Ne cédons à aucune simplification : le oui n'est heureusement pas la sanctification d'un projet européen de société libérale. Et ne nous faisons aucune illusion : le non ne portera pas un coup d'arrêt fatal à la casse des acquis sociaux.
En revanche, un travail militant sur les textes à venir nécessite que soit voté le traité qui rend pouvoir au Parlement. Des députés Verts y travaillent. Ce sont eux qui ont demandé le retrait de la directive « Services » au profit d'une directive « Services d'intérêt général », une évaluation d'impact global sur les conséquences économiques, sociales et environnementales, le vote par appel nominal sur le paragraphe 6 - écrit par la droite - qui lie l'ouverture du marché des services à la croissance et l'emploi. Cet appel nominal eut pour effet la mise en minorité des promoteurs et le retrait du paragraphe 6 !
En hommage au travail pugnace et assidu de nos députés européens Verts, nous souhaitons leur garantir de plus grandes marges de manoeuvre : le traité le permettra.
Je terminerai en citant un grand auteur français, qui s'étonnait, voilà un siècle, de l'embrasement de l'opinion pour une mauvaise cause : « Dans les affreux jours de trouble que nous traversons, au moment où la conscience publique paraît s'obscurcir, c'est à toi que je m'adresse, France, à la nation, à la patrie. Chaque matin, en lisant dans les journaux ce que tu sembles penser (...), ma stupeur grandit, ma raison se révolte davantage. Eh quoi ? France, c'est toi qui en es là, à te faire une conviction des plus évidents mensonges (...), à t'affoler sous l'imbécile prétexte que l'on insulte ton avenir (...), lorsque le désir des plus sages, des plus loyaux de tes enfants, est au contraire que tu restes, aux yeux de l'Europe attentive, (...) la nation d'humanité, de vérité et de justice ? Et c'est vrai, la grande masse en est là, surtout la masse des petits et des humbles, le peuple des villes, presque toute la province et toutes les campagnes, cette majorité considérable de ceux qui acceptent l'opinion des journaux ou des voisins, qui n'ont le moyen ni de se documenter, ni de réfléchir. Que s'est-il donc passé, comment ton peuple, France, ton peuple de bon coeur et de bon sens, a-t-il pu en venir à cette férocité de la peur (...) ? »
Ce texte est de Zola. Il a été publié la veille de J'Accuse et est moins connu. En voici l'original