plus forte…
Monsieur Badré, mes chers collègues, pardonnez-moi de vous faire perdre quelques minutes pour vous raconter cette anecdote.
Au début des années quatre-vingt-dix, tout juste élu au poste de président du conseil général de la Mayenne, je m’entendais dire, par mes collègues, qu’il fallait absolument mettre en place une prime à la vache allaitante. Après de nombreuses concertations avec différents organismes, dont la chambre d’agriculture, nous avons décidé d’une prime de 1 000 francs – l’euro n’existait pas encore – par vache, destinée à aider les jeunes agriculteurs qui s’installaient.
Le jour où nous avons créé la prime, le prix des vaches a augmenté de 1 000 francs ! Autrement dit, nous avons aidé, non pas les jeunes qui s’installaient, mais les vieux qui vendaient les vaches !
Toutes ces aides faussent les conditions du marché. N’y a-t-il donc pas, dans certaines positions, comme une vanité politique, qui, par ailleurs, met en péril nos finances publiques ?
Ce dont les artisans et les commerçants ont besoin, c’est du pouvoir d’achat des consommateurs et le pouvoir d’achat des consommateurs dépend moins du commerce que d’une capacité retrouvée à produire et à créer des emplois ! Je m’inscris donc en faux contre l’idée selon laquelle la consommation est le moteur de la croissance. C’est vrai dans une économie fermée, mais cela ne l’est pas dans une économie mondialisée. Quand on relance la consommation en France, on crée beaucoup d’emplois en Asie !
La parole est à M. Jean-Claude Danglot, pour explication de vote.
Mes chers collègues, je vous invite à faire preuve de concision, même si M. le président de la commission n’a pas vraiment donné l’exemple !
Sourires.
La baisse de certains crédits pose un véritable problème.
La proposition de transfert qui nous est faite à travers cet amendement prouve, comme je le disais dans mon intervention, que ce budget n’est pas à la hauteur des enjeux économiques et, surtout, des discours ambitieux sur une relance de l’industrie et de l’emploi dans notre pays.
Au-delà des effets d’annonce, il y a la réalité des chiffres ! La diminution des dépenses publiques passe avant l’emploi. Vous évoquez maintenant, monsieur le secrétaire d’État, le Système européen de banques centrales. Mais qui a voté pour cette Europe-là ?
Ces remarques étant faites, je précise que nous voterons cet amendement tendant à corriger la baisse des crédits du FISAC. En revanche, nous nous abstiendrons sur les amendements n° II-391 et II-393 rectifié, car l’INSEE n’a pas à faire les frais de ce transfert, à cause d’un budget insuffisant.
Très bien ! sur les travées du groupe CRC-SPG.
Avant de donner notre position sur cet amendement n° II-143 relatif aux crédits du FISAC, permettez-moi, mes chers collègues, de réagir aux propos de M. le président de la commission.
Celui-ci nous a expliqué très doctement – j’ai noté exactement ses propos – que le déficit abyssal de l’État français serait la conséquence de l’art de vivre à la française. Je veux prendre mes distances par rapport à cette affirmation : je crois plutôt que ce déficit est la conséquence d’un certain nombre de choix qui, en définitive, n’ont pas toujours été très opportuns, et je ne vise pas uniquement des décisions prises dans un passé immédiat.
Cela étant dit, j’en viens maintenant à la position du groupe socialiste sur la proposition de la commission de l’économie.
Puisque Denis Badré a accepté de retirer son amendement au profit de l’amendement n° II–143 de la commission de l’économie, nous voterons ce dernier, qui, comme cela a été dit, a été adopté l’unanimité des membres de ladite commission. Celui-ci vise à maintenir la dotation du FISAC au niveau des crédits de paiement inscrits en loi de finances initiale pour 2010.
Aucune raison ne justifie, à mon sens, que le FISAC subisse une pareille réduction de ses crédits. Nous avons tout de même noté une baisse de 33 % des crédits de paiement et de 40 % des autorisations d’engagement par rapport à la loi de finances initiale pour 2010.
Or vous savez qu’un rapport récemment rendu public dresse un bilan particulièrement élogieux de l’action menée par le FISAC depuis sa création, en 1992, et ce jusqu’en 2009. Pourquoi, dans ce contexte, opérer une telle coupe dans un dispositif qui donne satisfaction, notamment dans les zones rurales ? Nous sommes tout à fait favorables au maintien de ces crédits.
Je suis très sensible au plaidoyer de M. le président de la commission des finances et je ne voudrais pas paraître rancunière, mais je rappelle tout de même que, dans le cadre du plan de relance de l’année dernière, on nous a fait acquérir pour 60, 5 millions d’euros, dans l’indifférence générale et sans expertise des domaines, la salle Pleyel. Ce choix n’était pas forcément adapté à la situation de nos territoires et il eût été préférable d’affecter ces 60, 5 millions d’euros au FISAC.
