Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cinq minutes, c’est bien court pour évoquer un problème aussi dramatique que celui de la drogue, au travers des crédits de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie, qui constitue une action du programme « Coordination du travail gouvernemental ». La commission des affaires sociales a été saisie pour avis de ce budget que je vais m’efforcer de vous détailler.
Avec 29, 8 millions d’euros de crédits, la MILDT ne s’occupe en fait directement que d’une infime partie de la lutte contre la drogue et la toxicomanie. Elle est cependant au cœur de cette politique, car elle assure le pilotage du plan gouvernemental 2008-2011.
Dans le cadre de la loi de finances rectificative de 2008, la commission des affaires sociales avait demandé à ce qu’un document de politique transversale soit élaboré. Celui-ci a été présenté pour la première fois cette année et il nous permet d’avoir une vision globale des sommes consacrées par l’État à la lutte contre les drogues.
Le total s’élèverait, pour 2010, à près de 931 millions d’euros. Si l’on y ajoute les sommes attribuées à la prise en charge sanitaire et sociale au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit environ 267 millions d’euros, on arrive à une enveloppe de près de 1, 2 milliard d’euros pour l’année prochaine.
Cette somme ne me paraît pas excessive face aux addictions diverses qui sont responsables de près de 20 % des décès en France chaque année.
Une part importante de ce financement relève du budget de l’éducation nationale : la priorité doit être donnée à la lutte contre la première consommation de substances addictives qui, rappelons-le, s’effectue désormais dès l’âge de dix ou onze ans, un accès précoce étant le principal indicateur d’une toxicomanie ultérieure.
La vraie question est de savoir si les sommes consacrées à la lutte contre la drogue sont bien utilisées. C’est là que j’émettrai quelques réserves. En effet, de trop nombreux cloisonnements demeurent. Il y a là, à mon avis, une grande marge de progrès, notamment dans le monde de l’éducation.
Le travail des infirmières scolaires, la visite épisodique d’un gendarme ou d’un policier en uniforme peuvent faire prendre conscience aux jeunes des dangers encourus, faciliter la détection des problèmes et, le cas échéant, l’orientation vers une prise en charge adaptée ; mais l’action doit être plus continue et plus diversifiée.
La politique de répression paraît également inadaptée puisqu’elle oscille entre le simple rappel à la loi et la peine de prison, qui n’empêchent pas la récidive, malheureusement. J’estime qu’une contraventionnalisation serait la meilleure réponse.
Au-delà de l’efficacité de la répression, la question fondamentale est celle de l’évaluation. Le plan gouvernemental de lutte contre les drogues est un engagement important, mais nous devons rester modestes dans nos attentes. Trois ans ne peuvent suffire à inverser une tendance inquiétante.
Il nous faut une évaluation de fond, inscrite dans la durée, afin de saisir les tendances sociales en matière de consommation des drogues et, surtout, leurs déterminants. Il semble à la commission des affaires sociales que l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies devrait être chargé de la détermination des indicateurs permettant de mesurer l’efficacité de la politique publique. Ces indicateurs pourraient faire l’objet d’une publication annuelle.
Je dois également vous faire part, monsieur le ministre, de l’inquiétude de beaucoup de mes collègues sur la politique de l’État concernant les réseaux de distribution des drogues. Nombreux sont ceux qui estiment que la police et la justice ne les répriment pas suffisamment, qu’elles les conserveraient même en l’état afin, peut-être, de maintenir une forme de paix sociale dans certains quartiers.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, vous faire l’écho de ces préoccupations auprès de vos collègues chargés de l’intérieur et de la justice ?
En conclusion, je voudrais souligner le fait que nous commençons à y voir plus clair sur cette politique. Il faut persévérer dans cette voie. Nous pensons d’ailleurs que la lutte contre les drogues et les toxicomanies pourrait être déclarée grande cause nationale.
Dans cette attente, la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la MILDT.