Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 3 novembre 2009 à 14h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Discussion générale

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je concentrerai mon intervention sur le « défi du maintien de la présence postale », selon les termes mêmes de l’étude d’impact sur ce projet de loi.

Le Gouvernement se trouve en effet dans une situation paradoxale : comment faire croire que la présence postale va se trouver renforcée alors même que la transformation de La Poste en société anonyme va la contraindre à une plus grande rentabilité économique, indépendamment de son utilité sociale ?

Rappelons qu’un bureau de poste n’est pas forcément rentable, il est avant tout utile. À l’aune de la seule rentabilité, ce sont donc des milliers de bureaux qui seraient voués à la disparition. À ce titre, la présence postale dans les territoires ruraux a déjà reculé depuis plusieurs années, les obligations de La Poste en termes d’aménagement du territoire s’étant trouvées allégées par les lois successives et les contrats de service public qui préparent l’ouverture à la concurrence.

Un rapport de la Commission européenne au Conseil soulignait déjà en 2006 que « l’accès aux services postaux dans les régions isolées risquait de pâtir » de la mise en œuvre des directives de libéralisation.

Il ne s’agit donc pas d’une inquiétude nouvelle pour les élus et les citoyens, qui vous interpellent régulièrement sur cette question. J’ai moi-même, dans mon département, la Meurthe-et-Moselle, été sollicitée par de nombreuses communes et autres collectifs de défense qui ne supportent plus la lente agonie de leurs services postaux.

Bien avant que la réforme ne soit annoncée, tout était déjà mis en œuvre pour tuer à petit feu les agences locales dites « non rentables » et inciter les usagers à se rendre dans des centres plus importants. Ainsi, à Onville et à Leyr, la réduction de l’amplitude horaire d’ouverture des bureaux se poursuit, posant le problème de l’accessibilité des usagers, renvoyés vers d’autres bureaux de poste. À Leyr, la prise d’activité des facteurs a été transférée au centre voisin, situé à vingt kilomètres du périmètre de leurs tournées ! À Onville, l’unique agent du guichet n’est remplacé que de façon aléatoire lors de ses absences. Les usagers sont avertis le jour même, par un écriteau sur la porte, de la fermeture ou, le cas échéant, des horaires du jour ! À cela, La Poste répond que les clients peuvent, désormais, traiter la plupart de leurs opérations sur internet ! C’est oublier que, souvent, ces personnes sont aussi confrontées à l’isolement en termes de réseaux de télécommunication. Je pense particulièrement aux personnes âgées.

Comment ne pas s’émouvoir, alors, des conclusions de la commission Ailleret, qui souhaite que les surcoûts liés aux missions de service public, notamment en termes d’aménagement du territoire, diminuent, pour arriver à l’équilibre.

Si l’État maintient sa participation au capital, parallèlement, il se désengage du financement des missions de service public, au titre desquelles il doit un milliard d’euros à La Poste. La priorité est donc le remboursement des charges indues.

En outre, le changement de statut fait peser un risque sur ces missions, qu’il s’agisse de l’accessibilité bancaire, de la distribution de la presse, du service universel postal et de l’aménagement du territoire. Vous nous direz que celles-ci sont confortées par la loi, monsieur le ministre. Mais comment faire sans financement ?

L’article 2 bis affirme vouloir graver dans la loi la présence de plus de 17 000 points de contact. Mais de quoi parlons-nous ? Depuis que le processus de libéralisation est entamé, le nombre de bureaux de plein exercice a chuté, passant de 14 147 en 1999 à 11 422 au terme de l’année 2008. Parallèlement, le nombre d’agences postales communales et de relais poste n’a fait qu’augmenter. Pourtant, on ne fait pas les mêmes choses dans un simple relais poste ou dans un bureau de plein exercice.

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