Monsieur Bel, je vais vous donner la preuve matérielle que le groupe que vous présidez est complètement associé à cette volonté de « pourrir le débat » sur la réforme postale, tout au long de cette semaine. De même, je vais vous démontrer, en répondant à M. Bourquin, que vous vous complaisez à habiller certaines réalités.
Je commencerai par répondre sur le fond, car ce débat sur La Poste le mérite à mes yeux.
Vous affirmez, monsieur Bourquin, que les 2, 7 milliards d'euros pouvaient être apportés à La Poste tout en maintenant le statut d’EPIC. Or vous savez très bien que l’Union européenne interdit un tel apport à un établissement public ! Si nous le faisions, nous serions immédiatement condamnés et La Poste devrait rembourser cette somme au Gouvernement. C'est la raison pour laquelle le seul moyen de conserver le caractère public de La Poste tout en lui apportant 2, 7 milliards d'euros consiste à la transformer en société anonyme à caractère public.
Par ailleurs, vous m’avez annoncé que vous alliez formuler des propositions, mais vous avez surtout parlé de bulle financière et agité le spectre de la privatisation. Le maintien de 17 000 points de contact postaux n’est pas une garantie à vos yeux et vous relevez qu’aujourd'hui la situation de certains bureaux ou agences est précaire – constat sur lequel nous pouvons nous rejoindre –, mais vous n’indiquez pas comment et avec quels moyens nous allons améliorer les choses : vous estimez au contraire qu’il ne faut rien changer, ce qui est pour le moins paradoxal ! Vous nous accusez d’adopter une démarche idéologique et de procéder au « déménagement du territoire », mais vous ne présentez pas la moindre proposition, préférant en rester à des procès d’intention et à une addition de bons sentiments.
Cela étant, alors que le sujet qui nous occupe fait débat depuis des semaines, vous venez enfin de formuler publiquement une suggestion : assurer le financement de La Poste par le biais du grand emprunt. Je prends donc acte de ce que le parti socialiste est favorable à un recours au grand emprunt pour financer La Poste : cela figurera au Journal officiel ! Cependant, que les 2, 7 milliards d'euros proviennent du Gouvernement et de la Caisse des dépôts et consignations ou du grand emprunt, où est la différence ? Cela reste de l’argent public, et nous nous heurterons à l’opposition de l’Union européenne dans les deux hypothèses, car l’État n’a pas le droit d’apporter 2, 7 milliards d’euros à un établissement public !
Telle est la seule proposition que vous ayez faite, après en avoir annoncé de nombreuses ! Entre nous soit dit, elle n’est d’ailleurs pas des plus originales !
Il est vrai que vous proposez également de mener un combat sur le plan européen pour faire accepter que des établissements publics puissent recevoir de l’argent public sans avoir besoin de changer de statut. Comment peut-on suggérer de s’engager dans cette voie alors que l’ouverture à la concurrence interviendra dans moins d’un an ? Compte tenu du temps qu’il faut pour amener les instances européennes à revoir si peu que ce soit leur position, La Poste aura disparu avant que nous ayons obtenu le moindre résultat, absorbée par des concurrents qui auront pu, eux, évoluer pour se renforcer. Cela dit, le fait que l’un de vos amendements prévoie de modifier le statut de La Poste en 2045 montre à quel point vos propositions sont caricaturales !
Je parlerai maintenant une dernière fois de privatisation, ayant déjà donné suffisamment d’explications sur ce point pour ne plus avoir à y revenir ensuite. Désormais, ce qui compte à mes yeux, c’est de débattre de l’avenir de La Poste, de sa modernisation, de la grande entreprise de logistique, leader européen, que nous voulons créer. Il est temps de tourner la page : La Poste ne sera pas privatisée ! Vous pouvez bien brandir ce spectre, cela ne m’intéresse pas ! Ma seule préoccupation est de donner toutes ses chances à La Poste.
Néanmoins, je tiens à réfuter absolument votre argument relatif à l’IRCANTEC, qui ne doit pas inquiéter les salariés. Au mois de juillet dernier, nous avons répondu à leurs attentes en ouvrant les négociations, notamment avec l’AGIRC-ARRCO. Il sera inscrit dans la loi que l’AGIRC-ARRCO versera une soulte à la hauteur des engagements nécessaires pour permettre aux salariés de La Poste de bénéficier du régime de l’IRCANTEC.
Enfin, vous avez fait référence à une boutade d’un conseiller du Président de la République sur le caractère non éternel de toute chose en ce bas monde : ce qu’une loi fait, une autre loi peut le défaire, a-t-il dit.