Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, cette année, plus d’un an après le vote de la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, j’ai décidé de mettre l’accent sur le programme Tourisme de la mission « Économie ».
En ce qui concerne les principales tendances de l’économie touristique, le tourisme se confirme être, à travers la crise, un secteur majeur de l’économie nationale. Il représente plus de 6 % du PIB et demeure le premier poste excédentaire de la balance des paiements, avec un solde positif de 7, 8 milliards d’euros. Le tourisme, c’est aussi près de 210 000 entreprises, qui emploient 844 000 salariés !
La fréquentation touristique a certes connu un infléchissement, mais, avec 76, 8 millions d’entrées en 2009, la France demeure la première destination touristique mondiale, devant l’Espagne, l’Italie et les États-Unis. Le tourisme bénéficie en outre d’un phénomène de chassés-croisés : en période de crise économique, les touristes étrangers viennent moins nombreux, mais les touristes français restent davantage en France. Inversement, en période de meilleure conjoncture, les touristes français sont plus nombreux à partir pour l’étranger, mais les touristes étrangers sont aussi plus nombreux à venir en France. Ces tendances inverses produisent un effet stabilisateur favorable à l’économie touristique. En 2009, le taux de départ des Français s’est élevé à 77, 9 %, ce qui signifie quand même qu’un Français sur quatre n’est pas parti en vacances, le taux de départ à l’étranger ou dans les collectivités d’outre-mer s’élevant à 23, 9 %.
L’importance du tourisme dans notre économie contraste avec la modicité des crédits qui lui sont consacrés. Non seulement le programme Tourisme se classe avant-dernier de tous les programmes budgétaires, mais sa dotation pour 2011 accuse également une réduction marquée par rapport à 2010. Les crédits de paiement passent de 55, 9 millions d’euros à 50, 6 millions d’euros, soit une baisse de 9, 6 %.
Cette diminution ne s’explique qu’en partie par des transferts de crédits et la non-reconduction d’opérations ponctuelles. Elle est d’autant plus préoccupante qu’elle est amenée à se poursuivre. En effet, la programmation pluriannuelle des finances publiques fait apparaître pour le programme Tourisme des dotations en baisse à 46, 3 millions d’euros en crédits de paiement pour 2012, puis à 45, 3 millions d’euros pour 2013, soit une réduction de 18, 9 % en quatre ans, de 2010 à 2013.
Les crédits du programme Tourisme apparaissent donc bien modestes au regard de l’importance économique du secteur. J’en avais fait la remarque à Mme la ministre Christine Lagarde lors de son audition devant la commission de l’économie, le 27 octobre dernier. Elle m’avait alors fait part de sa volonté de recentrer les moyens disponibles sur Atout France.
Effectivement, l’action de l’État dans le domaine du tourisme est relayée par certains établissements autonomes, qui jouent un rôle de levier efficace. C’est le cas d’Atout France, qui est un groupement d’intérêt économique résultant de la fusion, en 2009, de Maison de la France, chargée de la promotion de l’image de la France à l’étranger, et d’ODIT France, chargé de l’ingénierie touristique. Atout France intervient sur un marché international du tourisme dynamique, puisqu’il progresse de 4, 5 % à 5 % par an, mais très concurrentiel. Cet opérateur, qui dispose de trente-deux bureaux à l’étranger, doit donc réussir à prendre pied sur les marchés émergents, tout en conservant la part de la France dans les marchés matures.
Je ferai deux observations sur le budget d’Atout France.
D’une part, il fait largement recours au partenariat : sur un budget total de 81, 2 millions d’euros pour 2010, les ressources propres devraient s’élever à 42, 8 millions d’euros, et celles qui sont issues des partenariats devraient se monter à 38, 4 millions d’euros. Cet effet multiplicateur est intéressant, mais il ne saurait justifier le désengagement de l’État.
D’autre part, la loi du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques a étendu les missions régaliennes d’Atout France, en confiant à ce GIE notamment le classement des hébergements touristiques, l’immatriculation des agents de voyages et le référentiel des offices de tourisme. Or, aucun crédit supplémentaire n’a été accordé à l’agence au titre de ces nouvelles missions, qui occupent pourtant douze emplois.
L’action de l’État dans le secteur du tourisme est également relayée par un autre établissement public, l’Agence nationale pour les chèques-vacances. Or, l’ANCV ne reçoit aucune subvention, mais se finance en prélevant une commission de 1 % sur les chèques-vacances qu’elle émet et rembourse. Elle dégage même ainsi des excédents de gestion qui lui permettent de contribuer à la rénovation du patrimoine du tourisme social et d’accompagner les actions de solidarité organisées par les associations.
En conclusion, j’estime que le dynamisme des établissements intervenant pour le compte de l’État dans le secteur du tourisme ne saurait suppléer le désengagement financier de celui-ci. La réduction sensible des crédits du programme Tourisme, qui étaient déjà très modestes, est sans commune mesure avec l’importance du tourisme pour notre économie.
Pour ces raisons, je me suis abstenue sur ces crédits de la mission « Économie » pour 2011, alors que la majorité des membres de la commission les ont adoptés.