Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, évoquer l’ensemble des problèmes budgétaires rencontrés par l’outre-mer dans un délai maximal de cinq minutes serait une pure vue de l’esprit ; je me limiterai donc à quelques points essentiels. Cela me sera d’autant plus facile que les rapporteurs spéciaux de la commission des finances se sont déjà penchés sur les aspects financiers et que ce projet de budget présente aux yeux de la commission des lois de nombreux aspects satisfaisants. Certes, tout n’est pas parfait, mais de réels progrès peuvent être notés ; c’est un point de divergence que j’ai avec M. Lise.
Le périmètre de la mission s’est enfin stabilisé, ce que nous demandions depuis longtemps.
Les crédits dévolus à la mission « Outre-mer » sont en augmentation : 6, 4 % en autorisations d’engagement et 6, 3 % en crédits de paiement. L’accroissement des moyens que cela représente est loin d’être négligeable, surtout dans une période difficile où la crise fait encore sentir ses effets.
Mais l’élément le plus important qui caractérise ce budget, au-delà des seuls crédits, se trouve dans la nouvelle approche retenue. Nous assistons, en effet, à une réelle prise de conscience, dont l’objectif affirmé consiste à rénover en profondeur les politiques destinées à l’outre-mer.
La loi pour le développement économique des outre-mer a été adoptée. Les états généraux de l’outre-mer ont été mis en place, ainsi qu’un conseil interministériel de l’outre-mer, dont les récentes décisions, annoncées par le Président de la République lui-même, sont particulièrement audacieuses et prometteuses.
Nous pouvons tous nous féliciter de la volonté de transparence, de concurrence, de vérité des prix, de proximité et de responsabilité qui a ainsi été affirmée. Ces mesures vont donner un coup de fouet salutaire au développement économique et social de l’outre-mer. Faire baisser des prix anormalement élevés, améliorer les circuits de distribution, favoriser la production locale à qualité et à coût compétitifs, inciter au développement de grands projets structurants, rénover le dialogue social, comme soutenir une plus grande insertion des départements et des collectivités ultramarines dans leur environnement régional : de telles actions ne pourront qu’entraîner des avancées substantielles, créatrices d’emplois et améliorant le niveau de vie.
En définitive, avec la position nouvelle prise par le Gouvernement et le Président de la République, on assiste au passage d’une logique de rattrapage par rapport à la métropole à une logique de valorisation des atouts de l’outre-mer. Cette nouvelle vision comme la nature repensée de l’effort de l’État doivent être considérées comme la reconnaissance explicite de la richesse que représente l’outre-mer pour la République.
Or, nous le savons bien, toute richesse, pour perdurer, doit non seulement être entretenue, mais également valorisée. C’est pourquoi, madame la ministre, mes chers collègues, tout doit être mis en œuvre pour le plus grand succès de cette nouvelle politique. Aussi est-il essentiel de lever toutes les entraves qui bloquent encore cette marche en avant.
Par exemple, il serait grand temps de finaliser et de publier l’ensemble des décrets nécessaires à l’application pleine et entière de la LODEOM. Il serait aussi particulièrement utile de donner une dimension plus large à la continuité territoriale, à laquelle le Gouvernement est attaché, nous le savons. Celle-ci doit pouvoir couvrir l’ensemble des aspects de la vie quotidienne pour prendre tout son sens. Pourquoi, par exemple, faut-il encore aujourd’hui près de dix jours pour envoyer une simple lettre dans des territoires d’outre-mer, qui sont pourtant desservis pratiquement tous les jours par des avions en provenance de Paris ? Même en comptant vingt-quatre heures de voyage, cela représente tout de même huit jours de plus que pour Toulouse, Nancy ou Marseille !
De même, l’optimisation de l’organisation institutionnelle des collectivités et des départements mérite toute l’attention de l’État. La prochaine consultation populaire en Martinique et en Guyane va dans ce sens, et l’on peut s’en réjouir. De nombreuses questions restent toutefois encore en suspens, en particulier l’état civil de Mayotte, qui est un élément incontournable de la départementalisation, les ressources financières des communes de Polynésie pour davantage de responsabilité et de proximité, ou l’organisation institutionnelle de Wallis-et-Futuna, qui n’est pas encore conforme à la révision constitutionnelle de 2003, sans parler de l’immense source de connaissances sur notre planète qui mérite d’être explorée au sein des Terres australes et antarctiques françaises.
Quoi qu’il en soit, les orientations fixées par le conseil interministériel de l’outre-mer à la suite des états généraux vont dans la bonne direction, madame la ministre. Elles reprennent d’ailleurs, pour une large part, les mesures préconisées par la mission commune d’information du Sénat, présidée par notre collègue Serge Larcher et dont le rapporteur est notre collègue Éric Doligé.
Nous pouvons ainsi nous féliciter de voir reconnues non seulement la qualité des travaux de notre Haute Assemblée, mais également sa clairvoyance concernant l’avenir. Je puis vous assurer, madame la ministre, que nous serons vigilants quant à la mise en œuvre concrète de ces mesures auxquelles nous sommes très attachés.
Comme l’a fort justement écrit dans son livre Un pouvoir nommé désir la journaliste Catherine Nay : « Dans toute vie, il existe un moment où une porte s’ouvre pour laisser entrer l’avenir ». Eh bien ! madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pour l’outre-mer, cette porte vient de s’ouvrir ! C’est pourquoi la commission des lois vous recommande de voter les crédits de la mission « Outre-mer ».