Intervention de Jacques Mahéas

Réunion du 3 décembre 2010 à 21h45
Loi de finances pour 2011 — Compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l'état

Photo de Jacques MahéasJacques Mahéas :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, puisque cinq minutes seulement me sont imparties, je limiterai mon intervention à quelques points du programme 148, Fonction publique, non sans rappeler le contexte toujours inquiétant dans lequel il s’inscrit.

Monsieur le ministre, drapé de votre programme 148, vous prétendez que la fonction publique va maintenir des services de qualité à effectifs réduits. Mais, dans la pratique, la mise en œuvre des missions de service public devient presque impossible, dans le contexte de la seconde vague de révision générale des politiques publiques, qui permet donc, insidieusement, de venir justifier leur future privatisation.

Les réformes destructrices s’enchaînent les unes aux autres, accompagnant la RGPP. La loi « mobilité et parcours professionnels », adoptée en août 2009, est l’illustration concrète de la perte de la garantie de l’emploi pour les fonctionnaires. Le 16 novembre dernier, le Journal officiel publiait le décret permettant, soit de mettre en disponibilité – c’est-à-dire sans salaire –, soit de licencier un agent qui, dans le cadre de la suppression de son poste, refuserait par trois fois les propositions d’emploi de l’administration. C’est chose faite !

Voici un principe consacré alors que l’ensemble des agents souffrent de la dégradation de leurs conditions de travail.

Or cette politique, la vôtre, qui a pour but affiché de redonner de la lisibilité et de l’efficacité à l’administration nous montre d’elle-même ses limites ! À force de vouloir réduire les dépenses publiques, elles augmentent !

Ainsi, on ne pourrait passer sous silence le dérapage des dépenses salariales de l’État, pour lesquelles la commission des finances de notre assemblée a dû émettre un avis favorable, le 24 novembre dernier, assorti de fortes réserves certes, sur un décret d’avance transmis par le Gouvernement pour...ouvrir « en urgence » 1, 14 milliard d’euros de crédits de paiement dont « 930 millions destinés à couvrir les dépenses de personnel » ! Ce dérapage proviendrait « de départs en retraite inférieurs aux anticipations, mais aussi de surcoûts associés à des mesures catégorielles dont la multiplicité conduit à douter de la consistance réelle des efforts de maîtrise de la masse salariale de l’État », toujours aux dires de la commission.

Gouverner c’est prévoir ! Franchement, que penser de cette politique qui déstructure la fonction publique et aboutit aux résultats exactement inverses des objectifs qu’elle poursuit ? Quelle lisibilité avons-nous de la masse salariale des fonctionnaires d’État ?

Monsieur Tron, vous avez précisé, lors de l’audition en commission, qu’il faudrait donner une plus grande publicité à une nouvelle « découverte » : 20 300 emplois de plus – probablement cachés dans les tiroirs des ministères – que ceux habituellement comptés pour le ministère de l’éducation nationale, qu’il a bien fallu rémunérer sur l’année 2010. Dans ce nombre figurent 2 900 enseignants vacataires recrutés pour assurer des remplacements, le volant de professeurs remplaçants ayant disparu puisque les titulaires ne sont pas remplacés, à raison d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite !

J’en reviens au projet de loi de finances : pas plus que l’an dernier, il n’est porteur d’une action significative pour la fonction publique. Il s’enferre dans des objectifs comptables dont les écueils ont pourtant été relevés tant par la Cour des comptes que par le principe de réalité que je viens de vous rappeler.

Nulle part dans ce programme ne sont évoqués les enjeux auxquels doivent faire face l’État et son administration : redéfinir les besoins en termes de services publics, accompagner les fonctionnaires dans leur formation, leur mobilité, leur pouvoir d’achat ou leur retraite. On s’intéresse aux chiffres et on oublie le facteur humain.

Comment ne pas remarquer la baisse de près de 10 % des crédits alloués à la formation des fonctionnaires ? J’avais déjà souligné devant vous, l’an dernier, qu’en 2008, seuls 868 agents avaient été concernés lors de la mise en place du droit individuel à la formation, le DIF. Cette année encore, le DIF n’est pas mis en œuvre dans la plupart des administrations et il n’est pas donné suite aux demandes des agents. Les lois de 2007 relatives à la modernisation de la fonction publique et à la fonction publique territoriale n’ont, dans les faits, entraîné aucune amélioration de la formation des agents, alors même qu’on exige d’eux davantage de mobilité, plus d’adaptation à de nouvelles tâches.

Une telle politique nie le travail parlementaire et les véritables besoins de réforme dans la fonction publique ! « Réforme », pourtant, le Gouvernement n’a que ce mot à la bouche pour présenter sa politique concernant la fonction publique.

Après les 33 700 suppressions d’emplois équivalents temps plein annoncées en 2010, ce sont encore plus de 31 600 suppressions qui devraient être effectuées l’année prochaine. De plus, selon le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011à 2014, de nouvelles coupes claires sont prévues.

Or cette politique ne fonctionne pas. Le nombre de contractuels ne cesse d’augmenter, et je ne parle pas seulement des 2 900 remplaçants de l’éducation nationale réapparus ! On assiste à un recours à l’intérim et à des remplacements temporaires de fonctionnaires par des contractuels, sur des emplois permanents, portant le taux de contractuels à près de 15 % dans la fonction publique d’État.

En outre, parmi les mesures prévues par le Gouvernement pour soutenir le pouvoir d’achat des fonctionnaires, quasiment aucune n’est générale. Le point d’indice, qui n’a progressé que de 0, 5 % cette année, …

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