Pour ma part, je me suis battue contre cette opération parfaitement inopportune, soutenue, faut-il le rappeler, par le groupe CRC-SPG.
Il y a donc deux poids et deux mesures !
Par conséquent, si je comprends très bien ce que nous dit M. le président de la commission des finances, j’aimerais que nous fassions preuve de plus de mesure, s’agissant de prochaines dépenses qui pourraient nous sembler moins justifiées que d’autres.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je veux bien qu’on se fasse plaisir, mais je redoute vraiment que le Gouvernement ne demande une seconde délibération. Si M. Cornu voulait bien rectifier l’amendement de la commission de l’économie et réduire à 10 millions d’euros, par exemple, l’abondement des crédits du FISAC
Exclamations.
Je constate que vous rouvrez le débat, monsieur le président de la commission…
La parole est à M. Denis Badré, pour explication de vote.
Monsieur le président de la commission, c’est parce que j’anticipais votre objection que je me suis rallié à l’amendement de la commission de l’économie, mais, au risque de devoir vous peiner, je considère que descendre en deçà de 20 millions d’euros serait un très mauvais signal adressé aux artisans et aux commerçants, lesquels risquent déjà d’être indisposés par la réduction des crédits du FISAC.
En conséquence, j’invite l’ensemble de nos collègues à voter l’amendement de la commission de l’économie. Ce serait un bon « placement », à tous égards. Dans le cas contraire, toute la classe politique risquerait d’en être affectée.
Monsieur le président de la commission, je ne mésestime pas le risque d’une seconde délibération ; pour autant, je ne rectifierai pas l’amendement de la commission de l’économie, qui, je le rappelle une nouvelle fois, a été voté à l’unanimité de ses membres.
Cela dit, je me souviens que, voilà deux ans, un amendement que nous avions voté à l’unanimité et qui n’avait pas fait l’objet d’une seconde délibération avait été « retoqué » en commission mixte paritaire.
Monsieur le président de la commission, vous êtes membre de la commission mixte paritaire et vous aurez donc la main. Aussi, dans l’hypothèse où le Gouvernement ne demanderait pas une seconde délibération sur cet amendement, si celui-ci est voté – unanimement, je l’espère –, je vous demande d’entendre la clameur qui monte de toutes les travées de cet hémicycle en faveur de son adoption. Il s’agit d’un amendement raisonnable que le Gouvernement et le président de la commission des finances doivent prendre en considération.
L'amendement est adopté.
M. le président. Grandeur et solitude du président de la commission des finances…
Sourires.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-391 est présenté par M. Sido.
L'amendement n° II-393 rectifié est présenté par M. Badré, Mme Dini, MM. Dubois et J.L. Dupont, Mmes N. Goulet et Payet et M. Pozzo di Borgo.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
en euros
Programmes
Autorisations d'engagement
Crédits de paiement
Développement des entreprises et de l'emploi Dont Titre 2
Tourisme
Statistiques et études économiquesDont Titre 2
Stratégie économique et fiscaleDont Titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Bruno Sido, pour présenter l’amendement n° II-391.
Nous abordons là une question, qui, pour être moins sensible et moins populaire que celle du FISAC, n’en n’est pas moins très importante.
Cet amendement vise en effet à revaloriser les crédits des centres techniques industriels, les CTI, et organismes assimilés. Ces CTI sont des organismes de droit privé qui remplissent des missions d'intérêt général.
Les subventions allouées aux CTI s'inscrivent dans l'exercice de leurs missions d'intérêt général, dans le cadre d'une délégation de service public. Ces actions sont menées de manière mutualisée et bénéficient à l'ensemble des entreprises de leur ressort, en premier lieu aux petites et moyennes entreprises. En effet, les CTI sont les seules structures existantes pour aider les PME-PMI dans la recherche appliquée.
La mission sur les CTI et sur les comités professionnels de développement économique, les CPDE, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques a publiquement reconnu, lors d'une réunion à mi-parcours, l'efficacité de ces centres dans la réalisation de leurs missions.
Dans ce contexte, étant donné les efforts réalisés par ces organismes depuis dix ans et les objectifs qui leur sont fixés dans le cadre des politiques publiques, la réduction très sensible de leurs crédits de 20%, soit plus de 7 millions d'euros, semble incompréhensible.
Depuis 2000, soit depuis onze ans, à périmètre inchangé, les crédits alloués n'ont pas été revalorisés ; de fait, ceux-ci ont diminué de 20 % en euros constants.
