Dans la conscience et la mémoire collectives, ce dramatique évènement est présent et influe fortement sur la position suspicieuse et craintive de nombreux citoyens face au nucléaire. Je ne m'attarderai pas sur la gestion par les autorités françaises de cet évènement, mais le flou et l'incertitude persistants, notamment quant aux répercussions sur la santé publique, n'ont fait et ne font qu'entretenir le sentiment de méfiance.
Sans doute, la situation actuelle et future du marché de l'énergie légitime de manière plus objective, s'il en était encore besoin, le débat que nous avons aujourd'hui. Ce marché est soumis à de nombreuses contraintes : une contrainte démographique, l'accroissement de la population engendrant un besoin énergétique accru ; une contrainte environnementale, liée au réchauffement climatique et l'épuisement progressif des énergies fossiles ; une contrainte géopolitique, compte tenu de la localisation des ressources dans des zones politiquement peu stables ; enfin, une contrainte politique, l'indépendance énergétique étant une préoccupation majeure.
L'énergie nucléaire répond à ces contraintes. Cependant, cela ne doit pas conduire au « tout nucléaire » et il faut absolument tout mettre en oeuvre pour favoriser le développement des énergies renouvelables, qui présentent également de réels et indiscutables avantages.
Le rôle important que le nucléaire sera donc amené à jouer dans les décennies futures justifie pleinement un texte visant à en garantir la transparence et la sécurité. Au regard de l'avenir qui se dessine, ce texte fondateur s'avère même un préalable indispensable.
Il est d'autant plus indispensable qu'il s'inscrit dans un contexte nouveau, sur fond de dérégulation et de privatisation de la filière électronucléaire avec l'ouverture du capital d'EDF, ou de celle, éventuelle, du capital d'AREVA. Mes collègues de l'Assemblée nationale ont, à juste titre, demandé la création d'une commission d'enquête sur les risques engendrés par l'évolution du statut de la filière nucléaire. Je partage pleinement l'idée que « la privatisation de la filière nucléaire est source d'un foisonnement de risques et que des efforts de transparence et d'information sur ce sujet hautement sensible pour nos concitoyens doivent être faits ».
Un tel contexte exige que soient formalisées dans une loi les contraintes et obligations auxquelles seront soumis les exploitants en matière de transparence et de contrôles.
La répétition étant pédagogique, rappelons encore une fois que, au-delà des mesures techniques qui découleront de ce texte, il s'agit avant tout d'adresser aux Français un signal de confiance.
Or le mariage surprise de Gaz de France et de Suez a brouillé le message. Nul besoin de s'attarder sur l'improvisation et la précipitation avec lesquelles cette opération a été conduite. En revanche, je tiens à rappeler que j'étais présent lorsque le Gouvernement avait donné sa parole que la limite des 70 % de capital détenu par l'Etat ne serait pas remise en cause. La valeur de vos engagements est ainsi bien relative, alors que, selon les propos tenus par le Président de la République lors de son allocution du 5 janvier 2006, l'action du Gouvernement doit « faire progresser encore la confiance ».