Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, mon intervention porte sur le programme 134, Développement des entreprises et de l’emploi, et, plus particulièrement, sur l’action n° 4, Développement des télécommunications, des postes et de la société de l’information.
Les crédits prévisionnels de l’action, en baisse de 0, 8 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2010, s’établissent à 209, 8 millions d’euros tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement.
Alors que les crédits pour 2010 étaient déjà jugés insuffisants par beaucoup, comment l’État va-t-il pouvoir assumer ses obligations à l’égard de La Poste ou encore son rôle d’aménageur du territoire dans le domaine des télécommunications ?
Qu’en est-il réellement du financement des quatre missions de service public de La Poste, que je déclinerai ?
La première de ses missions de service public concerne le transport et la distribution de la presse.
Tout d’abord, permettez-moi de formuler une remarque de forme : les 242 millions d’euros inscrits pour ce secteur le sont au titre de deux missions, la mission « Économie » et la mission « Médias, livre et industries culturelles ». Cette présentation nuit à la lisibilité. Il serait plus efficace de rassembler les crédits sous une même mission.
Cela étant, si le soutien de l’État à La Poste pour l’exercice de cette mission de service public est réel, il n’en demeure pas moins insuffisant, puisque la dépense restant à la charge de La Poste est estimée à plus de 170 millions d’euros.
Quant à l’accord tripartite de 2008 entre l’État, la presse et La Poste, il ne permet pas d’être optimiste pour l’avenir, puisqu’il prévoit une réduction progressive de l’accompagnement de l’État, qui disparaîtra en 2016.
La deuxième mission de service public concerne la présence postale.
Pas plus que dans les budgets annuels précédents, cette mission n’est soutenue par l’État. En réalité, ce sont les collectivités territoriales qui la financent pour partie, en consentant, comme la loi les y oblige, un abattement maximal de 95 % sur la nouvelle contribution économique territoriale, le reste étant supporté par La Poste.
Le 3 novembre dernier, les ministres Michel Mercier et Christian Estrosi se sont engagés à porter le budget annuel du fonds postal national de péréquation territoriale de 135 millions d’euros à 170 millions d’euros. Cela étant, le décret sur les conditions de fixation du taux des abattements n’est toujours pas paru, ce qui empêche l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, de déterminer les coûts de la présence postale.
J’en viens maintenant à la troisième mission de service public de La Poste : le service universel postal.
Son financement, assuré jusqu’à présent par les recettes du secteur réservé, ne le sera plus à partir du 1er janvier prochain, les postes nationales perdant, à cette date, leur monopole résiduel. La compensation sous forme d’une aide de l’État, pourtant permise par la dernière directive postale, a été écartée par le Gouvernement au profit d’un fonds de compensation, alimenté par les contributions de l’ensemble des prestataires de services postaux titulaires d’une autorisation de l’ARCEP.
Le mauvais fonctionnement du fonds de compensation en vigueur en matière de téléphonie fixe m’a toujours amené à considérer que ce dispositif n’est pas satisfaisant.
Dans son rapport sur La Poste, la Cour des comptes a d’ailleurs également bien mis en évidence les risques de défaillance de ce mécanisme de compensation.
La Poste remplit une quatrième mission de service public : l’accessibilité bancaire.
La loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie a prévu un mode de financement spécifique à cette mission, avec une rémunération complémentaire dégressive visant à assurer à La Banque Postale une compensation proportionnée aux missions de services d’intérêt économique général qui lui sont confiées. Là encore, le manque à gagner pour La Poste est important.
Cela explique que la Cour des comptes exhorte l’État à couvrir les charges de service public afférentes au transport de la presse, à l’aménagement du territoire et à l’accessibilité bancaire.
Avec un tel projet de budget, preuve est à nouveau faite que l’État ne donne pas à La Poste les moyens nécessaires à la compensation du surcoût des missions de service public qui lui sont confiées.
J’en viens à la recapitalisation de La Poste.
Face au refus déterminé de l’opposition – tout particulièrement sénatoriale – d’un changement de statut, le Gouvernement expliquait que la transformation de La Poste en société anonyme visait avant tout à permettre sa recapitalisation par l’État et la Caisse des dépôts et consignations.
Où en sommes-nous, un an après ? La Caisse des dépôts et consignations ne semble pas se précipiter pour apporter sa participation, fixée à un total de 1, 5 milliard d’euros. Quant à l’État, que constatons-nous ? Le programme 731 du compte d’affectation spéciale, Participations financières de l’État, prévoit 890 millions d’euros pour des augmentations de capital, dotations en fonds propres et autres avances d’actionnaires et prêts assimilés. Le groupe La Poste est notamment visé.
Les informations sur ces prévisions de dépenses sont toutefois insuffisantes : aucune indication n’est fournie, ni sur le calendrier de l’augmentation du capital de La Poste ni sur la manière dont la « libération progressive » de ces fonds aura lieu.
Faut-il en conclure que l’augmentation du capital du groupe La Poste n’est pas si urgente que cela ? Si oui, comment croire que le changement de statut ait été réalisé seulement pour renforcer les fonds propres de La Poste ?