Les CTI ont engagé des efforts de rationalisation de fonctionnement et sont parvenus à réaliser des gains de productivité dans l'organisation et la gestion des actions technologiques, mais ont dû également en passer par une réduction des effectifs, en particulier parmi les ingénieurs et les chercheurs.
En 2010, sur les 35 millions d’euros inscrits dans la loi de finances, seulement 31, 8 millions d’euros seront versés, d'où une réduction supplémentaire de 9 % de 2009 à 2010.
Cette année, le projet de loi de finances n'inscrit que 28 millions d’euros de crédits, soit une réduction supplémentaire de 12 %, nonobstant ce qui s’est passé en cours d’année.
Il est ainsi proposé qu'une augmentation de 2 millions d'euros soit attribuée à l'action n° 3, Actions en faveur des entreprises industrielles, du programme 134, Développement des entreprises et de l'emploi, pour revaloriser les crédits des CTI et organismes assimilés.
En gage, il est proposé de prélever 1 million d'euros sur les crédits de l'action n° 2, Information sur les entreprises et synthèses économiques, du programme 220, Statistiques et études économiques. Cette action bénéficie pour 2011 d'une augmentation de ses crédits.
Un autre million d'euros serait prélevé sur les crédits de l'action n° 5, Soutien, du programme 220. Les crédits de cette action – autorisations d'engagements hors dépenses de personnel – bénéficient d'une hausse de 6, 2 millions d’euros par rapport aux crédits pour 2010.
Cet amendement vise à rétablir un certain équilibre en faveur des CTI, pour éviter qu’ils ne soient contraints de restreindre leurs activités de recherche et pour qu’ils puissent enfin soutenir les PME, priorité affichée de manière récurrente par le Gouvernement. Cet amendement a donc pour objet de permettre que les actes suivent enfin les paroles.
La parole est à M. Denis Badré, pour présenter l'amendement n° II-393 rectifié.
Cet amendement étant identique à celui qui vient de nous être présenté par Bruno Sido, je n’ajouterai rien au brillant plaidoyer de notre collègue.
Je suis très sensible à l’argumentation développée par nos collègues, mais il n’est pas possible de gager la mesure proposée par un prélèvement sur les crédits du programme 220, c’est-à-dire sur le budget de l’INSEE.
Les CTI ont en effet pour l’objet la promotion du progrès technique et sa diffusion auprès des PME. Parmi les organismes sous tutelle de l’État, certains bénéficient d’une dotation budgétaire tandis que certains autres perçoivent le produit de taxes fiscales reposant sur les entreprises.
Ces taxes représentent au total près de 110 millions d’euros et les dotations budgétaires environ 30 millions d’euros.
Au moins deux motifs plaident en défaveur de ces deux amendements.
En premier lieu, la réduction de la dotation pour 2011 en faveur des CTI doit être relativisée, car il faut prendre en compte le budget global dont disposent ces organismes, budget qui pourrait être alimenté davantage par les contributions des entreprises que par l’État.
Cela me semble en effet un très bon argument.
En second lieu, l’augmentation de leurs crédits se ferait au détriment des moyens de l’INSEE, qui – je suis bien placé pour le savoir – doit faire face à cinq chantiers, assumer de nouvelles missions, en même temps qu’il doit gérer son déménagement à Metz, ainsi que le Président de la République en a décidé. Ce n’est donc pas raisonnable ! Au passage, je tiens à faire remarquer à M. Sido que, non seulement les crédits de l’INSEE n’augmentent pas, mais encore ils retrouvent simplement leur niveau de 2006 et de 2007.
M. le rapporteur spécial a tout dit ! Les CTI rendent certes un grand service, mais vous savez comme moi que, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, ils sont appelés à revoir leurs modes de fonctionnement, à mutualiser leurs actions et à faire des économies. À cet égard, M. Rebsamen et M. le président de la commission ont évoqué plusieurs pistes.
En outre, il n’est pas raisonnable de gager ces amendements sur le programme Statistiques et études économiques. L’INSEE, cela a été dit, doit notamment gérer les conséquences de son installation à Metz.
Telles sont, mesdames et messieurs les sénateurs, les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Je souhaite simplement informer mes collègues que l’Assemblée nationale avait adopté un amendement identique à ceux que mon collègue Denis Badré et moi-même soumettons à votre vote, amendement qui a finalement été supprimé au terme d’une seconde délibération, ce qui constitue une véritable agression contre les parlementaires.
Nos collègues députés ayant montré qu’ils avaient parfaitement conscience du problème qui se pose, il m’étonnerait que la Haute Assemblée ne les imite pas.
