Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il me revient, au nom de la commission des finances, de vous présenter les crédits pour 2011 de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte spécial « Pensions ».
Avant d’entrer dans le détail, dans le contexte actuel du débat qui agite notre pays sur la réforme des retraites, je souhaite, à titre liminaire et personnel, exprimer mon désaccord profond sur les points fondamentaux de la loi portant réforme des retraites, à savoir le recul de 60 à 62 ans de l’âge d’ouverture des droits et de 65 à 67 ans de l’âge permettant de percevoir une retraite à taux plein.
Cette loi présente également des mesures très insuffisantes sur la pénibilité. Elle pénalise les carrières longues, c’est-à-dire ceux qui commencent à travailler très jeunes, et les carrières incomplètes, en particulier celles des femmes.
Par ailleurs, toujours sur le sujet de la réforme des retraites, j’ai présenté, le 29 septembre dernier, un premier bilan de la réforme de 2008 du régime spécial de retraite de la SNCF. Voici les principaux constats que j’ai pu effectuer.
Cette réforme des régimes spéciaux a opéré un transfert de charge substantiel des régimes de retraite, dorénavant autonomes, vers les entreprises, la SNCF et la RATP.
L’augmentation des charges salariales de la SNCF entraîne un surcoût pour les régions des conventions de transport express régional – environ 2 millions d’euros par région et 24 millions d’euros pour la région parisienne.
L’adossement du régime de retraite de la RATP est annoncé depuis 2007, mais n’est toujours pas réalisé. Je demanderai donc à M. le ministre de nous expliquer les raisons de ce retard.
Je reprends maintenant mes fonctions de rapporteur spécial de la commission des finances.
Pour 2011, le coût global du compte spécial « Pensions » s’élèvera à 52, 6 milliards d'euros, contre 51, 12 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2010.
J’ai noté que le projet de loi de finances anticipait l’application de la réforme des retraites en augmentant dès 2011 de 0, 27 point le taux de cotisation de 7, 85 % applicable aux fonctionnaires, dans la perspective de la convergence vers le taux de droit commun de 10, 55 %.
Or, malgré cette augmentation des recettes, le compte spécial « Pensions » est présenté en déficit de recettes de 200 millions d’euros, soit 0, 4 % du total, qui sera comblé par la mobilisation à due concurrence du fonds de roulement de 1 milliard d’euros qui lui est affecté.
S’agissant maintenant de la mission « Régimes sociaux et de retraite », je précise que le motif qui a présidé à la création d’une telle mission budgétaire est de regrouper le financement d’un ensemble de régimes spéciaux de retraite en déclin démographique pour lesquels la nation exprime sa solidarité en apportant une subvention d’équilibre. Pour 2010, la contribution de l’État s’élèvera à 6, 03 milliards d’euros, soit une progression de 5, 4 %, contre 5, 72 milliards d’euros en 2010. Ce budget soutient les régimes sociaux et de retraite de près de 800 000 pensionnés pour moins de 250 000 cotisants.
Je ferai une observation de principe sur le périmètre de la mission « Régimes sociaux et de retraite », car j’ai identifié un certain nombre de régimes spéciaux qui sont subventionnés par l’État en dehors de la présente mission.
Il s’agit notamment des caisses de retraite de la Comédie-Française et de l’Opéra de Paris. Outre les 17 millions d’euros attribués à ces deux établissements sur les crédits de la mission « Culture », quelque 675 millions d’euros de prestations sociales et de retraite, issus de la mission « Écologie, développement et aménagement durable », financent l’après-crise des mines – Charbonnages de France, houillères, mines de fer, ardoisières, etc. – et les retraites des anciens électriciens et gaziers d’Algérie, du Maroc et de Tunisie.
Afin d’améliorer la lisibilité d’ensemble de la contribution de l’État aux régimes spéciaux, je propose que le rattachement à la mission « Régimes sociaux et de retraite » du financement de ces régimes soit mis à l’étude pour l’élaboration des prochains budgets.
Avant de conclure cette intervention, je souhaite dire un mot de la décristallisation des pensions civiles et militaires des anciens combattants ressortissants de pays autrefois colonies ou protectorats de la France.
L’article 100 du présent projet de loi répond à une longue attente de ces anciens combattants pour bénéficier de pensions équivalentes à celles de leurs frères d’armes français.
À la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui a institué la procédure de question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a rendu sa première décision le 28 mai 2010 et a considéré comme « contraires au principe d’égalité » les dispositions légales instituant la cristallisation des pensions de ces anciens combattants.
À l’article 100 du projet de loi de finances pour 2011, il est proposé au législateur de remédier à cette inconstitutionnalité en alignant les droits à pensions, quelle que soit la nationalité du bénéficiaire. Le coût de cette mesure, dont l’entrée en vigueur est prévue au 1er janvier prochain, serait de 150 millions d’euros en année pleine. Pour 2011, le Gouvernement estime que cette charge serait limitée à 82 millions d’euros du fait de la montée en charge progressive des demandes de reconstitution de carrière par les intéressés.
J’appellerai le Gouvernement à la plus grande diligence dans la mise en œuvre de la mesure et dans le traitement des dossiers compte tenu de l’âge élevé des intéressés.
Pour terminer, mes chers collègues, et considérant que le paiement des droits à pension constitue pour l’État une obligation, je vous propose, au nom de la commission des finances et sous le bénéfice de mes observations, d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale « Pensions » et de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».