Néanmoins, je l’ai dit, deux points – les auteurs et l’extraterritorialité – ne font pas l’objet d’un consensus.
Paradoxalement, la ligne de partage se situe non pas entre la droite et la gauche, mais entre l’ensemble des familles politiques du Sénat et, disons-le clairement, le groupe UMP de l’Assemblée nationale, qui porte une appréciation différente de la nôtre sur ces questions. Je ne comprends pas pourquoi ! Non que les députés de l’UMP ne voient pas les problèmes, mais ils pensent que nos solutions pour les résoudre sont dangereuses.
L’Assemblée nationale est en effet revenue sur deux propositions que nous considérons, avec la majorité sénatoriale, comme essentielles. Au risque de voir notre relation avec l’Assemblée nationale devenir conflictuelle, nous estimons nécessaire de les réinscrire dans la proposition de loi, car ces deux dispositions constitueraient une réelle avancée. Leur suppression réduirait la portée novatrice de ce texte et son importance. Il est rare que des dispositions fassent ici, au Sénat, l’objet d’un tel consensus, comme l’a rappelé Mme le rapporteur.
Les députés ont refusé que les dispositions du présent texte puissent s’appliquer aux plateformes de distribution du livre numérique situées en dehors du territoire national. En clair, ni Amazon ni Apple ne seraient concernés par les mesures que nous prenons ensemble alors qu’ils constituent, à l’échelon mondial, les plus gros fournisseurs de contenus numériques.
Autrement dit, si le dispositif que nous proposons ne devait viser que les entreprises françaises, il ne ciblerait qu’une infime partie du secteur. La loi serait caduque dans son principe ! Elle serait même dangereuse, car elle imposerait aux entreprises françaises des contraintes que les autres n’auraient pas ! En fait, il ne faudrait pas légiférer du tout – ce n’est évidemment pas ce que je souhaite – afin que ces entreprises puissent s’adapter et disposer des mêmes armes que leurs concurrents étrangers.
À partir du moment où nous légiférons, nous devons absolument apporter une réponse à cette question afin de ne pas prendre le risque de dégrader la situation des entreprises françaises en voulant bien faire.
Je suis pour le moins surpris par l’argument selon lequel les directives européennes s’opposeraient à une telle extension parce qu’elle constituerait un moyen de porter atteinte au principe de libre concurrence et de créer des entraves protectionnistes.
Je signale pour mémoire que le prix unique du livre a déjà fait l’objet d’attaques dans le passé, de la part des libéraux de tout poil, qui estimaient déjà qu’il constituait un obstacle à la libre concurrence et qu’il était, de ce fait, contraire aux directives européennes.