Je suis impressionné par la prolifération de tous ces organismes techniques ou professionnels. Certes, mes chers collègues, je ne doute pas que vos amendements reposent sur de réelles convictions, mais je vous invite à examiner ce qui se passe dans chacun de ces organismes et à en étudier le mode de fonctionnement.
Les quelques exemples que j’ai en tête m’incitent à penser que les rémunérations que perçoivent leurs dirigeants ont connu ces dernières années une véritable inflation, au seul motif qu’il fallait les aligner sur celles qui étaient pratiquées sur le marché. Mais ce marché est une fiction totale !
À la suite de M. le rapporteur spécial, j’ajoute que, plutôt que de percevoir le produit de cotisations, ces CTI auraient plutôt intérêt à recourir au crédit d’impôt recherche, qui permet d’obtenir une aide correspondant à 30 % de l’investissement en matière de recherche et de développement.
J’estime donc que le compte y est et, à titre personnel, je voterai contre ces deux amendements.
Je mets aux voix les amendements identiques n° II-391 et II-393 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Économie », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits de la mission « Économie ».
Ces crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien », figurant à l’état D.
en euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien
Désendettement de l’État
Optimisation de l’usage du spectre hertzien
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Ces crédits sont adoptés.
Mes chers collègues, je vous rappelle que l’examen de l’article rattaché à cette mission a été réservé jusqu’après le vote de l’article 51.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Économie » et du compte spécial « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Aide publique au développement », ainsi que des comptes spéciaux « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique », « Accords monétaires internationaux » et « Prêts à des États étrangers ».
La parole est à M. Yvon Collin, rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les trois programmes de la mission « Aide publique au développement » associent le ministère des affaires étrangères et européennes, le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ainsi que le ministère chargé de l’immigration, lequel, désormais, se confond avec le ministère de l’intérieur.
Pour cette mission, le projet de loi de finances prévoit 4, 5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 3, 4 milliards d’euros en crédits de paiement.
Par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2010, on constate une forte hausse des autorisations d’engagement, de 59 %. Cette hausse, il faut le dire, tient au hasard du calendrier de la reconstitution des fonds multilatéraux auxquels la France contribue.
Les crédits de paiement de la mission, en revanche, sont quasi constants d’un exercice à l’autre. La programmation pour 2011-2013 assure cette stabilité sur l’ensemble de la période, notamment en faveur du programme géré par le ministère des affaires étrangères et européennes. Ce point est important, car ce programme concentre la part de l’aide la plus visible, donc la plus politique, notamment les dons-projets mis en œuvre par l’Agence française de développement, l’AFD.
L’orientation budgétaire ainsi retenue témoigne de la priorité que le Gouvernement a choisi de donner à la politique d’aide au développement. En tant que rapporteur spécial, je ne peux que m’en réjouir.
Cependant, cette mission représente seulement 47 % des crédits de paiement prévus dans le budget général pour 2011 qui seront comptabilisables en aide publique au développement et 35 % du total de l’aide publique au développement française estimée pour l’année prochaine.
En effet, d’une part, la politique « transversale » de l’aide au développement repose, à titre principal, sur quatorze programmes et sur sept missions du budget général.
D’autre part, le reste de l’effort national en la matière proviendra de crédits hors budget général – notre collègue Edmond Hervé vous les présentera tout à l’heure –, d’opérations de traitements de dettes des pays pauvres n’ayant pas directement d’impact budgétaire, mais pesant lourd dans notre aide au développement – elles ont représenté plus de 1 milliard d’euros en 2009 –, de la coopération décentralisée assurée par les collectivités territoriales – à hauteur de 70 millions d’euros en 2009 –, et enfin du produit de la contribution de solidarité sur les billets d’avion, d’un montant de 170 millions d’euros l’année dernière.
En 2009, et ce malgré la crise, les apports des pays développés à l’aide publique au développement se sont accrus, tous types d’aide confondus, de 0, 7 % par rapport à 2008. Hors allégements de dettes, cette progression atteint 6, 2 % d’une année sur l’autre. Ainsi 119, 6 milliards de dollars ont-ils été versés aux pays en développement l’année dernière.
Parmi les principaux donneurs en volume, les États-Unis ont conservé leur premier rang, leur apport s’élevant à près de 29 milliards de dollars. La France, en soutenant un effort d’aide de plus de 9 milliards d’euros, soit 0, 46 % du revenu national brut, s’est hissée au deuxième rang mondial des donneurs en volume, devant l’Allemagne, le Royaume-Uni et le Japon.
