Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la crise qui est apparue aux États-Unis pendant l’été 2007 – crise financière, crise de confiance, crise de la titrisation, crise de la liquidité, crise de la mondialisation – ne cesse de plonger des cohortes de salariés dans le chômage. Bien sûr, elle interpelle directement le Parlement.
Le groupe de travail Assemblée nationale-Sénat est un objet nouveau dans l’univers parlementaire. C’est sur votre initiative, monsieur le président, ainsi que sur celle de votre homologue Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, qu’il a été constitué : douze sénateurs et douze députés, douze parlementaires de la majorité et douze parlementaires de l’opposition. Il compte quatre rapporteurs : Gilles Carrez et Nicolas Perruchot pour l’Assemblée nationale ; Philippe Marini et Bernard Angels pour le Sénat.
Ensemble, sur la base de nos expériences personnelles et des travaux menés dans chaque assemblée, nous essayons de conduire une réflexion sur la crise financière en cours et d’apporter une vision parlementaire sur la refondation de la finance mondiale. C’est ainsi que nous avons pu transmettre des notes au Président de la République avant les réunions du G20 à Washington, le 15 novembre 2008, et à Londres, le 2 avril 2009. Le Président nous a également reçus, le 15 avril dernier, pour nous rendre compte de cette dernière réunion.
Cette méthode, convenons-en originale, s’est révélée jusqu’à présent plutôt fructueuse et, sans que l’on puisse pour autant parler de consensus, a permis, en ce qui concerne tant le diagnostic que les préconisations, des rapprochements et des convergences qui n’étaient pas forcément attendus lors de la création du groupe.
Je laisserai à Philippe Marini et à Nicole Bricq, en remplacement de Bernard Angels, le soin de dresser le bilan de nos réflexions et de donner notre point de vue sur les suites du dernier G20. Pour ma part, je commencerai mon intervention par un bref compte rendu de la mission que vient d’effectuer aux États Unis le bureau de la commission des finances. Ce propos liminaire sur le pays où est née la crise, le pays qui détient aussi une partie des réponses à cette crise, me donnera l’occasion de vous livrer certains constats auxquels j’accorde une importance toute particulière.
Au cours de la semaine écoulée, nous avons rencontré les principaux responsables du Fonds monétaire international, du Congrès, des institutions monétaires et financières américaines ainsi que plusieurs banquiers, dirigeants d’entreprises et responsables de hedge funds. Qu’en avons-nous retenu ? Essentiellement un constat et deux interrogations.
Le constat est simple. La crise actuelle, la plus grave depuis la grande dépression des années 1930, puise certes son origine dans le surendettement des ménages américains et l’incapacité où se sont trouvés nombre d’entre eux à faire face à leurs obligations de remboursement d’emprunts. Il n’en demeure pas moins qu’elle a servi de révélateur et a mis en exergue l’incroyable fragilité du secteur financier, caractérisé notamment par le développement considérable, et aussi largement anarchique, des produits dérivés depuis les années 1970.
Le président de la Réserve fédérale américaine, Ben Bernanke, considérait récemment que l’innovation financière a amélioré l’accès au crédit et réduit les coûts, au point qu’il paraît inenvisageable de revenir trente ans en arrière. Soit ! Mais nous allons devoir faire face dans l’immédiat à deux difficultés majeures, qui correspondent à mes deux interrogations.
Première question : les États-Unis, qui restent la première économie du monde, mettront-ils effectivement en place des mécanismes de régulation et de supervision qui seront à la hauteur de leurs responsabilités dans le fonctionnement du système financier international ?
Seconde question : dans un contexte où c’est en pratique la Réserve fédérale qui assume de plus en plus le risque systémique en intégrant certains actifs douteux dans son bilan et en se comportant finalement comme une banque, …