Intervention de Jean-Claude Frécon

Réunion du 26 novembre 2009 à 22h00
Loi de finances pour 2010 — Conseil et contrôle de l'état

Photo de Jean-Claude FréconJean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Conseil et contrôle de l’État » présente, depuis l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances, une architecture inchangée, avec trois programmes : « Conseil d’État et autres juridictions administratives », « Cour des comptes et autres juridictions financières » et « Conseil économique, social et environnemental ».

Cette mission s’appuie sur une enveloppe budgétaire totale de 569, 9 millions d’euros, consacrée à hauteur de 56, 4 % à la justice administrative, les juridictions financières représentant 37 % de ces crédits et le Conseil économique, social et environnemental, « seulement » 6, 6 %.

Le programme « Conseil d’État et autres juridictions administratives » comporte 322 millions d’euros de crédits de paiement, soit un budget en progression de 5, 7 % par rapport à 2009. Dans le contexte budgétaire tendu que nous connaissons, cette progression confirme l’importance attachée aux moyens de la justice administrative. Les tribunaux administratifs bénéficient tout particulièrement de cette hausse et voient leurs crédits croître de 8, 7 %. L’effort budgétaire porte également sur les effectifs des juridictions, puisque 53 emplois en équivalent temps plein travaillé sont créés en 2010, dont 20 postes de magistrat et 30 de greffier.

Depuis plusieurs années, l’un des enjeux de ce programme réside dans la réduction des délais de jugement. À cet égard, le cas de la région d’Île-de-France est particulièrement sensible. Ainsi, en 2008, les tribunaux administratifs de la région parisienne ont enregistré, à eux seuls, 32 % du total des nouvelles affaires introduites devant les juridictions de première instance.

Outre le renforcement des effectifs permis par la loi d’orientation et de programmation pour la justice, une autre décision forte a été prise : la création d’un nouveau tribunal administratif en région parisienne. Installé depuis le 1er septembre 2009 à Montreuil-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, ce tribunal devrait contribuer au désengorgement des juridictions parisiennes.

Intégrée au programme depuis le 1er janvier 2009, la Cour nationale du droit d’asile s’est, elle aussi, engagée dans une démarche volontariste de diminution de ses délais de jugement. La CNDA s’appuie pour ce faire sur une réorganisation de son fonctionnement, une amélioration de ses procédures d’instruction et de déroulement des audiences, ainsi que sur un renforcement de ses effectifs, avec notamment 10 magistrats affectés à temps plein depuis le 1er septembre dernier.

Il va de soi que les efforts budgétaires consentis en faveur de ce programme imposent, en retour, une amélioration notable des délais de traitement des contentieux. De ce point de vue, l’objectif fixé par la loi d’orientation et de programmation pour la justice de ramener ces délais à un an n’est pas encore atteint, sauf pour le Conseil d’État, mais il ne me paraît pas non plus hors de portée.

Le programme « Conseil économique, social et environnemental » disposera en 2010 d’un budget de 37, 5 millions d’euros, en progression de seulement 0, 6 million d’euros, soit une hausse de 1, 63 % par rapport à 2009.

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de la discussion budgétaire de l’an dernier, mais aussi à l’occasion de la présentation des conclusions de ma récente mission de contrôle sur cette institution, le Conseil économique, social et environnemental se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins et s’engage dans une étape clef de son histoire. La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a étendu ses compétences au domaine environnemental et ouvert une possibilité de saisine par voie de pétition ainsi que de consultation sur les projets de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des finances publiques. Le Parlement peut désormais également consulter le Conseil sur tout problème à caractère économique, social ou environnemental.

Dans l’attente de la prochaine réforme du Conseil économique, social et environnemental, qui devrait intervenir dans les mois à venir – c’est la raison pour laquelle le mandat des conseillers a été prorogé d’un an par la loi organique du 3 août 2009 –, il faut rappeler une nouvelle fois que l’évolution de cette institution devra intervenir à « budget presque constant ». On ne peut d’ailleurs que se réjouir du consensus régnant sur cette question.

Seul restera ensuite à traiter le problème du financement de la caisse de retraites du Conseil, dont l’équilibre fragile pourrait être remis en cause par l’inévitable rajeunissement et la féminisation qui résulteront de la réforme et des nouvelles nominations.

Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » est doté de 210, 7 millions d’euros en crédits de paiement, en progression de 1, 5 % par rapport à 2009.

Mais ce chiffre est trompeur, car les dépenses de fonctionnement augmentent de 9, 6 % du fait, notamment, de dépenses de loyers budgétaires. Pour sa part, l’enveloppe consacrée à l’investissement est pratiquement divisée par deux pour les crédits de paiement et par trois pour les autorisations d’engagement.

Cette réduction très significative des crédits d’investissement s’explique notamment par la fin des travaux de rénovation de la tour des archives, devenue « tour Chicago », située rue Cambon, sur le site même de la Cour des comptes.

Caractérisé par une quasi-stabilité de ses effectifs, à 1 841 équivalents temps plein travaillé, le programme présente une originalité, du fait de la politique de recrutement d’« experts extérieurs à la Cour des comptes ».

Ces « experts », au nombre de 45 et recrutés par contrat pour une durée de trois ans, contribuent aux missions de certification des comptes de l’État et de la sécurité sociale. Ils donnent pleinement satisfaction aux autorités de la Cour et, en particulier, à son Premier président, dans la mesure où ils permettent de diffuser au sein de cette juridiction les techniques les plus modernes du métier de l’audit.

Bien évidemment, il est encore difficile d’évaluer, dans le cadre de ce programme, l’impact financier de la réforme des juridictions financières qui se profile à l’horizon. On peut toutefois penser que cette réforme présentera un coût d’adaptation et de structure qui pourrait, sur une échéance d’une dizaine d’années, être compensé par une réduction des effectifs de l’ordre d’une centaine d’équivalents temps plein travaillé.

Il faut, enfin, mettre l’accent sur la reconnaissance internationale que nos juridictions financières se sont acquise pour leur capacité d’expertise. Je souhaite ainsi rappeler que la Cour des comptes mène plusieurs missions de commissaire aux comptes auprès d’organismes internationaux tels que l’ONU, l’OTAN, l’UNESCO, INTERPOL, l’OMC, et bien d’autres encore.

En conclusion, et sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances propose au Sénat l’adoption des crédits de la mission et de chacun de ses trois programmes.

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