Cependant, dans le classement en valeur, c’est-à-dire en fonction de l’aide au développement rapportée à la richesse nationale, notre pays ne se trouve qu’à la onzième place. Nous nous situons juste derrière le Royaume-Uni et la Suisse, et devant l’Espagne et l’Allemagne. Je précise que, dans ce classement en valeur, les États-Unis sont au dix-neuvième rang, entre le Portugal et la Grèce…
L’année 2010 devrait donner lieu à une nouvelle progression de l’aide française, à hauteur de 9, 7 milliards d’euros, soit 0, 5 % du revenu national brut. Toutefois, pour 2011, un repli est anticipé, l’aide versée par notre pays ne devant atteindre que 9, 5 milliards d’euros, soit 0, 47 % de la richesse nationale. Le budget général de l’État, globalement, devrait fournir à ce titre 7, 1 milliards d’euros.
En tout état de cause, la France semble encore loin, nous le voyons, de pouvoir traduire en actes l’engagement qu’elle a pris, et même renouvelé en 2008, de consacrer à l’aide publique au développement, à l’horizon de l’année 2015, 0, 7 % de la richesse nationale. En 2010 déjà, notre pays n’honorera pas son engagement de consacrer au moins 0, 51 % du revenu national brut à l’aide publique au développement, alors que le Royaume-Uni devrait, lui, y parvenir. Il est vrai que la France ne sera pas la seule dans cette situation de défaut, que devraient connaître d’autre pays, notamment l’Allemagne.
Encore faut-il analyser non seulement la quantité, mais également la qualité de cette aide.
Sous cet aspect, il est important de noter que la part bilatérale dite « programmable » de l’aide publique au développement française est minoritaire. En effet, l’aide multilatérale et européenne – environ 4 milliards d’euros – représente 45 % de notre aide globale, mais cette proportion devient supérieure à la moitié si l’on ne tient pas compte des dépenses bilatérales, dites « non programmables ».
Cette répartition, nous le savons, est préjudiciable à l’aide de terrain, c'est-à-dire l’aide aux projets, l’aide à la coopération technique, notamment. Or il y va du rayonnement international de notre pays, car, grâce à son aide bilatérale, la France est visible à l’étranger, et d’abord auprès des populations bénéficiaires. Dans la masse de l’aide multilatérale, son rôle, hélas ! passe souvent inaperçu.
De ce point de vue, il est heureux que nous ayons obtenu, pour la période 2011-2013, une baisse de notre clé de contribution au Fonds européen de développement. En 2011, cette contribution s’élèvera tout de même à 804 millions d’euros, mais je prends acte du rééquilibrage prévu en faveur du bilatéralisme qui, dépenses non programmables incluses, devrait croître jusqu’à 64 % d’ici à 2012.
Pour autant, la comptabilisation au titre de l’aide publique au développement de certaines dépenses bilatérales non programmables reste sujette à caution.
Il en va ainsi de l’aide versée à Wallis-et-Futuna, qui est de l’ordre de 85 millions d’euros par an. On doit cependant noter un progrès : du fait de la transformation de Mayotte en département, l’aide versée à cette île – environ 300 millions d’euros par an – ne sera désormais plus comptabilisée au titre de l’aide publique au développement.
De même, on peut contester le fait que soient considérés comme entrant dans l’aide au développement les frais d’écolage des étudiants en France ressortissants des pays en développement et les aides accordées aux réfugiés originaires de ces pays, soit respectivement 670 millions d’euros et 270 millions d’euros en 2009.
À l’inverse, certaines dépenses publiques, qui concourent pourtant de façon effective au développement, ne sont pas comptabilisables comme telles selon les normes de l’OCDE, notamment la dépense fiscale assise sur les dons aux organisations de solidarité internationale. Notre pays a là manifestement un travail à mener afin de faire réviser les règles de comptabilisation de l’aide.
Je précise que l’aide bilatérale française bénéficie principalement à l’Afrique subsaharienne, à hauteur de 49 % du total, et aux pays à revenu intermédiaire.
Toutefois, en 2009, la Chine et la Turquie ont respectivement occupé le deuxième et le cinquième rang parmi les pays bénéficiaires. Là encore, on peut s’interroger sur la pertinence d’une comptabilisation de ces dépenses au titre de l’aide au développement.
Tous ces éléments sont autant de justifications de l’entreprise de rationalisation dans laquelle notre pays vient d’engager son dispositif d’aide publique au développement.
Je rappelle en effet que le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement, lors de sa réunion du 5 juin 2009, a resserré les priorités géographiques, mais également clarifié les priorités sectorielles de cette aide, en vue d’en renforcer l’efficacité.
À la suite de cette réunion, un document-cadre a été élaboré tout au long de l’année 2010 et finalisé au début du mois de novembre. Le Gouvernement nourrit l’ambition de refonder la politique de coopération au développement.
Le Parlement a été invité à participer à la réflexion en la matière, et le Sénat, notamment par l’intermédiaire de la commission des affaires étrangères et de la commission des finances, y a pris une large part.
