Intervention de Georges Tron

Réunion du 3 décembre 2010 à 21h45
Loi de finances pour 2011 — Compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l'état

Georges Tron, secrétaire d'État auprès du ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, chargé de la fonction publique :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, ainsi que François Baroin vient de l’indiquer, j’apporterai, pour ma part, quelques éléments de réponse complémentaires aux questions ayant plus précisément trait à la fonction publique. Je me permettrai d’agrémenter au passage de quelques remarques les propos des orateurs.

Mme Gourault a souligné à juste titre que, concernant le contrôle des ETPT, il était bienvenu d’appliquer aux opérateurs les mêmes règles que celles qui ont cours depuis quelques années s’agissant des administrations centrales. Cela correspondait à une demande plusieurs fois réitérée.

Il est vrai que la règle s’applique, me semble-t-il, depuis la loi de finances 2009. Cela étant, il est non moins vrai que l’on pourrait aller plus loin. Pour ce qui est des opérateurs, qui disposent de 270 000 à 280 000 ETPT, le contrôle mériterait sans doute d’être renforcé dans la mesure où l’on a constaté qu’ils étaient devenus, ces dernières années, les principaux réceptacles d’emplois qui, au sein de l’administration centrale, étaient présentés comme en diminution. Je tiens à insister sur cet aspect, notamment auprès de M. Mahéas : nous avions effectivement constaté des transferts entre les administrations centrales et les opérateurs. Instaurer une règle commune à ceux-ci et à ceux-là va évidemment dans le bon sens.

S’agissant de la formation, je répondrai à Mme Gourault en même temps qu’à plusieurs autres orateurs qui ont soulevé les mêmes interrogations qu’elle.

Vous l’avez noté, le budget dédié à la formation est en légère diminution. Cette évolution est simplement liée à l’application de nouvelles règles de gestion, plus rigoureuses. Cela dit, ce poste budgétaire s’élève encore à 82 millions d’euros, ce qui reste considérable ! En réalité, les économies réalisées sur le fonctionnement de l’ENA et sur les IRA, reposent surtout sur la diminution du nombre d’ETPT : de cinq pour chaque IRA et de douze pour l’ENA.

Par ailleurs, les économies réalisées du fait du raccourcissement de la scolarité – elle passe de vingt-sept à vingt-quatre mois – permettent une légère diminution du budget de l’ENA. Ces mesures ne relèvent donc de rien d’autre que d’une rationalisation de la gestion.

On peut se réjouir que le fameux contrat d’objectifs, que nous avions si souvent réclamé, soit aujourd’hui, enfin, opérationnel. À ce titre, je tiens à souligner, à la suite du ministre du budget et des comptes publics, que nous avons désormais la possibilité d’apprécier le coût de la participation aux frais de logement des élèves de l’ENA.

Par ailleurs, dans la droite ligne du rapport de M. Le Bris sur la formation des agents de l’État, des dispositifs d’individualisation et de professionnalisation de la formation sont mises en œuvre à l’ENA. C’est à une réforme véritablement globale de l’École que nous procédons. Sur le même sujet, la Haute Assemblée pourra – dans trois semaines, je crois – discuter de la modification du classement de sortie de l’École, qui n’est pas une question anodine.

Concernant la mobilité, madame Gourault, vous avez, à mon avis fort justement, appelé de vos vœux une évaluation de l’ensemble des dispositifs issus de la loi du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

Nous savons que certains dispositifs fonctionnent bien, d’autres, moins bien.

Ainsi, le prêt mobilité est manifestement une possibilité que peu d’agents de l’État exploitent. Il existe plusieurs raisons à cela. Tout d’abord, ce prêt souffre sans doute d’un manque de notoriété. En outre, il est concurrencé par d’autres dispositifs qui, eux, marchent bien, telle l’aide à l’installation des fonctionnaires, également prévue dans la loi de 2009. Dans le cadre du CIAS, le comité interministériel consultatif d’action sociale, qui se réunira le 7 décembre prochain, nous demanderons aux organisations syndicales de formuler des propositions à ce sujet.

En ce qui concerne l’aide ménagère à domicile, nous avons constaté que son mode d’attribution ne profitait, en réalité, pas à celles et ceux qui sont dans les situations financières les plus difficiles. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de revoir le dispositif. Au lieu d’agir unilatéralement, il a donc été demandé aux membres du CIAS, où les organisations syndicales sont représentées, de faire des propositions très précises permettant de « repyramider » l’aide, de manière qu’elle soit attribuée à des familles qui sont véritablement en situation de difficulté. D’ici à quelques semaines, nous devrions disposer de ces éléments de réflexion qui, bien entendu, seront étudiés et suivis d’effet avec le plus de vélocité possible.

En ce qui concerne les non-titulaires, au sujet desquels M. Jacques Gautier m’a également interrogé, je voudrais indiquer que la démarche du gouvernement actuel est d’éviter le recours abusif à leur embauche dans la fonction publique. Le 25 janvier dernier, le Président de la République a appelé de ses vœux l’ouverture d’un vaste débat sur cette question. C’est la raison pour laquelle Éric Woerth et moi-même avons, il y a quelques mois, reçu les organisations syndicales et lancé le chantier de la réforme du statut des non-titulaires. Après la concertation avec les organisations syndicales, nous ouvrirons des négociations qui devraient aboutir – c’est en tout cas l’espoir nourri par le Gouvernement – à la conclusion d’un accord.

