Intervention de François-Noël Buffet

Réunion du 27 octobre 2005 à 15h00
Création d'une commission d'enquête sur l'immigration clandestine — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de François-Noël BuffetFrançois-Noël Buffet :

Monsieur le président, mes chers collègues, il nous est aujourd'hui proposé de créer, au sein de la Haute Assemblée, une commission d'enquête sur l'immigration clandestine. Le groupe UMP, à l'origine de cette proposition, estime en effet - et à juste titre - que ce problème mérite une attention toute particulière.

La nécessaire intégration des populations immigrées installées en toute régularité sur notre sol est compromise par une pression migratoire illégale, qui draine avec elle un nombre important de problèmes : le travail clandestin, une grande précarité qui engendre des phénomènes de délinquance, le développement de filières mafieuses et, parfois, un véritable trafic d'êtres humains.

La désillusion pour ces candidats au voyage clandestin est souvent très grande. L'eldorado tant rêvé se transforme rapidement en un véritable cauchemar.

Cette situation engendre des violences ou une délinquance de subsistance qui compromettent les efforts d'intégration de l'immigration régulière.

Au-delà des aspects juridiques et matériels de cette question, nous sommes confrontés à un véritable problème humain, qui mérite tout autant notre attention de parlementaires.

Notre pays doit traiter cette immigration clandestine de manière ferme et déterminée, mais il a aussi l'obligation de ne pas agir de manière inhumaine.

Plus généralement, il importe de contrôler que nos services publics des douanes, de police, de gendarmerie, de justice, du logement et de l'inspection du travail fonctionnent correctement. Il nous incombe également de nous assurer que les lois que nous avons votées aux mois de novembre et de décembre 2003 sont parfaitement appliquées.

Des améliorations sont sans doute possibles, et les conclusions du rapport que rendra cette commission d'enquête pourront utilement nourrir notre réflexion à tous.

Monsieur Peyronnet, vous avez affirmé que, si les auteurs de la proposition tendant à la création de cette commission d'enquête s'étaient fixé comme objectif d'appréhender le problème de l'immigration dans son entier, celle-ci aurait pu être adoptée à l'unanimité. Il nous faut alors regretter que vous n'ayez pas déposé en temps utile un amendement en ce sens. Il aurait pu - qui sait ? - recevoir un accueil favorable !

Je tiens à rappeler que, si la lutte contre l'immigration illégale a nettement progressé - le nombre d'arrêtés de reconduite à la frontière a augmenté de 30 % en 2004 et le nombre de mesures exécutées a crû, quant à lui, de 40 % -, cela demeure insuffisant. En effet, quatre immigrés clandestins sur cinq restent sur notre sol malgré une mesure de reconduite à la frontière prononcée à leur encontre, mesure souvent confirmée par une décision de justice.

La commission d'enquête, si elle est créée, se penchera également sur le défi démographique lancé par l'immigration clandestine dans nos territoires ultramarins, où cette question revêt une acuité particulière.

L'exemple de Mayotte - de récents événements nous ont rappelé l'actualité et la gravité du problème qui s'y pose - est, de ce point de vue, emblématique. Imaginez que, dans cette collectivité d'outre-mer, un habitant sur trois est un immigré clandestin ! D'ici à cinq ans, si l'on se fonde sur l'évolution actuelle, les personnes vivant en toute irrégularité sur le territoire mahorais représenteront la majorité de la population. Une telle situation est-elle acceptable ?

Est-il tout autant acceptable, d'ailleurs, d'être régulièrement confronté au décès de clandestins cherchant à entrer dans notre pays ou, plus généralement, en Europe ? Souvenons-nous de la découverte macabre, au mois de juin 2000, des corps sans vie de cinquante-huit immigrants illégaux d'origine chinoise dans la remorque d'un camion, lors d'une vérification douanière au port de Douvres. Cette tragédie ne constitue sans doute que la partie émergée de l'iceberg du trafic d'êtres humains. On estime à 30 millions le nombre de personnes qui, chaque année, traversent illégalement les frontières internationales et entre 400 000 et 500 000 celui des migrants illégaux qui, annuellement, entrent dans l'Union européenne. Quelque 3 millions de personnes résideraient actuellement de façon illégale en Europe.

Face à cette situation, nous devons poser, sans tabou, les problèmes liés à l'immigration clandestine sur notre territoire. Sans tabou, cela signifie tout voir et tout dire ! Cela signifie aussi mieux connaître ce qui pousse à de tels comportements. Cela signifie encore être capable de proposer des solutions conformes aux valeurs qui animent notre République.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP, qui est à l'origine de cette demande de création de commission d'enquête, votera cette proposition de résolution.

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