Ce document-cadre a le mérite de présenter, à destination de l’ensemble des acteurs, la doctrine française en matière d’aide publique au développement. Il tend, de façon opportune, à considérer que cette aide doit relever non de la charité et de la seule compassion, mais d’une véritable stratégie géopolitique, dans laquelle on considère non seulement la nécessité de soulager la pauvreté, mais aussi les intérêts de notre pays dans le monde.
Néanmoins, ce document n’aborde que de façon très parcimonieuse les aspects financiers, le choix ayant été fait de dissocier l’exposé de la stratégie et la programmation des moyens budgétaires. Si cette organisation peut se comprendre, elle nuit à la crédibilité des ambitions affichées.
En outre, le statut du document-cadre reste indéterminé. En effet, ce texte n’a pas de valeur juridique. De plus, à ma connaissance, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement n’a pas été convoqué pour son adoption formelle. Dans ces conditions, et à ce stade, on peut douter de l’autorité politique qu’il revêtira en pratique.
Afin que ce document ne risque pas de rester un vœu pieu, je pense, monsieur le ministre, qu’il conviendrait de donner à ce nouvel outil les formes d’adoption et de publicité officielle appropriées qu’il mérite.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d’adopter les crédits de la mission « Aide publique au développement ».
Applaudissements
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en tant que rapporteur spécial des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux », et « Prêts à des États étrangers » ainsi que du compte d’affectation spéciale « Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique », je m’en tiendrai à l’essentiel. Je vous invite, si vous souhaitez des détails chiffrés, à vous reporter au rapport afférent de la commission des finances.
J’évoquerai tout d’abord nos accords monétaires avec les pays de la zone franc.
En 2011, comme en 2008, en 2009 et en 2010, ces accords n’ont pas de poids budgétaire, compte tenu de l’importance des réserves bancaires existantes.
Mais l’absence de traces budgétaires ne saurait nous faire oublier les difficultés de ces pays, liées notamment à la chute des cours des matières premières, à la progression des dépenses de ces pays et à leurs difficultés à exporter du fait d’un renchérissement de l’euro par rapport au dollar.
Ensuite, le compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers » illustre la modestie de notre présence industrielle dans les pays concernés. J’avais d’ailleurs eu l’occasion l’année dernière de faire le même constat. Les chiffres ne doivent pas nous tromper. En effet, sur les 6, 880 milliards d’euros de crédits de paiement du compte, 6, 143 milliards d’euros sont fléchés vers la Grèce.
J’évoquerai maintenant les prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes.
Dans ce domaine, la France, mes chers collègues, continue d’être le premier contributeur. La Côte d’Ivoire, la République démocratique du Congo et le Soudan en sont les bénéficiaires. Il convient de rappeler, concernant la Côte d’Ivoire, que la démocratie et le respect des droits de l’homme sont le premier moteur du développement.
Applaudissements
Une fois encore, il nous faut rappeler la nécessité d’une approche globale et non uniquement monétaire. Ainsi, on observe dans ces pays, spécialement endettés, la présence de divers fonds d’investissements très spéculatifs.
L’année dernière, j’avais évoqué l’évolution de la situation des terres en Afrique. Selon certains observateurs, entre 15 millions et 20 millions d’hectares de terres seraient achetées par des puissances extérieures à l’Afrique.
Félicitons-nous des contrats de désendettement et de développement que nous continuons de faire vivre, ainsi que des prêts de l’Agence française de développement, dont les remboursements, comme vous le savez, monsieur le ministre, mes chers collègues, tiennent compte des circonstances économiques. À cet égard, je rappelle que nous sommes le seul pays à proposer ce type de contrat.
J’aborderai enfin le prêt à la Grèce, dont il a beaucoup été question. Je rappellerai simplement que la France est susceptible de prêter 6, 143 milliards d’euros à ce pays en 2010.
J’en viens à mon dernier point : la création d’un nouveau compte d’affectation spéciale.
Lors de la conférence des Nations unies sur le climat, qui s’est tenue à Copenhague en décembre 2009, les pays développés ont collectivement décidé de financer dans la période 2010-2012 des actions dans les pays en voie de développement destinées à lutter contre le changement climatique. L’accord porte sur 30 milliards de dollars, soit 7, 2 milliards pour l’Union européenne et 1, 260 milliard d’euros pour la France.
Le dispositif relatif à la forêt intéresse ce que l’on appelle les « quotas souverains » de la France. Notre aide alimente différents fonds et emprunte soit le canal multilatéral, soit le canal bilatéral.
Afin d’honorer nos engagements spécifiques contre la déforestation, nous avons besoin d’un financement supplémentaire de 150 millions d’euros sur trois ans. Ils seront inscrits dans deux nouveaux programmes, hors budget général, relevant d’un nouveau compte d’affectation spéciale, qu’il vous est proposé de créer.
Ces 150 millions d’euros seront donc financés, je l’ai dit, par la vente des « quotas carbone » que nous avons économisés. L’État français dispose en effet d’un excédent qu’il peut vendre à d’autres États. Cette situation résulte de notre bonne performance énergétique. Je rappelle à cet égard que la France émet en moyenne 6 tonnes de carbone par habitant, contre 15 tonnes pour les États-Unis et 10 tonnes pour l’Allemagne.
Il s’agit là d’un financement innovant et vertueux. Souhaitons qu’il soit durable.
À cet égard, permettez-moi de formuler une observation. Ce dispositif de cessions de « quotas souverains » en faveur de la forêt est différent du système dit de « gestion des actifs carbone de l’État », défini par l’Union européenne et visé à l’article 32 du présent projet de loi de finances.
Dans ce dispositif, il revient à chaque État de répartir entre les différentes installations industrielles concernées une quantité globale de quotas, tout dépassement se trouvant pénalisé. Il nous faut compter également avec les nouvelles entreprises qui entrent dans le dispositif, car cela augmente considérablement le tonnage supplémentaire de dioxyde de carbone prévu. À l’origine, pour ces nouveaux entrants, le tonnage prévu était de 2, 74 millions de tonnes. Aujourd'hui, il est estimé à 9 millions.
La commission des finances a prévu un montage financier pour faire face à la situation. Nous verrons le sort qui y sera réservé, monsieur le président de la commission des finances.
À titre personnel, même si je comprends bien la dualité de quotas et de régimes – nous avons, d’un côté, des quotas industriels et, de l’autre, des quotas souverains – j’estime qu’elle n’est tout de même pas d’une accessibilité intellectuelle immédiate…
Sourires.
Lorsque j’évoque ce compte spécial, nous vendons un surplus. Lorsque j’évoque ces quotas industriels, je crains que nous ne soyons obligés d’acheter et, donc, de dépenser.
Conclusion de ces rapports spéciaux, les crédits figurant dans notre rapport écrit ne portent que sur une fraction de l’aide publique au développement.
Monsieur le ministre, je vous prie d’excuser ce qui vous semblera une répétition par rapport à ce que j’avais déjà indiqué l’an dernier, mais je souhaiterais qu’il y ait une consolidation totale des comptes de l’aide au développement.
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.
Si nous intégrions dans ces comptes la totalité de la coopération décentralisée des collectivités territoriales, que personne au niveau gouvernemental ou des administrations centrales ne connaît de manière précise pour différentes raisons, je suis persuadé que nous aurions quelques raisons supplémentaires d’être fiers.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat d’adopter sans modification les crédits de ces comptes spéciaux.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’UMP.
Monsieur le ministre, laissez-moi vous dire tout d’abord le plaisir qui est le mien de vous retrouver aujourd’hui au banc du Gouvernement dans vos nouvelles attributions. Votre présence met un terme à une période, somme toute assez longue, pendant laquelle il n’y avait pas de ministre de la coopération, même si le ministre des affaires étrangères exerçait cette responsabilité.
Je souhaite bien sûr aussi vous adresser de chaleureux vœux personnels de succès dans vos nouvelles fonctions, d’une part, en raison des relations d’amitié qui nous unissent et, d’autre part, parce qu’un véritable pilotage politique de l’aide publique au développement nous semble indispensable.
Un tel pilotage politique est nécessaire pour coordonner les nombreuses administrations qui concourent à cette mission – je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est offerte pour leur rendre hommage –, mais également pour expliquer le sens de notre action à nos concitoyens et à nos partenaires du Nord et du Sud, sachant que la France demeure le deuxième contributeur mondial en matière de développement.
En tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, et dans le court temps de parole qui m’est imparti, je tiens à rappeler que le présent projet de loi de finances prévoit une stabilisation des crédits de l’aide au développement. Dans le contexte actuel, il s’agit d’un résultat plutôt satisfaisant, me semble-t-il, qui montre la volonté du Gouvernement de préserver les crédits de la coopération ; nous connaissons tous les contraintes qui s’exercent sur notre budget.
Certes, nous aurions souhaité que la France soit plus riche, que le déficit public soit moins élevé et que les crédits de la coopération soient plus importants. Néanmoins, je pense qu’une telle sanctuarisation constitue pour nous tous un élément de satisfaction.
Le projet de budget pour 2011 manifeste également une volonté de redressement de notre aide bilatérale.