En réalité, il ne s’agit pas là, madame Gourault, d’un plan de titularisation, qui serait le dix-septième depuis 1950. Il s’agit plutôt d’identifier très nettement les différentes poches de précarité dans le statut des non-titulaires, afin de pouvoir les corriger. En particulier, au regard de la loi de 2005, il est tout à fait clair que certains agents conservent parfois le statut de non-titulaire alors même qu’ils pourraient légitimement revendiquer la requalification de leur CDD en CDI, voire une titularisation. C’est donc sur l’identification de ces situations abusives que le Gouvernement a décidé de focaliser ses travaux.

Plusieurs phases rythmeront les négociations que nous ouvrirons bientôt avec les organisations syndicales. La première visera à identifier les situations justifiant le recours aux non-titulaires. La deuxième phase ciblera les moyens de garantir aux non-titulaires la signature d’un CDI ou la titularisation. La troisième phase permettra de s’interroger sur la façon de définir, pour les non-titulaires sur le point de signer un CDI ou d’être titularisés, un plan de développement de carrière qui corresponde à leurs aspirations.

Monsieur Gautier, je vous indique que les budgets de la formation et de l’aide sociale interministérielle sont maintenus et que leur évolution suivra la trajectoire de ces dernières années, notamment pour ce qui est de l’individualisation des prestations. En réalité, le présent budget est à peu près constant et notre objectif est de corriger les poches d’insatisfaction, comme je viens de le dire à Mme Gourault.

Pour le reste, nous nous efforçons de nous ajuster à une demande qui évolue. Il y a quelques années, les agents de l’État réclamaient des restaurants administratifs ; aujourd’hui, ils demandent des chèques-restaurants. Il y a quelques années encore, ils réclamaient des crèches pour leurs enfants ; aujourd’hui, ils demandent des primes permettant de payer une assistante à domicile.

Nous cherchons donc à moduler la répartition des moyens en fonction de l’évolution des besoins des agents, tout en maintenant un budget constant. Ce n’est pas un budget énorme, mais un budget dont la logique tient compte des réalités constatées.

Vous m’avez également interrogé, monsieur Gautier, sur la réduction des effectifs au regard de la masse salariale. M. Mahéas, fin connaisseur du sujet, m’a posé, sur le même sujet, une question à la tonalité sensiblement différente, laissant entendre que le Gouvernement avait la volonté de baisser les rémunérations des fonctionnaires. Or chacun constate, y compris M. Mahéas, l’augmentation de près de 1 milliard d’euros de la masse salariale de la fonction publique. Comment peut-il prétendre que le Gouvernement se montre très dur envers la fonction publique et, en même temps, relever cette augmentation de 1 milliard d’euros, alors même que les effectifs diminuent !

J’ajoute que nous sommes aujourd’hui en mesure d’identifier très précisément une tendance indiscutable, sur laquelle je reviens avec constance, quelles que soient les circonstances dans lesquelles je parle : depuis 2000, la rémunération moyenne des personnes en place, la RMPP, augmente d’au moins 0, 6 % chaque année. Ce fut même le cas en 2003, où il n’y a pas eu d’augmentation du point d’indice.

Ainsi, même en année « blanche » au regard du point d’indice, l’augmentation de la RMPP est supérieure à 0, 6 %, atteignant parfois 3, 6 % ou 3, 7 %. C’est la conséquence de la mise en place de la garantie individuelle du pouvoir d’achat des fonctionnaires, la GIPA, dont le but est précisément de faire en sorte que l’inflation ne pénalise le niveau de rémunération réelle d’aucun agent de l’État.

Environ 140 000 personnes bénéficient chaque année de la GIPA, dont le montant individuel moyen s’élève à environ 1 000 euros. Le dispositif global se chiffre donc à 140 millions d’euros, inscrits sur le budget de l’État. La situation est semblable s’agissant du glissement vieillesse-technicité – le GVT – et des mesures catégorielles ; j’y reviendrai dans quelques instants.

Je m’empresse de dire que les mesures catégorielles sont en grande partie financées par le retour du « un sur deux ». On pourra en dire tout ce qu’on veut, moi, je constate que ce non-remplacement permet d’économiser près de 1 milliard d’euros par an. Seule la moitié de ce montant – 450 millions d’euros – devrait théoriquement être reversée au titre des mesures catégorielles. En réalité, le Gouvernement va bien au-delà, car il y a de vraies réformes qui sont structurellement financées par le retour du « un sur deux ».

C’est en particulier le cas dans l’éducation nationale. François Baroin et moi-même avons reçu récemment Mme Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU, et nous nous sommes permis de lui rappeler que les 200 millions d’euros dédiés à la mise en œuvre de la mastérisation étaient autorisés par le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, tout comme la prime versée aux proviseurs, ainsi que l’aide à l’installation des professeurs dans leur premier poste.

Par conséquent, à moins d’être aveugle aux efforts consentis par le Gouvernement en faveur de la fonction publique, on ne peut pas nous reprocher d’être chiches avec elle !

S’agissant des mesures salariales qui sont prises dans les collectivités territoriales, le Gouvernement se doit évidemment de respecter le principe constitutionnel de la libre administration de ces dernières. C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas nous y opposer de façon coercitive.

En revanche, il est vrai que le budget consacré aux collectivités territoriales – sous la forme de divers concours – s’élève à plus de 50 milliards d’euros et qu’une telle somme justifie que l’État puisse parfois se permettre de leur demander de participer à l’effort national de redressement des comptes publics. Il convient de trouver un juste équilibre…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion