Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le Gouvernement présente ce projet de loi dans un contexte particulier. L’inquiétude de la société française est palpable : inquiétude face aux politiques de libéralisation menées tambour battant par votre gouvernement, inquiétude en raison de la précarité montante, inquiétude liée au sentiment de déclassement, inquiétude pour l’avenir de la nouvelle génération, inquiétude pour le devenir du territoire. Ce qui était assuré hier est aujourd’hui susceptible d’être remis en cause à tout moment.
On peut voir dans le délitement du lien social l’émergence de l’individualisme et le recul des solidarités traditionnelles ; pour ma part, j’impute plutôt cette dissolution au libéralisme non tempéré que vous appliquez à tous les pans de notre économie : la généralisation et la banalisation du travail dominical fragilisent les familles ; le paquet fiscal, contesté jusque dans vos rangs, privilégie les plus aisés et reporte la fiscalité sur les ménages de la classe moyenne.
Parallèlement à ces dérégulations qui précarisent chaque jour davantage nos concitoyens, brouillent leurs repères et dégradent leur vie quotidienne, vous menez une politique qui se résume à l’affaiblissement des solidarités collectives issues du programme du Conseil national de la Résistance, que vous détricotez avec constance. Votre cible principale, c’est notre système de protection sociale et le service public. Non seulement le périmètre de ce dernier s’est réduit comme peau de chagrin, mais, là où il est irremplaçable, indispensable, comme dans les domaines de la santé et de l’éducation, vous ne lui donnez plus les moyens d’être un service de qualité.
Pour dissiper ce climat anxiogène et occulter les vraies difficultés sociales et économiques, votre gouvernement nous propose comme remède un débat sur l’identité nationale. Les Français ont bien compris que le tempo était choisi à dessein : il s’agit, d’une part, d’une manœuvre de diversion face aux problèmes quotidiens, notamment la dégradation de l’emploi, et, d’autre part, de visées électoralistes qui ne trompent personne.
Dans ce débat sur l’identité, il apparaîtra sans doute que l’attachement au service public, notamment à La Poste, est l’une des composantes forte de cette identité. Le lien affectif des Français avec La Poste et son personnel excède en effet largement son rôle économique, tant son rôle social est important. Vous avez les yeux rivés sur un tableau de bord, vous contentant de mesurer les performances financières, les coûts et les surcoûts, sans vraiment prendre la mesure de l’attachement de nos concitoyens à leur Poste.
C’est pourquoi la votation citoyenne a rencontré un si fort écho dans la population. Sur ce plan, vous avez commis une erreur d’appréciation, suivie d’une faute : votre erreur d’appréciation est de ne pas avoir anticipé une telle mobilisation ; votre faute est de l’avoir discréditée en l’assimilant à une mascarade et en la dénonçant comme une manipulation.