La commission des affaires étrangères avait souligné à de nombreuses reprises le déséquilibre croissant entre les crédits multilatéraux et les crédits bilatéraux.
La France a mené une stratégie de montée en puissance de nos contributions aux grandes institutions internationales, afin d’orienter leur programmation vers l’Afrique. Cette stratégie a, du reste, plutôt bien réussi, mais nous sommes sans doute allés un peu trop loin. Nous constatons dans chacune de nos missions à l’étranger combien les crédits dont disposent les agences de l’Agence française de développement et les ambassades sur le terrain se sont réduits.
Nous nous félicitons donc de cette tentative de redressement, permise, à budget constant, par une légère diminution de nos contributions à la Banque mondiale et surtout au Fonds européen de développement.
Cette évolution permet d’augmenter les crédits de notre aide bilatérale qui concourent à des projets instruits par l’AFD dans les domaines de l’infrastructure, de l’eau, de l’urbanisme ou de l’agriculture à destination de pays en crise comme l’Afghanistan ou Haïti, ainsi qu’aux ONG et aux collectivités territoriales qui mènent des actions de coopération décentralisée. Mon collègue André Vantomme et moi-même souhaitons les saluer tout particulièrement.
Cette évolution marque un arrêt dans la diminution continue ces dernières années de notre moyen d’intervention sous forme de dons.
Comme l’a souligné le Comité d’aide au développement, de l’OCDE au mois de septembre dernier : « Les cinq secteurs sur lesquels la France veut se concentrer sont des secteurs dont la plupart sont susceptibles d’être appuyés par des dons et ne se prêtent que difficilement aux prêts. Pourtant, la France a réduit ses dons. Cela pose un défi pour la mise en œuvre de la nouvelle stratégie de la France et le ciblage sur les PMA, qu’elle a proposé. ». Ce défi-là est aujourd’hui le vôtre, monsieur le ministre : faire coïncider nos crédits avec nos priorités.
Nous avons par ailleurs constaté ces dernières années le dynamisme de l’AFD, dont la croissance se fonde sur une diversification géographique et sectorielle qui suscite néanmoins quelques interrogations.
L’AFD est aujourd’hui le principal opérateur français de l’aide au développement, mais intervient à 87 % sous forme de prêts dans des pays de plus en plus éloignés de nos priorités géographiques. Cette situation résulte à la fois d’une diminution des subventions d’État et d’un choix assumé de diversification.
Cette évolution a retenu l’attention de la commission des affaires étrangères. C’est pourquoi, en application de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, notre commission souhaitera se saisir du contrat d’objectifs et de moyens en cours de négociation entre l’AFD et l’État.
À ce sujet, monsieur le ministre, nous souhaiterions vivement avoir quelques indications sur le calendrier des négociations du contrat.
La commission a également souligné la nécessité d’assurer au niveau européen une synergie et une complémentarité entre tous les acteurs du développement. L’Europe, c’est 60 % de l’aide publique au développement mondiale, mais nous nous y engageons encore en ordre trop dispersé, sans stratégie commune et peut-être même sans véritable politique européenne.
Dans le contexte de dégradation des finances publiques que nous connaissons en Europe, on ne peut plus continuer à avoir vingt-sept politiques de coopération, en sus de celle de l’Union européenne, menant les mêmes actions dans les mêmes pays.
Monsieur le ministre, nous vous invitons plus que jamais à promouvoir des programmations conjointes fondées sur une division du travail en fonction des avantages comparatifs de chacun. Il y a des expériences pilotes dans ce domaine ; il faut les soutenir.
Au-delà des crédits, il y a aussi les résultats. Au sein de la commission, nous avons beaucoup insisté sur l’évaluation nécessaire des résultats au cours de l’année avec le ministère des affaires étrangères et le ministère chargé de la coopération. On nous dit que c’est complexe ; c’est tout à fait exact. Mais l’aide au développement n’a pas le monopole de la complexité.
Monsieur le ministre, vous et nous sommes redevables devant les citoyens et les contribuables de cette politique. C’est pourquoi nous souhaiterions que le ministère avance sur le sujet. Nous avions regretté que la nouvelle stratégie française de coopération et d’aide au développement n’ait pas été élaborée à l’issue d’une évaluation de l’ensemble de notre politique en la matière. Le précédent ministre nous avait proposé de nous associer à un bilan de celle-ci. Qu’en sera-t-il avec vous, monsieur le ministre ?
Au-delà de ces précisions, cette première rencontre ici, au Sénat, dans vos fonctions, devrait être pour nous l’occasion d’entendre votre conception personnelle de l’aide au développement, le bilan que vous faites de notre coopération et vos priorités pour les prochains mois.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Mme Catherine Tasca applaudit également.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures.